Le Conseil de sécurité "préoccupée" par la reprise des tensions en Centrafrique - Le Communiqué
L'ONU appelle gouvernement et opposition au dialogue en Centrafrique
Le Conseil de sécurité de l'ONU a appelé mardi le gouvernement de Centrafrique et l'opposition à apaiser les tensions qui menacent la réconciliation nationale engagée en 1998 après des mutineries militaires.
Le Conseil a exprimé "sa profonde préoccupation" face à la dégradation de la situation en Centrafrique en proie à une grave crise politique et sociale et déstabilisée par le conflit voisin en République démocratique du Congo (RDC).
Il demande ainsi au gouvernement comme à l'opposition de contribuer "à l'apaisement de la tension actuelle".
Les quinze membres du Conseil ont adopté une déclaration présidentielle en ce sens, à l'issue d'un débat public sur la situation dans ce pays qui est l'un des plus pauvres du continent.
La Centrafrique a été le théâtre de mutineries militaires à répétition en 1996 et 1997. Après une mission qui a aidé à rétablir la paix entre 1998 et février 2000, l'ONU a ouvert un Bureau des Nations Unies pour la consolidation de la paix (BONUCA) qui aide le gouvernement à poursuivre les réformes politiques et économiques.
L'opposition réclame la démission du président Ange-Felix Patassé, réélu pour six ans en septembre 1999, et les fonctionnaires sont en grève depuis début novembre pour obtenir le paiement d'au moins 12 mois d'arriérés de salaires.
L'afflux de réfugiés dûs à la guerre en RDC et l'interruption de la navigation sur le fleuve Oubangui ont aussi fragilisé l'économie centrafricaine.
Ces tensions "font de la République centrafricaine le +ventre mou+ de la sous-région et compromettent sérieusement les chances d'y renforcer la paix et la stabilité", a déclaré au Conseil le représentant de l'ONU en Centrafrique, Cheikh Tidiane Sy.
Il a toutefois affirmé que l'opération de paralysie du pays lancée vendredi par les syndicats avait été "un échec certain" après que le gouvernement eût annoncé qu'il allait payer trois mois d'arriérés de salaires.
Cela ouvre la perspective d'un "véritable dialogue" pour le réglement de la crise, a-t-il ajouté.
Le Conseil insiste sur le fait "qu'il appartient d'abord aux Centrafricains de trouver la volonté politique indispensable à la réconciliation nationale".
Mais il appelle également les pays donateurs à soutenir financièrement, comme ils s'y étaient engagés lors d'une conférence en mai dernier à New York, les efforts de consolidation de la paix en Centrafrique.
L'investissement de la communauté internationale risque d'avoir été fait en pure perte pendant des années "si une aide d'urgence n'est pas apportée aux autorités centrafricaines", a plaidé Cheikh Tidiane Sy.
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Le Conseil de sécurité "préoccupée" par la reprise des tensions en Centrafrique.
Dans une déclaration présidentielle à l'issue de consultations, le Conseil de sécurité de l'ONU a exprimé aujourd'hui sa "profonde préoccupation" face aux tensions politico-sociales qui se sont récemment "avivées" en Centrafrique, et invité le gouvernement de ce pays à "prendre des mesures concrètes pour la mise en oeuvre des réformes économiques et l'apaisement des tensions sociales.
Après avoir souligné qu'il appartenait aux Centrafricains de "trouver la volonté politique indispensable" à la réconciliation nationale, les membres du Conseil appellent les donateurs internationaux, en particulier les institutions bancaires de l'ONU, à continuer de soutenir les efforts économiques de ce pays.
Lors des consultations, l'émissaire de l'ONU en Centrafrique, Cheikh Tidiane Sy, a notamment qualifié la République centrafricaine de '"ventre mou" de la sous-région, en raison des vives tensions politico-sociales qui y règnent et de l'incidence négative de la guerre au Congo démocratique sur la paix et la stabilité dans ce pays.
Le Communiqué de Presse : CS/2096
CONSEIL DE SECURITE: L'ABSENCE DE DIALOGUE POLITIQUE ET L'IMPACT DU CONFLIT AU CONGO-KINSHASA, IDENTIFIES COMME OBSTACLES A LA STABILITE DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE
L'ONU en RCA est encouragée dans ses efforts
A l'issue de son débat sur la situation en République centrafricaine (RCA), le Président du Conseil de sécurité, M. Kishore Mahbubani (Singapour), a lu une déclaration par laquelle les membres du Conseil félicitent le Bureau d'appui des Nations Unies pour la consolidation de la paix en RCA (BONUCA) et accueillent favorablement les nouveaux progrès réalisés, notamment en matière de désarmement et de restructuration des forces de sécurité et de défense ainsi qu'en ce qui concerne le respect des droits de l'homme par les forces de l'ordre. Les membres du Conseil marquent toutefois leur profonde préoccupation face aux tensions politiques et sociales qui se sont récemment avivées dans le pays et qui, selon eux, menacent le processus de réconciliation nationale engagé depuis quatre années avec le soutien actif de la communauté internationale. Les membres du Conseil notent, ainsi avec inquiétude l'absence de dialogue entre le Gouvernement et l'opposition et les entraves à la tenue de réunions pacifiques des partis et des syndicats. Ils encouragent fortement le Gouvernement centrafricain à faire tout ce qui est en son pouvoir pour consolider les institutions démocratiques et élargir le champ de la réconciliation nationale.
Du point de vue économique, les membres du Conseil se déclarent préoccupés par la dégradation de la situation économique, en partie en raison des répercussions du conflit en République démocratique du Congo (RDC) et de la crise de carburant qui en résulte. A ce titre, ils se disent disposés à examiner dans un proche avenir les résultats de la mission dans la région de l'Envoyé spécial du Secrétaire général pour évaluer l'impact du conflit en RDC sur la RCA. Sur le plan intérieur, les membres du Conseil demandent au Gouvernement de la RCA de prendre des mesures concrètes pour la mise en oeuvre des réformes économiques et, dans ce contexte, soulignent le caractère prioritaire du paiement des arriérés de salaire dans la fonction publique. Ils encouragent également le Gouvernement à prendre les dispositions financières indispensables à la relance du programme de démobilisation et de réintégration des anciens mutins. Ainsi, appellent-ils les Etats Membres qui ont annoncé des contributions lors de la réunion spéciale de New York en mai 2000 à honorer leurs engagements.
Présent au cours du débat, le Ministre de la promotion de la responsabilité civique chargé des relations avec le Parlement de la République centrafricaine, M. Agba Otikpo Mezode, a souligné que la destruction des infrastructures socioéconomiques, entamée en 1996 et 1997, l'impact du conflit en République démocratique du Congo, le poids de la dette extérieure et la logique de récupération politique constituent la trame de l'aggravation de la crise en RCA. Il a affirmé que, dans son pays, l'urgence est à la consolidation des acquis démocratiques, à la stabilisation de l'Etat et à la reprise des activités économiques soutenues par l'aide de la communauté internationale. A ce titre, les délégations se sont félicitées du décaissement par la Banque mondiale de la deuxième tranche du crédit à la consolidation des finances publiques et de la décision du Fonds monétaire international (FMI) de décaisser des fonds supplémentaires. Dans ce contexte, de nombreuses délégations ont souhaité que la demande de la RCA concernant son admission à l'Initiative renforcée en faveur des pays pauvres très endettés (HIPC/PTTE) soit très rapidement acceptée. Le représentant de la Chine a, lui, annoncé la décision de son pays d'annuler la totalité de la dette bilatérale de la RCA.
Ont également participé au débat le Représentant du Secrétaire général et chef du BONUCA, le Directeur adjoint du Bureau régional pour l'Afrique du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le Vice-Président pour les affaires extérieures et les relations avec les Nations Unies de la Banque mondiale ainsi que l'Observateur permanent de l'Organisation internationale de la Francophonie auprès des Nations Unies. Les quinze membres du Conseil ont aussi pris la parole.
Aux fins de l'examen de cette question, le Conseil était saisi du rapport du Secrétaire général.
SITUATION EN REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE (RCA) ET EFFORTS DE L'ONU POUR CONSOLIDER LA PAIX (S/2001/35)
Dans ce rapport, le Secrétaire général rend compte de l'évolution de la situation politique, économique, sociale et sécuritaire en RCA ainsi que des activités du Bureau des Nations Unies pour la consolidation de la paix en RCA (BONUCA). Le Bureau a pour mandat d'appuyer notamment les efforts du Gouvernement pour consolider la paix et la réconciliation nationale, renforcer les institutions démocratiques, effectuer au besoin des missions de bons offices, contribuer au renforcement de la capacité nationale concernant la promotion et la défense des droits de l'homme, aider à appliquer des réformes liées à la sécurité et faciliter la mobilisation au niveau international d'un soutien politique et de ressources pour la reconstruction nationale et le redressement économique du pays. La situation en RCA a été dominée, ces derniers temps, par une vive tension dans les relations entre le parti au pouvoir - Mouvement de libération du peuple centrafricain (MPLC) - et l'opposition. Le Président Patasse n'a pas favorisé le dialogue avec l'opposition, note le rapport qui estime qu'un dialogue constructif n'était pas possible avec des opposants politiques qui réclamaient sa démission. Pour sa part, l'opposition rejette l'idée d'une conférence nationale ou de nouvelles assises, faisant valoir que les conclusions en resteraient lettre morte. Le 19 décembre 2000, les 15 partis de l'opposition ont tenu un rassemblement qui a été dispersé par les forces de sécurité. A l'issue de l'arrestation de certains participants, les députés de l'opposition ont boycotté des réunions du Parlement jusqu'à la clôture de la session, le 29 décembre. L'absence de dialogue, conclut le Secrétaire général, est un obstacle de taille à la viabilité des institutions démocratiques mises en place il y a à peine un an. Le Secrétaire général se montre néanmoins optimiste devant l'engagement du Premier Ministre d'ouvrir les médias d'Etat aux partis de l'opposition, ce qui devrait permettre d'améliorer les relations entre le parti au pouvoir et l'opposition.
Au plan social, la situation est difficile et est caractérisée par l'absence d'améliorations relatives aux droits de l'homme. Aux plans militaire et sécuritaire, la situation est relativement calme et le BONUCA a organisé des cours de formation de police civile. Les efforts de désarmement se sont poursuivis, et jusqu'à ce jour, 95% des armes lourdes ont été récupérées depuis les mutineries de 1996 et 1997, contre 65% des armes légères. En ce qui concerne la démobilisation et la réinsertion de militaires, le manque de ressources financières et le retard des partenaires internationaux à honorer leurs engagements, très peu de progrès ont été enregistrés dans ce domaine, indique le Secrétaire général dans le rapport.
Au plan économique, le Secrétaire général indique que le taux de croissance est tombé à 3,3% alors que les prévisions étaient de 5% et que le pays a enregistré une très forte hausse de l'inflation à la suite de la flambée du prix des produits pétroliers. Soulignant l'importance de l'aide de la communauté internationale, le Secrétaire général se félicite que la Banque mondiale ait approuvé une dérogation partielle aux conditions liées au décaissement des 5 millions de dollars au titre de la deuxième tranche du crédit de consolidation budgétaire. Il indique qu'un pourcentage considérable de ce montant sera utilisé pour assurer le service de la dette du pays. Le montant restant n'est pas suffisant pour aider le Gouvernement à faire face au problème des arriérés de salaires, souligne le Secrétaire général en prenant note de l'assurance donnée par le FMI quant à l'approbation au début 2001, de la demande de réduction de la dette du Gouvernement de la RCA au titre de l'Initiative renforcée en faveur des pays pauvres très endettés.
Les incidences du conflit en République démocratique du Congo sur la RCA font dire aux autorités centrafricaines que le pays court un double risque d'affaiblissement de son économie et de déstabilisation, mentionne le rapport. Les effets du conflit sont négatifs, multiformes et multisectoriels, souligne le Secrétaire qui rappelle, que la communauté internationale a beaucoup investi dans le retour de la paix en RCA. Il émet l'espoir qu'elle ne relâchera pas ses efforts t au risque de voir s'effriter les résultats tangibles de ce qu'elle a fait pour contribuer à la paix.
Déclarations
Présentant le deuxième rapport du Secrétaire général sur la situation en République centrafricaine, M. CHEIKH TIDIANE SY, Représentant du Secrétaire général et Chef du Bureau des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République centrafricaine (BONUCA), a observé que la situation sur le terrain est très préoccupante en raison de la tension politique et sociale et de l'incidence négative de la guerre en République démocratique du Congo. Les effets conjugués d'une telle situation font de la République centrafricaine le "ventre mou" de la sous-région et compromettent sérieusement les chances d'y renforcer la paix et la stabilité. Du fait des difficultés économiques et financières auxquelles il est confronté, le Gouvernement nourrit d'énormes attentes vis-à-vis de la communauté internationale et des Nations Unies, en particulier, a expliqué M. Sy qui a noté que les annonces de contributions, faites lors de la réunion spéciale de bailleurs de fonds, de New York en mai 2000, n'ont pas été suivies d'effet. Il a invité les partenaires de la République centrafricaine à honorer leurs engagements et a averti que l'investissement réalisé par la communauté internationale pour la restauration de la paix risque d'avoir été fait en pure perte si une aide d'urgence n'est pas apportée aux autorités centrafricaines.
M. FREDERICK LYONS, Directeur adjoint du Bureau régional pour l'Afrique du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), a rappelé que le problème fondamental de la sécurité humaine a conduit le Gouvernement de la RCA à entamer un programme de désarmement. Partant, en 1998, le Gouvernement, en collaboration avec le PNUD, a convenu d'un programme de réintégration et de démobilisation que le PNUD a financé à hauteur de 2,9 millions de dollars. Le Programme national de démobilisation et de réintégration, adoptée l'année dernière, fait suite au premier programme et le PNUD s'est engagé à accorder une somme additionnelle de 900 000 dollars. Ce programme a créé des conditions techniques pour la mise en Suvre d'un programme de démobilisation et de réintégration. Dans une phase initiale, 700 militaires et gendarmes seront démobilisés. Pour assurer le succès du programme, le Gouvernement devra régler les arriérés de salaires à l'égard des démobilisés. Il est aussi essentiel que la communauté internationale fournisse des ressources financières à temps. A cet égard, pour la période 2000 à 2003, le PNUD a ouvert des crédits de 9 millions de dollars pour financer les programmes de bonne gouvernance et de lutte contre la pauvreté. Dans ce cadre, la collaboration sera maintenue avec le Département des affaires politiques et celui des opérations de maintien de la paix, a assuré le représentant du PNUD.
M. MATS KARLSSON, Vice-Président pour les affaires extérieures et les relations avec les Nations Unies de la Banque mondiale, a indiqué que la Banque mondiale est très préoccupée par la situation en République centrafricaine, non seulement en raison des difficultés propres auxquelles doit faire face le pays depuis 5 ans, mais aussi parce qu'il subit les effets néfastes d'événements survenant hors de ses frontières, principalement en République démocratique du Congo. La République centrafricaine n'a par conséquent pas pu emboîter le pas de la réforme structurelle lancée ses dix dernières années dans de nombreux pays d'Afrique. M. Karlsson a expliqué que la Banque mondiale vient d'élaborer une politique opérationnelle sur la "Coopération au développement et les conflits" qui vise, grâce à une stratégie appropriée d'investissement, à aider le redressement économique et social et à assurer le développement durable dans les pays qui viennent de sortir d'un conflit. Il a précisé que la Banque mondiale dispose d'un certain nombre d'avantages pour mettre en Suvre ce programme en République centrafricaine, et ce même si ces dernières années les activités menées dans ce pays ont subi plusieurs interruptions. En outre, la Banque accorde sa confiance au Premier Ministre et à son équipe économique parce qu'ils semblent bien saisir l'intérêt de leur pays et paraissent résolus à le défendre.
Ces éléments conduisent les institutions de Bretton Woods à soutenir les efforts de stabilisation et de réforme du Gouvernement centrafricain de façon multiple. C'est ainsi que de manière tout à fait exceptionnelle, la Banque mondiale a, le mois dernier, approuvé une dérogation partielle aux conditions liées au décaissement de la deuxième tranche du crédit de consolidation budgétaire représentant 5 millions de dollars. Cette mesure a été prise bien que le pays ait été en arriéré dans le paiement du service de sa dette, a précisé M. Karlsson. Dans les six prochains mois, la Banque va s'attacher à développer une stratégie plus complète de lutte contre la pauvreté, en fournissant aux autorités des ressources de 8 millions de dollars. La Banque va également aider le Gouvernement centrafricain à préparer son dossier d'accession à l'initiative en faveur des pays pauvres très lourdement endettés (PPTE). Une aide sera aussi fournie pour l'élaboration du programme urgent de lutte contre le VIH/sida. Mais à plus long terme, trois domaines essentiels méritent une attention particulière, a fait observer M. Karlsson. Il s'agit tout d'abord de l'économie dont la solidité est fondamentale à la réussite des efforts de consolidation de la paix. Il faut ensuite que les efforts déployés par les Nations Unies et les institutions internationales soient parfaitement coordonnés et mis en commun. Enfin et bien que les institutions internationales puissent temporairement résoudre certains problèmes urgents, tel que le paiement des salaires des fonctionnaires, rien ne pourra remplacer la détermination et l'abnégation du Gouvernement centrafricain qui seul peut s'attaquer aux causes profondes du conflit, essentiellement la mauvaise gouvernance, et ainsi garantir une solution durable, a insisté le Vice-Président de la Banque mondiale.
M. ANIL KUMARSINGH GAYAN, Ministre des affaires étrangères de Maurice, a jugé impératif que les dirigeants politiques de la RCA lancent sans délai un processus de dialogue pour rétablir la paix et la stabilité dans le pays. Il est également important, a dit le Ministre, que l'opposition réagisse favorablement à une initiative de cet ordre. Le processus démocratique, a-t-il estimé, doit être inclusif et tributaire de l'existence d'institutions qui seules sont capables d'assurer les bases d'un Etat moderne. Venant à la situation économique de la RCA, le Ministre des affaires étrangères a considéré que tant que les fonctionnaires ne seront pas payés, il ne pourra y avoir d'administration publique fiable. La règle de droit disparaîtra et le climat général tendra à la corruption et à d'autres pratiques illégales. Le Ministre a donc jugé essentiel que la demande du Gouvernement de la RCA, en ce qui concerne l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés, soit approuvée le plus tôt possible. Imputant la situation actuelle des pays d'Afrique à l'absence de bonne gouvernance, au non-respect des institutions démocratiques, à la persistance des violations des droits de l'homme et au manque de transparence à tous les niveaux, le Ministre des a estimé que l'assassinat récent du Président Kabila de la République démocratique du Congo illustre l'ampleur des problèmes propres à l'Afrique, en général, et à la région des Grands Lacs, en particulier.
Le Ministre a ainsi fait part de la décision du Président de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) de convoquer une réunion d'urgence de l'organe central de son Mécanisme de prévention, de gestion et de règlement des conflits. La situation en RCA, a dit le Ministre, ne peut être dissociée des conditions qui prévalent dans la région des Grands Lacs. La circulation et le trafic d'armes légères, l'utilisation des ressources naturelles pour financer des activités paramilitaires, l'existence de groupes armés, et surtout l'utilisation à mauvais escient des ressources humaines sont certains des problèmes qu'il convient de régler de manière urgente. L'OUA, a assuré le Ministre, est déterminée à remettre les pays africains dans la voie tracée par les réalités du continent et le pragmatisme. A cet égard, il a souligné l'importance de la coopération régionale pour prévenir les conflits.
M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a déclaré qu'en ce qui concerne la RCA, la poursuite de l'aide internationale est une nécessité. Il s'est félicité de la décision de la Banque mondiale de décaisser la deuxième tranche du crédit à la consolidation des finances publiques. La récente décision de réduction de dette du FMI va elle aussi dans le bon sens, a ajouté le représentant avant de souhaiter que les engagements pris à New York, en matière d'aide bilatérale, soient intégralement tenus. La France, a-t-il précisé, est le premier bailleur bilatéral avec plus de 18% de l'aide publique au développement (APD) totale. En matière civile, cela représente 18 millions de dollars en 2000 et plus de 82 coopérants présents sur place. L'aide internationale n'est pas tout, a estimé le représentant en considérant, à l'instar du Secrétaire général qu'"il appartient aux Centrafricains eux-mêmes de trouver la volonté politique qui conduira à la réconciliation nationale".
En la matière, a dit le représentant, les autorités centrafricaines ont une responsabilité particulière. Il leur revient, en premier lieu, de prendre les mesures susceptibles d'apaiser les tensions actuelles. Deux mesures sont prioritaires, a estimé le représentant, en citant la relance du dialogue avec l'opposition et le paiement des arriérés de salaires dès que les rentrées budgétaires le permettront. De ce point de vue, le représentant s'est félicité de l'annonce par le gouvernement du paiement, dès le mois de février, des arriérés 2000. De la même façon, il a salué la relaxe, dès janvier, des 62 prévenus de la manifestation interdite du 19 décembre. Il a émis l'espoir qu'à la lumière des récentes tensions, les réformes structurelles connaîtront un nouveau souffle à commencer par celle des finances publiques afin de stabiliser le financement de la fonction publique.
M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a relevé les sources de préoccupation en RCA que sont l'absence de réconciliation nationale, les violations des droits de l'homme et le non-paiement des arriérés de salaires. Soulignant l'importance du rôle de la communauté internationale, le représentant a appuyé l'appel du Secrétaire général tendant à ce que les donateurs respectent leurs engagements, au nom de la stabilité économique du pays.
M. ALISTAIR HARRISON (Royaume-Uni) fait siennes quelques-unes des explications formulées par le Ministre des affaires étrangères de Maurice sur la situation en RCA. Le Royaume-Uni est très préoccupé par la situation en République centrafricaine qui est "effarante" et qui de surcroît s'aggrave. Les efforts que la communauté internationale y déploie depuis plusieurs années ne doivent pas être gâchés. Or, de l'avis du Royaume-Uni, le seul moyen de résoudre durablement la crise nationale actuelle est d'engager un véritable dialogue interne. C'est pourquoi, il est si préoccupant que des milices aient été utilisées pour "faire taire" les opposants. Le représentant a donc insisté pour que seuls des moyens démocratiques soient employés. Il s'est félicité que des ressources aient été trouvées pour payer les fonctionnaires. Mais il a prévenu qu'il ne s'agit là que d'une solution temporaire et qu'il est indispensable que les autorités trouvent le moyen de régler définitivement ces problèmes.
M. Harrison a aussi salué les travaux de la BONUCA et s'est inquiété des conséquences du conflit en République démocratique du Congo sur la République centrafricaine. La délégation du Royaume-Uni attend avec impatience les recommandations que le Représentant spécial du Secrétaire général, fera à cet égard. Le représentant a demandé aux gouvernements de débloquer de manière urgente des fonds pour les programmes de sécurité et de développement en République centrafricaine.
MME PATRICIA DURRANT (Jamaïque) s'est déclaré préoccupée par les tensions politiques entre le parti au pouvoir en RCA et l'opposition qui, selon elle, auront sans aucun doute un impact négatif sur le paysage politique du pays. La représentante s'est jointe aux appels visant la relance du dialogue entre les parties, étant donné la nécessité absolue de consolider les jeunes institutions démocratiques. En la matière, la représentante a estimé que la collaboration entre le Conseil de sécurité et le Secrétariat sera de la plus haute importance. Elle a, dans ce contexte, appelé les donateurs à honorer leurs engagements financiers afin de permettre à la BONUCA de renforcer ses efforts en matière de désarmement, de démobilisation et de réintégration. Parlant de l'environnement régional, la représentante a reconnu l'impact du conflit en République démocratique du Congo sur la situation en RCA. Elle a donc plaidé pour une approche globale des conflits dans la région en estimant qu'une solution à la crise de la région dépend du rétablissement de la paix en République démocratique du Congo.
M. ISSA KONFOUROU (Mali) s'est réjoui des progrès dont il a été fait état dans le processus de réconciliation nationale grâce, notamment, aux efforts de la BONUCA. Toutefois il a regretté la lenteur enregistrée dans la réalisation des programmes de démobilisation et de réinsertion des anciens combattants. Il a estimé que les donateurs doivent fournir une aide conséquente dans ce domaine car il est particulièrement important de consolider les acquis obtenus jusqu'à présent. La délégation malienne se félicite aussi du fait qu'une solution ait été trouvée à la crise dans le versement des salaires des fonctionnaires et qu'un certain nombre de prisonniers politiques aient été libérés. Il a engagé les autorités centrafricaines à continuer dans cette voie car la stabilité de la République centrafricaine contribuera indéniablement à la stabilité régionale.
Malgré ces progrès, la situation des droits de l'homme demeure une source de préoccupation, a néanmoins déclaré M. KONFOUROU. C'est pourquoi il a adhéré à la proposition du Secrétaire général d'insister sur le respect de tous les droits des citoyens, y compris les accusés. Le représentant a souligné la gravité de la crise de l'approvisionnement pétrolier et a jugé encourageantes les réponses fournies par la Banque mondiale et le FMI. Toutefois, il a averti qu'aucun soutien international ne peut remplacer l'engagement de tous les Centrafricains à véritablement instaurer une réconciliation nationale.
"Le rapport du Secrétaire général sur la situation en République centrafricaine décrit une réalité qui ne peut être que source de préoccupation", a observé M. ANDRES FRANCO (Colombie). Malgré le bon travail effectué par la BONUCA, les tensions politiques et sociales menacent, en effet, de réduire à néant les avancées enregistrées vers la réconciliation nationale et l'établissement d'institutions démocratiques solides. En somme, ce sont à la fois les efforts du Gouvernement centrafricain et ceux de la communauté internationale qui risquent ainsi d'être compromis par le manque de dialogue et les difficultés économiques, a averti M. Franco. Le représentant s'est montré très préoccupé par les effets du conflit sévissant en République démocratique du Congo, et notamment par les conséquences néfastes que pourrait avoir la circulation accrue d'armes illicites qui en découle. A cet égard, il a espéré connaître rapidement les recommandations de l'Envoyé spécial du Secrétaire général dans cette région.
"Il est clair que c'est au peuple de la République centrafricaine que revient avant tout la responsabilité de consolider la paix et de parvenir à la réconciliation nationale," a reconnu le représentant. Toutefois, il a jugé fondamentale la contribution de la communauté internationale à ce processus, étant donné que la République centrafricaine connaît un cas aigu de pauvreté, un taux de chômage particulièrement élevé, ainsi qu'une malnutrition et de une absence des services de santé de base. L'engagement de la communauté internationale doit donc se poursuivre et devenir important. C'est pourquoi, la délégation colombienne juge préoccupante l'insuffisance des ressources financières jusqu'à présent envoyées, résultant notamment dans le retard à la mise en Suvre des programmes de démobilisation et de réintégration. M. Franco a lancé un appel au Président Patassé et à tous les acteurs politiques du pays pour qu'ils continuent de travailler ensemble à la réconciliation et au dialogue. Se tournant vers la communauté internationale et les institutions de Bretton Woods, il leur a demandé de poursuivre, en coopération étroite avec le Gouvernement de la République centrafricaine, leur soutien à l'établissement d'institutions démocratiques et à la stabilisation économique et politique du pays.
M. SHEN GUOFANG (Chine) s'est dit préoccupé par l'absence de dialogue entre le Gouvernement et les partis d'opposition et par le refus de ces partis de coopérer avec le Gouvernement. Il a dit espérer que toutes les parties feront preuve de la volonté nécessaire pour aboutir au dialogue en appelant l'ONU à faire davantage pour le faciliter. La détérioration de la situation économique et sociale, a estimé le représentant, risque d'avoir des répercussions négatives sur la situation politique dans le pays. Aussi s'est-il félicité de la position des institutions de Bretton Woods d'aider la RCA. Il a espéré que ces dernières de même que les autres donateurs augmenteront leur appui au pays. Il a appelé ces derniers à donner effet aux engagements pris à New York au mois de mai. Le représentant a espéré que l'allègement de la dette de la RCA pourra devenir une réalité plus rapidement que prévu. Dans ce contexte, le représentant a annoncé la décision de son pays d'annuler la totalité de la dette bilatérale de la RCA. Venant à la question de la sécurité, le représentant s'est dit préoccupé des attaques perpétrées contre le personnel de la mission. Il a appelé le Gouvernement à prendre les mesures qui s'imposent pour garantir la sécurité de ce personnel. Il a terminé sur la question de l'impact du conflit de la RDC sur les pays voisins en souhaitant le rétablissement rapide de la paix dans ce pays.
M. VLADIMIR N. SERGEEV (Fédération de Russie) a appuyé les efforts visant à consolider la paix en RCA et a particulièrement salué le travail de la BONUCA. Le représentant s'est néanmoins dit préoccupé par les relations tendues entre le Gouvernement et les partis d'opposition qui, a-t-il souligné, continuent de nourrir des espoirs de revanche en misant dangereusement sur l'option de l'affrontement. L'absence d'un dialogue dans le contexte économique et social actuel peut avoir des conséquences regrettables, a dit le représentant. Se déclarant également préoccupé par l'impact du conflit en RDC sur la situation en RCA, le représentant a conclu en considérant que les Centrafricains sont responsables au premier chef de la consolidation de la paix mais que la communauté internationale et les institutions spécialisées des Nations Unies ont l'obligation de contribuer à ces efforts.
M. RICHARD RYAN (Irlande) s'est félicité des progrès accomplis par le gouvernement de la République centrafricaine, comme le note le Secrétaire général dans son rapport, en particulier en matière de désarmement, ce qui favorise la restructuration de la défense et des forces de sécurité. Cependant, la situation économique et politique du pays paraît mal en point. Il appartient aux Centrafricains de travailler à la réconciliation nationale et d'éviter les tensions telles que celles qui ont suivi la dispersion d'un rassemblement de l'opposition en décembre, a conseillé le représentant, tout en insistant sur le dialogue entre le gouvernement et l'opposition, dans le but de préserver les institutions démocratiques récemment rétablies. Il a appelé le gouvernement de la République centrafricaine à prendre des mesures, en faveur, notamment, de la liberté de la presse.
Sur le terrain des droits de l'homme, il a noté les violations dont fait état le rapport, particulièrement celles commises au nom de ce qu'on appelle la justice de proximité. En revanche, il s'est réjoui du travail accompli par le bureau des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République centrafricaine dans la formation des officiers de police. Le conflit en République démocratique du Congo et l'instabilité qu'il entraîne dans la région ne facilite pas l'amélioration de la situation économique. M. Ryan s'est félicité des réponses positives que le Secrétaire général a reçues de la Banque Mondiale et du FMI. En conclusion, il a souligné l'importance de la contribution de la communauté internationale et des institutions financières internationales pour favoriser un retour à la stabilité en République centrafricaine.
M. WEGGER STROMMEN (Norvège) a estimé que la RCA illustre, à bien des égards, la nécessité d'une approche globale dans les efforts de consolidation de la paix. Cette situation, a-t-il dit, exige une coordination et une mobilisation des ressources par la communauté internationale et un engagement des autorités nationales en faveur du dialogue et de la réconciliation nationale. Il est nécessaire, a ajouté le représentant, de prendre un certain nombre de mesures pour renforcer les institutions, le respect des droits de l'homme, le désarmement, la démobilisation et la réintégration. Il est également nécessaire, a-t-il dit, de déployer des efforts humanitaires pour assister le nombre croissant de réfugiés à la frontière de la République démocratique du Congo. Compte tenu de la situation actuelle en RCA, le représentant a jugé important que le Conseil de sécurité envoie un signal clair au Gouvernement de la RCA sur la nécessité de travailler à la réconciliation nationale. En matière de sécurité, il a estimé que la circulation des armes légères montre clairement la nécessité d'une approche régionale. En l'absence d'une solution pacifique en République démocratique du Congo, la RCA continuera à faire face aux flux des réfugiés et au problème du trafic illégal des armes légères. Terminant sur la question de l'aide bilatérale, le représentant a souligné que son pays a contribué, quelque 300 000 dollars au programme spécial de désarmement, de démobilisation et de réintégration. Il a, dans ce contexte, appelé les donateurs à honorer leurs engagements financiers en la matière.
M. VOLODYMYR G. KROKHMAL (Ukraine) a salué les efforts continus que M. Cheikh Tidiane Sy a déployés à la tête du Bureau des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République centrafricaine (BONUCA) dans le cadre du processus de stabilisation de la République centrafricaine (RCA). Le représentant a salué les progrès réalisés par le Gouvernement de la RCA, notamment en matière de désarmement et de restructuration des forces de défense et de sécurité. Il a déclaré que beaucoup reste à faire dans le domaine des droits de l'homme et que l'assistance de la communauté internationale est d'une importance cruciale dans ce domaine. Il a salué la décision du Président de la RCA d'ouvrir un centre de traitement pour les malades du VIH/sida.
Le représentant a estimé que le contexte régional continue d'être très préoccupant pour la RCA car le conflit en République démocratique du Congo, qui a provoqué un important mouvement de réfugiés, ainsi que la crise du pétrole en RCA, ont de graves répercussions sur la situation humanitaire, économique, sociale et sécuritaire de ce dernier pays. Le secteur économique y est encore très fragile et requiert l'élaboration de solutions à long terme. Le représentant a déclaré que la réalisation d'une stratégie politique, sociale et économique en RCA exige une approche réfléchie et coordonnée de la part de la communauté internationale. Il a été d'avis qu'en même temps, le renforcement de l'esprit de réconciliation nationale, ainsi que la responsabilité de la paix et de la stabilité en RCA dépendent d'abord du peuple de ce pays.
Pour M. MARK MINTON (Etats-Unis), les versements effectués récemment par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international ne constituent qu'un premier pas dans le processus de reconstruction de la nation et de redressement économique dont la responsabilité revient clairement au Gouvernement et au peuple centrafricains. Or la bonne gouvernance est le fondement tout à fait nécessaire de l'établissement d'une société pacifique, démocratique et autosuffisante. Et tout en reconnaissant les défis nombreux que tout pays sortant d'un conflit doit relever, la délégation américaine tient à mettre l'accent sur la responsabilité particulière qui incombe au Gouvernement centrafricain dans le règlement des difficultés politiques et économiques qui frappent le pays. M. Minton a exprimé sa préoccupation face à l'absence de dialogue politique en Centrafrique. Il a demandé instamment au Président Patassé de renouer le dialogue avec les membres des partis d'opposition et à ces derniers de faire preuve de bonne volonté et d'engagement en faveur d'un règlement pacifique des désaccords actuels. M. Minton a aussi insisté pour que le Gouvernement continue de suivre la voie de la réforme économique tracée par les institutions de Bretton Woods. Il a salué les initiatives évoquées par le représentant de la Banque mondiale s'agissant du VIH/sida. Le contrôle des dépenses publiques, l'utilisation des revenus publics de l'Etat pour lutter contre la pauvreté, et l'élimination de la corruption sont, selon lui, des éléments fondamentaux à l'instauration d'une République centrafricaine forte et stable.
"Même si c'est aux Centrafricains que revient la responsabilité première de la réforme économique et politique de leur pays, il faut bien reconnaître qu'aucun pays n'est seul au monde", a déclaré le représentant, avant de faire remarquer que le pays est directement affecté par les événements ayant lieu dans les Etats voisins, notamment la République démocratique du Congo. Le grand nombre de réfugiés concentrés à la frontière méridionale du pays et son impact particulièrement déstabilisateur sont tout particulièrement au nombre des préoccupations de la délégation américaine. C'est pourquoi, elle se réjouit de l'initiative du Secrétaire général d'envoyer un représentant spécial pour évaluer les conséquences du conflit en RDC dans la région. Tant la communauté internationale que les pays de la région doivent en fait continuer d'apporter leur soutien à la République centrafricaine. Les acteurs régionaux devraient notamment prendre des mesures pour réouvrir à la navigation les fleuves Congo et Oubangui, ce qui, entre autres, permettrait de réduire la crise de l'approvisionnement en pétrole. M. Minton a estimé que la question de la République centrafricaine fait véritablement office de test pour les Nations Unies et la communauté internationale et permettra de mesurer leur capacité à aider un gouvernement sortant d'un conflit, suivi d'une opération de maintien de la paix réussie, à reconstruire ses institutions et à entreprendre une réforme. L'exemple de la République centrafricaine pourra aussi servir de modèle dans l'établissement de nouveaux partenariats, a suggéré en conclusion le représentant.
M. SAID BEN MUSTAPHA (Tunisie) a pris note des progrès enregistrés en République centrafricaine et a fait part de sa préoccupation face à la situation actuelle. Les conséquences de la crise de 1996 continuent d'être omniprésentes et les défis auxquels le Gouvernement centrafricain fait face sont loin d'être surmontés malgré les efforts entrepris par ce dernier, a-t-il noté. Sur le plan politique, il a constaté que les relations entre le parti au pouvoir et les partis d'opposition sont difficiles et ne cessent de se détériorer, ce qui constitue une source de préoccupation. La délégation tunisienne a encouragé toutes les parties à engager un dialogue constructif dans le but d'atteindre une réconciliation nationale réelle et durable, a-t-il indiqué, tout en ajoutant que les efforts du Représentant spécial du Secrétaire général seront dans ce cadre une aide précieuse.
Le représentant a estimé que la situation socio-économique en République centrafricaine est tout aussi inquiétante car la détérioration des conditions de vie et la persistance des arriérés de salaire et des pensions, entre autres facteurs, exacerbent la tension sociale et prédisposent à l'instabilité politique. Il a déclaré qu'il est évident que le Gouvernement centrafricain n'est pas en mesure de faire sortir le pays de cette situation sans l'aide et l'assistance de la communauté internationale et des institutions de Bretton Woods. La délégation tunisienne a pensé, par ailleurs, qu'en dépit des quelques incidents enregistrés, la situation sécuritaire et militaire est encourageante. Il a particulièrement salué les initiatives qui ont permis de restructurer les forces de la défense et de la sécurité, de déployer des unités à l'intérieur du pays et de réintégrer les anciens combattants dans l'armée. La délégation tunisienne s'est également félicitée des résultats significatifs enregistrés dans le cadre du processus de désarmement qui ont permis au Gouvernement de récupérer 95 % des armes lourdes et 65 % des armes légères. Le représentant a estimé que ce bilan positif est toutefois assombri par l'incapacité du Gouvernement centrafricain, due au manque de ressources, de poursuivre le programme de démobilisation et de réinsertion des anciens combattants, ainsi que par l'apparition dans ce pays de nouvelles armes provenant d'Etats voisins en conflit. Il a déclaré que la recherche d'une solution définitive à tous ces problèmes sécuritaires, humanitaires et socio-économiques en République centrafricaine gagnerait à se faire dans le cadre d'une approche sous-régionale globale.
M. AGBA OTIKPO MEZODE, Ministre de la promotion de la responsabilité civique, chargé des relations avec le Parlement de la République centrafricaine (RCA), a réaffirmé l'attachement des autorités de la RCA " à l'indispensable option de préservation de la paix et d'unité nationale et de consolidation des acquis démocratiques en dépit de l'option d'affrontements de quelques dirigeants politiques extrémistes". La société de la RCA, a expliqué le Ministre, vit, à l'heure actuelle, des manifestations inspirées par des extrémistes en rupture de popularité et recherchant des raccourcis pour accélérer l'alternance politique. Ils font feu de tout bois, inventant et provoquant des évènements, manipulant ceux qui existent pour en faire une affaire politique. La RCA a-t-elle besoin de l'éducation civique ou de l'animation politique, s'est interrogé le Ministre avant d'affirmer que son pays ne connaît pas de crise politique parce que les institutions démocratiques, dont 95% sont déjà installées, fonctionnement normalement. L'Assemblée nationale compte 6 groupes parlementaires dont 5 sont de l'opposition.
Le pouvoir judiciaire fonctionne indépendamment, a-t-il poursuivi, en citant la mention faite à ce sujet dans le rapport du Secrétaire général. La société civile joue également son rôle même si parfois elle a des partis pris déconcertants. Le Gouvernement ne cesse de souligner son ouverture au dialogue alors que les extrémistes continuent de se réfugier dans le refus de ce dialogue, a-t-il dit. Après deux ans de mutinerie où tout a été détruit, la RCA s'est retrouvée avec 12 mois d'arriérés de salaires de fonctionnaires, a expliqué le Ministre en venant ainsi aux questions sociales. Aucun plan d'urgence financier n'a été proposé, a-t-il souligné en précisant que cet attentisme s'est poursuivi jusqu'en 1999, date des élections législative et présidentielles Ces deux élections étant jugées à risque, aucune action de bailleurs de fonds et d'opérateurs économiques n'est pourtant venue, a encore dit le Ministre. Pourtant, a-t-il affirmé, il est faux de dire que les salariés sont restés sans paiement pendant 12 mois. Ce n'est qu'au mois de mai, avec la crise de carburant, que les salariés ont eu à vivre deux à trois mois sans salaires.
La destruction des infrastructures socioéconomiques, entamée en 1996 et 1997, l'impact du conflit en République démocratique du Congo, le poids de la dette extérieure et la logique de récupération politique constituent la trame de l'aggravation de la crise en RCA. Le Gouvernement, a dit le Ministre, n'a jamais dénié aux travailleurs les droits auxquels ils prétendent. Toutefois, l'état dans lequel le pays se trouve et l'effort qu'il convient de consentir sont constamment battus en brèche par l'action irraisonnable de certains politiciens " sans scrupules" qui depuis l'indépendance favorisent les glissements vers l'anarchie. Cela, a estimé le Ministre, constitue un obstacle majeur à la campagne de lutte contre la corruption et l'instauration de la bonne gouvernance nécessaires à la relance de l'économie. Les démocrates comprendront que la prise du pouvoir et sa gestion n'obéissent pas à des règles permissives pour toutes les tentations ni au principe selon lequel la rue doit changer le cours des choses.
En RCA, a souligné le Ministre, l'urgence est à la consolidation des acquis démocratiques et à la stabilisation de l'Etat. L'urgence est aussi à la reprise des activités économiques soutenues par l'aide de la communauté internationale. La réussite et la consolidation de la démocratie ne procèderont pas de successions d'équipes mais dépendront de la faculté de l'équipe en place à aller au bout de son mandat et à organiser des élections libres et démocratiques pour garantir l'alternance politique. Jamais les droits de l'homme n'ont autant préoccupé les autorités du pays, a dit le Ministre en soulignant l'absence dans son pays de prisonniers politiques et d'atteintes à la liberté d'expression. La liberté, si elle n'est pas encore idéale est en marche, a encore dit le Ministre en arguant que la démocratie et l'Etat de droit exigent que les uns et les autres acceptent le principe de la primauté du droit. Il a assuré que pour faire face à toutes ces difficultés, le Gouvernement entend prendre toutes ses responsabilités et respecter ses engagements. Le Ministre a demandé à la communauté internationale, de la compréhension, des moyens et du temps pour que la RCA redevienne le havre de paix et " la Suisse africaine ", d'il y a trente ans.
M. RIDHA BOUABID, Observateur permanent de l'Organisation internationale de la Francophonie auprès des Nations Unies, a rappelé que son Organisation a accompagné le retour à la stabilité et la relance du processus de démocratisation en RCA notamment par la fourniture d'une assistance et l'envoi d'observateurs aux législatives de 1998 et présidentielles de 1999 ainsi que par l'envoi d'une mission de bons offices en mars 1999 et d'une mission d'évaluation des besoins en mai 2000. L'Organisation entend, a dit son représentant, poursuivre et renforcer la mise en Suvre des mesures concrètes destinées à rendre la RCA en mesure de tirer pleinement parti des programmes que conduit la Francophonie à travers son Agence intergouvernementale et ses autres opérateurs. Leur mise en Suvre, a expliqué l'Observateur, doit être assurée en collaboration avec la BONUCA et le PNUD, dans le cadre des accords conclus avec l'ONU et le PNUD. Ces dernières semaines, a-t-il ajouté, le Secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie a chargé l'ancien ambassadeur du Sénégal auprès des Nations Unies à Genève d'effectuer une mission d'information et d'écoute en Centrafrique pour y examiner les moyens de renforcer la coopération francophone dans ce pays et d'identifier l'assistance possible pour accompagner les efforts qui seraient déployés en vue de faciliter un dialogue entre les forces politiques et centrafricaines.
La mission a ainsi identifié une série de mesures à mettre en Suvre dans les meilleurs délais. A ce titre, l'Observateur a cité la contribution nécessaire à une initiative d'évaluation globale de la mise en application des Accords de Bangui ainsi que du Pacte de réconciliation nationale, propre à renouveler le dialogue entre tous les acteurs publics et privés sans oublier les syndicats et les associations de femmes. Il s'agirait aussi, a-t-il poursuivi, de la mise à disposition de l'expertise francophone pour l'élaboration de textes favorisant une vie politique apaisée et enfin, d'un soutien au fonctionnement et à la revitalisation des institutions de contrôle, de régulation et de médiation revêtant une importance majeure. La responsabilité du retour à la paix, à la sécurité et à la stabilité durables incombe en premier lieu non pas à la communauté internationale mais au gouvernement, aux dirigeants politiques et au peuple centrafricain, a conclu l'Observateur. Leur volonté, leurs engagements et leurs actes pour réaliser ces objectifs ne peuvent qu'inciter davantage la communauté internationale à les aider.
M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) a espéré que tous les participants à la réunion de ce matin auront pu profiter des commentaires formulés tant par les acteurs sur le terrain que par les membres du Conseil de sécurité. Il est évident que le travail de la BONUCA a eu des effets positifs, a-t-il poursuivi. Toutefois, il est tout aussi indéniable que l'on risque de voir les effets de ce travail, s'effriter, si le processus de réconciliation nationale n'est pas véritablement lancé et mené à bien, a-t-il averti. Selon lui, avant de parvenir à une paix durable et au développement à long terme, il faudra appliquer l'Accord de Bangui dans son intégralité et le Pacte national de réconciliation également. Pour cela, il faut renforcer la police, restructurer les forces armées, réinsérer les anciens soldats et redresser l'économie. Il faudra aussi trouver des fonds suffisants, voire supplémentaires, a fait observer M. Mahbubani, avant d'ajouter qu'il faudra également s'attaquer aux causes profondes des problèmes. A cet égard, il a considéré que le rapport périodique du Secrétaire général ne mettait peut-être pas suffisamment l'accent sur la nécessité d'aboutir définitivement à un terme à la crise du versement des salaires des employés de la fonction publique. "Le groupe de travail sur les causes des conflits en Afrique pourra peut-être se pencher sur la situation en République centrafricaine sous cet angle", a-t-il suggéré. Pour la délégation de Singapour, l'autre facteur à ne pas omettre est l'impact sur la RCA du conflit en République démocratique du Congo. De manière générale, les effets des conditions difficiles de la région des Grands Lacs sont indéniables. M. Mahbubani a précisé que l'objectif final de tous les efforts, nationaux et internationaux, déployés en RCA doit être compris par tous. Il a espéré que la déclaration présidentielle que le Conseil s'apprête à adopter sera particulièrement utile à cet effet.
Répondant aux observations formulées lors de la séance, M. CHEIKH TIDIANE SY, Représentant du Secrétaire général et Chef du BONUCA, a, pour sa part, mis l'accent sur l'aspect critique de la situation, ajoutant que le processus de consolidation de la paix en République centrafricaine en était à une phase cruciale. Compte tenu de l'instabilité qui prévaut sur le reste de la région, il a prévenu que même une solution aux problèmes internes de la RCA pourrait s'avérer insuffisante. Il faut donc, de son avis, adopter une approche globale et de ce point de vue la mission de l'Envoyé spécial du Secrétaire général, M. Amara Essy, pourrait apporter une contribution de valeur.
Sur le plan interne, il est vrai que des progrès ont été enregistrés, notamment en ce qui concerne les droits de l'homme, a reconnu M. Sy. Aussi l'un dans l'autre, peut-on garder espoir, surtout s'il l'on considère l'engagement et la bonne volonté dont font preuve les institutions internationales, notamment celles de Bretton Woods. Il a espéré, en conclusion, que le BONUCA continuera de son côté à jouir de la confiance des membres du Conseil et de la communauté internationale.
Déclaration présidentielle
1. Le Conseil de sécurité a examiné le rapport du Secrétaire général en date du 11 janvier 2001 (S/2001/35), présenté en application de la déclaration du Président du Conseil du 10 février 2000 (S/PRST/2000/5).
2. Le Conseil félicite le Bureau d'appui des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Centrafrique (BONUCA) et le Représentant du Secrétaire général pour les efforts qu'ils n'ont cessé de déployer en vue de contribuer à la paix et à la stabilité en République centrafricaine. De ce point de vue, le Conseil accueille favorablement les nouveaux progrès réalisés dans certains domaines depuis le précédent rapport du Secrétaire général (S/2000/639) du 29 juin 2000, notamment en matière de désarmement et de restructuration des forces de sécurité et de défense, ainsi qu'en ce qui concerne le respect des droits de l'homme par les forces de l'ordre.
3. Le Conseil se félicite de la mission dans la région de l'Envoyé spécial du Secrétaire général afin d'évaluer l'impact du conflit en République démocratique du Congo sur la République centrafricaine et la République du Congo, en particulier sur les plans humanitaire, économique et social et sur le plan de la sécurité. Le Conseil est disposé à examiner dans un proche avenir les résultats de cette mission.
4. Le Conseil exprime sa profonde préoccupation face aux tensions politiques et sociales qui se sont récemment avivées en République centrafricaine et qui menacent le processus de réconciliation nationale engagé depuis quatre années avec le soutien actif de la communauté internationale. Le Conseil note avec inquiétude l'absence de dialogue entre le Gouvernement et l'opposition. Le Conseil est également préoccupé par la dégradation de la situation économique, en partie en raison des répercussions du conflit en République démocratique du Congo et de la crise du carburant qui en résulte.
5. Le Conseil se félicite des contributions déjà apportées et appelle les donateurs, bilatéraux et multilatéraux, à soutenir pleinement les efforts du Gouvernement de la République centrafricaine. Le Conseil se réjouit du décaissement par la Banque mondiale de la deuxième tranche du crédit à la consolidation des finances publiques et se félicite de la récente décision du Fonds monétaire international de décaisser des fonds supplémentaires. Le Conseil appelle les États Membres qui ont annoncé des contributions lors de la réunion spéciale de New York, coprésidée par le Secrétariat, l'Allemagne et le PNUD, en mai 2000, à remplir leurs engagements. Le Conseil souligne aussi l'importance d'une aide internationale aux réfugiés et aux personnes déplacées en République centrafricaine et dans les autres pays de la région afin de contribuer à la stabilité régionale.
6. Le Conseil réaffirme qu'il appartient d'abord aux Centrafricains de trouver la volonté politique indispensable à la réconciliation nationale. Le Conseil encourage fortement le Gouvernement de la République centrafricaine à faire tout ce qui est en son pouvoir pour consolider les institutions démocratiques et élargir le champ de la réconciliation nationale. Le Conseil demande à tous les acteurs politiques centrafricains de contribuer, chacun en ce qui le concerne, à l'apaisement de la tension actuelle entre le Gouvernement et l'opposition. À cet égard, tout en se félicitant de la relaxe, le 8 janvier, des 62 prévenus arrêtés lors de la manifestation interdite du 19 décembre 2000, le Conseil note avec préoccupation les entraves à la tenue de réunions pacifiques de l'opposition et des syndicats.
7. Le Conseil demande au Gouvernement de la République centrafricaine de prendre des mesures concrètes pour la mise en oeuvre des réformes économiques et l'apaisement des tensions sociales. Le Conseil souligne le caractère prioritaire du paiement des arriérés de salaire dans la fonction publique et accueille favorablement l'annonce récente par le Gouvernement de la République centrafricaine de mesures dans cette direction. Le Conseil encourage également au Gouvernement de la République centrafricaine à prendre les dispositions financières indispensables à la relance du programme de démobilisation et de réintégration.
8. Le Conseil prie le Secrétaire général de continuer à le tenir régulièrement informé des activités du BONUCA, de la situation en République centrafricaine et notamment des progrès accomplis dans les réformes politique, économique et sociale, et de lui présenter un rapport d'ici le 30 juin 2001, en application de la déclaration du Président du Conseil en date du 10 février 2000.