BANGUI, 13 mai 2003 (AFP) - 9h18 - Le nouveau pouvoir centrafricain veut accroître la production de diamants, deuxième ressource du pays, après avoir assaini le secteur marqué jusqu'alors par la fraude et des pratiques très personnelles de l'ancien président Ange-Félix Patassé, selon les nouvelles autorités.
"L'objectif premier est d'augmenter la production mais il faut d'abord assainir le secteur", a déclaré lundi à l'AFP le ministre centrafricain des Mines, Sylvain Ndoutingaï.
"A notre arrivée (après le coup d'Etat du 15 mars), nous avons trouvé une situation chaotique avec la complicité des autorités du pays: des textes contradictoires, des autorisations personnelles d'exploitation accordées en violation du code minier au niveau de la présidence de la République, etc.", a expliqué M. Ndoutingaï.
"Aucune société n'avait le permis d'exploitation prévu par la loi. Certaines n'avaient même pas de permis de recherche", a-t-il poursuivi.
Ces autorisations personnelles étaient délivrées par M. Patassé "à un milieu restreint, à des fins personnelles et ne rapportaient rien à l'Etat", a ajouté M. Ndoutingaï, un officier de 30 ans, entré en rébellion au côté du général François Bozizé, nouvel homme fort de Bangui.
Pour cette raison, le gouvernement a décidé, le 14 avril, la suspension de l'exploitation pour la trentaine de sociétés du secteur, à l'exception des artisans, dans l'attente d'un examen au cas par cas.
En revanche, les concessions dont bénéficiaient la société Colombe Mines, liée à l'ancien président, et celle de son beau-frère, ont été réintégrées dans le domaine de l'Etat. "Tout était exploité à titre personnel", a assuré le ministre, neveu du général Bozizé. Ces deux concessions représentaient "80% du domaine minier" de Centrafrique.
"Il faut également mettre au clair les textes et ensuite, les faire respecter", a-t-il estimé. Des Etats généraux des mines sont prévus en ce sens début juin. "Quand le terrain sera déblayé, on pourra faire venir des investisseurs sérieux", a-t-il indiqué.
"L'exploitation des diamants reste un domaine privé. L'Etat se contente de réglementer, contrôler et percevoir ses taxes", a-t-il ajouté.
La Centrafrique devrait adhérer prochainement au processus dit "de Kimberley", soutenu par les Nations-unies. Ce processus prévoit une certification et une traçabilité des diamants afin de lutter contre "les diamants de la guerre", soumis à un embargo.
"Il nous reste un dernier accord à signer. Une mission Kimberley est attendue en RCA du 10 au 16 juin", a précisé M. Ndoutingaï.
La Centrafrique exporte officiellement environ 500.000 carats par an. Mais les diamants arrivant en réalité sur la place d'Anvers (Belgique) en provenance de Centrafrique atteignaient au moins le double en raison de la fraude, selon les experts.
La traçabilité imposée par le processus de Kimberley et un suivi plus rigoureux des nouvelles autorités devraient mettre un terme à ces incohérences, estiment-ils.
Enfin, le ministre des Mines a estimé que davantage de Centrafricains devaient investir à tous les niveaux la filière minière, actuellement largement contrôlée par des étrangers. "C'est un secteur qui peut fournir de nombreux emplois alors que tant de jeunes sont au chômage", a-t-il relevé.
Le diamant centrafricain est d'excellente qualité et très recherché par les joailliers. Représentant environ 45% des exportations, le diamant est la deuxième ressource de la Centrafrique après le bois.