SI J’ÉTAIS CATHERINE SAMBA PANZA

 

 

À voir l’énergie dépensée par les propagandistes ou agents publicitaires de certains candidats à la Tour PETROCA, on se serait cru en pleine campagne électorale. Toute passion ou opération de communication commandée ou zèle afin d'être bien vu mis à part, on ne peut pas, mais alors pas du tout, lorsqu'on souhaite vraiment que la RCA renaisse de ses cendres, faire la promotion de Mohamadou aka Abdoul Karim Meckassoua ou de Mahamat Kamoun.


Mohamadou Abdoul Karim devenu Meckassoua, faut-il le rappeler, est celui qui a fabriqué le dépeceur en chef en 2003. Il fut son collaborateur durant sept années aux plus hautes fonctions de la hiérarchie Boziziste. Faut-il encore rappeler que si nous sommes aujourd'hui au fond du gouffre, ce monsieur n'y est pas étranger car non seulement il a fabriqué le dépeceur en chef mais il a aussi participé à sa calamiteuse gestion qui a permis à la Seleka de prendre le pouvoir ? Qu'est-ce qu'il n’a pas fait hier, qu'il peut faire aujourd'hui ? J'entends ici et là parler d'expérience. Laissez-moi rire. L'expérience qui a permis à des vendeurs de thé, de friperie, de pisteurs, de gardiens de moutons et chèvres pour mettre en déroute une armée nationale et prendre le pouvoir ? C'est de cette expérience-là dont on veut faire la promotion pour que le peuple reprenne espoir ?


J'entends ici et là dire que c'est un spécialiste des audits et que c'est cela qui fait peur à CSP et à sa cour qui rechignent à le nommer. Quelqu'un a t'il vu passer sur la place publique un audit fait par Mohamadou durant les sept années de présence au gouvernement et les réformes introduites après ceux-ci ?Je vois déjà les propagandistes de Mohamadou me rétorquer cette affirmation très centrafricaine que l'on entend depuis plusieurs décennies en RCA : « mais Bozizé ne l'écoutait pas ou n'écoutait personne ». Si tel était le cas, pourquoi est-il resté avec lui durant sept longues années ? Quelqu'un a t'il souvenance d'une prise de parole publique de Mohamadou contre un acte politique condamnable de Bozizé ou de ses proches durant ou après ses fonctions ?


Il n y a qu'en RCA où l'on peut faire la promotion de ce qui n'a pas fonctionné. Si vraiment c'est la « fameuse communauté internationale » qui soutient la désignation de Mohamadou, il n'y aurait pas eu besoin de tout ce tintamarre auquel nous assistons depuis 72 heures. Très lié avec le dépeceur en chef qu'il a fabriqué, Mohamadou ne sera jamais accepté par ceux qui ont chassé Bozizé du pouvoir et qui verront par sa nomination, le retour de ce dernier aux affaires. Accepter d'être nommé Premier Ministre parce qu'on est d'abord musulman, est un déshonneur que ses conseillers devraient lui notifier...je ne comprends pas qu'il ne comprennent pas...De grâce, arrêtez de prendre les petits-fils de Karnou pour des demeurés.


Quant à l'autre candidat, Mahamat Kamoun, le simple fait qu'il ait été Directeur de Cabinet de Djotodia constitue un facteur bloquant majeur à sa désignation comme Premier Ministre qu'il n'est pas intéressant d'ergoter sur son cas. Qu'on lui dise de préparer ses dossiers car étant le plus proche collaborateur de Djotodia, il sera appelé à témoigner à la CPI.


Soyons sérieux un instant, s'il faut « OBLIGATOIREMENT » nommer un Premier Ministre sur sa seule qualité de « MUSULMAN », il y a dans ce pays au moins 675.000 musulmans présents dans les seize préfectures, dans la diaspora ou travaillant dans des organisations internationales ou dans les missions et représentations diplomatiques centrafricaines à l'étranger. Un éventail large pour peu que l'on veuille prendre le temps pour faire un tri sérieux et non sous pression.


Si j'étais Catherine Samba Panza, j'arrêterai toute cette comédie. Onze entités reçues, chacune avec un nom pour le PM et trois pour les ministres. Tel un attrape-nigaud, tout le monde est tombé dans le piège et une fois encore, c'est le pays qui est paralysé. Je l'avais dit il y a une dizaine de jours : « NZAPAYEKE KANGA BE TI MO ALLELUIA, YE SO A WARA TIANGAYE, GBANDA A WARA MO ». Il ne fallait pas aller à Brazzaville, car le piège se refermerait sur lui et dans cette dynamique, ralentirait la république. Revenu de Brazzaville, il a qualifié ceux qui ont dit non au voyage touristico-politique d'antipatriotiques. Et bien lui en a pris, on l'a démissionné.

Deux semaines pour se partager la RCA de l'après-Brazzaville. Pendant ce temps, plus personne ne parle du dialogue qui devrait déjà commencer et dont la grande messe aura lieu en octobre ou novembre c'est à dire dans deux mois. Et c'est là que si j'étais Samba Panza, j'aurai fait comprendre à tout le monde qu'allant au dialogue dans deux mois, il est utile de garder l'actuel gouvernement jusqu'à la fin du processus car dans 4 mois, il n’y aura pas d’élections en RCA et qu'il faut trouver un nouveau cadre institutionnel pour la nouvelle transition avec obligatoirement une nouvelle équipe gouvernementale à la clé. Que gagnerait-on à nommer un Premier Ministre maintenant alors que dans deux mois, le dialogue le démettra obligatoirement ?

Un cousin me faisait remarquer il y a quelques semaines que : « la RCA est en crise mais tout le monde veut devenir Président, Premier Ministre ou Ministre, cela veut dire que yé ti tengo ni a yéké da » A voir toute la propagande organisée pour accéder à la tour PETROCA même pour deux mois seulement, on est autorisé à croire qu'il y a vraiment à manger là-bas d'où cette orgie propagandiste.


On nous avait dit ; virons Bozizé, la RCA sera une vraie démocratie. On nous a dit virons Djotodia et Tiangaye et la paix reviendra, maintenant on nous dit qu'il faut nommer un Premier Ministre sur sa première qualification qui est son appartenance à un culte. Depuis décembre 2012, la situation ne fait que s'empirer, chaque jour semble nous approcher du moment où le pire se produira. Alors que depuis un mois et demi la RCA est paralysée par Brazzaville et la gestion de l'ordre politique censé y découler, le pays continue de mourir. On tire et tue à Boyrabe et la bataille de Bangui entre Antibalakas dont j'avais parlé il y a quelques mois semble devenir réalité. À Batangafo, Bambari, chaque jour par dizaine la mort est donnée à nos frères et sœurs pris au piège dans un conflit qui n'a que trop duré et qui s’éternise parce qu'au centre des décisions et du pouvoir, les gens ont la tête ailleurs, ils ont perdu le nord.


La solution à l'impasse institutionnelle ne se trouve pas dans le passé, Mohamadou aka Abdoul Karim Meckassoua et Mahamat Kamoun ont chacun participé à la liquidation de la RCA et sont exclus d'office du processus refondateur, si quelqu'un pouvait transmettre ce message à Samba Panza.

 

Clément De Boutet-M'bamba

(09/08/2014)