Rejeté
par ses pairs au Sommet Inde-Afrique Mohammed VI boude et s’isole
Par
Hamid Saidani - liberte-algerie.com le 31-10-2015 10:00
Le roi du Maroc s’est présenté au sommet Inde-Afrique
avec une délégation de quelque 400 personnes. ©AFP
Le clash
tant redouté entre le Maroc et les pays africains a failli avoir lieu deux jours
avant le sommet, à l’occasion de la préparation du projet de la Déclaration de
Delhi par les ministres des Affaires étrangères.
Le roi du Maroc,
Mohammed VI, n’oubliera pas de sitôt sa mésaventure à New Delhi, la capitale de
l’Inde, où il s’est rendu avec armes et bagages pour participer au Sommet
Inde-Afrique. Alors que les autres délégations africaines, y compris celles qui
étaient représentées par les chefs d’État, ne comprenaient tout au plus qu’une
dizaine de membres, le royaume a, lui, mobilisé quelque 400 personnes entre
ministres, responsables, hommes d’affaires et journalistes pour cet événement où
il pensait être reçu comme une guest-star. Ce fut finalement chou blanc pour
lui, ce qui l’a contraint à bouder le dîner et le déjeuner officiels offerts par
le Premier ministre indien, Narendra Modi, à ses hôtes, respectivement, la
veille et le jour du sommet. Le Maroc, n’étant plus membre de l’Union africaine,
qui, à l’occasion copréside le Sommet Inde-Afrique, se retrouve d’emblée dans
une posture plutôt embarrassante pour un chef d’État.
Pourtant, dans
les quelques jours qui ont précédé le sommet, le Maroc avait réussi à dissuader
les autorités indiennes d’inviter la République sahraouie à la rencontre. Ce qui
fut fait. Le royaume pensait ainsi avoir fait l’essentiel. C’est sans aucun
doute la raison qui a poussé Mohammed VI à débarquer dans la capitale indienne à
la tête d’une forte délégation, croyant, peut-être, avoir gagné la bataille
contre le reste des pays africains. Mais le clash tant redouté entre le Maroc et
les pays africains a failli avoir lieu deux jours avant le sommet, à l’occasion
de la préparation du projet de la Déclaration de Delhi par les ministres des
Affaires étrangères. En effet, selon des indiscrétions, le représentant marocain
s’est tout simplement opposé, lors des discussions, à toute évocation du
principe de décolonisation dans le texte en question. Un principe pourtant tout
le temps martelé par les Nations unies et l’Union africaine et sur lequel la
communauté internationale est unanime. Le comportement du représentant marocain
a, visiblement, choqué tous les autres ministres qui n’ont pas hésité à rejeter
unanimement la proposition marocaine. Le ministre marocain des AE, Salaheddine
Mezouar, se serait pris une volée de bois vert de la part de l’assistance qui ne
comprenait pas qu’un pays, comme le Maroc, qui, lui aussi, avait tant souffert
de la colonisation, puisse aujourd’hui remettre en cause le principe de
décolonisation, admis universellement. Le représentant marocain a donc dû battre
en retraite face à la levée de boucliers des autres délégués.
La déclaration finale du sommet a ainsi intégré ce
principe. Et comme pour ajouter un peu plus d’amertume au malaise du roi qui
s’est retrouvé visiblement isolé dans la grande salle du complexe sportif de New
Delhi, le classement des interventions des chefs d’État est venu confirmer la
posture peu confortable dans laquelle s’est mise Sa Majesté. En effet, après le
laïus prononcé par le Premier ministre indien, en tant que représentant du pays
hôte, la parole a été donnée au président de l’Union africaine en exercice, le
président du Zimbabwe, Robert Mugabé, qui, selon toute vraisemblance, a pris un
malin plaisir à tacler le roi du Maroc, en évoquant, et à plusieurs reprises, le
combat de l’Afrique contre le colonialisme, ses souffrances dues, justement, à
la colonisation et l’engagement du continent en faveur de la décolonisation. Au
début de son intervention, le tonitruant Mugabé a même évité, et selon toute
vraisemblance de manière délibérée, de saluer le roi du Maroc. En entamant son
discours, M. Mugabé s’est adressé, dans l’ordre, au Premier ministre indien, à
la présidente de la Commission africaine, au roi du Swaziland, seul roi dans la
salle avec Mohammed VI, aux présidents, aux vice-présidents et, enfin, au reste
de l’assistance. Ce qui a certainement dû agacer encore plus le roi du Maroc. Et
comme pour faire perdurer le supplice de ce dernier qui a tenté de se mettre
dans les habits de l’invité de marque, c’est la présidente de la Commission de
l’Union africaine, Mme le Dr Nkosazana Dlamini-Zuma, qui a été invitée à
rejoindre la tribune pour prononcer, elle aussi, une allocution. Mohammed VI a
dû patienter jusqu’au début de la première session des interventions des chefs
d’État pour prononcer son discours. Mais, là aussi, ce n’est pas fini. En effet,
c’est le roi de Swaziland qui l’a précédé à la tribune. Et cela ne pouvait que
le froisser davantage, lui qui se voyait, en venant au sommet, en guest-star de
l’événement. En fin de compte, apparemment, les choses ne se sont pas passées
comme prévu. La coupe étant pleine, Mohammed VI a dû quitter la salle avant même
la fin des interventions des autres chefs d’État inscrits pour la première
session. Au déjeuner qui a suivi, il n’était tout simplement pas présent,
manifestant, ainsi, son embarras de se retrouver en tête à tête avec ceux qu’il
considère comme des ennemis. À la reprise des travaux, dans l’après-midi, il n’y
avait aucune trace de lui. Et comme pour couronner le tout, il a boycotté la
cérémonie de prise de photos des chefs d’État participants, avec le Premier
ministre indien, tous en tenue traditionnelle indienne.
S. H
Source : http://www.liberte-algerie.com/actualite/mohammed-vi-boude-et-sisole-235543