LA REPUBLIQUE
CENTRAFRICAINE COMME ELLE VA
Comme a son habitude,
l’histoire de la RCA a connu une foudroyante accélération qui laisse sceptique
plus d’un observateur . L’Assemblée nationale s’est débarrassée de son sulfureux
Président pour le remplacer par un autre au prénom chrétien mais islamisé . A
l’occasion de cette destitution, un député a tiré dans l’hémicycle sans qu’on
sache exactement s’il voulait faire un coup d’Etat, massacrer ses collègues ou
seulement les effrayer pour amuser la galerie . Cet épisode rocambolesque révèle
au grand jour les tares et les faiblesses de la RCA telle qu’elle va .
I . Au niveau du
législatif
Le Président de l’Assemblée
nationale a acheté sa majorité parlementaire avec « un plat de lentilles » il y
a deux ans avec force promesses, monts et merveilles . Les vendus viennent de
lui vomir ce plat à la figure et d’une drôle de façon . Décidément, bien mal
acquis ne profite pas ! Les « honorables » qui se sont
déshonorés ont manifestement préféré sacrifier leur Président que de courir le
risque de retourner devant leurs électeurs ! Passons car il y a plus grave
dans cet épiphénomène qui eut déjà un précédent en Centrafrique . Après tout, ce
mode de gestion de la chose publique n’est pas inscrit dans la loi fondamentale
centrafricaine comme au Liban !
La chose la plus inquiétante
est d’apprendre que certains parlementaires se trimballent tranquillement dans
les travées de la représentation nationale armés jusqu’aux dents . Qui, de la
Minusca, de la police ou de la gendarmerie centrafricaine est chargé de protéger
ce lieu sensible de la jeune démocratie ? Pourquoi ce travail a-t-il été
négligé en ce jour crucial ? On attend impatiemment des explications
et un portique détecteur de métaux !
La destitution du PAN
a provoqué une onde de choc chez ses électeurs du KM5 et SURTOUT parmi les
fameux « généraux »
d’opérette de la Séléka . Le PAN serait-il le chef putatif des Séléka ?
Ecoutera-il les imams de Bangui et celui de la grande mosquée de l’Arabie
Saoudite ?
Rappelons que primitivement,
le rôle du législatif est de faire des lois et de contrôler le gouvernement et
non servir de sinécure ou de simple tremplin pour assoiffés du pouvoir et
recalés du suffrage universel .
II. Au niveau de
l’exécutif
Tout le monde parle de la RCA
comme d’un pays qui a la chance d’être dirigé par deux professeurs d’université
surdiplômés . Ma philosophie politique me pousse à préférer un paysan
centrafricain qui aime son pays à un professeur d’université qui louvoie .
Le Premier Ministre de la RCA est
un géographe de formation . Quelle que soit sa spécialisation, comment peut-il
ignorer le titre révolutionnaire de Lacoste : « La géographie, ça
sert, d’abord, à faire la guerre » ? Ce remarquable titre date de
1976 et pose clairement le géographe comme un géopoliticien capable de
comprendre et de gérer une situation de crise dans un espace-temps donné . Cela
fait plus de deux ans qu’il est Premier Ministre sans compter les cinq autres
années où il a servi de directeur de cabinet à l’actuel Président quand ce
dernier était à la primature . Alors pourquoi aucun chef de la horde sauvage
venue de l’extérieur semer la discorde dans le pays n’est arrêté ? Pourquoi
se laisse-t-il narguer par des apatrides sans foi ni loi, des va-nus-pieds
devenus aujourd’hui des millionnaires et des milliardaires ? Des gens qui
veulent détruire la RCA parce qu’ils n’ont rien à perdre .
Une fine stratégie aurait
dirigé la Minusca non pas à faire la guerre en lieu et place des Centrafricains
mais à s’interposer véritablement pour empêcher les tueries quotidiennes . Et si
la Minusca ne veut pas jouer ce rôle, il reste toujours la possibilité de partir
en signant son forfait de non-assistance à peuple en danger .
La Minusca pourrait nous
aider à construire des écoles, des ponts, des édifices publics en remplacement
de ceux détruits par la Séléka , y compris des prisons hermétiques sans
quoi la Cour Pénale Spéciale mise
en place à Bangui apparaîtra pour ce qu’elle est : une coquille vide . Les
assassins de la RCA n’ont pas peur parce qu’ils savent qu’il n’y a aucune
structure pénitentiaire capable de les contenir dans le pays .
Les ONG doivent se soumettre
à un rigoureux cahier des charges correspondant aux besoins actuels et futurs de
la RCA qui ne doit pas être un moulin . Les mécontents seront priés de remballer
leurs « biloko » …etc . Les
règles doivent être centrafricaines !
Quant au Président de la
République, je ne sais pas s’il continue ses cours de mathématiques à la faculté
des sciences mais il ferait mieux de faire donner des cours de maths partout sur
le territoire, de détruire les immenses panneaux publicitaires qui polluent les
grandes villes pour les remplacer par des figures géométriques de manière à
instruire son peuple . Donner des
cours à quatre ou cinq étudiants seulement laisse penser qu’il a du temps à
distraire ou qu’il est irremplaçable en RCA . De plus, sa présence à la faculté
doit générer d’inextricables problèmes de sécurité .
Si la géographie doit servir
d’abord à faire la guerre, les mathématiques sont là pour étudier les
proportions, les volumes, les périmètres…La RCA a deux spécialistes dans chacune
des deux sciences . Alors pourquoi depuis bientôt cinq ans que les djihadistes
stipendiés de l’extérieur ne sont-ils pas encore arraisonnés et jetés en
prison ? Plus prosaïquement pourquoi les monuments censés embellir Bangui
sont-ils lourdauds, obèses ( soldats) et cette colombe symbole de la paix qui
fait penser plutôt au dodo ! Etonnez-vous après cela que le pays ne décolle
pas ! Gouverner c’est penser à tout . La RCA va mal
…
David KOULAYOM-MASSEYO . Le
2 Novembre 2018 .