Les
conséquences de l’épidémie d’Ebola sur la santé
maternelle
FREETOWN/DAKAR,
14 août 2015 (IRIN) - Au cours des 13 dernières années, le taux de mortalité
maternelle de
Plus de 220 travailleurs de la santé ont succombé
au virus, y compris de nombreuses sages-femmes, et, dans ce système de santé
déjà fragile, la formation et la marge de manoeuvre pour remplacer ces employés
qualifiés sont limitées. Il y a aussi la crainte des hôpitaux et des médecins
qui continue de persister au sein de la population locale. Les Sierra-Léonais
ont en effet été traumatisés par une épidémie qui a fait près de 4 000 victimes
et ils continuent d’être témoins chaque semaine de nouvelles infections, bien
que leur nombre soit faible.
Selon un rapport de
«
Nous avons rencontré plusieurs difficultés pendant l’épidémie d’Ebola. Voyant
cela, de nombreuses femmes enceintes ont décidé de ne pas se rendre à l’hôpital.
Il se peut que cela ait donné lieu à l’augmentation [récente] des taux de
mortalité [des femmes enceintes] », a dit à IRIN A.P. Koroma, surintendant
médical au Princess Christian Maternity Hospital (PCMH), aussi appelé Cottage
Hospital, à Freetown.
Quatre-vingt-cinq décès maternels ont été
enregistrés à l’hôpital depuis l’annonce de l’épidémie, en mai 2014, ce qui,
selon M. Koroma, représente « une nette augmentation par rapport aux années
précédentes ».
« Les gens étaient craintifs, et ils le sont toujours »,
a-t-il ajouté.
Avant Ebola, 10 700 femmes en moyenne donnaient naissance
chaque année au Cottage Hospital. Depuis l’épidémie, ce chiffre a chuté pour
atteindre 6 723.
Le plus récent taux de mortalité maternelle n’a pas
encore été rendu disponible au niveau national, mais on s’attend à ce qu’il ait
augmenté vu le taux de fréquentation des hôpitaux et les risques que supposent
les accouchements à la maison en Sierra Leone.
« Pendant l’épidémie
d’Ebola, les gens avaient l’impression qu’ils pouvaient contracter le virus
s’ils se rendaient à l’hôpital », a expliqué M. Koroma. « Nous avons fait de
notre mieux [...] pour venir en aide aux femmes qui sont venues à l’hôpital,
mais certaines d’entre elles sont arrivées trop tard. On leur avait dit que si
elles avaient des saignements – l’un des symptômes d’Ebola –, aucune infirmière
ou aucun médecin ne voudrait les toucher tant qu’un test de dépistage d’Ebola
n’aurait pas été fait. Or, cela peut prendre jusqu’à trois jours. »
Parmi
les femmes qui ont décidé de se rendre à l’hôpital, certaines sont décédées en
attendant le résultat du test de dépistage.
L’hôpital a désormais accès à
un test de diagnostic rapide qui permet d’obtenir un résultat en moins de trois
heures.
Malgré cela, et malgré l’amélioration générale des mesures de
sûreté, de nombreux hôpitaux craignent toujours d’accueillir les femmes
enceintes. Les accouchements mettent en effet le personnel en contact direct
avec les fluides corporels.
« Lorsque nous avons commencé à entendre
parler des décès de nos collègues, tout le monde s’est mis à avoir peur et
personne ne voulait toucher les patients », a expliqué M. Koroma.
Mais ce
ne sont pas toutes les femmes qui décident de se tenir à distance des
hôpitaux.
« Des amis m’ont dit que je risquais d’attraper Ebola si je
venais à l’hôpital… j’ai commencé à avoir peur », a dit Mary Conteh, une jeune
femme de 22 ans de Freetown qui a donné naissance plus tôt ce mois-ci. « Mais
j’ai finalement décidé de venir au Cottage Hospital… Je remercie le Seigneur que
mon accouchement se soit bien passé. »
Pénurie de
travailleurs de la santé
Selon le rapport de
« C’est un
choc terrible, surtout pour un système de santé déjà affaibli », a dit David
Evans, économiste senior au Groupe de
Les experts estiment que des investissements
supplémentaires sont absolument nécessaires pour pallier les lacunes dans les
soins prodigués aux mères si
« Il n’y a pas 1 000 solutions
possibles », a dit M. Evans. « Ces pays et les communautés internationales qui
les soutiennent doivent embaucher davantage de travailleurs de la santé et
fournir les ressources nécessaires pour s’assurer qu’ils sont bien payés et
qu’ils ont envie de rester en Sierra Leone pour y travailler. Et ils doivent
aussi s’assurer qu’ils ont des équipements de protection en attendant qu’Ebola
disparaisse complètement. »
À court terme, pour éviter une augmentation
supplémentaire de la mortalité maternelle, M. Evans suggère de mettre en place
une mesure palliative, c’est-à-dire d’employer des travailleurs de la santé et
des assistants de naissance étrangers en attendant que les capacités locales se
développent et que des travailleurs issus de la population locale reprennent le
flambeau à plus long terme.
Les femmes de Sierra Leone disent prier pour
cela.
« Tout ce que je veux, c’est que mon bébé soit en santé », a dit
Frances Tucker, une jeune femme de 25 ans enceinte de cinq mois. « Je ne veux
pas avoir les problèmes que d’autres femmes ont eus en restant à la maison parce
qu’elles avaient peur de venir à l’hôpital [...] mettant ainsi en péril leur vie
et celle de leur bébé.
»
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