En Centrafrique, urgence notable, lobbying discret, action soutenue

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La réunion à New-York sur la RCA le 25 septembre (crédit : Commission européenne)

La réunion à New-York sur la RCA le 25 septembre (crédit : Commission européenne)

(BRUXELLES2), oct 21, 2013  -  Réunis à Luxembourg, les ministres des Affaires étrangères de l’UE viennent d’appeler « à une mobilisation forte, rapide et coordonnée » face à la crise que traverse la république Centrafricaine.

« L’Union européenne est vivement préoccupée par la situation en République centrafricaine (RCA) où l’insécurité et l’effondrement total de l’ordre public exposent les populations civiles, en particulier les enfants qui sont les plus vulnérables, à des atteintes graves aux droits de l’Homme. La situation humanitaire est alarmante : l’ensemble de la population est considérée en situation de risque grave. »

Ces mots peuvent sembler relever du verbatim diplomatique habituel pour un public français (ou francophone), connaisseur de la république Centrafrique, tant il parait évident que la crise est grave. Mais cette « évidence » n’est pas partagée par tous les Européens. Loin de là ! En Centrafrique, bien que discrète, l’action de la diplomatie européenne a été bien réelle et, surtout, bien coordonnée. Détails…

Conscientiser, tout d’abord

Avant tout, comme l’explique à B2, un expert du dossier, il a fallu « conscientiser, intéresser tous les acteurs européens (et les partenaires internationaux) à cette crise un peu oubliée ». Il a également fallu dénouer une crise entre la CEEAC (la Communauté Économique des États de l’Afrique Centrale) qui s’estimait compétente pour intervenir (mais n’en avait pas les moyens) et l’Union africaine. Un travail de haute couture diplomatique qui mérite un coup de chapeau.

Une action discrète

Alors que ce sujet n’a fait l’actualité des médias que récemment et de façon épisodique, l’Union européenne a pris à bras le corps le problème. « On n’a pas beaucoup communiqué. Mais cette question a, très tôt et bien avant qu’il y ait d’intérêt public sur la question, été prise au sérieux », confirme un haut diplomate européen que j’ai interrogé. « On a été actif sur trois dimensions de cette crise : la sécurité, l’humanitaire, le développement économique et social », sans oublier l’aspect politique.

Visites politiques

La Commissaire européenne à l’Aide humanitaire, Kristalina Georgieva, s’est ainsi « fortement impliquée sur le dossier ». La composante « humanitaire » de la crise est, en effet, très forte. Après une visite cet été en compagnie de Valerie Amos, la coordinatrice de l’ONU pour les affaires humanitaires (OCHA), elle est revenue pour une visite plus officielle avec le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, il y a une semaine (dimanche 13 octobre). Entre les deux, la réunion organisée en marge de l’assemblée générale des Nations-Unies à New-York, le 25 septembre, a certainement constitué un momentum politique important, avant qu’une résolution ne soit votée au Conseil de Sécurité.

Missions d’évaluation

Sur le plan technique, « plusieurs missions d’évaluation ont aussi été envoyées sur le terrain ». Tout d’abord, une mission « mixte » du service diplomatique européen (SEAE), composée de militaires, de spécialistes du développement (Devco), de l’aide humanitaire (ECHO), et des différentes unités concernées du SEAE (unité géographique notamment) se sont rendues à Bangui. Une autre mission s’est rendue également à Addis-Abeba au siège de l’Union européenne.

Contacts discrets

Des délégations de l’Union européenne comme certaines ambassades bilatérales ont été mobilisées pour convaincre, un par un, les pays africains de la CEEAC qu’il en allait de l’intérêt de tous, de faciliter la transition entre la CEEAC et l’Union africaine pour le règlement de cette crise. « Cela a pris un peu de temps et ce n’était pas gagné d’avance » comme l’avoue un Européen qui a suivi de près cette négociation.

Et aide à la planification

On peut aussi ajouter à cette présence diplomatique, une aide à la planification menée par des officiers européens placés auprès de l’Union Africaine (un officier est sur place à Addis Abeba) et auprès de la CEEAC, la communauté économique de l’Afrique centrale). 

Agir tout de suite

Comme l’explique à B2 un expert du dossier, « Il faut agir maintenant et pas dans trois mois ». « Nous sommes sommes face à une crise majeure, aigüe, où toute la population du pays (même si celle-ci n’est pas très nombreuse, environ 4,6 millions d’habitants) est affectée en même temps. Ce qui est rare ». Le positionnement géographique de la Centrafrique, entre le Soudan et le Congo, est crucial. Situé sur une ligne de fracture entre musulmans et chrétiens ou animistes, il pourrait réveiller des conflits apaisés (Tchad-Soudan notamment). Un pays « situé au carrefour de plusieurs zones fragilisées par des années de crise ou de conflit, par le braconnage, la présence de groupes armés étrangers, y compris l’Armée de résistance du Seigneur et par la montée de menaces terroristes transnationales » comme le précisent les 28 dans leur communiqué.