Après une annonce du départ imminent de la force libyenne, le président Patassé consulte Tripoli et Lomé : Abdoulaye Miskine doit s'éloigner
Une pomme de discorde s'est glissée durablement dans l'affaire Bozizé, ensuite s'est installée une brouille mettant au premier plan les agressions et massacres attribués à un "déserteur tchadien" réfugié dans la région frontalière de Centrafrique. Il s'agit des actions sporadiques et meurtrières qui seraient conduites par "Abdoulaye Miskine" qui ne serait pas "Abdoulaye Miskine", mais simplement un militaire centrafricain du nom "Martin Koumtan-Madji" selon l'intéressé et l'entourage du président Patassé.
Mais pourquoi cet éloignement soudain de Miskine pour le Togo ? A-t-il été accusé et jugé par une Cour centrafricaine ? Ou reconnu indésirable au point de partir en exil ? Et sous quelle identité ? Le Tchad pourrait-il se satisfaire de cette solution et la Libye en conséquence réexaminerait-elle sa position ? Autant de questions troublantes qui se posent. Ce qui est certain, la population centrafricaine comme une fatalité, vit au ralenti, dans l'incertitude et vaque tous les jours à enterrer ses morts dans un dénuement total.
BANGUI, 12 oct (AFP) - 17h04 - Abdoulaye Miskine, chef de la force spéciale chargée de sécuriser le nord de la Centrafrique, et au centre de la crise tchado-centrafricaine depuis plusieurs mois, va être prochainement "éloigné du territoire centrafricain, a indiqué samedi à l'AFP une source proche de la présidence à Bangui.
Le président centrafricain, Ange-Félix Patassé, en visite jeudi à Lomé (Togo) "a obtenu du président (togolais) Gnassingbé Eyadéma que son pays accueille Martin Koumtan-Madji, alias Miskine", a indiqué cette source.
"Cet éloignement devrait se faire dans un délai d'un mois", a-t-elle précisé.
Un sommet extraordinaire des chefs d'Etat d'Afrique centrale, le 2 octobre à Libreville, avait décidé de l'envoi "dans un délai d'un mois" d'une force multinationale africaine en Centrafrique et préconisé l'éloignement d'Abdoulaye Miskine, accusé par N'Djamena d'être un ancien rebelle tchadien responsable d'exactions et de l'ex-chef d'état-major de l'armée centrafricaine, le général François Bozizé, réfugié au Tchad depuis novembre
La protection que le Tchad a accordé au général Bozizé, soupçonné par Bangui d'avoir comploté contre le régime du président Patassé, est à l'origine de la crise tchado-centrafricaine, qui a débouché ces derniers mois sur des affrontements meurtriers à la frontière entre les deux pays.
Abdoulaye Miskine est pour sa part accusé par N'Djamena d'être un ancien lieutenant du chef rebelle tchadien Laokein Bardé, ce que contestent Miskine et Bangui qui le présente comme un officier centrafricain à la tête d'une "force spéciale", chargée de sécuriser la région nord de la Centrafrique.
Les autorités centrafricaine sont par ailleurs à la recherche d'une "solution" pour les éléments de cette "force spéciale", qui rassemble entre 200 et 300 personnes, a affirmé une source militaire centrafricaine ayant requis l'anonymat.
"L'éloignement d'Abdoulaye Miskine au Togo est imminent", a assuré à l'AFP un responsable du Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC, au pouvoir), le parti du président Patassé.
"Cela répond non seulement aux recommandations du sommet de la CEMAC (Communauté économique et monétaire d'Afrique centrale), mais aussi à la volonté du MLPC de réserver un accueil chaleureux au président (tchadien) Idriss Deby", qui a promis, au sommet de Libreville, une prochaine visite à Bangui, a ajouté sous couvert de l'anonymat ce responsable.
Le président centrafricain, Ange-Félix Patassé, au pouvoir depuis 1993, a vécu de 1982 à 1992 en exil au Togo. Son épouse, Angèle Patassé, est par ailleurs de nationalité togolaise.
LOME, 10 oct (AFP) - 19h10 - Le président centrafricain, Ange-Félix Patassé, est arrivé jeudi à Lomé pour une visite de 24 heures, durant laquelle il doit rencontrer son homologue togolais, Gnassingbé Eyadéma, a indiqué un porte-parole de la présidence.
Les deux chefs d'Etat devraient notamment aborder la question de la crise en Côte d'Ivoire, confrontée à une insurrection de militaires rebelles depuis le 19 septembre.
Le président centrafricain est arrivé de Libye, où il s'était rendu mercredi pour un entretien avec Mouammar Kadhafi.
M. Eyadéma s'était lui-même rendu en Libye le 26 septembre dernier pour une visite de travail et des discussions avec le colonel Khadafi.
TRIPOLI, 9 oct (AFP) - 22h22 - Le président centrafricain Ange-Félix Patassé est arrivé mercredi soir à Tripoli et s'est aussitôt entretenu avec le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, a indiqué l'agence officielle libyenne JANA.
Les deux dirigeants ont examiné "les moyens de renforcer les relations bilatérales et de soutenir l'Union africaine", a ajouté JANA sans autres précisions.
De source proche de la présidence centrafricaine, on avait indiqué que M. Patassé était accompagné de son ministre des Affaires étrangères, Agba Otikpo Mé zo dè, et de son conseiller spécial, Joseph Vermont Tchendo. Les motifs de sa visite en Libye n'ont pas été précisés.
Les autorités tchadiennes avaient annoncé, le 26 septembre, le prochain retrait du contingent militaire libyen déployé à Bangui, affirmant que le colonel Kadhafi en aurait informé lui-même le président tchadien Idriss Deby.
Cette annonce a été violemment contestée quelques jours plus tard par la présidence centrafricaine, qui a dénoncé les accusations "fantaisistes" proférées par "certains ennemis de la RCA".
En Libye, les responsables sont restés muets sur cet éventuel retrait.
Un sommet des chefs d'Etat d'Afrique centrale, organisé le 2 octobre à Libreville pour mettre un terme à la crise tchado-centrafricaine, avait abouti à une inattendue réconciliation entre les deux présidents. Ce sommet avait décidé de l'envoi en RCA d'une force multinationale africaine pour sécuriser la frontière et assurer la sécurité du président centrafricain.
Environ 200 soldats libyens assurent déjà la sécurité personnelle du président Patassé depuis qu'il a été victime d'une tentative de coup d'Etat le 28 mai 2001.
Cette présence inquiète depuis lors N'Djamena qui entretient des relations complexes et ambiguës avec son puissant voisin du nord.
Actualité Centrafrique de sangonet - Dossier 11