Le Conseil de sécurité
de l'ONU a adopté à l'unanimité, jeudi 10 Octobre 2013, une première résolution
qui envisage le déploiement de Casques bleus pour ramener le
calme
Réponse
du ministre des affaires étrangères, M. Laurent Fabius, à une question
d'actualité à l'Assemblée relative à la situation de la République
Centrafricaine
Monsieur
le Président
Mesdames
et Messieurs les Députés,
Monsieur
le Député,
Il
y a quelques jours, le président de la République, dans son discours devant
l'Assemblée générale des Nations unies a lancé un cri d'alarme pour la
Centrafrique.
La
Centrafrique est un petit pays mais qui cumule toutes les difficultés et tous
les malheurs.
Il
y a d'abord un problème sécuritaire de grande ampleur puisque, sur cinq millions
d'habitants, 400.000 personnes ont déjà été déplacées. Il y a des exactions, des
viols, des meurtres.
Il
y a un problème de transition politique puisque l'autorité en place, Michel
Djotodia et son Premier ministre ne sont en place qu'à titre provisoire avant
les élections.
Il
y a un problème humanitaire de première grandeur. Songez, Mesdames et Messieurs
les Députés que, pour cinq millions d'habitants, il y a en tout et pour tout
sept chirurgiens. Ce qui signifie que la communauté internationale, l'Union
africaine, les voisins et la France doivent se mobiliser pour stabiliser la
situation.
Demain
sera votée aux Nations unies la première résolution, sur proposition de la
France, qui permettra d'avancer. Une deuxième résolution sera votée ensuite
avant le mois de décembre, ce qui permettra de mobiliser davantage de forces
autour de la MISCA, avec un appui des Français. D'autres dispositions seront
prises.
Au
cours des mois qui viennent, vous m'entendrez beaucoup parler de la République
centrafricaine. Moi-même, je serai présent dimanche prochain en République
centrafricaine notamment pour apporter mon soutien à la population française.
J'ai demandé à la commissaire européenne compétente de
m'accompagner.
La
France est décidée à ne pas laisser tomber la République
centrafricaine./.
Centrafrique : le
plan de Paris pour éviter une intervention en solo
Thomas HOFNUNG
A
l'initiative de Paris, une course contre la montre est engagée au niveau
international pour venir en aide à la Centrafrique, ce «pays néant» comme l'a
récemment baptisé Laurent Fabius, le ministre français des Affaires étrangères.
Alors que les massacres continuent à l'intérieur du pays et que le risque d'un
conflit interconfessionnel augmente de jour en jour, la France est parvenue à
mettre les Nations unies dans la boucle. Le Conseil de
sécurité de l'ONU a adopté à l'unanimité, ce jeudi (10/10/13), une résolution
qui envisage le déploiement de Casques bleus pour ramener le calme dans cette
ancienne colonie française. Selon ce texte, le secrétaire général, Ban Ki-moon,
devra présenter un plan à ce sujet dans les 30 jours. Une seconde résolution
autorisant le recours à la force, sous chapitre VII, sera alors soumise au vote.
Mais a priori pas avant la fin novembre, voire début
décembre.
Il y a urgence.
«C'est l'anarchie la plus totale sur place,
il n'y a plus d'Etat, plus de chaîne de commandement», relève-t-on à
Paris. «Les violences sont
multiples, ajoute une source diplomatique, et s'il n'y a pas de plan d'islamisation d'un pays
très majoritairement chrétien, le risque d'un conflit religieux prend corps.
Dans certaines zones, les groupes liés au mouvement Séléka (qui a pris le
pouvoir en mars dernier, ndlr) ont détruit les églises, abattu les porcs et
interdisent de boire de l'alcool.» Des comités d'autodéfense se sont
constitués dans les villages, qui n'hésitent plus à se lancer dans des
expéditions punitives contre les musulmans, considérés collectivement comme des
soutiens au mouvement Séléka.
En sollicitant l'ONU,
Paris veut faire coup triple : éviter d'avoir à intervenir en solo dans une
ancienne colonie africaine (comme au Mali), circonscrire et si possible guérir
ce foyer de déstabilisation situé dans une région hautement instable et, enfin,
partager le fardeau financier du soutien logistique à la force panafricaine, en
mal de moyens et de financements. A l'heure actuelle, la France dispose de 450
hommes regroupés sur l'aéroport de Bangui. Ces soldats effectuent des
patrouilles dans la capitale, où la situation s'est quelque peu stabilisée ces
dernières semaines, notamment pour assurer la sécurité des quelque 500
ressortissants (binationaux compris).
«Nous sommes dans une
logique de prévention», explique un haut
responsable français. La Centrafrique, note-t-il, est «à la confluence de trois zones de conflit majeures:
l'Afrique des Grands lacs, le Soudan-Somalie et le Sahel.» Paris
s'inquiète de la présence au sein de la nébuleuse Séléka de rebelles et
demi-soldes venus du Soudan, du Tchad, mais aussi d'une éventuelle implantation
de groupes islamistes chassés du Mali ou du Nigéria. «La Centrafrique n'est pas devenue un foyer
terroriste, mais elle pourrait le devenir si on ne fait rien»,
dit-il. Un message qui, croit-on à Paris, ne devrait pas laisser insensibles les
Américains.
Si tout se déroule
comme prévu, la France augmentera ses effectifs en Centrafrique pour soutenir la
future opération de maintien de la paix de l'ONU et l'appuyer, comme au Mali
aujourd'hui, en tant que force de réaction rapide dotée d'hélicoptères et de
moyens de renseignement autonomes. «Nous ne
voulons pas intervenir en première ligne, dans cette affaire nous jouons
seulement un rôle de catalyseur», plaide un
diplomate.
La France veut éviter
à tout prix un scénario "à la Serval": au Mali, elle a mobilisé la communauté
internationale et soutenu durant des mois le déploiement d'une force
panafricaine, avant de devoir intervenir seule en urgence pour stopper
l'offensive des groupes jihadistes. "Au Mali, nous faisions face à un ennemi
bien armé et déterminé. En Centrafrique, il s'agit surtout de mettre un terme à
l'anarchie, c'est un dossier à la portée de la communauté internationale", veut
croire un responsable à Paris.
Mais que se
passerait-il, demain, si un massacre à grande échelle était commis? La France et
ses soldats ne seraient-ils pas sous forte pression pour agir? "On n'en est pas
là. La Centrafrique, ce n'est pas le Rwanda", assure une source diplomatique.
Qui ajoute dans le même souffle:«Dans les instances internationales, quand on
parle de la Centrafrique, nos partenaires se tournent systématiquement vers nous
pour nous demander ce qu’il faut faire...»
Thomas HOFNUNG
L'ONU
se mobilise pour la Centrafrique
Par Tanguy
Berthemet, .lefigaro.fr - le 10/10/2013 à 20:24
Des anciens rebelles
de la Séléka, mardi, montent la garde dans la cour de l'église catholique à
Bangassou, lors d'une réunion entre l'archevêque de
Bangui et le chef de la communauté musulmane.
Crédits photo : ISSOUF SANOGO/AFP
À la demande de
Paris, le Conseil de sécurité doit adopter une résolution d'aide à ce pays en
proie à l'anarchie.
La marche vers une
intervention internationale en République centrafricaine s'accélère. La nuit dernière, une
première résolution devait être votée au Conseil de sécurité de l'ONU. Le texte,
court, devait se contenter de répéter les vœux pour l'établissement
d'institutions de transition un rien stables dans le pays, théâtre d'un coup
d'État le 24 mars dernier. Mais il devait aussi et surtout demander aux Nations
unies d'étudier les différentes possibilités d'interventions militaires. Une
seconde résolution serait ensuite adoptée, sans doute début
décembre, pour ordonner le
déploiement de troupes, dotées d'un mandat fort pour imposer la paix, et
réclamer les financements. L'adoption de ces textes est en théorie au moins
acquise, Washington et Londres, un temps réticent à cette opération, ayant
finalement donné leur aval. Paris, à la manœuvre en coulisses, souhaite aller le
plus vite possible pour s'éviter d'avoir une fois encore à intervenir seul dans
son ancienne colonie menacée de sombrer une anarchie sanglante.
La France ne fera
pas pour autant l'économie d'un nouveau débarquement. Le principe d'une aide
militaire française de soutien aux forces internationales de l'Union africaine
(Misca) est déjà arrêté depuis plusieurs semaines. Longtemps hésitant à un tel
mouvement dans un pays symbolique de la Françafrique et si peu de temps après
l'opération malienne, François Hollande a fini par se décider face aux risques
de tueries à grande échelle sur fond de haine interreligieuse. Entre deux maux,
le président français a choisi le moindre. Le volume de troupes supplémentaires
- il y a déjà 410 soldats français stationnés à Bangui - qui seront déployées en
Centrafrique, n'a pas encore été dévoilé. «Ils seront au total entre 750 et
1500», assure-t-on au ministère de la Défense.
Soutien à la
Misca
Officiellement, ces
soldats n'interviendront pas directement. Dans les faits, les Français
s'apprêtent à participer à la sécurisation de Bangui, mais aussi des grands axes
dans le pays pour rassurer les populations en proie aux exactions des anciens
rebelles de la Séléka. Ils se chargeront en parallèle de soutenir la Misca. Ce
contingent compte pour l'instant environ 2000 hommes, pour la plupart
camerounais, congolais et tchadiens. Il devait rassembler 3600 soldats
rapidement, mais cette montée en puissance traîne en longueur faute de fonds. Le
futur vote à l'ONU devrait permettre de régler ce problème de finances. Ce sont
ces soldats africains qui seront en première ligne, dans les mois à
venir.
«Les
Tchadiens sont décidés à désarmer la Séléka quitte à employer la manière
forte».
Un
officier africain
Comme au Mali, et
avant en Côte d'Ivoire, les soldats français devraient vite se faire discrets,
et ne conserver qu'une mission de force de réaction rapide à la Misca. Et comme
au Mali, pour réagir à d'éventuels coups durs, Paris pourra aussi compter sur
quelque 800 fantassins tchadiens. N'Djamena, puissance tutélaire en Centrafrique
depuis une décennie, a elle aussi pris la mesure du danger. Le puissant voisin
qui a joué un jeu ambigu à Bangui ces derniers mois, appuyant notamment la prise
de pouvoir par la Séléka, semble résolu à faire rentrer ces anciens alliés dans
le rang. Les rebelles, composés selon l'Union africaine à plus de 80%
d'étrangers, notamment soudanais et tchadiens, se livrent depuis six mois à des
pillages et à des meurtres, terrorisant les populations. «Les Tchadiens sont
décidés à désarmer la Séléka quitte à employer la manière forte, pour ramener le
calme», résume un officier africain.
Selon des sources
françaises, le volet militaire de l'opération en Centrafrique ne devrait pas
poser de problèmes. «D'un point de vue opérationnel, c'est une mission simple»,
résume-t-on. Les problèmes sont ailleurs. Politiquement, la Centrafrique est un
véritable champ de ruines, sans institutions solides. Reconstruire l'État
prendra du temps et ne sera pas sans risques. Une fois de plus, la France est
tentée de prendre exemple sur le Mali pour résoudre cette situation, en poussant
à l'organisation d'une élection présidentielle très
rapidement.