Grèves des fonctionnaires de la Mairie de Bangui, Elus harcelés
Grève de cinq jours des fonctionnaires de la mairie de Bangui
Le syndicat des fonctionnaires de la mairie de Bangui en Centrafrique a décidé de lancer une grève de cinq jours à compter du vendredi 2 février pour obtenir le paiement de cinq mois d'arriérés de salaires, a-t-on appris jeudi de source syndicale.
Persuadés que le préavis de grève déposé le 23 janvier dernier était déjà arrivé à échéance, la plupart des agents municipaux n'ont toutefois pas respecté le mot d'ordre de leur syndicat et ont débrayé dans la journée de jeudi, a constaté un journaliste de l'AFP.
Pour montrer leur mécontentement, les grévistes ont accroché des branches de palmiers sur toutes les fenêtres et portes de l'hôtel de ville, où la plupart des services ont été paralysés, a-t-on encore constaté.
Les fonctionnaires de la mairie, qui s'étaient jusqu'à présent tenus à l'écart de l'actuelle grève de la fonction publique centrafricaine, réclament le versement de cinq mois sur les 29 mois d'arriérés de salaire accumulés sur plusieurs années, a expliqué le syndicat.
"On vient de payer trois mois aux autres fonctionnaires mais nous avons été marginalisés", s'est insurgé le secrétaire général de ce syndicat, Norbert Karakombo.
"C'est une grève de cinq jours renouvelable et il n'y aura pas de service minimum parce que tout le monde a faim", a prévenu le dirigeant syndical qui s'étonne de l'absence de réponse des autorités après le dépôt du préavis de grève.
"Lorsque nous demandons que le personnel soit payé, on nous répond qu'il n'y a pas d'argent, alors que nous versons de l'argent au Trésor public tous les jours", a expliqué de son côté le maire de Bangui, Mme Cécile Guere Seregue, qui affirme avoir fait part de cette situation au ministre de tutelle, au Premier ministre et même au président Ange-Félix Patassé.
A l'exception des agents municipaux, tous les fonctionnaires centrafricains ont reçu le 19 janvier le versement de trois mois de salaire, rappelle-t-on.
Ce geste du gouvernement avait alors permis d'atténuer la grave crise sociale que la grève lancée le 2 novembre dernier par une partie de la fonction publique du pays avait déclenchée.
(AFP, Bangui, 1er février 2001 - 17h50)
Vives turbulences entre opposition et pouvoir centrafricain
(AFP, Bangui, 1er février 2001 - 16h40)
Deux chefs de partis en fuite, un ancien président interdit de voyage à l'étranger: les rapports entre le pouvoir centrafricain et l'opposition sont soumis à de vives turbulences, malgré un récent appel au "dialogue" du conseil de sécurité de l'ONU, notent les observateurs.
Plutôt calmes depuis la réélection du président Ange-Félix Patassé en septembre 1999, ces relations se sont dégradées au fil du mouvement social des fonctionnaires centrafricains, en grève depuis le 2 novembre pour réclamer le paiement d'au moins 12 mois d'arriérés de salaires.
Appels répétés à la démission du président Patassé de l'opposition depuis décembre, barricades érigées dans la capitale par un mouvement de jeunesse inconnu, manifestations interdites, arrestations d'opposants, ces relations n'ont cessé de s'envenimer pour atteindre un point de quasi-rupture.
Le pouvoir de Bangui, confronté à un contexte social dans l'impasse, à des finances exsangues et aux retombées de la guerre en RDCongo voisine, a d'abord accusé l'opposition de récupérer la grève et de "vouloir prendre le pouvoir par les armes", avant de passer à la riposte.
Ses bêtes noires priviligiées, l'ancien Premier ministre Jean-Paul Ngoupandé et le député d'opposition Charles Massi, fers de lance du soutien de l'opposition aux fonctionnaires, sont entrés en clandestinité ces derniers jours.
Le premier, député et chef du Parti de l'unité nationale (PUN), a échappé de justesse à une interpellation à son domicile, dans la nuit du 14 au 15 janvier, au cours de laquelle quatre de ses militants ont été arrêtés et sont toujours détenus.
Poursuivi pour "création d'association clandestine, détention d'armes de guerre, fabrication et dépôt de bombes sur la voie publique, empêchement des travailleurs de se rendre à leur lieu de travail et préparatifs d'une guérilla urbaine", Jean-Paul Ngoupandé n'a plus reparu publiquement à Bangui.
Egalement recherché, l'ancien ministre Charles Massi, député et chef du Forum démocratique pour la modernité (FODEM), a opté lui aussi pour la clandestinité.
L'ancien président centrafricain David Dacko, successeur de l'Empereur Bokassa 1er, souvent soupçonné de collusion avec la France, s'est par ailleurs vu interdire de quitter le territoire national le 8 janvier, alors qu'il voulait se faire soigner à l'étranger.
La situation n'a pas échappé au Conseil de sécurité de l'ONU, qui, exprimant "sa profonde préoccupation", a appelé le 23 janvier gouvernement et opposition à apaiser les tensions qui menacent la réconciliation nationale engagée en 1998 après des mutineries militaires.
Mais le climat politique centrafricain ne semble pas avoir bénéficié de la légère amélioration constatée sur le terrain social depuis le paiement, le 19 janvier, de trois mois d'arriérés de salaires aux agents de l'Etat, grâce à un décaissement de 10 millions de dollars du FMI.
Depuis deux semaines, les 15 partis politiques de l'opposition rivalisent de communiqués pour accuser le président Patassé de "réinstaller un régime de dictature" en RCA.
La presse indépendante de Bangui dénonce pour sa part la mise en place d'une "commission spéciale" destinée selon elle à traquer les opposants et perquisitionner leur domicile.
Le quotidien "Le Démocrate" citant des sources proches du parti au pouvoir affirme que "cette commission pilotée par trois hauts fonctionnaires (...) sert de couverture officielle à des opérations de commandos dont les éléments d'exécution sont surtout composés de miliciens."
"C'est une structure en marge de la loi", a affirmé à l'AFP un opposant centrafricain sous couvert de l'anonymat, selon qui "il n'est nul besoin d'être spécialiste en sciences politiques pour comprendre ce qui se passe en RCA: certains rêvent d'une démocratie sans opposition".