2020, la belle année ! du retournement historique en RCA.

 

 

Le 1er janvier 1966 à 3h20 du matin, le colonel Bokassa, chef d'état-major des forces armées centrafricaines, se rend chez son parent David Dacko, président de la République : « Noko ! Mou na mbi ngou ». La porte s'ouvre devant l'intempérant qui réclame à boire. Il se saisit de la personne du président et prend le pouvoir. Ainsi débute le calvaire de la République centrafricaine. Il durera 54 ans, et 2019 se termine en cauchemar.

 

1 – L'acte VI du KNK est déjà annoncé.

Ce mardi 31 décembre 2019, une nouvelle année s'annonce. 2020 est l'aube d'un retournement historique du pays. C'est une année d'élections générales. Ces dernières devront se tenir dans les délais prescrits par la constitution. Certes, le KNK, qui a posé l'acte IV de sa stratégie le samedi 21 décembre dernier, tentera d'imposer son candidat, François Bozizé. Ce dernier sera recalé, ayant déjà effectué deux mandats présidentiels successifs. Ce rejet permettra à son parti de lancer l'acte VI de sa stratégie, la déstabilisation déjà annoncée du pays. Il faudra néanmoins rester ferme sur les échéances électorales.

 

2 – Le mouvement Cœurs unis dans les malversations financières.

Au pouvoir depuis l'élection présidentielle de mars 2016, le président Touadéra est empêtré dans des scandales politiques et des malversations financières à répétition. Corruption et impunité sont devenues la marque de fabrique de son régime. Il a démontré son incapacité à diriger un État moderne, n'ayant pas réussi à ramener la sécurité et l'ordre public dans le pays. Dans un tel contexte, sa candidature est vouée à l'échec.

De son côté, le président de l'URCA, politiquement affaibli par les démissions successives au sein de son parti, ne pourra pas rééditer son score de 2016 ; un miracle ne se produit jamais deux fois de suite. Quant au responsable du Chemin de l'espérance, il devra renoncer à solliciter les électeurs centrafricains, ayant dépassé les bornes de l'intrigue. Les autres candidats potentiels, aussi nombreux soient-ils, joueront les utilités, sans renforcer l'espace démocratique.

Il reste deux grands partis politiques qui peuvent sauver ce qui reste du pays de Barthélemy Boganda, à condition d'entamer derechef leur propre aggiornamento, le MLPC et le RDC.

 

3 – Le retour au politique et à la nation.

Le MLPC est un parti structuré et organisé mais son leader est trop impliqué dans les conflits qui ont endeuillé la RCA. Au côté de Patassé et Bozizé, c'est par lui que sont entrés en Centrafrique les miliciens banyamulenges du chef rebelle congolais Jean-Pierre Bemba. Le MLPC a porté François Bozizé au pouvoir et lui a servi de marchepied. Pis, en soutenant la stratégie du désarmement concerté de président Touadéra, qui a abouti aux accords de Khartoum et à l'entrée des chefs de guerre dans les rouages de l'Etat républicain, le président du MLPC s'est disqualifié, se rendant complice de la violation de l'article 29 de la Constitution. Enfin, ayant déjà sollicité à trois reprises la confiance des électeurs sans succès, il lui faut passer la main, sauf à vouloir vaincre par épuisement de ces derniers.

Demeure donc le RDC. Malgré deux épisodes politiques marqués par la trahison de certains membres historiques du parti, dont les départs auraient pu l'affaiblir, le RDC reste le pôle fort de l'opposition démocratique. Il doit cependant gagner en rigueur et organisation, afin de constituer une alternative politique véritable, avec un projet de société et un programme de gouvernement capables de rassembler les Centrafricains. Au-delà du parti, le RDC doit rallier l'ensemble des populations du bassin de l'Oubangui et celles du bassin de la Kotto, ces alliés séculaires qui ont forgé l'âme de la nation centrafricaine. Le leader du RDC devra, dans cette perspective, symboliser le mitan de la prochaine mandature, quitte à renoncer à être lui-même candidat s'il le faut.

 

Il nous faut reconstruire une Nation, en échappant « aux divisions, au tribalisme et à l’égoïsme » qui ont toujours conduit notre peuple à l'échec. Le moment semble venu et 2020 s'inscrit comme l'année de ce renouveau que tout le pays appelle de ses vœux.

 

Bonne année à toutes et à tous !

Paris, le 31 décembre 2019

 

Prosper INDO

Economiste,

Consultant international

Prosper INDO