PARIS, 31 oct (AFP) - 15h45 - L'intransigeance et le refus de dialogue du président centrafricain Ange Félix Patassé est à l'origine des troubles à répétition qui secouent Bangui, estime jeudi l'ancien Premier ministre Jean-Paul Ngoupandé.
Q: Comment expliquez-vous la succession de rebellions et de tentatives de coups
d'Etat qui, d'année en année, secouent la Centrafrique depuis 1996?
R: C'est une situation due essentiellement à l'intransigeance et au refus de
dialogue du président Ange Félix Patassé. Les tensions, qu'elles soient
ethniques, politiques ou économiques ne ne doivent pas se gérer dans la violence
mais par des discussions patientes. M. Patassé doit comprendre qu'il doit
discuter avec ses compatriotes. Depuis la première mutinerie de 1996, il y a eu
de nombreux rendez-vous manqués. Plusieurs accords ont été signés, puis remis en
cause. Les Nations unies (MINURCA) sont arrivées en 1998, et sont reparties en
2000 en croyant avoir tout réglé. Mais des troubles ont à nouveau éclaté.
Q: Mais comment se fait-il que l'intransigeance du président Patassé perdure à
ce point, et comment, malgré les nombreux troubles, arrive-t-il à se maintenir
au pouvoir?
R: A mon avis, il y a deux raisons. La première est interne: il ne faut pas
sous-estimer la responsabilité de l'opposition, dans la mesure où, elle aussi,
est piégée par l'émiettement tribal, par le positionnement de type tribaliste.
Il n'y a pas un véritable front uni, il y a trop de tactiques individuelles,
alors cela laisse un vaste champ pour la manoeuvre (de Patassé). L'opposition
doit aussi former un front uni et crédible, et formuler des propositions
démocratiques. Nous sommes une quarantaine de partis politiques pour près de 4
millions d'habitants. Il ne faut pas attendre que les solutions viennent de
l'extérieur.
L'autre raison est extérieure : le président Patassé a des +associés extérieurs+. Il est aidé par la Libye et le Mouvement de libération du Congo de Jean-Pierre Bemba. Mon expérience des interventions africaines m'a enseigné qu'il y a toujours du "business" derrière. Bemba fait ses affaires à Bangui: l'or, les diamants, le café, les hydrocarbures.
Q: Vous être l'auteur d'un livre "L'Afrique sans la France". Précisément, dans
votre pays, le France a retiré le contingent militaire qu'elle entretenait, et
la Libye s'est substituée à elle, qu'en pensez-vous?
R: La France s'est désengagée de l'Afrique ces derniers années. La situation est
trop grave sur le continent pour un désintérêt et je suis de ceux qui pensent
que la France doit se ré-impliquer. Je sens un frémissement en ce sens, qui
gagnerait à être précisé et concrétisé.