Le sens du putsch manqué et l'origine de l'arsenal selon le président Patassé
Bangui décidé à faire toute la lumière sur le putsch manqué du 28 mai 2001
Les autorités de Bangui, où devait arriver dimanche l'envoyé spécial de l'ONU, l'ex-président malien Amadou Toumani Touré, ont affiché leur volonté de faire "la lumière" sur le coup d'Etat manqué du 28 mai qui a fait, selon un premier bilan, au moins 59 morts et 87 blessés.
Le gouvernement centrafricain a notamment créé une "Commission mixte d'enquête judiciaire" pour rechercher, arrêter et traduire devant la justice "les auteurs, coauteurs, complices" de la tentative de putsch.
Cette commission, placée sous l'autorité du ministère de la Justice et dirigée par le Commissaire du gouvernement au tribunal militaire permanent, "peut déléguer certains de ses pouvoirs par voie de commission rogatoire pour accomplir certains actes en province ou à l'étranger", précise un document officiel transmis samedi à l'AFP.
Le texte ne précise pas dans quelle direction s'oriente les enquêtes en cours mais les autorités centrafricaines, et le président Ange-Félix Patassé en tête, ont déjà mis en cause l'ancien chef de l'Etat André Kolingba, sur lequel pèsent sept chefs d'inculpation dont "tentative de coup d'Etat" et "assassinat".
Dans un discours radiodiffusé vendredi, le président Patassé a d'ailleurs expliqué avec force détails que l'exécution de ce coup d'Etat avait été planifiée par ses auteurs pour commencer le dimanche 27 mai et s'achever le 1er juin.
"Elle devait être suivie d'une chasse aux sorcières, de l'arrestation des nordistes pour être traduits au baptême du feu, etc..", a-t-il ajouté en référence à son appartenance à une ethnie du nord de la Centrafrique et à la sourde rivalité qui l'oppose au "sudiste" Kolingba.
Aucune nouvelle sur le sort de ce dernier, dégradé au rang de simple soldat de 2ème classe, n'était disponible dimanche, mais des militaires ont indiqué à l'AFP sous couvert de l'anonymat que l'homme dont la tête a été mise à prix par le régime avait réussi à franchir le fleuve Oubangui pour se réfugier en République démocratique du Congo (RDC) voisine.
"L'impressionnant arsenal d'armes saisi au domicile de Kolingba m'oblige à demander un constat international", a déclaré en outre le président Patassé en demandant à la France et plusieurs organisations internationales de dépêcher "une délégation à Bangui à cet effet".
Sans mettre explicitement en cause l'ancienne puissance coloniale, le chef de l'Etat s'est néanmoins dit "surpris que des armes et munitions devant être livrées par l'ambassade de France à la gendarmerie nationale centrafricaine puissent atterrir à la résidence de Kolingba, attenante à la résidence de l'ambassadeur de France" à Bangui.
Des sources militaires ayant requis l'anonymat ont confirmé à l'AFP l'existence de "plusieurs caisses" d'armes, mais elles n'ont pas pu donné plus de détails sur le type d'armes et leur provenance.
Les observateurs ont toutefois rappelé que la France a été au centre de la restructuration des Forces armées centrafricaines (FACA) engagée à la suite des mutineries à répétitions de 1996-1997.
Pendant ce temps la population de Bangui continuait dimanche à réapprendre à vivre après une dizaine de jours de combats entre forces loyalistes et putschistes.
Un premier bilan officiel, qui ne prend toutefois pas en compte tous les cas de décès survenus dans les quartiers où des victimes ont déjà été enterrées, a fait état samedi de 59 morts et 87 blessés.
Le gouvernement centrafricain, qui estime aussi que plus de 80.000 personnes déplacées de "tous âges" se trouvent toujours à l'extérieur de la capitale, a lancé un pressant appel à l'aide internationale.
Bangui se préparait d'ailleurs a recevoir dans la journée dimanche l'ancien chef d'Etat malien Amadou Toumani Touré, parti samedi de Bamako.
Le général Touré, porteur d'un message du secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, pour le président centrafricain, devra prendre contact avec toutes les parties en conflit, a indiqué son entourage, ajoutant que l'ex-président partait "confiant" en Centrafrique.