Les rebellions et la
création de l’anarchie en Centrafrique
Des viols de femmes et
de filles, des saisis de biens appartenant aux citoyens, des vols d’engins et
d’équipements divers, des agressions sur des personnes, des destructions de
propriétés, des assassinats et autres crimes indescriptibles avaient été
rapportés à travers divers témoignages des habitants et des médias
centrafricains, et, qui avaient eu lieu sur toute l’étendue du territoire
centrafricain, exécutés sans répit par les hommes de cette rébellion Séléka.
Leurs actes été allés au delà du renversement du régime de François Bozizé et
avait abouti à l’humiliation totale des citoyens centrafricains. Enfin, lorsque
la soumission du peuple sera complète, la République Centrafricaine demeurera un
pauvre pays sous occupation et sous les nouvelles idéologies dictées de
l’extérieur aux dirigeants de la rébellion Séléka, même si Michel Djotodia,
président de la transition et son premier ministre Nicolas Tiangaye avaient
récemment pris la décision de dissoudre la Séléka.
Les faits énumérés
ci-dessus illustrent parfaitement les intentions que Michel Djatodia avait
exprimées dans une correspondance que celui-ci adressait à des co-religionnaires
des pays arabes ou du Moyen-Orient pour solliciter des aides financières et
matérielles qui serviraient à sa rébellion, afin de réparer ce qu’il avait
considéré comme des injustices. Il était question pour lui et pour une petite
minorité de “centrafricains” adeptes de l’islam, de prendre le pouvoir à Bangui,
parce qu’ils estimaient que les chrétiens et les animistes centrafricains
avaient longtemps brimé les “arabo-musulmans” et n’avaient pas inclus ceux-ci
dans les gouvernements ou dans les prises des grandes décisions politiques du
pays, depuis son accession à l’indépendance. Cet argument ne tient pas debout si
nous nous permettons de citer les noms de dignitaires musulmans qui avaient
collaboré avec les différents régimes politiques désastreux à Bangui. A titre
d’illustration, nous vous citerons Yérima Mandjo, Ismaïla Nimaga, Mahamat
Salleh, Idris Salao, Karim Méckassoua, Aoudou Paco, Ibrahim Paco pour ne citer
que ces quelques noms qui nous étaient venus à l’esprit. Michel Djotodia n’avait
donc pas dit toute la vérité pour justifier sa demande d’aide. Mais ses parrains
l’avait cru, même si celui-ci avait oublié, pour une raison ou une autre, de
leur dire en substance qu’il se prénommait toujours Michel. Aujourd’hui encore,
celui-ci n’avait toujours pas conclu sa conversion à l’islam. N’est-ce pas
courant dans sa confrérie ou au sein de sa rébellion, d’être à la fois musulman
le soir et chrétien le matin ou vice versa? Selon Michel Djotodia, cette
ambivalence n’avait pas son importance et quiconque pouvait mentir allégrement
pour gagner son pain, au nom de l’islam ou de la sharia dont tout le monde a
peur. D’autre part, ce même Michel Djotodia avait affirmé devant le public qu’il
adhérait totalement aux principes de la démocratie et en faveur de leur
application en Centrafrique. N’est-ce pas tout cela des propos contradictoires?
Est-ce que ces prises de position ne devraient pas être considérées comme une
déclaration flagrante de malhonnêteté de la part de Monsieur le Président de la
Transition? Comment la conférence de Libreville avait pu se convaincre et fait
accepter au peuple centrafricain un personnage avec une telle moralité?
N’était-il pas par ses déclarations un traître à l’unité nationale
centrafricaine? Et celui-ci n’avait toujours pas eu le courage pour s’expliquer
sur ses positions diamétralement opposées et sur les engagements de sa rébellion
qui seraient contraires à l’expression démocratique. Et à ce sujet, l’on
rapporterait que les journalistes centrafricains avaient reçu de grosses sommes
d’argent du ministre Gazambeti pour “oublier” de tirer au clair ces points
embarrassants et anti-démocratiques. Ceux qui avaient soutenu Michel Djotodia et
fait de lui leur président, devraient être bien fiers d’avoir enfin un nouveau
despote musulman avec les qualités de monsieur rocambole. Mais surtout, tous les
parrains politico-religieux de la Séléka seraient en joie de savoir qu’il y
avait enfin en place en Centrafrique, le nouveau Khalife de la transition
islamiste. Et ceux-ci étaient prêts à avancer que la République Centrafricaine
ne pourrait effectuer le grand bond vers son développement qu’à la faveur d’un
gouvernement islamique. Quelques mois seulement d’existence laisseraient déjà
présager d’un avenir désastreux ou de la pire espèce pour le peuple
centrafricain qui sera déchu de tous ses droits.
Si les crimes que nous
avons énumérés plus hauts devraient être considérés comme les conséquences
imprévues de la dite rébellion, nous voudrions cependant faire observer que
toutes ces actions néfastes sur les citoyens, sur l’économie, sur le
fonctionnement de l’administration, sur l’intégrité du territoire et sur la paix
dans ce pays, avaient frappé aux portes du nord et de l’est de ce pays depuis
déjà plusieurs décennies. Malheureusement, les centrafricains n’y avaient pas
porté suffisamment attention.
Si vous faisiez une
lecture rapide de l’histoire de ce pays frontalier du nord, avant et après la
mort de François Ngarta Tombalbaye, vous retiendrez certainement l’histoire
tumultueuse des différentes rébellions qui avaient, entre autre, mis en évidence
les divisions entre les populations du nord de ce pays se disant arabes et
musulmans et les populations du sud de ce même pays, saras musulmans, animistes
ou chrétiens. Il serait intéressant d’identifier clairement l’impact de ces
rébellions sur l’économie de ce pays. Qu’est-ce qu’elles avaient apporté aux
habitants en général? Si ce pays avait eu la particularité d’avoir d’énormes
richesses halieutiques, une agriculture sahélienne abondante, le pétrole et
autre, nous estimons que les bénéfices qui en avaient été tirés n’avaient pas
été judicieusement répartis, puis ré-investis dans le pays et qui auraient
équitablement profité à toutes les tribus ou à toutes les couches de sa
population. Les différentes rébellions qui avaient ébranlé la paix dans ce pays,
sa guerre avec la Libye et une de leurs conséquences, le trafic des armes de
guerre, avaient trouvé, en ces lieux et pendant des décennies, un territoire de
prédilection qui servi alors de couloir de passage pour l’écoulement clandestin
des armes de guerre de différents calibres dans le pays, dans les pays
limitrophes et dans cette vaste région de l’Afrique Centrale. Les profits tirés
de ce commerce s’étaient révélés très lucratifs avec toutes ces rébellions,
anciennes ou nouvelles qui s’éteignaient et se rallumaient comme des feux
follets. Puis, lorsque les querelles s’étaient endormies, faute de nouveaux
financiers, faute de nouveaux chefs de guerre plus combattifs, ou faute de
nouveaux motifs de querelle, à défaut d’une politique de formation
professionnelle et technique dans des domaines autres que celui du maniement des
armes, à défaut d’une politique économique en faveur de la création d’emplois
qui aurait pu être établie par la manne du pétrole, les anciens combattants
toujours armés, les jeunes, et très souvent les adolescents n’avaient pensé
survivre qu’en s’enrôlant volontairement ou pas au sein de groupes armés,
éclectiques qui prétendaient être les meilleurs à offrir les solutions
politiques viables aux problèmes économiques et sociaux de ce pays.
Malheureusement, comme la pratique des principes démocratiques n’existait que
dans les discours élogieux et démagogiques des institutions politiques et des
groupes rebelles, les cris d’appel à l’aide de la population active et ceux de
la jeunesse qui étaient passés par divers camps d’entraînement militaire,
avaient tourné à des cris de frustration et au désespoir. Pour continuer à
exister et à survivre, les anciens combattants des différentes rébellions et les
nouvelles générations qui aspiraient à un meilleur avenir, n’avaient eu pour
choix que celui de rallier n’importe quel nouveau mouvement de rébellion,
n’importe quel énergumène d’une ethnie dite guerrière ou un quelconque fieffé,
enturbanné et ambitieux qui voulait se faire appeler colonel, commandant ou
général et qui avait décidé d’en découdre avec le gouvernement. Leur stratégie
commune consistait à utiliser la manière forte et non la démocratie pour se
faire reconnaître par le régime au pouvoir ou à la rigueur recevoir des
largesses financières comme condition pour faire taire les armes. Le nouveau
créneau pour l’accès à l’emploi dans le pays ne consistait plus uniquement à
aller à l’école ou à apprendre la sagesse dans le coran pour s’instruire, mais
de s’enrôler comme mercenaire et offrir ses services au premier venu qui ferait
reluire l’espoir de récompenses immédiates et innombrables sous forme sonnante
et trébuchante.
Au-delà des frontières
limitrophes du nord-est et de l’est de la République Centrafricaine, vouloir
dresser une chronologie de l’histoire de ce vaste territoire pourrait rappeler à
l’esprit les particularités de la guerre du Darfour et celles de la rébellion
dans le sud du Soudan. Vous vous souviendrez des descriptions, des
photographies, des atrocités qui avaient été rapportées dans les médias pendant
des décennies, avant, pendant ou après le régime du Général Ibrahim Abbud. Vous
vous souviendrez des bombardements aériens ou encore des techniques de la terre
brûlée, opérées par ces hommes armés qui arrivaient par exemple à cheval dans
les villages et qui massacraient femmes, enfants et vieillards sans défense. Ce
pays avait cependant le pétrole mais aussi des prisonniers politiques, des
bidonvilles, certainement des camps de réfugiés, mais il avait également la
misère, entretenue singulièrement par les régimes politiques d’hommes en
majorité musulmans et qui n’avaient toujours pas réussi à éradiquer les maux qui
affecteraient les diverses franges de sa population, et ce, malgré la
prédominance d’une religion officielle musulmane. Mais pourquoi ces deux pays
que nous avons cités, avec leur religion officielle n’avaient toujours pas
réussi à assurer le bien-être pour leurs peuples respectifs? Vous conviendrez
avec nous que l’exclusivité de la pratique de l’islam dans ces pays n’avait
garanti en aucune façon la réussite économique ou la satisfaction des besoins
fondamentaux des populations.
Dans le même temps, à
un moment ou à un autre, les gouvernements de ces deux états voisins s’étaient
mutuellement accusés d’entretenir des groupes rebelles dans des bases arrière
sur leur territoire, et, d’où ces groupes menaient des opérations contre les
troupes gouvernementales. A la longue, grâce aux marchands d’armes, grâce à la
manne pétrolière, et à cause des grandes étendues incontrôlées en bordure des
frontières de la République Centrafricaine, ces deux pays voisins du nord et de
l’est étaient devenus une poudrière, un El Dorado et un poste de recrutement
pour tous ceux qui chercheraient un emploi rémunéré, loin de Ndjaména et loin de
Khartoum.
En Centrafrique et
pendant plusieurs décennies, les responsables politiques avaient, chacun pour ce
qui le concerne, pensé qu’il n’y avait pas de raison particulière de se
préoccuper outre mesure de toutes ces rébellions étrangères et tous ces
massacres qui se passaient loin de Bangui, chez les voisins du nord et du
nord-est et de l’est. Chacun avait oublié que le territoire centrafricain
n’était situé qu’au delà d’une ligne imaginaire que l’on appelait frontière et
qu’il suffisait de faire un pas pour la franchir. Pendant des décennies, les
hommes et les femmes de tous les partis politiques centrafricains, ceux ou
celles qui avaient joué des rôles dans le gouvernement ou encore ceux ou celles
qui avaient été élus pour représenter le peuple au sein d’une assemblée
nationale, ne s’étaient contenté de s’assurer que d’une seule chose; leurs
places autour de la table des profits à tirer ou dans le club national de la
confrérie des corrompus et corrupteurs, capable d’assurer leur participation aux
festins de n’importe quel régime politique. Pourquoi devraient-ils s’occuper du
destin de la population, s’il n’y avait aucune garantie de la pérennité du gain
qu’ils pourraient tirer de toutes les combines juteuses pour profiter du
diamant, de l’or, des défenses d’éléphants et autres ressources naturelles du
pays? C’était cela leur vision de la politique et du patriotisme. Les
centrafricains entraient en politique non pour s’occuper à l’éradication des
maux qui freinent le développement du pays et mettre le bien-être à la portée de
chaque citoyen, mais pour faire mieux que leurs prédécesseurs et profiter de
chaque occasion pour tirer des profits juteux et personnels des postes qu’ils
occupaient. Ce qui expliquerait pourquoi les déclarations époustouflantes de ces
hommes et de ces femmes qui condamnaient les actions du régime politique à
Bangui, devenaient soudain atones quand le régime leur offrait un poste dans le
gouvernement. Ce qui expliquerait la naissance, souvent spontanée, des partis
politiques ou encore l’existence des groupes de rébellion.
Barthélémy Boganda,
son parti politique et ses compatriotes des autres tendances politiques de
l’époque avaient très certainement rêvé de mettre en place un modèle de gestion
publique des affaires du pays, copié sur celui des états modernes d’Europe,
d’Amérique du Nord, d’Amérique Latine ou d’Asie. Il s’agissait d’un modèle qui
aurait compris les grandes institutions de la République à savoir, le peuple
d’abord, puis l’exécutif, le législatif, et le judiciaire. Ils avaient pensé à
un pays dont la destinée ne serait pas uniquement dictée par une ethnie, par
quelques officiers ou mutins de l’armée nationale, par un petit groupe
d’intellectuels, par d’anciens diplômés en manque d’emploi, ou par des bandits
d’où qu’ils viendraient. Ils avaient imaginé un pays qui reposerait sur une
participation politique active de toutes les couches de la population et de
toutes les tribus sans distinction, et, qui serait orienté vers le développement
harmonieux du pays et le bien-être de chaque citoyen.
Et toute cette
histoire des premières années de la naissance de la République Centrafricaine
s’était heureusement déroulée sans effusion de sang de la population. La grande
majorité de la population était animiste avec une large minorité chrétienne et
une petite minorité musulmane. Cependant, dans ce contexte socio-culturel, la
paix avait été acquise entre les diverses communautés, assurée par un état de
droit napoléonais, par une administration centrale séculière placée sous
l’autorité du gouvernement et sous la vigilance de l’assemblée nationale, des
courts de justice et de la société civile. Pendant plusieurs décennies, il n’y
avait jamais eu de grande révolte entre les ethnies, ni entre les communautés
religieuses et dont on se souviendrait; à l’exception de l’ethno-centrisme du
régime d’André Kolingba et de la dichotomie savanier-riverain établie par le
MLPC d’Ange Patassé, vue ainsi globalement. Puis, des phénomènes marquant une
mauvaise gestion des affaires du pays avaient commencé à se manifester, à savoir
les incarcérations politiques; les arriérés des salaires des fonctionnaires qui
persistent encore aujourd’hui; les bourses impayées d’assistance aux étudiants;
la dilapidation des édifices publiques et des infrastructures; l’escamotage des
programmes scolaires; la corruption des autorités publiques; les détournements
des fonds publiques; les meurtres politiques; les grèves des services publiques;
les années dites blanches à l’université et dans les établissements scolaires
qui avaient depuis compromis les standards des diplômes; les hôpitaux et centres
de santé qui étaient devenus des mouroirs.
Aujourd’hui, nous
serons une multitude à nous demander pourquoi la population et son
administration en étaient arrivées à ce stade lamentable d’une sauvagerie
indescriptible commise par la Séléka et rapportée par les médias? Il ne
manquerait à ce tableau “pittoresque” que des actes de cannibalisme ou la
constitution d’esclaves par cette Séléka. Il ne se passe pas un seul jour sans
que soient rapportées les exactions commises par les diverses factions et les
hommes du groupe rebelle Séléka ou ceux qui avaient soutenu le régime bicéphale
de Michel Djotodia et de Nicolas Tiangaye, régime né de la prestidigitation des
centrafricains et de tous ceux qui convoiteraient l’argent du trésor public, la
riche faune, l’or, le diamant, le bois, le réfrigérateur, la télévision,
l’ordinateur, le mobilier de bureau, une chose ou une autre que ce pays aurait
encore dans le ventre. Nicolas Tiangaye et les autres membres de son
gouvernement monté de toutes pièces, étaient en réalité soit des malfaiteurs en
l’espèce, soit s’étaient volontairement associés à des brigands qui avaient
assassiné des citoyens innocents et détruits les réseaux des infrastructures
socio-économiques du pays.
Les différents régimes
politiques, les hommes et les femmes qui avaient animé les débats sociaux et
politiques, avaient transformé un modèle de gestion d’un pays, qui se voulait
efficace et moderne au minimum en une institution mercantile pour construire sa
première villa, pour entretenir un deuxième bureau, pour alimenter des comptes
privés dans les institutions financières du pays ou à l’extérieur au détriment
de l’expansion des fonds du trésor public de l’état. Mais où étaient donc passés
les fonds provenant des assistances bilatérales et multilatérales? Où étaient
passés les impôts générés par l’exploitation des nombreuses ressources
naturelles du pays? Où étaient passés les impôts difficilement collectés auprès
des entreprises et des commerces dans le pays? Ces ressources avaient disparu et
personne n’avait osé en exiger les remboursements, même après les résultats de
nombreux audits de toutes ces malversations. Les procureurs, les inspecteurs
d’état ,chargés respectivement, de faire la lumière sur toutes ces malversations
et chargés des opérations de contrôle et d’audit, devraient se déjuger, à cause
d’un système national de raquette généralisée, établi puis soutenu par chaque
régime au pouvoir à Bangui. Les coupables? Ils oseraient toujours avancer que
les véritables coupables étaient les hommes et les femmes du régime politique
précédent. Chaque fois, les nouveaux arrivés étaient toujours plus flamboyants
que leurs prédécesseurs.
Les farces des
différentes factions politiques au pouvoir à Bangui, les exactions des
rébellions sur la population civile, les agressions des groupes étrangers
infiltrés contre la population civile ou encore les actes délibérés de
brigandage qui avaient été décrits ces dernières années en Centrafrique
ressemblent pour beaucoup à ce que nous pourrions simplement appeler l’anarchie
Le peuple centrafricain encore digne, devrait se révolter contre les
envahisseurs, les politiciens malfaiteurs et les brigands de tout bord, se faire
justice et garder la tête haute.
Yang Mè Zègbè