Des besoins humanitaires urgents
après le coup d'État en République centrafricaine
NAIROBI, 7 avril 2013
(IRIN) - Moins de
deux semaines après le coup de force des rebelles et le renversement du
président de
« Les principaux besoins
humanitaires identifiés à Bangui concernent l'accès à la santé, l'alimentation
et l'eau potable [et] la sécurité et la protection des civils », a dit à IRIN
Amy Martin, qui dirige la branche du Bureau de la coordination des affaires
humanitaires des Nations Unies (OCHA) de Bangui.
M. Bozizé a quitté le pouvoir le 24
mars après la prise de Bangui par les rebelles du Séléka, ce qui a contribué à
l'aggravation d'une situation humanitaire déjà précaire en RCA. L'insécurité
faisait partie du quotidien des habitants, notamment ceux du nord-est du pays,
avant le coup d'État et l'accès aux services de base était
insuffisant.
Aujourd'hui, seuls deux hôpitaux de
Bangui fonctionnent ; toutes les écoles du pays ont été fermées et les
fonctionnaires n'ont pas encore repris leur travail. La distribution d'eau et
d'électricité a été suspendue et l'insécurité s'est aggravée.
Insécurité
« L'insécurité est persistante, en
raison de la circulation des armes et du manque de discipline des rebelles du
Séléka », a dit Mme Martin.
Après le coup d'État, de nombreux
cas de pillages et de violences ont été signalés à Bangui. Le Fonds des Nations
Unies pour l'enfance (UNICEF) a indiqué que 10 tonnes de fournitures d'urgence
avaient été volées dans son entrepôt principal.
« Les pillages se poursuivent à
Bangui et dans les villes prises par le Séléka, notamment à l'ouest et au
nord-ouest de Bangui », a ajouté Mme Martin.
Concernant le nombre de personnes
affectées par la crise, elle a dit : « Nous utilisons le chiffre de population
totale du pays, soit 4,5 millions de personnes, comme nombre de personnes
affectées. Les personnes les plus vulnérables - les femmes, les enfants, les
personnes âgées, - sont les plus exposées aux risques ».
L'insécurité a provoqué des
mouvements de population.
« Dans le Nord-Ouest, les gens se
réfugient dans le bush ; à Bangui, plusieurs milliers de personnes ont traversé
le fleuve [Oubangui] pour rejoindre Zongo [en RDC], mais la situation se calme,
alors elles commencent à revenir », a dit Mme Martin.
L'insécurité pourrait également
s'aggraver dans le sud-est du pays, une région affectée par les activités des
rebelles ougandais de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA). Suite à la prise
de pouvoir par le Séléka, les troupes ougandaises et les conseillers militaires
américains présents en RCA ont suspendu les recherches pour retrouver le leader
de
« Nous ne savons pas encore si les
Ougandais et les Américains vont partir, mais s'ils s'en vont, il n'y aura plus
de forces de sécurité pour protéger les civils dans le sud-est de
« Il est peu probable que le nouveau
régime de
M. Cakaj a ajouté : « On ne sait pas
comment M. Kony va réagir aux derniers développements, mais si l'on se base sur
les anciennes attaques contre
Insécurité alimentaire
L'insécurité, qui s'est accrue
depuis décembre, a un impact sur les activités agricoles et commerciales, ce qui
suscite des inquiétudes concernant la sécurité alimentaire.
« À l'intérieur du pays, les gens
ont besoin de semences et d'intrants pour préparer la saison agricole . Il faut
relancer le commerce pour permettre aux gens d'accéder aux marchandises sur les
marchés », a dit Mme Martin d'OCHA.
Selon le rapport de situation publié
le 28 mars par OCHA, « Les frontières avec tous les pays voisins ont été
fermées, ce qui affecte directement l'acheminement des [marchandises] et des
carburants depuis Douala, qui est le principal axe commercial et
d'approvisionnement entre Bangui et le Cameroun ».
La préparation des terres, qui
aurait dû commencer en janvier, a pris du retard dans plusieurs endroits », a
indiqué un rapport rendu public par l'Organisation des Nations Unies pour
l'alimentation et l'agriculture (FAO) en mars.
« La situation de la sécurité
alimentaire, qui était déjà alarmante . empire depuis décembre 2012, date à
laquelle le conflit civil s'est intensifié », a ajouté le rapport, prévenant que
la « situation devrait s'aggraver à nouveau jusqu'à la prochaine récolte, en
juillet 2013, particulièrement dans le nord des régions de Nana-Grébizi, d'Ouham
et de Vakaga ».
« Il faut noter que, avant le début
de la crise, les inondations survenues dans les préfectures de Nana-Gribizi,
d'Ouham et de Vakaga avaient déjà affecté les activités agricoles », a dit à
IRIN Alessandro Costantino, économiste au sein du Système mondial d'information
et d'alerte rapide sur l'alimentation et l'agriculture de
Et la poursuite des inondations
pourrait devenir problématique : « Chaque année,
Les rebelles du Nord-Est
Les rebelles du Séléka sont en
majorité originaires du nord-est du pays, une région agitée et «
géographiquement isolée, historiquement marginalisée et presque sans présence de
l'État », selon l'International Crisis Group (ICG).
Parmi les éléments déclencheurs du
coup d'État, l'« absence d'[une] solution au problème des groupes armés du
nord-est de
« Le désarmement des combattants est
prévu depuis les accords de Libreville de 2008, mais il n'a jamais été mis en
ouvre en raison du manque de volonté politique du régime de M. Bozizé »,
indique-t-il.
Le dirigeant du Séléka, Michel
Djotodia, s'est autoproclamé président après le coup d'État, et « s'il reste au
pouvoir, il sera le premier président de
M. Djotodia était le dirigeant des
rebelles de l'Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), qui
ont rejoint les rebelles de
Le gouvernement de M. Djotodia
prévoit de remettre le pouvoir à un président élu après une période de
transition d'une durée de trois ans. Mais des défis commencent à apparaître,
l'opposition critiquant la composition du nouveau gouvernement décidée par le
Séléka le 31 mars, quelques jours seulement après la suspension de
Problèmes d'accès
Aujourd'hui, des centaines de
milliers de personnes n'ont pas accès à l'aide humanitaire et aux services de
base.
Selon l'UNICEF, les enfants sont
parmi les plus touchés : environ deux millions d'enfants n'ont pas accès aux
services sociaux de base et sont exposés à la violence.
« Les enfants de
« Il est impératif d'avoir un accès
total et sûr aux communautés affectées par le conflit. Avec chaque jour de plus
perdu, chaque distribution empêchée, chaque fourniture humanitaire volée,
davantage d'enfants pourraient mourir ».
M. Fontaine a ajouté, « Le temps est
venu pour la coalition du Séléka, qui s'est emparé du pouvoir le weekend
dernier, de montrer son attachement aux principes humanitaires et aux droits de
l'Homme pour les Centrafricains ».