Obama: soutien de Colin Powell et somme record récoltée pour sa campagne

Alain JEAN-ROBERT, AFP, Lundi 20 octobre 2008 19h00

A 16 jours de l'élection présidentielle américaine, le candidat démocrate à la Maison Blanche Barack Obama a reçu dimanche le soutien de poids de l'ancien secrétaire d'Etat du républicain George W. Bush, Colin Powell au moment où sa campagne annonçait avoir récolté la somme record de 150 millions de dollars en septembre.


Barack Obama, en meeting à Fayetteville en Caroline du Nord, le 19 octobre 2008

Ces deux événements semblaient de nature à stimuler les démocrates dans la dernière ligne droite de la campagne présidentielle alors que les sondages accordent en moyenne 5 points d'avance à M. Obama au niveau national.

L'ancien chef d'état-major des armées américaines et héros de la première guerre du Golfe, a loué sur la chaîne NBC le "caractère réformateur" du candidat démocrate et sa campagne "fédératrice".

Une présidence Obama "provoquerait l'enthousiasme du pays et du monde", a assuré le général à la retraite. "Obama a démontré de la fermeté. Il a démontré de la vigueur intellectuelle. Il a une façon de gérer ses affaires qui nous sera profitable", a-t-il estimé.

Son soutien tombe à pic pour M. Obama alors que l'équipe de campagne du candidat républicain l'accuse de se situer à l'extrême gauche de l'échiquier politique américain et met en doute sa capacité à rassembler les Américains au-delà de son camp.

"J'ai toujours admiré et respecté le général Powell. Nous sommes amis de longue date. Ce n'est pas une surprise", a réagi avec dépit M. McCain.

Au cours du même entretien, M. McCain a publiquement évoqué la possibilité d'une défaite.

"Je ne m'apesantis pas la-dessus. Mais, j'ai eu une vie merveilleuse. Je peux retourner vivre en Arizona, et représenter (mes administrés) au Sénat", a-t-il dit.M. Powell est le premier poids lourd de l'administration Bush à apporter son soutien officiel au candidat démocrate.

L'équipe de campagne de M. Obama a fait savoir que le sénateur de l'Illinois avait appelé M. Powell pour le remercier de son appui. "M. Obama est impatient de recevoir ses conseils au cours des deux prochaines semaines et, si possible, au cours des quatre prochaines années", a dit Robert Gibbs, directeur de la communication du candidat démocrate.

Secrétaire d'Etat durant le premier mandat de George W. Bush (2001-2005), avocat de la guerre en Irak et l’ONU avant de dénoncer les "mensonges" qui ont entraîné les Etats-Unis dans cette guerre, M. Powell n'a cessé de prendre ses distances avec l'administration républicaine tout en refusant de rompre les ponts avec sa famille politique.

M. Powell était républicain et demeure républicain. Il est ami avec John McCain et garde des liens avec de nombreuses personnalités de l'époque où George Bush père était président, notamment le ministre de la Défense d'alors et actuel vice-président Dick Cheney.

Au cours de sa longue carrière, M. Powell, 71 ans, a été conseiller pour la sécurité nationale de Ronald Reagan. Ancien combattant de la guerre du Vietnam, il a été chef d'état-major interarmée de 1989 à 1993 et s'est illustré notamment durant l'opération "Tempête du désert" après l'invasion du Koweït par l'Irak de Saddam Hussein en 1991. En 1996, il avait brièvement envisagé d'être candidat à la Maison Blanche contre le démocrate Bill Clinton.

Juste avant l'intervention de M. Powell, l'équipe de campagne de M. Obama a annoncé que le sénateur avait engrangé 150 millions de dollars en septembre. Jamais M. Obama n'avait récolté autant d'argent en un seul mois.

Depuis le lancement de sa campagne, M. Obama a récolté 605 millions de dollars.

Cet afflux d'argent devrait permettre à M. Obama de mener une campagne agressive dans plusieurs Etats clefs notamment dans plusieurs Etats considérés comme des fiefs républicains comme la Virginie et la Caroline du Nord.

M. McCain a accepté de recevoir de l'argent public et est soumis à un plafond de dépense de 84 millions de dollars d'ici le 4 novembre. Il peut néanmoins compter sur l'aide du parti républicain qui a engrangé 66 millions de dollars en septembre.


Le républicain Colin Powell soutient le démocrate Barack Obama

AP, Steven Hurst, Dimanche 19 octobre, 23h02

Barack Obama a gagné un allié de poids dimanche: Colin Powell, militaire de carrière, républicain et ancien chef de la diplomatie dans le premier gouvernement de George W. Bush, celui qui a lancé la guerre en Irak. En soutenant le candidat démocrate à la Maison Blanche, Colin Powell porte un coup sévère au républicain John McCain.

"Je pense que nous avons besoin d'une personnalité incarnant la transformation. Je pense que nous avons besoin d'un président qui représente un changement de génération, et c'est pourquoi je soutiens Barack Obama", a déclaré Colin Powell sur la chaîne de télévision NBC.

"Je crois vraiment qu'à ce moment de l'histoire de l'Amérique, nous avons besoin d'un président qui ne va pas simplement poursuivre, même avec un nouveau visage, des changements et quelques aspects anticonformistes, qui ne va pas simplement poursuivre les politiques que nous avons mises en oeuvre ces dernières années", a-t-il poursuivi.

Dans le contexte actuel de crise économique et financière aux Etats-Unis, il a trouvé John McCain "un peu incertain" et versatile sur la façon de réagir, alors que Barack Obama a selon lui "fait montre d'assurance, de curiosité intellectuelle (et) d'une profonde connaissance" des problèmes. "Je crois qu'il a une façon de gérer les affaires qui nous servirait bien."

Quant à Sarah Palin, N°2 du ticket républicain, "je ne pense pas qu'elle soit prête à être présidente des Etats-Unis", a asséné l'ancien chef d'état-major, aujourd'hui âgé de 71 ans.

Interrogé sur Fox TV, John McCain, 72 ans, a répondu que "ce n'est pas une surprise" mais a souligné qu'il avait de son côté quatre anciens secrétaires d'Etat ayant tous appartenu à des gouvernements républicains: Henry Kissinger, James Baker, Lawrence Eagleburger et Alexander Haig.

Mais avec cette prise de position très critique envers son ami de longue date John McCain et l'action du président Bush, le général Powell sape les principaux arguments du candidat républicain, qui met en avant sa carrière politique et son passé militaire pour présenter Barack Obama comme un nouveau venu sur la scène politique, inapte à diriger le pays et son armée.

Ce soutien est d'autant plus précieux qu'il vient d'un ancien très haut responsable afro-américain très influent, et que Barack Obama, s'il était élu le 4 novembre, deviendrait le premier président noir des Etats-Unis. Mais Colin Powell a affirmé que si cet aspect avait été déterminant, il se serait déclaré il y a déjà plusieurs mois.

M. Obama s'est déclaré "plus qu'honoré, en toute humilité, d'avoir le soutien du général Colin Powell", qui "a incarné nos idéaux les plus élevés durant sa longue et distinguée carrière publique", selon des notes préparées pour un meeting à Fayetteville, en Caroline du Nord. "Il sait, comme nous, que c'est le moment où nous devons nous rassembler en tant que nation, jeunes et vieux, riches et pauvres, Blancs et Noirs, républicains et démocrates."

Colin Powell a ajouté qu'il restait républicain bien que le parti bascule trop à droite à son goût. Partisan du droit à l'avortement et de la promotion active des minorités, il s'est dit gêné par la perspective qu'un vote McCain-Palin aboutisse à la nomination "de deux juges conservateurs supplémentaires à la Cour suprême" fédérale. Il ne compte toutefois pas faire pas campagne pour le sénateur de l'Illinois, que les sondages donnent favori pour la présidentielle.

Signe de sa bonne santé, le candidat démocrate a récolté 150 millions de dollars en septembre, selon les chiffres publiés par son équipe, ce qui porte son trésor de guerre à un total de 605 millions de dollars, montant jamais atteint dans les précédentes campagnes présidentielles. Le camp Obama doit présenter lundi ses comptes mensuels à la Commission fédérale électorale.

De son côté, la direction du Parti démocrate a annoncé avoir récolté 49,9 millions de dollars en septembre, et avoir 27,5 millions de dollars sur son compte début octobre. Le parti peut utiliser ces fonds pour aider la campagne Obama.

Quant à John McCain, il a préféré rester dans le système de financement public de campagne, ce qui le limite à 84 millions de dollars pour septembre et octobre. Son parti a pour sa part récolté 66 millions de dollars en septembre.

L'impressionnant succès de Barack Obama pourrait bien sonner le glas du système actuel de financement public des campagnes électorales. Le candidat républicain n'a pas manqué de rappeler dimanche que son adversaire s'était initialement engagé à se limiter aux fonds publics, et a agité le spectre de la corruption. "L'histoire nous montre que quand il y a des sommes d'argent illimitées dans les campagnes politiques, cela conduit au scandale", a-t-il lancé.

L'élection présidentielle américaine ne se jouant pas au niveau national mais Etat par Etat, l'Associated Press a réalisé une étude qui attribue à Barack Obama les suffrages de 264 grands électeurs, à quelques voix des 270 nécessaires pour aller à la Maison Blanche. John McCain est donné favori dans des Etats représentant 185 voix, tandis que six Etats représentant un total de 80 voix restent indécis. AP

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