Inde-Afrique: Un partenariat renouvelé

RFI - Par

MEA, New Delhi
MEA, New Delhi

Fin du troisième sommet Inde-Afrique. Narendra Modi a donné une nouvelle impulsion à ce partenariat qui piétinait depuis quelques années.

Ce troisième sommet Inde-Afrique, qui s’est terminé le 29 octobre, a été un triomphe pour le Premier ministre indien Narendra Modi. Son principal succès est d'avoir su donner une nouvelle impulsion à des relations Inde-Afrique qui piétinaient depuis quelques années, faute de direction et d’implication politique de la part du parti du Congrès au pouvoir jusqu’à 2014 mais plongé jusqu’au cou dans des affaires de corruption.

Narendra Modi a changé le format de cette rencontre au sommet en invitant tous les pays africains sans exception, alors que jusqu’ici l’Inde respectait à la lettre le principe de la Formule de Banjul et n’invitait qu’un nombre limité de pays, suivant en cela les recommandations de l’Union africaine. Ce changement de format en dit long sur l’ampleur de l’ambition africaine de l’Inde. Il en a été d’ailleurs question à la conférence de presse de clôture où le haut fonctionnaire indien chargé des questions africaines a parlé de «changement qualitatif » dans l’engagement africain de l’Inde. Il a parlé aussi de « rencontre historique ».

Le sommet a par ailleurs adopté une Déclaration politique et un document cadre de coopération stratégique. Ces documents disent la philosophie de partenariat mutuellement bénéfique sur laquelle l’Inde souhaite fonder son engagement en Afrique.

La Chine, grande rivale de l'Inde en Afrique

Or philosophie n’empêche pas realpolitik. L’Inde est en compétition avec la Chine et le Japon pour les ressources du continent africain tout comme pour la captation du marché intérieur de l’Afrique pour leurs produits. Or les échanges indiens avec l’Afrique s’élèvent à 70 milliards de dollars contre seulement 3 milliards en 2000. C’est une croissance impressionnante, mais 70 milliards est peu par rapport aux 210 milliards que représente le chiffre d’affaires du commerce sino-africain. Les investissements indiens en Afrique s’élèvent à quelque 50 milliards, alors que les investissements chinois sont loin devant. Les deux pays sont des pays émergeants. Pour le développement de leur industrie, ils ont tous les deux besoins de matières premières.

Pour l’Inde, cet engagement est aussi politique. Ce grand pays de plus d'un milliard d'habitants, qui veut entrer au Conseil de sécurité de l’ONU, a besoin du soutien des africains pour y arriver. Dans les différents discours que Modi et ses ministres ont prononcés devant les délégations africaines, l’injustice de l’architecture stratégique mondiale est revenue de manière systématique. Pour autant, ce n’est pas sûr que lorsque la question va se poser, les pays africains veuillent se mobiliser pour l’Inde, comme on l’a vu en 2006 lorsque les Africains ont voté pour la candidature japonaise pour un siège de membre non-permanent au Conseil de sécurité.

Prêts et dons

D’où le souci des Indiens d’inscrire leurs relations avec les Africains dans une vision à long terme. Modi était toutefois attendu aux tournants sur les questions de lignes de crédit, d’aide, d’alliances en matière de climat. L’Inde donne aux Africains des prêts aux taux concessionnels qui sont utilisés pour la mise en place des projets réalisés en coopération avec les sociétés indiennes. Le montant cumulé des prêts accordés par l’Inde depuis 2008 s’élève à 7, 4 milliards de dollars.

Le Premier ministre indien a annoncé l’octroi de nouveaux prêts de 10 milliards de dollars sur 5 ans, soit le doublement des crédits par rapport au dernier sommet en 2011. Parallèlement, le montant de dons est tombé de 1,2 milliards à 600 millions de dollars. La partie du discours du Premier ministre indien consacrée au doublement des bourses, qui passent de 25 000 à 50 000 pour les cinq ans à venir, a été particulièrement applaudie. C’est une des conséquences concrètes du sommet qui sera suivie avec intérêt par les étudiants africains. Ceux-ci ont pris l’habitude de venir faire des études supérieures dans les universités indiennes. C’est moins cher qu’en Europe.

Enfin, l’Inde et l’Afrique ont profité de ce sommet pour annoncer leur désir de lutter ensemble contre le réchauffement climatique. Les différentes administrations sont en train de travailler pour pouvoir présenter des positions communes au sommet de Paris, notamment sur la question de la création d’une agence internationale pour la promotion de l’énergie solaire.

Prochaine étape : 2020

Le prochain sommet Inde-Afrique se tiendra en 2020, « pour nous donner le temps d’assimiler toutes les implications de cette nouvelle direction que le Premier ministre vient de donner à notre partenariat », a déclaré à la conférence de presse de clôture le haut fonctionnaire indien Navtej Sarna, chargé des affaires africaines.