INTERVIEW EXCLUSIVE LNC DE CHARLES ARMEL
DOUBANE
ANCIEN AMBASSADEUR DE LA RCA A
L’ONU
(Propos recueillis par Fatima Lamine)
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LNC
Excellence,
tout d'abord pouvez-nous dire les raisons qui ont fait que vous aviez refusé le
poste de ministre des affaires étrangères dans le gouvernement de Tiangaye III
?
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Charles
Armel Doubane
Sur cette nomination, que de salives versées, que d’encres
coulées.Trois ou quatre raisons justifient la déclination de
l’offre.
Je n’ai jamais été consulté. Même si je sais d’où
venait la suggestion, rassurez-vous, ne venant pas de mon jeune frère Me
Mboligoumba comme plusieurs fois dit.
J’ai été appelé aux responsabilités depuis plusieurs
années, et me trouvant toujours en dehors du territoire national. Les
responsables prenaient toujours soin de me prévenir, de discuter avec moi, mais
cette fois-ci, cela n’a pas été le cas. Je ne connaissais pas la seleka,
ses idées, ni ses acteurs. Le changement s’est fait dans le sang, la
violence, les pillages, les viols. etc…
Ayant des convictions fondées sur des principes et valeurs,
il ne m’était pas possible que je fasse chorus avec les nouveaux maîtres du
pays.
Victimes comme la plupart des compatriotes, car lynché,
humilié et pillé, même après avoir été nommé ministre, et mes proches agressés;
accepter ce poste, fut-il prestigieux et lucratif était féliciter Néron pour ce
qu’il a fait au peuple.
Peut-être qu’on croyait que tout le monde viendrait à la
soupe. En dépit de la disette du moment, j’ai accepté de rester loin du
réfectoire et solidaire du peuple, refusant par la même toute compromission
complice. Car viendra un jour, le temps des comptes. L’on dira,
certainement, c’était pour la cause nationale. Oui, sous Pétain, les gens
ont parlé ainsi, et l’histoire a su par la suite où les placer.
Mes médecins n’ont pas été du reste dans cette décision.
Enfin mes enfants m’ont dit : ” Papa, cette fois-ci,
tu penses à nous”. Je leur ai répondu, oui, mais je vais être utile à mon pays
dans cette circonstance particulière”.
Et j’ai choisi de rester à l’ONU ou réellement, je pouvais
faire quelque chose. Et le passage du PM
N. TIANGAYE a été un succès. La suite ?
Des personnalités onusiennes et européennes ont fait, font
et feront le déplacement en RCA au chevet de son peuple en détresse. Des aides
leurs ont été, sont et seront apportées.
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LNC
Votre très récent départ en tant que Ambassadeur de la
Centrafrique à l’ONU est-il une conséquence ?
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CAD
Oui en partie je m'y attendais. Le
détonateur est que certains marchands d'illusion zélés autour du chef de
l'Etat de la transition, ignorant le contexte dans lequel se trouve notre
pays, lui ont fait croire que je travaillais contre ses intérêts au service
du PM. Ils veulent lui faire subir un camouflet diplomatique au niveau de
la communauté internationale en le faisant venir à la prochaine Assemblée
Générale qui ruinerait le peu de crédibilité dont disposent encore notre
pays et son chef fut-il de la Transition. Ce contre lequel je me suis
opposé et m'opposerai encore même en dehors et loin des Nations Unies. C'est
notre pays après tout.
Par ailleurs que je
passerais mon temps à faire ma campagne pour les prochaines consultations
électorales etc...
Mais une chose est sûre, j'étais en
mission, elle commença un jour et devait prendre fin et le moment est
arrivé.
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LNC
Vous avez une très grande expérience de la politique en
Centrafrique, en ayant été ministre sous le président Patassé, ministre des
relations avec le parlement européen, ministre de l’éducation nationale, député
de l’ADP, l’Alliance pour la démocratie et le progrès, un parcours sans faute,
pour vous, ne pas vous impliquer dans le pouvoir Séléka, est-ce une manière de
vous en démarquer ?
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CAD
Il est clair
que la Seleka ne correspond pas à mes vues, le résultat de sa prise de pouvoir
et de sa gouvernance nous ramènent au moyen Age. Décrédibilisant notre pays qui
ne répond plus aujourd'hui aux standards internationaux de notre temps, 53 ans
après l'accession à la souveraineté internationale.
Par conséquent,
je ne pourrais jamais lui être d'un quelconque appui. J'ai choisi le peuple et
la "légitimité"
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LNC
L’image
diplomatique de la RCA dévalorisée dans le monde du fait des abandons de ses
rares représentations internationales, problèmes d’intendance au Congo, en
France, aux USA, en Egypte, etc…Les ambassadeurs faute de moyens, tirent le
diable par la queue, votre avis là-dessus ?
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CAD
En dehors des
questions, de déficit de moyens (humains, logistiques et financiers), la
diplomatie centrafricaine a généralement été pilotée à vue, SANS ORIENTATIONS
PRECISES sur les grandes thématiques internationales. Si l'on y ajoute le
non-paiement des contributions qui devaient renforcer notre crédibilité et
respect internationaux, le résultat est là. Cependant quand on sait ce que l'on
veut, si l'on s'organise mieux avec le peu de moyens dont on dispose avec une
bonne organisation et gestion avec les méthodes qui en correspondent on peut
s'en sortir. Sans triomphalisme aucun, il suffit de venir voir ou visiter la RCA
aux Nations Unies pour s'en convaincre.
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LNC
Si vous pouviez
passer outre votre prudence de diplomate, pouvez-vous nous dire votre
appréciation sur la situation actuelle de la Centrafrique, surtout du juriste
que vous êtes de par votre formation ?
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CAD
La RCA va mal
très mal. C'est un pays certes, mais plus un Etat, et je pèse mes mots, car un
grand courant a même travaillé pour que, de jure l'on réouvre le désuet Conseil
de tutelle pour s'occuper de son cas. Dieu merci avec l'aide de certains pays
amis mais surtout de l'Union Africaine cette humiliation suprême nous a été
épargnée.
Mais ce n'est
pas une fatalité. Nombre d'Etats ont connu de pareilles voire pires situations.
Nous pouvons nous en sortir, si nous le voulons individuellement et
collectivement.
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LNC
Quelle est
votre vision pour un meilleur Centrafrique ?
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CAD
Un Centrafrique
ou il fait bon vivre, construit sur quatre
piliers :
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LA
RECONSTRUCTION D'UN ETAT DE DROIT;
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UNE EDUCATION
ET FORMATION ADAPTEES AUX REALITE NATIONALES ET UNIVERSELLES AINSI QU'UNE SANTE
ACCESSIBLE A TOUS;
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UNE ECONOMIE
AXEE SUR LA PROMOTION ET LA VALORISATION DES RICHESSES NATIONALES ET INTEGREE
DANS LE COMMERCE INTERNATIONAL
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UN ETAT MODERNE
OUVERT SUR LE MONDE BASE SUR UNE DIPLOMATIE DE
DEVELOPPEMENT,
Mais pour y
parvenir il nous faut des leaders amis de la RCA, visionnaires et volontaristes,
organisés et méthodiques, gérant selon les règles du 21e siècle avec de bonnes
évaluations.
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LNC
Etant avec Mme
Andet-Koyara les centrafricains non seulement les plus expérimentés à
l’international, mais aussi les plus connus et les plus crédibles, avez-vous des
projets personnels à court terme ?
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CAD
Mon projet
personnel à court, moyen et long terme c'est servir le peuple centrafricain et
notre pays. Et pour l'immédiat c'est aider à la sécurisation du pays, et je suis
heureux du quasi aboutissement de l'initiative de l'UA, la MISCA qui sera
appuyée par les NU j'en suis persuadé. Dieu merci nous sommes en train de
convaincre deux grands Etats Africains à intégrer le processus (je ne les
nommerai pas) par l'envoi des troupes.
Apres, il nous
faut restructurer nos forces de défense pour prendre la relève, même si cela
n'est pas facile. Faire sortir la crise centrafricaine de l'oubli, intéresser le
monde et la communauté internationale a la cause centrafricaine, rechercher
auprès des bailleurs l'aide alimentaire nécessaire; car il y a un réel risque de
catastrophe alimentaire. Et là, j'appuierai à 100/100 les initiatives de la
Ministre Marie Noëlle KOYARA.
Comptons
d'abord sur nos capacités d'organisation interne, de cela dépendront l'adhésion
et l'accompagnement des autres.
Quand on aura
résolu ces priorités, chacun pourra retrouver sa chapelle. Et comme aimait dire
F. MITTERAND, chaque chose en son temps.
Le moment venu, j'aviserai.
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LNC
Vous pourrez
être dans la course aux prochaines présidentielles, seul ou avec un ou des
partenaires ?
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CAD
La RCA et son
peuple ont reçu un grand coup. Mais ils ont su résister et rester
debout.
Le plus grand
bien de la Séléka a été de créer et de faire se développer dans le péril et
l’adversité une grande conscience patriotique et nationale sans faille. En
témoignant, les manifestations et l’élan de solidarité en cours. Unis nous
vaincrons. Travaillant ensemble nous parviendrons à faire de notre pays un Etat
où il fait bon vivre. C’est possible, c’est faisable, avec l’Aide de Dieu, si
nous le voulons tous.
Travaillons en
créant les conditions pour refaire de notre pays un havre de paix où il fait bon
vivre, au moins pour nos enfants.
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LNC
Si vous aviez
un mot à dire aux centrafricains qui vous lisent pour les
réconforter.
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CAD
Bonne chance à
la nouvelle RCA, unie et prospère. J’y crois dur comme
fer.
(Diffusion
LNC, 26 juillet 2013)