Bozizé "cassé", l'opposition avertie: Patassé durcit le ton

AFP, Bangui, 14 nov 01 - 19h42 - La président centrafricain Ange-Félix Patassé a durci violemment le ton mercredi dans l'affaire Bozizé, en "cassant" l'ancien chef d'état-major au rang de soldat de seconde classe et en avertissant l'opposition qu'"il n'y a pas de place en Centrafrique pour les putschistes et les terroristes".

La dégradation du général François Bozizé semble fermer la porte au règlement négocié prôné par le Tchad, où celui-ci s'est réfugié, tandis qu'un nombre indéterminé de ses partisans armés se trouvent toujours à l'extrême nord de la Centrafrique, non loin de la frontière tchadienne.

Un communiqué conjoint des partis d'opposition réclamant dans la matinée "le départ immédiat des troupes libyennes d'occupation" de la Centrafrique et "une amnistie en faveur du général Bozizé et de ses hommes", a déclenché l'ire présidentielle.

Dans cette déclaration "relative à l'affaire Bozizé", quatorze partis d'opposition, représentant une trentaine de députés sur 109, ont dénoncé "la gestion chaotique de l'après-coup d'Etat manqué" par le régime et "l'ingérence intolérable de la Libye dans les affaires intérieures de la RCA".

Outre le départ du contingent libyen présent à Bangui depuis le putsch manqué et l'amnistie pour Bozizé, les signataires demandaient notamment "la dissolution de la Commission mixte d'enquête judiciaire sur le putsch" manqué du 28 mai dernier et "la libération des personnes arbitrairement arrêtées par la Commission".

Une cinquantaine de députés de l'opposition et de la majorité ont par ailleurs adopté mardi une résolution visant à interpeller le gouvernement sur les arrestations, la semaine dernière, de deux députés du Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC, au pouvoir), sans levée préalable de leur immunité parlementaire.

La riposte de la présidence centrafricaine a fusé en deux temps par l'intermédiaire de son porte-parole, Prosper N'Douba.

Ce dernier a lu à la radio nationale un décret présidentiel annonçant que le général Bozizé a été "cassé et remis simple soldat de 2ème classe", pour "atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat".

"L'intéressé perd tout droit à pension et décoration et est renvoyé dans son foyer", stipule ce décret, identique à celui pris cinq mois plus tôt envers l'ancien président centrafricain André Kolingba (1981-93), accusé par Bangui d'être l'instigateur du putsch manqué.

Résistant plusieurs jours à Bangui à son arrestation sur mandat d'amener de la Commission, le général Bozizé avait finalement fui avec ses partisans, pour gagner le Tchad jeudi dernier.

Le porte-parole de la présidence a ensuite lu un communiqué présidentiel cinglant, mettant "sévèrement en garde les partis politiques de l'opposition et tous ceux qui succombent aux tentations putschistes et terroristes qu'il n'y a pas de place en Centrafrique pour les putschistes et les terroristes".

La présidence a une nouvelle fois justifié la présence du contingent militaire libyen déployé à Bangui depuis la tentative de coup d'Etat pour assurer la protection du chef de l'Etat, et renforcé mardi dernier lors de la "résistance" du général Bozizé,

"La présence des troupes libyennes en Centrafrique, est non seulement conforme aux accords régissant l'appartenance de notre pays à l'espace SENSAD (NDLR: sigle arabe de la Communauté des Etats sahélo-sahariens: COMESSA), mais relève de la souveraineté du chef de l'Etat", selon le communiqué présidentiel.

Dans la journée, François Bozizé a quitté Sahr (sud du Tchad) pour la capitale tchadienne N'Djamena.


Vive réaction de la présidence à la demande de retrait des troupes libyennes

AFP, Bangui, 14 nov 01 - 18h11 - La présidence centrafricaine a vivement réagi mercredi à la demande des partis d'opposition du pays qui réclament le retrait immédiat des troupes libyennes stationnées en Centrafrique et une amnistie pour le général François Bozizé, a-t-on appris de source officielle.

"La présidence de la République s'étonne des prises de position des partis politiques de l'opposition qui se sont rendus complices des putschistes, terroristes, en leur apportant un soutien inespéré à travers des exigences qu'ils formulent pour (l'ancien chef d'état-major centrafricain François) Bozizé et ses compagnons, ainsi que le retrait des troupes libyennes et la dissolution de la commission mixte d'enquête judiciaire" sur le putsch avorté du 28 mai dernier, déclare le communiqué présidentiel.

"La présence des troupes libyennes en Centrafrique est non seulement conforme aux accords régissant l'appartenance de notre pays à l'espace SENSAD, mais relève de la souveraineté du chef de l'Etat", poursuit le communiqué. SENSAD est le sigle arabe de la COMESSA (Communauté des Etats Sahélo-Sahariens).

"La présidence de la République met sévèrement en garde les partis politiques de l'opposition et tous ceux qui succombent aux tentations putschistes et terroristes qu'il n'y a pas de place en Centrafrique pour les putschistes et les terroristes", indique le communiqué.

"Le peuple centrafricain veut la paix pour pouvoir mettre en oeuvre son programme de développement, dans l'unité et la concorde", conclut le communiqué.

Mercredi matin, les partis politiques de l'opposition avaient publié un communiqué dans lequel ils dénonçaient "l'ingérence intolérable de la Libye dans les affaires intérieures" de la RCA et réclamaient le retrait immédiat des troupes libyennes du Pays. Ces partis demandaient également l'amnistie pour le général Bozizé et ses compagnons ainsi que la dissolution de la commission mixte d'enquête judiciaire.