Intervention
du président François Hollande à la clôture de la négociation de la COP21
Le
Bourget – Samedi 12 décembre 2015
Monsieur
le Secrétaire général des Nations Unies, cher Ban KI-MOON,
Je
sais quelle a été votre obstination pendant ces derniers mois pour que nous
puissions nous réunir ici, à Paris, avec la possibilité d’un
accord.
Monsieur
le Président de la Conférence, cher Laurent FABIUS,
Vous
avez tout au long de ces derniers mois – et encore davantage ces derniers jours
– joué un rôle considérable pour rapprocher les points de vue et pour concilier
parfois ce qui paraissait inconciliable. Mais c’est le sens-même d’un accord
universel.
Madame
la Secrétaire exécutive,
Je
sais ce que vous avez fait aussi pour que les délégués puissent pleinement jouer
leur rôle, parce que vous étiez attachée à cette idée si belle que la communauté
internationale peut agir.
Mesdames,
messieurs les délégués,
Vous
avez beaucoup travaillé et je veux vous exprimer la gratitude de la France pour
les discussions que vous avez menées ici, à Paris, jour et nuit et parfois plus
la nuit que le jour, pour chercher l’accord qui n’avait pas été trouvé
jusque-là.
Tous
ces efforts doivent maintenant trouver leur conclusion, à quoi auraient servi
ces temps partagés, ces initiatives multiples, ces volontés de tous les
continents, à quoi aurait servi ce travail s’il ne débouchait pas sur un accord
universel contraignant et différencié.
Nous
sommes maintenant au moment décisif, à la seule question qui vaille et à
laquelle vous seuls pouvez apporter la réponse. Voulons-nous un accord ? Cet
accord qui n’a pas pu, à Copenhague, être trouvé ; cette impasse qui, pendant
des années, a été une immense déception pour tous ceux qui voulaient que la
planète puisse avoir un avenir ; cette impasse qui a pu jeter le doute sur la
capacité de la communauté internationale à agir. Eh bien, c’est vous, par les
progrès que vous avez été capables d’accomplir ces derniers mois et, surtout,
ces derniers jours, c’est vous et vous seuls qui avez la réponse
!
Nous
avons à faire le dernier pas, celui qui permet d’atteindre le but, le pas
décisif. Le texte, qui a été préparé et qui vous est soumis, est à la fois
ambitieux et réaliste. Il concilie la responsabilité et notamment celle des pays
les plus riches ; et en même temps la différenciation. Il accorde aux plus
vulnérables et aux pays en développement les moyens qui ont été promis. Il fixe
des mécanismes de révision qui sont essentiels pour la crédibilité de l’accord.
Ce texte sera, si vous en décidez, le premier accord universel de l’histoire des
négociations climatiques.
Vous
allez faire un choix, un choix pour votre pays, un choix pour votre continent
mais aussi un choix pour le monde. Ce sera un acte majeur pour l’humanité. C’est
la raison pour laquelle, à ce stade de la négociation, à ce stade ultime de la
Conférence, j’ai tenu à être avec vous. Parce que je suis dépositaire– comme
vous – du mandat qui a été confié par les 150 chefs d’Etat et de Gouvernement,
qui sont venus au début de la Conférence pour porter l’engagement qu’il y aurait
un accord à Paris. Mais également pour l’ambition, tenir l’objectif des 2
degrés, tout faire même pour être à 1,5 degré, parce que c’est notre
responsabilité, parce que c’est l’enjeu décisif, parce qu’un réchauffement qui
irait au-delà pourrait gravement atteindre les équilibres de la
planète.
Pour
y parvenir, nous avons fixé de nouveaux rendez-vous pour réviser les
contributions nationales, pour revoir les engagements financiers. Comme l’a dit
le Président de la COP, l’accord ne sera parfait pour personne si chacun le lit
à la lumière de ses seuls intérêts. Mais il sera un succès pour tous parce que
ce qui nous rassemble, c’est la planète elle-même.
Face
au changement climatique, nos destins sont liés. Chacun a ses contraintes et je
les connais. Mais la seule chose qui compte maintenant, c’est d’avoir raison
ensemble. Toutes les exigences n’ont pas été satisfaites, toutes les
revendications n’ont pas abouti, mais nous ne serons pas jugés sur un membre de
phrase mais sur le texte dans son ensemble, nous ne serons pas jugés sur un mot
mais sur un acte, pas sur un jour mais sur un siècle. Il en va donc de notre
crédibilité collective et celle de la communauté internationale toute
entière.
Mesdames
et messieurs, la présence ici aujourd’hui de 196 délégations -vous êtes le
monde- après tant de mois de travail, est sans précédent dans l’histoire des
discussions sur le climat. Un espoir considérable s’est levé. Le monde s’est mis
en marche, pas seulement dans cette salle mais bien au-delà. Des actions
immédiates ont été engagées par les collectivités locales, les citoyens, les
chercheurs, les entreprises. Des coalitions se sont formées, des initiatives ont
été prises dans tous les continents et je pense notamment sur les énergies
renouvelables à ce qui a été fait pour l’Afrique, ce que l’Inde a porté. Je sais
aussi combien nous nous sommes mobilisés sur le prix du carbone. Nous sommes
donc capables d’assurer la lutte contre le réchauffement climatique et le
développement.
Voilà
! L’Histoire arrive, l’Histoire est là, toutes les conditions sont réunies et
elles ne le seront plus avant longtemps. Nous sommes, vous êtes sur la dernière
marche, il faut se hisser encore à la hauteur de l’enjeu. Il n’y aura pas de
report, il n’y aura pas de sursis possible, l’accord décisif pour la planète
c’est maintenant. Et il ne tient qu’à vous, à vous seuls au nom de ce que vous
représentez, l’ensemble des nations du monde, d’en
décider.
Le
12 décembre 2015 peut être un jour non seulement historique mais une grande date
pour l’humanité. Le 12 décembre 2015 peut être un message de vie et je serai
personnellement heureux, presque soulagé, j’en serai même fier que ce message-là
soit lancé de Paris, parce que Paris a été meurtrie il y a tout juste un mois,
jour pour jour.
Alors
mesdames et messieurs, la France vous demande, la France vous conjure d’adopter
le premier accord universel sur le climat de notre
Histoire.
Il
est rare d’avoir dans une vie l’occasion de changer le monde, vous avez cette
occasion-là, de changer le monde. Saisissez-la pour que vive la planète, vive
l’Humanité et vive la vie.
Vidéo: Intervention du président François Hollande? la clôture de la #COP21