Les élucubrations de Patassé. Les mensonges

 

De nombreux internautes avaient certainement lu la proclamation de Patassé, intitulée “Le Président Ange Félix Patassé s’explique depuis Lomé”, qui avait été affichée le 29 août dernier sur le site de Centrafrique Presse.  Après en avoir seulement lu les premiers paragraphes notre réaction avait été la suivante.  Comment les conseillers personnels qui étaient supposés assister Patassé dans ses relations publiques, avaient laissé paraître une telle bévue?  Une seule explication nous été venue à l’esprit.  L’on avait entendu rapporter par ceux ou celles, proches de Patassé à l’époque, que celui-ci n’avait cure des avis de ses conseillers et n’écouterait que le son de sa propre cloche.  Et depuis Lomé, celui-ci n’avait toujours pas tirer de leçons.

 

Mais voyons ce qu’il avait bien voulu communiquer aux militants du Mouvement de Libération du Peuple Centrafricain (MLPC), puis aux centrafricains, cherchant surtout à tourner en dérision le jugement rendu contre lui par la justice centrafricaine en août de l’an 2006.  Par sa proclamation, Patassé avait enfin éprouvé le besoin de fournir des explications ou encore ce que l’on appellerait à tort es justifications.  Il avait pensé qu’il devait publiquement prendre quelqu’un à témoin.  Et ce quelqu’un selon lui serait le peuple centrafricain qui l’avait élu à la magistrature suprême du pays et qu’il avait refusé d’écouter et de véritablement servir pendant l’exercice de son pouvoir à Bangui.  Il avait dû penser au fond de lui-même que par le jugement de justice qui avait été rendu à Bangui, le peuple centrafricain et la justice de Bangui lui avaient manqué de gratitude, et avait procédé à l’énumération de grandes décisions qu’il avait prises en faveur du pays et de ses camarades travailleurs.  Nous avons décidé d’écrire cette réaction pour montrer aux centrafricains et surtout à la jeunesse les valeurs réelles de ces hommes qu’ils avaient désignés pour conduire les destinées de la Centrafrique.  Peut-être sauront-ils choisir leurs prochains dirigeants avec plus de rigueur!

 

Nous avions ensuite effectué une seconde lecture, cette fois entière de la proclamation de Patassé.  Notre seconde réaction avait été la déception, celle de n’avoir relevé aucun signe de contrition de la part de Patassé.  Dans son énumération, Patassé avait oublié tous les crimes qui avaient été commis sous ses ordres ou par les hommes qui le servaient.  Patassé avait par exemple oublié le rôle de son gouvernement dans la mauvaise gestion des forces armées dont il avait été le chef suprême, et qui avait abouti à la division et aux mutineries.   Patassé avait surtout oublié que des femmes, des mères, des épouses, et des filles avaient été violées par des mercenaires étrangers à sa solde.  Est-ce que c’était là ce que les militants du MLPC avait considéré comme les manifestations de la libération du peuple centrafrican?  Dans sa proclamation, Patassé n’avait fait aucune allusion à ces assassinats et à ces viols.  Patassé en sortant de son silence pour essayer de se justifier, n’avait même pas songé, une seule fois, à demander pardon aux victimes des viols, aux morts et à leurs parents qui lui avaient peut-être accordé leur confiance en l’élisant à la tête du pays.  Patassé avait démontré qu’il n’avait aucune humilité.  C’est donc là le vrai visage de Patassé qui clame toujours être “président légal et légitime de la République Centrafricaine”.  Ce serait peut-être pour toutes les qualités ci-dessus que Luc Appolinaire, son frère, et les siens du MLPC voudraient conserver à la tête de leur mouvement leur Patassé comme le vestige d’un rêve qui avait été un véritable cauchemar pour le peuple centrafricain tout entier y compris leurs militants de base de son MLPC. Eh bien tant mieux pour eux!  Cependant nous considérons que l’éveil nationaliste et la maturité politique aidant, la majorité des citoyens centrafricains leur dicteront de ne plus faire confiance à ces démagogues qui voudraient accéder au pouvoir à Bangui pour uniquement satisfaire leur soif du pouvoir et non pour véritablement galvaniser l’enthousiasme des enfants du pays et pour conduire le pays vers la liberté et la  prospérité de tous. 

 

En Centrafrique, des individus ou des groupes avaient existé, qui avaient organisé la culture, la récolte, le conditionnement et l’exportation du café.  Nous voudrions citer pour exemple la Compagnie Forestière Sangha Oubangui (CFSO) dans les régions de Nola et de Bania, les planteurs de café De Lègue, Santini ou Le Goff dans la région de Berbérati, Gruet à Carnot.  Nous pourrions aussi citer les exemples du diocèse catholique de Berbérati qui avait procédé à l’exploitation du bois dans les forêts de Goungou et de Banzoum, de Moreau qui avait exploité le bois de la forêt de la Bembaye, toujours dans la région de Berbérati.  Vous trouverez certainement d’autres exemples dans les autres régions ou préfectures de la Centrafrique.  En omettant volontairement tous les planteurs de café et toutes les scieries dans le pays, n’avions-nous pas là des exemples d’industries que l’on qualifierait de nationales?  Est-ce que Patassé avait volontairement décidé d’ignorer certains grands traits qui avaient marqué l’hisoire de son pays?  Sur quels arguments donc se baserait Patassé pour s’arroger pompeusement, comme du temps de son ancien maître, le titre de premier industriel sans soulever de réaction de la part du lecteur?  Il avait peut-être oublié que les époques avaient depuis changé.

 

Patassé avait été ministre de l’agriculture dès les premières heures du régime Bokassa.  Est-ce que celui-ci pourrait dire aux militants du MLPC et aux centrafricains d’où il avait tiré les ressources financières en 1967 pour acheter les équipements et les intrants, pour payer le personnel et les charges sociales, et pour ainsi monter son entreprise agro-industrielle de La Colombe?  Certaines rumeurs avaient indiqué que la Banque Nationale de Dévelopment (BND), une banque locale lui avait octroyé des prêts importants qu’il n’avait pas entièrement remboursés ou n’avait pas remboursé du tout.  Peut-être que son ancien compagnon Zanifé Touambona qui avait été à la tête de la BND à l’époque et d’autres centrafricains qui avaient traité les dossiers de liquidation de cette même BND pourraient aider à faire la lumière sur ces prétentions de Patassé!  Patassé avait prétendu avoir été le soutien financier du Trésor centrafricain sous le régime de Bokassa.  D’où avait-il tiré ses ressources pour ainsi soutenir financièrement les caisses d’un pays de la taille de la République Centrafricaine et permettre au gouvernement de payer les salaires des fonctionnaires, ses camarades?  Si Patassé avait réellement prêté de l’argent au Trésor centrafricain, nous supposons qu’une autorité du Trésor lui aurait fait délivrer un récipissé ou une reconnaissance de dette de l’état centrafricain.  A combien s’étaient élevés ses prêts privés au Trésor?  S’était-il fait rembourser ces dettes depuis qu’il était retourné au pouvoir à Bangui?  Est-ce que celui-ci pourrait nous en donner les preuves?  Patassé avait écrit par ailleurs “Comment pourrais-je faire des détournements des deniers publics dont je n’ai pas la gestion?”  Patassé qui avait été ministre, premier ministre, puis chef d’état avait voulu nous apprendre sa vision nouvelle de la notion de commis de l’etat et des responsabilites.  Comment donc s’étonner qu’il avait eu beaucoup de mal à convaincre les institutions de Bretton Woods  pour octroyer des prêts à la Centrafrique pour des projets de développement?  Vous noterez certainement dans la proclamation de Patassé la démonstration des pratiques anarchiques et scandaleuses de la gestion des ressources de l’état, qui étaient proches de l’escroquerie, et qui avaient cour depuis l’accès du pays à son indépendance.

 

Malgré ses dons ou ses prêts au Trésor centrafricain, l’on pourrait faire remarquer que Patassé n’avait en réalité entrepris aucune réforme administrative sérieuse pour véritablement s’attaquer à la faiblesse chronique de liquidité des caisses dudit Trésor.  Malgré le don des fonds personnels de Patassé à l’Enerca, cette société n’était jamais sorti de la crise, parce que le gouvernement de Patassé ne savait pas developper une véritable politique de ce que les économistes appelleraient le renforcement des capacités d’une entreprise.  Patassé avait pensé qu’en mettant à la disposition de l’Enerca des fonds pour l’achat de combustible, il avait trouvé la solution définitive aux problèmes de fonctionnement de cette société nationale.  La première source des problèmes du Trésor et de l’Enerca avaient été l’amalgame fait par Patassé dans la gestion de ses comptes bancaires et l’utilisation des revenus de l’état.  La seconde source des problèmes avait été l’autorité que s’était octroyé Patassé pour jouer le rôle gouverneur de la banque centrale de Bangui ou des caisses du Trésor.  La troisième source avait été l’absence d’une institution indépendante de contrôle de la gestion saine des recettes et des dépenses de l’état pour rester à l’élémentaire. Et il y aurait d’autres raisons.  Par exemple, puisque Patassé avait été premier industriel et philanthropiste, est-ce que celui-ci pourrait nous fournir les preuves des taxes, patentes et impôts conséquents que toutes ses sociétés avaient payé à l’état centrafricain?  Est-ce qu’il pourrait nous montrer les preuves des retenues sur les salaires et des cotisations patronales que ses entreprises de 3000 employés avaient versé à l’Office Centrafricain de Sécurité Sociale (OCSS) ou à l’Office National de la Main-d’Oeuvre (ONMO), conformément aux textes officiels en vigueur?  Si celui-ci ne peut apporter aucune de ces preuves, l’on pourrait conclure qu’au lieu de bâtir l’économie de la centrafrique sur des principes modernes et strictes, afin d’apporter la prospérité aux centrafricains, Patassé et ses sbires du MLPC étaient allés au pouvoir pour s’enrichir, faire volatiliser les retraites de ses camarades travailleurs et pour ruiner le pays?  Et ceux-ci avaient voulu faire croire aux militants du MLPC et au peuple centrafricain qui l’avaient porté au pouvoir qu’ils avaientt les programmes, les méthodes, et des stratégies pour développer tous les secteurs de l’économie de la Centrafrique.  Mais vous étiez-vous demandés ce que Patassé, les membres de son bureau politique, ses ministres, les députés et les présidents MLPCistes à l’assemblée nationale avaient apporté au pays?  La réponse aujourd’hui serait bien simple.  La misère de leurs camarades travailleurs, la misère partout dans le pays. Mais comme cette misère seule ne suffirait pas, certains militants du MLPC voudraient encore de Patassé ou quelqu’un qui auraient ses grandes qualités au pouvoir à Bangui.

 

Et si les centrafricains voudraient aspirer à autre chose qu’aux affres du passé et sortir de cette crise dans le pays, qui dure à n’en plus finir, ceux-ci devraient demeurer vigilants et empêcher de nouveaux démagogues de tout poil à accéder à la tête des partis politiques, des syndicats et des associations sous le travesti de la démocratie pour jouer au jeu du ravage économique de la Centrafrique.  

Jean-Didier Gaïna

Virginie, Etats-Unis d’Amérique (11 septembre 2006) - Point de vue et Regard