Noël à la rue pour les déplacés de Bangui-Mpoko.

 

Les déplacés internes réfugiés à l'aéroport de Bangui-Mpoko ont été sommés de quitter leur habitat de fortune avant Noël. Sur ce site qui a compté jusqu'à 100 000 personnes au plus fort de la crise centrafricaine, il reste actuellement trente mille personnes, représentant 8 378 ménages.

 

Pour faciliter le déguerpissement de ces sinistrés, le gouvernement propose d'octroyer une somme de cinquante mille francs cfa (50 000) à un couple avec un seul enfant, et 100 000 francs cfa à chaque ménage de taille supérieure. Mais seulement 30 familles auraient accepté cette transaction, les autres jugeant cette enveloppe insuffisante pour se reloger de manière décente.

Le Fonds monétaire international (FMI) ayant délégué 10 milliards de francs cfa pour financer cette opération, chaque ménage peut donc prétendre à une prise en charge à hauteur d'un million de francs cfa, sans épuiser la manne ainsi offerte.

Pour le ministre des affaires sociales, Mme Virginie Mbaïkoua, cette dotation est symbolique. Elle sera poursuivie par « un grand travail d'accompagnement que le gouvernement a décidé de faire, ce sera dans le quartier de retour ». On voudrait bien la croire.

 

Une question se pose : qu'en est-il de ceux des déplacés qui ont quitté le site depuis belle lurette pour se reloger par leurs propres moyens ? On voit mal l'Etat centrafricain les rappeler à ses guichets, sauf à déclencher une course aux subventions et susciter la convoitise des chasseurs de primes.

On s'interroge d'ailleurs sur les critères d'affectation de cette aide et sur ses modalités pratiques d'attribution. Qu'en est-il des déplacés de l'intérieur ? A-t-on dressé un relevé exhaustif des villages à reconstruire, sur quel modèle d'urbanisme et dans quel délai ?

Sans ces précisions, on est en droit de penser que la machine à corrompre est déjà en marche.

 

Il ya 3 ans, lorsque l'idée de fermer le camp des déplacés de Bangui-Mpoko s'était posée, sous le gouvernement du Premier-ministre Gaston Nzapayéké, nous avions suggéré aux autorités de la transition de saisir cette occasion pour repenser l'urbanisation chaotique de la ville de Bangui. Nous les avions invités à élaborer un nouveau plan d'occupation des sols, tracer de nouvelles voiries, réaliser avec l'aide du génie militaire européen un réseau de tout à l'égout, etc.

L'ancienne édile de Bangui, devenue chef de l'Etat de la transition, n'a rien fait de tel. Voici donc le nouveau gouvernement, neuf mois après son installation, contraint d'expédier dix mille familles au hasard des quartiers délabrés !

 

Il aurait mieux fait de mettre ce délai à profit pour constituer un groupe de travail interministériel, associant les ministères du logement, des transports, des affaires sociales, le Maire de Bangui, les architectes de la ville ainsi que les différents chefs de quartiers, pour fixer un plan d'ensemble, délimiter les quartiers à rénover, les maisons à reconstruire, les conditions d'accès à la propriété...

 

Du temps a été perdu, faute de génie et d'esprit d'anticipation.

 

 

Paris, le 21 décembre 2016

 

Prosper INDO

Président du CNR.