« Blablateurs » et jeu de dupes à Bangui.

 

M. Parfait Onanga-Onyanga, représentant spécial du secrétaire général de l'Onu en Centrafrique, vient une fois de plus de dérouler la parfaite panoplie du discours onusien : parler pour ne pas agir.

La Minusca est en contact des groupes armés pour les amener à la négociation dans le cadre du programme DDRR, et pourtant rien ne se passe,  sauf le « blabla » autour du désarmement concerté.

 

1 – La stratégie de la partition est en marche.

 

Au moment où la bataille fait rage autour de la ville de Bambari, au centre du pays, deux constats s'imposent :

-        1 -  sous la présidence autoproclamée de Michel Djotodia, ce dernier avait nommé Ali Ndarassa gouverneur militaire de la préfecture de la Ouaka. A l'arrivée des militaires français de l'opération Sangaris, cette région avait été désignée comme la base de cantonnement des éléments de l'ex-Séléka. Dans le cadre des « mesures de confiance », négociées par le général français Soriano, les éléments de la Séléka commandés par le « général » Zoundéko, qui stationnaient à Bossangoa, ont été reversés sur Bambari. Le 26 octobre 2014, l'alliance Séléka volait en éclats entre l'UPC et le FPRC. A la demande de la Minusca, l'aile militaire du FPRC commandé par le « général » Zoundéko est déportée à Bria. Ali Ndarassa, commandant l'aile militaire de l'UPC – l'aile politique étant dirigée par Habib Awal – conservait son implantation à Bambari. A l'époque, les uns et les autres militaient pour le rattachement de la RCA au Tchad et au Soudan, ou la partition.

-        2 –  l'objectif du FPRC de Noureddine Adam a toujours été la partition de la RCA. Prendre Bambari est devenu pour ce mouvement un impératif stratégique. La ville aux sept collines – comme Rome – est le nœud des circulations en direction de Bangassou au sud-est, et de Birao au nord-est. Le pont de la rivière Ouaka en est le symbole. Bambari est le verrou pour qui veut contrôler toute la partie Est de la République centrafricaine. Voilà pourquoi tous les schémas de dialogue mis en œuvre depuis 2013 ont jusqu'ici échoué (1). L'exfiltration d'Ali Ndarassa hors de Bambari est une victoire du FPRC.

 

2 – Le pompier pyromane.

 

Voir aujourd'hui le futur président de la commission exécutive de l'Union africaine, actuel ministre des affaires étrangères du Tchad, M. Mahamat Moussa Farki, affirmer sa détermination à « travailler étroitement avec les Nations Unies afin d'accompagner le gouvernement et le peuple de la République centrafricaine dans sa quête de sortie de crise », relève du « blabla » diplomatique. C'est le pyromane qui se mue en sapeur-pompier.

Moussa Farki connait bien la RCA. Ce pays est un  peu sa deuxième patrie. Il a grandi au PK5 et a fait toutes ses études secondaires à Bangui, avant de se rendre à Brazzaville pour s'inscrire, en licence, à la faculté de droit de l'université Marian Ngouabi, en République du Congo. Il a poursuivi par un diplôme d'études supérieures spécialisées (DESS) à l'Université Paris X de Nanterre.

Il connait donc tous les protagonistes de la crise centrafricaine.

 

La position officielle du Tchad est claire : ramener François Bozizé et Michel Djotodia au centre du jeu (2). Pour quelles raisons ? Parce qu'ils sont les donneurs d'ordre et, Idriss Déby, le maître du jeu. Un jeu de dupes, rendu possible par le do-nothing du gouvernement centrafricain !

 

En effet, à défaut de reproduire l'ensemble Oubangui-Chari-Tchad, certains voudraient bien échanger la région centrafricaine de l'Aoûk, riche en réserves d'hydrocarbures et de pierres précieuses, contre la région tchadienne du Logone, menacée de famine par l'assèchement du lac Tchad. A défaut, ils l'annexeront. Les groupes armés ne sont que les pions de cette stratégie (3).

 

Paris, le 17 février 2017

 

Prosper INDO

Economiste,

Président du CNR

 

(1)    cf. Prosper INDO, in « La partition en ordre de marche ? », Paris, 17 décembre 2015. - http://www.sangonet.com/afriqg/PAFF/Dic/actuC/ActuC21/la-partition-en-ordre-de-marche-2015-12-17.html

(2)    Michel Djotodia et François Bozizé sont le revers et l'avers d'une même médaille. Le premier a créé le comité des intellectuels et cadres pour le soutien à la candidature du second aux élections présidentielles de 1995, contre Ange-Félix Patassé. Ils ont été financés par les petits collecteurs de diamant du PK.5, dont certains sont proches de l'actuel président de l'assemblée nationale. Les uns et les autres sont devenus les seigneurs de guerre de l'ex-Séléka et/ou des anti-Balaka.

(3)   Selon les indiscrétions, les négociations de Luanda commencent à livrer leurs secrets : les groupes armés exigent une amnistie générale pour les crimes de guerre, le statut d'anciens chefs d'Etat et leurs corollaires protocolaires pour MM. Djotodia et Bozizé, l'attribution de 5 à 7 ministères de plein exercice, dont les finances et la défense, ainsi que l'intégration de leurs éléments au sein des forces armées centrafricaines !

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