Turbulences
à la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale
Par
Aza
Boukhris -
20
janvier 2018
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La
Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC) qui rassemble
Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale et Tchad, rencontre des
difficultés politiques et financières, comme elle n’en avait jamais
connues.
La
tentative de coup d’Etat en Guinée équatoriale, révélée par l’arrestation,
sur le territoire camerounais le 28 décembre 2017, d’une trentaine d’apprentis
mercenaires, originaires pour la plupart du Tchad et de Centrafrique, ne va pas
améliorer les relations personnelles entre les six chefs de l’Etat de la CEMAC.
Le caractère acariâtre de ces autocrates, nés avant l’indépendance de leur pays
et qui enjambent avec souplesse les obstacles des élections présidentielles,
accroît encore le ressentiment de chacun d’entr’eux envers les cinq
autres.
Des
relations dégradées
Le
scénario de la rocambolesque affaire équatoguinéenne va sensiblement refroidir
les relations entre le doyen des chefs d’Etat africains, l’Equato-Guinéen
Teodoro Obiang Nguema, et le Président centrafricain Faustin Archange Touadera.
Ce dernier, à la tête d’un Etat de plus en plus factice, a reconnu qu’il ne
contrôlait pas le territoire de son pays, ni d’ailleurs sa capitale. C’est à
Bangui qu’un de ses hommes liges, Sani Yalo, est soupçonné d’avoir organisé,
avec ses deux frères, la logistique et une partie du recrutement de ce vrai faux
coup d’Etat en Guinée.
La
Centrafrique a beaucoup à perdre avec cette inattendue crispation entre les deux
pays. Au Conseil de sécurité de l’Onu, la Guinée équatoriale sera probablement
moins attentionnée envers la Centrafrique.
Le
président tchadien a beau se disculper d’avoir participé à la mise en scène de
cette intrigue, il n’empêchera pas ses pairs d’Afrique centrale de se méfier
davantage de sa tentation hégémonique. Les relations entre le président gabonais
Ali Bongo avec les présidents Teodoro Obiang Nguema et le président congolais,
Denis Sassou Nguesso, sont distantes et empruntes de soupçons réciproques de
déstabilisation. Leur paranoïa va connaître une nouvelle
poussée.
Quant
à Paul Biya, le président camerounais, il ne supporte plus l’anarchie
centrafricaine et la criminalité transnationale qui mine la sécurité du
Cameroun. Les ministres centrafricains de la Défense, de la Sécurité et de la
Justice ont dû se rendre à Yaoundé, le 18 janvier 2018, pour écouter les fortes
exigences camerounaises. L’inquiétude de voir les mouvements rebelles
centrafricains, issus de l’ex Seleka, renforcer les rebellions internes et, pour
certains, muter en groupes djihadistes n’est plus un fantasme. Le danger est
bien perçu au Cameroun, au Congo, au Gabon et surtout en Guinée Équatoriale,
après la tentative de coup d’Etat par des rebelles d’origine
musulmane.
L’intégration
régionale fragilisée
L’intégration
au sein de la Cemac était déjà un processus à l’arrêt. Dans leurs relations avec
le FMI et l’Union européenne, chaque Etat joue sa partition. Les négociations
sont bilatérales, comme l’a fait le Cameroun en signant, sans se préoccuper de
la Cemac, un Accord de Partenariat Economique avec l’Union européenne. En
trouvant un motif inespéré avec la tentative de coup d’Etat, le président
équato-guinéen va pouvoir suspendre la libre circulation des citoyens des cinq
autres Etats dans son pays. L’Accord sur la libre circulation, en vigueur
seulement depuis la fin octobre 2017, risque de rejoindre les nombreux échecs de
l’intégration régionale de la Cemac.
Sur
le plan économique et financier, les États de la Cemac voient la détérioration
de leur situation atteindre la côte d’alerte. Le FMI table sur une croissance
négative de près de 1%, en 2018. Les coupes budgétaires, de plus en plus mal
supportées par la population, se révèlent très insuffisantes pour stopper la
dette souveraine des Etats. En 2017, elle est estimée à 50% du PIB. Le nouveau
président gabonais de la Commission de la Cemac, Daniel Ona Ondo, a annoncé une
réduction de 15 % du budget de la Cemac. Les investissements seront une
nouvelle fois réduits. Avec la forte baisse des recettes d’exportation,
notamment pétrolières, la chute des réserves de change se poursuit. La perte de
change est aujourd’hui estimée à 100 millions de us dollars par
mois.
La
question de l’avenir du franc cfa est clairement posée en zone Cemac. D’autant
que le nouveau gouverneur de la Banque des États d’Afrique Centrale (.BEAC) est
le Tchadien Abbas Toli Mahamat, ancien ministre des Finances et parent Zaghawa
du président Idriss Deby Itno qui ne cache pas son hostilité à la monnaie
communautaire.
http://mondafrique.com/turbulences-a-communaute-economique-monetaire-de-lafrique-centrale/