27 avril 2015
Le
forum pour la réconciliation ou énième trahison du bon peuple de
Centrafrique ?
Désespérément,
à tâtonnant, dans une indescriptible improvisation, guidés par le seul souci
d’accomplir un calendrier et de boucler coûte que coûte un agenda inavoué, les
élites de notre pays, autrement dit les gouvernants, la classe politique
traditionnelle ainsi que nos conformistes intellectuels ont dans une communion
générale décrété un forum national contre la volonté du bon peuple de
Centrafrique, lequel réclame d’abord et avant toute chose la
justice.
Il ne
saurait y avoir de réconciliation ni de paix sans la justice. Indiscutablement,
en d’autres temps et à certains moments, le forum est un formidable outil de
gouvernement. Il doit être utilisé à bon escient pour gouverner. C’est un outil
démocratique qui doit être entretenu en permanence par les gouvernants pour la
cohésion sociale et la concorde nationale. Si le fait d’organiser un forum
participe d’un sentiment louable, il est surtout préférable de l’organiser au
moment opportun pour mieux le circonscrire, sinon, on ne l’organise pas. Il n’y
a pas pire résultat en matière de conséquences ou de retombée sociale que celui
de poser des actes politiques incomplets et inachevés. Or, les éléments
objectifs et les cafouillages de ces derniers jours sont annonciateurs d’un
échec. Le traumatisme d’un tel échec risquerait de plomber davantage le
processus de réconciliation vers lequel nous voulons tendre. Les conséquences
seront incommensurables à termes. La nouvelle Centrafrique doit se reconstruire
sur des bases saines. Devrions-nous léguer nos erreurs aux générations
futures ? Sommes-nous si peu courageux et si peu responsables au
point de laisser un lourd héritage à nos enfants ? La réconciliation nous
interdit t’elle de dire la vérité ? D’obtenir d’abord réparation ? De
nommer les choses par leur nom ? Si nous en sommes arrivés là, c’est parce
que nous n’avions pas voulu régler complètement et d’une manière définitive
certains problèmes politiques qui se sont posés par le passé. A présent, il va
falloir crever l’abcès et le vider
complètement de toute cette puanteur nauséabonde pour ne plus avoir à revivre ce
que nous avions connu. Gouvernants,
intervenants, représentants et intellectuels ne trompez pas le bon peuple de
Centrafrique ! Soyez du bon côté, celui du bon et généreux peuple de
Centrafrique.
Aujourd’hui,
les gouvernants, toute la classe politique traditionnelle et les élites intellectuelles ont accordé
leur violent pour distraire le bon
peuple de Centrafrique déjà meurtri dans son âme en imposant un hypothétique
forum. Rares sont les voix qui se sont levées pour dénoncer le caractère
inopportun de ce forum. Les seuls points qui fassent débat sont les quotas de place qui sont
réservées aux différentes entités, la désignation de leurs représentants, la
participation ou non des anciens présidents, les primes... Qu’en est t-il
finalement des centrafricains ? Le forum de réconciliation s’il y’a devrait
être complètement inclusif. Il doit être ouvert à tous les centrafricains sans
exception qui désirent s’exprimer. Ils ont la légitimité pour le faire du fait
qu’ils ont été les innocentes
victimes d’un conflit qui n’avait pas lieu d’être. Si le forum tel qu’il est
proposé, comme n’étant qu’un espace d’échange, de négociation et de compromis,
alors, nous sommes en droit de dire objectivement qu’il n’a pas de sens. C’est
une trahison du bon et généreux peuple de Centrafrique. Malheur à celui qui le
dira en premier au risque d’être
taxer d’ennemi de la paix. La vérité ait que les bourreaux d’hier se sont
transformés en accusateurs et veulent camoufler ou étouffer la volonté du
peuple.
La situation
de post-conflit qui prévaut dans notre pays, l’exigence d’une recherche de
solution franche, sans équivoque et acceptable par la majorité des
centrafricains ôte toute pertinence, tout intérêt au compromis voir à la
compromission qu’offre le forum. Au regard du temps imparti, de la mise à
l’écart de certains acteurs politiques majeurs, du nombre pléthorique des
intervenants, de la franche scission qui existe entre les entités, de la
complexité des thématiques retenues, des objectifs recherchés, des attentes
suscitées, de la logistique approximative, nous sommes en mesure de penser que
nous nous dirigeons inéluctablement vers un échec. L’histoire retiendra que la
faute appartient une fois encore à nos élites qui sont ces gouvernants, cette
classe politique traditionnelle et ces intellectuels devenus au fil du temps des
conformistes. Ils ont accepté contre la volonté du peuple d’organiser un forum
en lieu et place d’une justice qui lui aurait permis de faire son deuil. Comment
peut-il en être autrement ? Nulle par ailleurs dans l’histoire de
l’humanité, ni dans le processus menant à l’édification des nations modernes
a-t-on déjà vu une réconciliation post-conflit se faire aussi rapidement sans
que justice ne soit rendue ? Comme d’habitude, la charrue est mise
avant les bœufs au risque de retarder la véritable réconciliation. Qui donc a
intérêt a trompé les Centrafricains ? Qui donc a intérêt que des solutions
durables et définitives ne soient
trouvées ? Que veut-on
vraiment échanger lors de ce forum ? Avec qui ? Que veut-on vraiment
négocier ? Avec qui ? Pour quels genres de compromis ? S’il est
vrai que le bon peuple de Centrafrique qui a trop souffert a besoin de la paix
pour se reconstruire, il réclame avant tout la justice ici et maintenant. Le
fait de vouloir coute que coute faire asseoir à la même table les bourreaux et
les victimes avant que la justice
ne soit rendue est une insulte à nos morts, à la dignité humaine, à la mémoire
collective. La paix ne saurait se construire sur l’impunité, des débris de
mensonge, des vérités cachées, de fausses excuses, de fausses accusations.
Toutes les vérités doivent êtres dites et les mensonges exhumés pour que la
thérapie soit totale et efficace afin qu’une nouvelle nation, Une et
indivisible, laïque et libre puisse renaitre en cette terre de nos aïeux,
berceau des bantous.
Franck
SARAGBA