Supercheries, escroqueries, magouilles et autres
scandales en Centrafrique
La supercherie est
ainsi éventée. On sait désormais que la marche de soutien au projet de
référendum constitutionnel pour permettre au président Touadéra de briguer un
troisième mandat a été financée par une escroquerie. IL s'avère en effet que
chaque marcheur a reçu la modique somme de 500 francs CFA, soit 76 centimes
d'euro, pour battre pavé le samedi 6 août dernier sur l'avenue des Martyrs, à
Bangui.
1 – L'énigmatique Monsieur le premier vice-président
de l'Assemblée nationale.
Le mécanisme de cette escroquerie a été inventé par le
premier vice-président de l'assemblée nationale. Excipant d'une rage dentaire
qui le ferait abominablement souffrir – ce que n'importe qui peut comprendre –
qui l'oblige à se rendre à Paris pour se soigner (1),
l' « honorable » député se fait décaisser la somme de 17 millions
de francs CFA du Trésor public, pour sa translation sanitaire. C'est un appel de
fonds dont il paraphe lui-même, alors que le président de l'Assemblée nationale
n'est ni absent ni empêché.
Malheureusement pour lui, sa demande de visa
introduite auprès du Consulat français est rejetée. Il s'est sans doute distrait
du contentieux qui a valu à son épouse et à ses enfants de faire l'objet d'une
interdiction du territoire français. C'est une partie de cette somme rondelette
qui a servi à dédouaner les marcheurs du 6 août dernier, comme si les fonds
secrets de la présidence de la République avaient taris.
Il s'agit donc bien d'un détournement de fonds publics
et d'abus de biens sociaux, au regard de la loi.
Pourtant, aux dernières nouvelles, sauf un rappel à
l'ordre du président du parlement, aucune information judiciaire n'est ouverte,
aucune enquête n'est lancée et aucune commission parlementaire ne
siège !
2 – Comme un privilège de « la classe de
loisir ».
On doit à l'économiste américain Thorstein Veblen
(1857 – 1929), le concept de « classe de loisir ». IL s'agit d'une
classe sociale de richissimes citoyens qui alimente pas sa consommation
ostentatoire (montres de luxe, tableaux de maîtres, meubles d'époque, voitures
de collection et pléthore d'épouses et concubines) capte et dilapide les
ressources financières d'un pays, aidée en cela par des sociétés d'import-export
qui trouvent là l'occasion d'agrandir leurs profites en tirant vers le haut les
prix des denrées de première nécessité (Savon, huile, pétrole lampant,
etc.).
En République centrafricaine cette classe de loisir
existe et se divise en deux catégories :
-
un gouvernement dont
l'organigramme est écrit au crayon à papier, composé de ministres conseillers au
cabinet du chef de l’État. Ils sont pléthore mais ne sont responsables devant
aucune instance institutionnelle, sauf de dépendre du bon plaisir du
président ;
-
un gouvernement officiel
d'une quarantaine de membres également, dont l'organigramme est écrit à l'encre
mais qui n'ont aucun pouvoir, sauf à être responsables devant la chambre des
députés (2).
Cette classe de loisirs est complétée par une
ribambelle des membres d'institutions chargées de la bonne gouvernance, nommés à
la discrétion du Prince, dépourvus de tout pouvoir d'investigations et
d'injonction. Ils bénéficient tous des privilèges de la classe de loisir et
peuvent ainsi s'adonner à leurs jeux favoris entre Sodome et
Gomorrhe.
3 – La deuxième mort de Barthélémy
Boganda.
Toute cette classe de loisir étant constituée
essentiellement par les membres de la famille, du clan, de l'ethnie et de la
région du président Touadéra, voire de quelques anciens camarades des cours
d'école, tous partisans du Mouvement des cœurs unis – le bien nommé parti
présidentiel - il faut se rendre à l'évidence : le projet de référendum
constitutionnel porté par le député de la Lobaye sera voté à l’unanimité lors de
la session extraordinaire de l'Assemblée qui vient, les députés de l'opposition
étant forcés au boycott, … une erreur selon nous (3).
L'adoption de projet verra s'ouvrir une période de
chasse aux sorcières virulente contre les leaders de l'opposition et la mise en
place d'une gestion mafieuse de l’État, comme en témoigne déjà la création d'une
cryptomonnaie nationale, destinée à permettre l'acquisition de la nationalité et
des terres par des étrangers ; ce qui se traduira par une modification du
corps électoral ! A l'exemple de Panama ou du Salvador, le Centrafrique
sera une « nation » sans âme, aux contours flous et disparates.
Barthélémy Boganda ne l'avait pas imaginé. Le voici assassiné une seconde
fois.
Pendant ce temps, une palanquée de quelques
hurluberlus se rendra ce samedi 13 août 2022, jour du soixante-deuxième
anniversaire de la proclamation de l'indépendance du pays, pour crier sous les
fenêtres de l'ambassade du Rwanda à Paris, oubliant que les troupes rwandaises
sont en République centrafricaine sous mandat de l'ONU et font partie de la
MINUSCA, dirigée par … une Rwandaise.
Paris, le 12 août 2022
Prosper INDO
Économiste,
Consultant international.
(1) – A
toute chose malheur est bon ; l'épouse en question ayant hérité d'un poste
de consul honoraire à Bruxelles.
(2) -
Responsabilité toute relative puisque, ni le ministre de la jeunesse et des
sports, ni sa collègue du commerce, mis en cause à l'étranger pour de sombres
affaires d'escroquerie – c'est une malédiction – n'ont été entendus par une
quelconque commission de l'Assemblée nationale, et siègent toujours autour de la
table du conseil.
(3) - La bataille démocratique qui vient sera rude et exige d'encourager le peuple à voter non ! Nul boycott ne devrait freiner l'ardeur, et des Républicains et des Démocrates.