SAULET –
GALLOTY – BINOUA : et pourquoi pas les autres ?
« Le Chien est parti, il reste les
chiots » pouvait-on lire sur l'une des nombreuses pancartes
Banguissoises au moment de la chute de Bokassa. Le chien, c'était l'empereur
Bokassa 1er et les chiots, ses collaborateurs qui étaient au cœur du nouveau
pouvoir.
Si l'origine de l’échec de la RCA remonte à l’élection de 1946, celle de la
séquence que nous vivons est plus proche de nous. Elle a pour nom :
Opérations CABAN et Barracuda.
L'opération CABAN (Centrafrique et Bangui) est le
nom de code du coup d'état qui a déposé l'empereur Jean Bedel Bokassa 1er le 21
septembre 1979. Elle sera suivie de l'Opération Barracuda, une intervention
extérieure de l'armée française, la 1ère officielle en Centrafrique, en soutien
au président Dacko.
La raison d'être du coup d'état du 21 septembre 1979
était la restauration de la République. Si sur la forme, l'empire n'existe plus,
ce dernier a survécu jusqu'à l’avènement de Djotodia. En effet, à l'empereur, se
sont succédés des hommes du 1er cercle, des princes en quelque
sorte :
1.
David
Dacko : septembre 1979 -
septembre 1981, Prédécesseur de Bokassa, détenu politique à sa chute puis
Conseiller Spécial de Bokassa avec rang et prérogatives de Premier
Ministre ;
2.
André
Kolingba : septembre 1981 – octobre 1993, co-auteur du coup d'état de la
saint sylvestre (c'est lui qui a arrêté le président Dacko et pris le contrôle
de la Radio), DG de la Radio, Chef du BTFAC,
Ambassadeur ;
3.
Ange Félix
Patassé : octobre 1993 – mars 2003 : ministre et premier ministre de
Bokassa de 1966 à 1978 ;
4.
François
Bozizé Yangouvonda : Mars 2003 – mars 2013, le plus jeune général de
l'armée centrafricaine, Garde-Corps personnel de Bokassa, Responsable avec le
général Mayo Mokola et le Colonel Inga de la répression lors des manifestations
du 15 au 20 janvier 1979 dont se servira la France comme prétexte pour lâcher
Bokassa et intervenir 9 mois plus tard pour le déposer.
L’histoire de la RCA depuis le coup d'état du 21
septembre 1979 nous permet d'affirmer qu'on ne pouvait pas restaurer la
République avec ceux-là même qui furent au cœur du régime impérial même si
certains devinrent victime ou otage d'un système qu'ils contribuèrent à créer et
installer. La renaissance en 1979 était un échec. Pour se convaincre de ce que
je dis, revisitons un classique de cette période, parole à Ange Félix Patassé,
Premier Ministre Impérial lors de la présentation à l'Empereur des vœux de
1977 : « votre Auguste Personne n'est pas sans savoir que
l'Afrique est la terre de prédilection des empires, et, dans sa mutation
actuelle, vibre en écho aux grands empires qui furent ceux du Ghana, du Songhaï,
du Mali, du Congo... la naissance de l'empire centrafricain se situe donc bel et
bien dans la plus pure tradition africaine, et traduit aujourd'hui plus que
jamais la volonté souveraine du peuple centrafricain de refaire son histoire,
sauvagement liquidée par plus de soixante-dix ans de colonisation. Oui majesté
impériale, vous êtes le plus illustre de ces héros de la grande famille des
hommes, Symboles de leur temps, et dont le destin se confond avec le destin de
leur nation. »
Le casting de la Restauration de la République a
échoué car les serviteurs
patrimoniaux de l'empire étaient chargés de restaurer un système liquidé par
eux-mêmes. Les castings qui suivirent Dacko 2 jusqu'à Djotodia n'ont servi qu'à
amplifier les contradictions et régler des comptes nés pour la plupart à la cour
impériale.
La France qui a pensé, organisé, financé et exécuté
la fin de l'empire aurait pu et/ou du écarter du « Processus
Restaurateur », ceux-là qui étaient à l'origine du chaos impérial. Elle en
a décidé autrement et aujourd'hui le Centrafrique pâtit, piétine et régresse
jour après jour à cause de ce mauvais casting.
Comprenons-nous, l'affirmation qui précède n'enlève
en rien la responsabilité individuelle de ces personnes et de toutes celles qui
ont eu l'honneur de diriger la RCA depuis septembre 1979. Elle n'exclut pas non
plus les responsabilités des autorités de la transition depuis Djotodia dans
l'absence de résultats. Elle se veut être un point de
départ.
En effet et c'est le point de chute, sur 24 dossiers
de candidature déposés auprès de la Commission Électorale du Conseil National de
Transition, seulement 8 furent retenus en janvier 2014.
17 critères d'éligibilité furent retenus pour être
candidats à la présidence de la Transition :
1. Être de Nationalité Centrafricaine
2.
Être âgé(e) de 35 ans au moins.
3. Avoir une propriété bâtie en
République Centrafricaine
4. Jouir de tous ses droits civiques et d’une
bonne moralité
5. Être compétent, intègre, crédible, rigoureux, capable
d’impulser une dynamique de réconciliation nationale, doté d’un leadership
participatif et justifier d’une expérience dans les hautes fonctions politiques,
publiques ou privées,
6. N’avoir pas été privé de son droit à
l’éligibilité par décision de justice,
7. N’avoir pas été condamné à une
peine afflictive ou infamante,
8. N’avoir pas été condamné à une peine
d’emprisonnement pour vols, escroquerie, abus de confiance, détournement de
deniers publics, faux et usage de faux, corruption et trafic d’influence,
infraction aux lois sur les mœurs et stupéfiants, infractions économiques,
douanières et fiscales
9. N’avoir pas été condamné par contumace,
10. N’avoir pas été un failli non réhabilité
dont la faillite a été déclarée soit par les tribunaux centrafricains, soit par
un jugement rendu à l’étranger mais exécutoire en République Centrafricaine,
11. Ne pas être un majeur incapable ou une
personne sous curatelle,
12. N’avoir pas été Chef d’Etat de
Transition, Premier Ministre Chef du Gouvernement de transition, membre du
Gouvernement de transition, membre du Cabinet du Chef d’Etat de Transition,
membre du Cabinet du Chef du Gouvernement de transition, à compter du 17 janvier
2013
13. Ne pas être membre du Bureau du Conseil
National de Transition, membre du Conseil National de Transition, membre de la
Cour Constitutionnelle de transition, membre du Haut Conseil de Communication de
Transition, membre de l’Autorité Nationale des Élections, leader d’un parti
politique, magistrat en fonction, membre des forces de défense et de sécurité,
14. N’avoir pas été membre d’une Milice ou
d’une rébellion armée durant les 20 dernières années,
15. N’avoir pas été impliqué dans la mauvaise
gestion d’un département ministériel, d’une administration, d’un office ou d’une
entreprise publique en République centrafricaine.
16. Être en règle avec l’administration fiscale
de la République Centrafricaine.
17. Déposer sur le compte du trésor public une
caution d’un montant de deux millions francs CFA, non remboursable pour ceux
dont la candidature est retenue.
Précisons d'entrée, que les critères 12 et 13
répondent déjà au débat sur l'inéligibilité des acteurs de la Transition et à
ceux qui croient pouvoir passer demain entre les mailles du filet du gendarme
électoral nous disons : OUI, tous ceux qui ont occupé une responsabilité au
sein de l’exécutif et du bureau du CNT depuis le 17 janvier 2013 sont
INELIGIBLES aux prochaines élections municipales, législatives et
présidentielles de 20XX.
À la lumière de ces 17 critères, 16 dossiers furent
rejetés dont ceux du Général Guy-José Galloty, du Colonel Anicet Saulet, de
Joseph Bendounga et du Pasteur Josue Binoua. On peut ergoter sur le sujet durant
une décennie mais ces derniers furent EXCLUS LEGALEMENT ET
DEMOCRATIQUEMENT de la compétition probablement à la motivation des critères
12 et 14. On peut comprendre la déception qui fut la leur ainsi que celle de
leurs soutiens. Mais avec ou sans eux, la RCA continue d'exister...Nul n'est
irremplaçable.
A ceux qui disent qu'il n'est pas démocratique
d'exclure légalement d'une compétition électorale, il est temps d'affirmer que
nous avons déjà la JURISPRUDENCE
BINOUA - GALLOTY – SAULET. Ce n'est pas une usine à gaz venue de
Papouasie Nouvelle Guinée ou du Tadjikistan. Il s'agit bien d'une innovation
centrafricaine. Les exclus de janvier 2014 sont Centrafricains comme les autres.
On peut et on a ce droit, de leur faire des reproches en rapport avec des actes
posés et au besoin, les exclure du jeu politique. Mais sont-ils les seuls ?
Étaient (sont)-ils les seuls vrais ennemis ou conjurés de ce pays ? J'ai la
faiblesse de croire que non.
Et c'est là que je confirme mon soutien à l'initiative de Mr Fidèle Gouandjika pour le prochain dialogue politique : «Pour une paix définitive en RCA, tous ceux qui ont été chefs d'état, présidents de la transition, présidents de l'Assemblée Nationale, députés, présidents du Conseil National de la transition, Conseillers nationaux de la transition, premiers ministres, membres du gouvernement et ministres conseillers à la présidence de la république ou à la primature depuis le 13 août 1960 jusqu'aux prochaines élections présidentielles et législatives de 2015 doivent être disqualifiés à vie de fonction présidentielle, gouvernementale et parlementaire ».
La manipulation est déjà en route, tout sera au
minimum. Un dialogue au minimum, des élections au minimum, une résolution de la
crise au minimum.
Nous disons non. Même si cela doit prendre 1 ou 2
mois, nous devons prendre le temps pour évacuer tous les contentieux et baliser
le sentier qui mène à la renaissance.
Le dialogue à venir ne doit pas être l'endroit où
sera débattu le calendrier électoral ou l'impunité à accorder au nom de la paix.
Ce dialogue devra être l'endroit pour concevoir le nouveau Centrafrique. Il ne
devra pas être un aréopage où les 89 partis politiques légalement constitués et
les 20 rebellions viendront caporaliser la destinée du pays. Non, il doit être
l'endroit où le peuple reprendra la parole pour s'affranchir une fois pour toute
des comploteurs qui agissent depuis l'aube de la RCA à visage découvert contre
lui. Pour un parti politique ou groupe rebelle présent, il devrait y avoir 16
citoyens centrafricains.
Si le Liberia et la Libye ont pris des dispositions
légales pour exclure du jeu politique tous ceux qui d'une part furent impliqués
dans la désastreuse guerre civile du Liberia et d'autre part ceux qui, 42 années
durant furent les zélés serviteurs de Kadhafi, il n y a pas de raison que la RCA
qui souffre aujourd'hui de la conséquence d'actes posés par certains de ses fils
et filles, fasse exception en Afrique et dans le monde. NON,
SAULET-GALLOTY-BINOUA ne peuvent pas être les seuls légalement exclus de
compétition électorale en RCA.
Centrafricaine, Centrafricain, vous avez la
parole ; FAITES-SAVOIR VOTRE OPINION.
Moi je dis non au recyclage politique et entre la
légalité constitutionnelle et la paix, je choisis la Paix et
toi ?
Clément De Boutet-M'bamba