Ces morts. Qui sont donc les responsables? Un mea maxima culpa qui ne satisfait pas le peuple
Le dialogue national ne servirait à rien si des militaires centrafricains, des civils ou autres baroudeurs, soupçonnés d’avoir commis ou non des crimes, avaient enfin accepté l’idée de ces assises, dans le seul dessein d’y trouver le forum nécessaire pour se laver de tous les crimes crapuleux qu’ils avaient commis, en cherchant à renverser Patassé et son régime. Si Patassé est depuis parti, le peuple, lui, est toujours là, endurant toujours toutes les souffrances et les deuils dont ces militaires et autres auraient été les auteurs.
La confession ou la reconnaissance publique des forfaits que des officiers militaires, centrafricains, avaient commis pour des raisons qui leur étaient légitimes, ne devraient pas autoriser leur absolution par une autorité quelconque. Le peuple devrait prendre acte et laisser la justice indépendante faire le travail qui est prescrit par le code judiciaire et autres textes juridiques qui n’avaient pas encore été abolis par Bozizé, comme il l’avait fait de la Constitution. Verser des larmes chaudes devant une assemblée ne siginife point se voir offrir une autre occasion pour prêter à nouveau le serment de servir la patrie centrafricaine. Le serment initial qu’ils avaient prêté, avait déjà été foulé aux pieds par ceux-là même qui avaient célébrer en grande pompe cet engagement à servir au sein de l’armée centrafricaine et à protéger le peuple contre l’ennemi. Malheuseusement ces ennemis du peuple centrafricain s’étaient revélés être ces officiers et ces soldats eux-mêmes.
Si Patassé et Bozizé avaient en leurs âmes et consciences, amnistié ces criminels, l’on serait bien en droit de se demander dans quels comptes ou dans quelles rubriques ces mêmes Patassé et Bozizé avaient décidé de ranger tous les morts, tous les viols, tous les vols et toute les destructions des infrastructures administratives du pays? Avaient-ils simplement décidé de passer une grande croix sur ces sujets épineux, difficiles et embarassant, en faisant croire à la vertue d’une quelconque réconciliation nationale? Vous observerez que ces amnisties étaient en réalité la démonstration d’une vue très courte de cette justice que nos hommes politiques prétendent rendre, sans vraiment en mesurer la portée.
Après avoir créé le désordre, ces fauteurs de trouble avaient pris la foudre d’escampête, réclamant au passage le statut de réfugié politique auprès du HCR ou de pays amis, pendant que les femmes et les enfants, innocents, étaient laissés à eux mêmes et payaient les pots cassés. Ne trouvez-vous pas que chaque militaire impliqué devrait rendre compte de ses actes à la justice et au peuple? Tout aurait été à l’honneur de ces officiers et soldats, s’ils avaient eu le courage d’exiger que justice soit rendue et de passer devant une cour de justice, militaire ou civile, afin d’établir leurs innocences ou leurs responsabilités, et, s’il y a lieu, de payer les dettes morales qu’ils doivent à la société centrafricaine toute entière qui souffre encore des conséquences des mutineries, du grand banditisme qui en avait résulté et des coups d’état à n’en plus finir. Devrait-on faire l’amalgame dans la “république” de Bozizé entre les rôles et prérogatives de la cour de justice et de ceux des assises du dialogue national? Au lieu d’autoriser au peuple et au monde entier, le privilège d’être les témoins d’actes honorables, ces militaires d’un autre genre avaient misérablement demandé clémence au public qui participait au dialogue national, avait-on lu. Si ceux-ci avaient procédé de cette manière honorable, cela aurait pu donner à leurs enfants et petits enfants l’occasion d’apprendre le sens profond des valeurs civiques et morales de la société civile et de l’institution militaire. Mais, ces officiers avaient, à leur convenance, oublié ce qu’une armée digne de ce nom appelle le code de l’honneur. Et les larmes de crocodile ne réussiront jamais à laver ces soldats des crimes qu’ils avaient commis et dont souffre encore le pays.
Des hors-la-lois, des truands et des assassins avaient été graciés par Bozizé, comme l’avait fait Patassé avant lui. Ces décisions politiques que ceux-ci avaient prises d’amnistier ces crminels à tour de bras, avaient fini par faire croire au public que la justice n’existerait plus en Centrafrique, et, occultent le sens de la responsabilité civique de chaque citoyen, quel qu’il soit, vis à vis de la société centrafricaine et de ses institutions (si elles existent encore!). Voulez-vous parler de justice? Mais il y en a point en centrafrique. Chaque fois qu’un régime essaie d’évoquer le terme justice, chacun s’indigne et parle de l’orchestration d’une chasse aux sorcieres. Le citoyen devrait-il donc croire qu’il est capable de commettre un crime quelconque et penser que la faiblesse du système judiciaire et la déconfiture de l’ambiance politique lui permettrait de s’en sortir impuni? Si une vértitable démocratie existait dans ses lettres et dans ses applications, cette perpétuelle anarchie qui détruit le pays n’aurait pas été de mise. Si vous aviez suivi l’histoire récente des amnisties en Centrafrique, vous auriez observé qu’aucun parti politique, aucun homme politique ne s’était élevé contre ces mesures présidentielles d’amnistie pour en contester son caractère nuisible à la bonne marche des affaires du pays. Savez-vous pourquoi? Parce que chacun y trouvait son compte. Un frère, un oncle, un cousin, malhonnête à sa manière, était passé ainsi à travers les mailles du filet de la justice. Un gbaya, un yokoma, un banda, un mandja, un ngbugu, un ngbaka, etc. avait été relaxé. Tout le monde devrait être heureux, n’est-ce pas!. Dans la rue, ces criminels seraient redevenus des citoyens libres, prêts à perpétrer les mêmes exactions à la prochaine occasion. Dites-moi donc qu’est-ce qui les en empêcherait?
Jean-Didier Gaïna
Virginie, Etats-Unis d’Amérique