Anniversaire 1982-2012: « L'objet de mon intervention de ce jour est d'apporter un témoignage à mes jeunes sœurs et  frères  pour leur dire que l'histoire récente de la RCA est pleine de zones d'ombre qui faudra au fur et à mesure éclairer. »

 

Bonjour,

 

Il y a trente (30) ans, en 1982, après les événements malheureux qui ont poussés des compatriotes à s'exiler au Sud du Tchad, le Général André KOLINGBA m'envoyait en mission sécrète à MOUNDOU pour essayer de convaincre ses compatriotes de rentrer au pays afin de sceller une vraie réconciliation nationale.

Les conditions posées par mon interlocuteur principal à MOUNDOU avait été très rapidement acceptées par le Général KOLINGBA c'est à dire la libération sans condition de tous les prisonniers politiques et leur réintégration dans leurs fonctions. C'est à François GUERET et à moi même que le Général KOLINGBA avait demandé de préparer la liste de tous les prisonniers politiques et le décret de leur libération.

L'entourage soit disant proche du Général KOLINGBA n'avait en aucun moment été associé de près ou de loin à cette initiative courageuse du Général KOLINGBA. Trente (30) ans après et avec le recul, il est indéniable que le Général KOLINGBA avait d'abord placé les intérêts de la nation avant toutes autres considérations. Il connaissait l'étroitesse des mentalités de son entourage et surtout l'aversion que cet entourage vouait à tous ce qui pouvaient ressembler à une réhabilitation des auteurs et partisans du Coup d'Etat manqué de 1982.

Les insultes et menaces dont j'ai été particulièrement victime de la part de certains membres de cet entourage sont encore vivaces dans mon esprit; Bien plus tard, J'ai même été accusé de préparer un Coup d'Etat avec François GUERET pour renverser le Général KOLINGBA.

François GUERET avait été demis de ses fonctions de Haut Commissaire d'Etat et pour ma part j'avais fait l'objet d'une mise en quarantaine qui n'avait pris fin que le jour où j'ai eu une explication franche et claire avec le Général KOLINGBA dans sa Villa du Quartier GBANGOUMA.

A la suite de cet entretien, il y avait eu quelques limogeages à la tête de certaines entreprises d'Etat et quelques éloignements dans l'entourage immédiat du Général KOLINGBA. Sans citer qui que ce soit, le départ du célèbre Directeur Général De La  CAISTAB à cette époque répondait à cette volonté du Général KOLINGBA d'assainir autant que faire se peut tout son entourage.

Depuis 1982, le Général KOLINGBA savait que le MLPC était majoritaire dans le pays bien que clandestin. Nous en avions souvent discuté et sa position était claire et nette à savoir: Eviter quelque affrontement que ce soit avec ce parti politique. La dissolution du Comité Militaire de Redressement Nationale (CMRN) et la création du Rassemblement Démocratique Centrafricain (RDC) ont été une erreur. Il était question pour moi que le processus démocratique interrompu en Septembre 1981 puisse être repris dans son entière intégralité, c'est à dire: Remise en place de la Constitution, Multipartisme intégrale, Liberté des Partis Politiques, Liberté d'Opinion, Liberté d'Association, Fin des Délits d'Opinion, Elections au Suffrage Universel. Pour bien marquer mon opposition à la création du RDC et bien qu'ayant été très proche du Général KOLINGBA, je n'ai jamais adhéré à ce parti.

D'aucun pouvait se poser la question de savoir pourquoi le Général KOLINGBA ne s'était pas réconcilié aussi avec Ange Félix PATASSE et François BOZIZE en 1982. La réponse est simple: Le Général KOLINGBA estimait que PATASSE et BOZIZE aurait dû se mettre sous la protection d'une Ambassade Africaine au lieu d'aller tout droit à l'Ambassade de France pour PATASSE et à la Base Militaire Française pour BOZIZE.

J'avais fait remarquer au Général KOLINGBA qu'il était normal que le Général BOZIZE trouva refuge dans cette base Française étant donné ses relations amicales avec le Colonel JOUBERT qui n'était autre que son Conseiller Militaire à la Présidence de la République.

En dehors de ces événements de 1982, et avant qu'un jour moi aussi je ne m'éteigne, je voudrais parler de la mort du Docteur CONJUGO. J'étais avec le Général KOLINGBA lorsqu'il a appris le décès du Docteur CONJUGO lors de cette manifestation donc les plus anciens ont le souvenir.

Je puis affirmer ici, à l'attention de la Famille du docteur CONJUGO que le Général KOLINGBA était entré dans une très grande colère. La mort du Docteur CONJUGO l'avait considérablement affecté, de cela, je puis en témoigner. Le Général KOLINGBA malgré les apparences avait un grand respect de la vie humaine. C'est ce respect de la vie humaine qui l'avait conduit à garder le Général BOZIZE en vie malgré les sollicitations de certains membres belliqueux de son entourage qui ne voulaient voir le Général BOZIZE qu'à 10 mètres sous terre. C'est ce même entourage qui l'avait influencé et convaincu pour qu'il se présente aux élections présidentielles de 1993. J'étais personnellement contre le fait de voir le Général KOLINGBA se présenter à ces élections. Je le lui avais fait savoir dans son bureau en des termes diplomatiques puis dans une longue lettre ouverte diffusée dans tout BANGUI le 14 JUILLET 1993. Ceux qui s'en souviennent peuvent en témoigner et principalement MAZETTE qui avait eu la responsabilité de diffusée cette lettre un jour après mon départ définitif de Bangui.

L'objet de mon intervention de ce jour est d'apporter un témoignage à mes jeunes sœurs et  frères  pour leur dire que l'histoire récente de la RCA est pleine de zones d'ombre qui faudra au fur et à mesure éclairer. Le Général KOLINGBA a été au début de sa présidence un Très Bon Président mais son entourage l'avait progressivement enfermé dans une cage de verre où il était coupé des réalités. L'ivresse du pouvoir avait aussi fait le reste. Des fortunes considérables s'étaient bâties dans le pillage des richesses nationales. L'anarchie et l'insouciance dans lesquelles étaient traitées les affaires de l'Etat ont mis en danger et menacées l'intégrité et l'unité de la Nation; Les responsables de cette gabegie sont connus, mais n'ont jamais été poursuivis par la Justice. Ange Félix PATASSE élu démocratiquement en 1993 n'avait jamais pu gouverner dans le calme et la sérénité à cause des innombrables et inutiles mutineries donc les effets se font encore ressentir aujourd'hui. La RCA est devenu un pays instable où les milices et bandes armées s'affichent au grand jour. Mais où étaient donc toutes ces bandes armées pendant les 13 (Treize) ans de règne de BOKASSA? Pourquoi ces bandes armées ne vont-elles pas combattre les forces rebelles étrangères qui envahissent notre pays?

 

Salutations à toutes et à tous.

 

Denis MBALLA

Vendredi 15 juin 2012 15h41

 

Nb: Analyse n'engageant que le point de vue de l'auteur qui souhaite des échanges sur la question