Les anciens enfants soldats menacés
par le VIH en Afrique
NAIROBI, 25 février 2008 (IRIN)
- A travers le
continent africain, les enfants émergent de conflits où ils ont servi de soldats
ou de « femmes » aux chefs rebelles et se retrouvent dans un monde qui leur est
inconnu. Généralement pauvres et souvent sans famille, bon nombre de ces jeunes
ont recours, pour s'en sortir, à des systèmes qui les exposent aux dangers du
VIH.
« Nous avons découvert dans des pays
comme la Sierra Leone que les enfants soldats démobilisés étaient de plus en
plus nombreux à consommer des drogues injectables », a déclaré le docteur Josef
Decosas, conseiller principal en matière de politique relative au VIH, à Plan
International, une agence de développement qui travaille pour et avec les
enfants. « Et nous savons que dès que le VIH s'immisce dans un réseau de
consommateurs de drogue, il se répand comme une traînée de poudre ».
Selon les résultats d'une enquête
menée dernièrement, les conflits ont tendance à freiner la propagation du virus
en limitant les mouvements de population et les interactions sociales, a-t-il
indiqué.
Cependant, lorsque ces conflits
prennent fin, les communautés retournent à la vie normale et deviennent de plus
en mobiles. En conséquence, le VIH devient un véritable problème.
« En Ouganda, le taux de prévalence
enregistré au sein de la LRA [rébellion de l'Armée de résistance du Seigneur]
est supposé être relativement faible. En revanche, au sein de la population
locale du nord de l'Ouganda, le taux de prévalence est plutôt élevé et ainsi,
les enfants démobilisés doivent être préparés afin de se protéger contre le
virus », a expliqué M. Decosas.
Olushola Ismail, responsable du
bureau du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) dans le district de
Kitgum, dans le nord de l'Ouganda, a souligné que l'agence, par l'entremise de
ses partenaires, recevait et réintégrait les anciennes victimes de la LRA.
La plupart d'entre elles acceptaient
de subir un test de dépistage, et les résultats se révélaient négatifs. Selon
les estimations, la LRA a enlevé quelque 30 000 enfants au cours des 21 années
de conflit qui ont secoué la région.
D'après M. Decosas, le fait que de
nombreux enfants soldats aient été délibérément désensibilisés aux horreurs des
massacres et de la violence sexuelle a aggravé la menace que représente le VIH.
En effet, les enfants éprouvent des difficultés à changer de comportement
lorsqu'ils réintègrent la société.
« Ils sont conditionnés de manière à
être désinhibés de toutes les façons possibles. Ils ne craignent plus les
comportements violents et la violence sexuelle. Ils ont donc des difficultés à
se réajuster », a dit M. Decosas.
Des politiques de réintégration à
repenser
Jusqu'à présent, les organisations
ougandaises se sont concentrées sur l'accueil des anciens enfants soldats dans
des centres, où ils reçoivent un soutien psychosocial pendant deux ou trois
mois, et apprennent à vivre de nouveau en société, avant de retrouver leur
famille dans les camps.
« Dans le contexte de l'Ouganda, ces
enfants sortent de la brousse et après un court séjour dans des centres
d'accueil, ils sont placés dans des camps de déplacés internes », a expliqué
Daisy Muculezi, responsable de programme, chargée de la protection de l'enfant,
auprès de l'organisation basée au Royaume-Uni, Save the Children.
« La situation est étroitement liée
aux moyens que les enfants utilisent pour s'en sortir. Alors qu'un grand nombre
d'entre eux se prostituent ou fabriquent de l'alcool - des méthodes courantes
pour gagner de l'argent dans les camps - d'autres consomment de l'alcool en
quantité excessive », a-t-elle poursuivi.
Daisy Muculezi a souligné que le
suivi de ces enfants replacés n'a pas été aussi régulier qu'il aurait dû l'être.
En conséquence, de nombreux enfants sont retournés vivre dans la rue, quelques
semaines après avoir été placés dans les camps, ne parvenant à joindre les deux
bouts.
« Le nord de l'Ouganda se trouve
désormais dans une phase de rétablissement. En outre, le plan de rétablissement,
de développement et de paix que le gouvernement a élaboré pour la région
comprend un volet d'aide sociale. C'est à ce volet que nous nous intéressons
spécifiquement afin de combler les lacunes que présentent nos programmes
destinés aux anciennes personnes enlevées par la LRA », a signalé Mme Muculezi.
Selon Olushola Ismail, l'un des
moyens les plus efficaces de venir en aide à ces enfants est de leur donner la
possibilité de choisir leur avenir.
« Nous ne voulons pas contraindre
les enfants à emprunter des voies qu'ils ne veulent pas. Ainsi, nous les
laissons choisir, et ils peuvent décider de devenir tailleurs, boulangers,
menuisiers ou poursuivre leur scolarité. »
Plan International a des programmes
scolaires destinés aux anciens enfants soldats en Angola, au Mozambique et en
Sierra Leone. Ces programmes proposent des formations sur la consolidation de la
paix, des séances de conseil pour les filles qui sont devenues mères après avoir
été violées lors du conflit, ainsi que des leçons de prévention du VIH/SIDA.
Selon les Nations Unies, 58 groupes
dans 13 pays, dont sept se trouvent en Afrique, continuent de recruter et
d'utiliser des enfants, dans le cadre de conflits armés.
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