L'enquête contestée au procès du putsch manqué du 28 mai 2001

AFP, Bangui, 20 fév 2002 - 16h08 - Les avocats des auteurs présumés du putsch manqué du 28 mai 2001 en Centrafrique ont contesté mercredi, à la réouverture du procès, la régularité de la procédure, provoquant un nouvel ajournement des débats à jeudi matin, a constaté le correspondant de l'AFP à Bangui.

Le président de la Cour criminelle de Bangui, Zacharie Ndouba, a annoncé en fin de matinée qu'il allait se retirer avec ses deux assesseurs et le jury populaire de neuf personnes composant cette juridiction, pour délibérer sur les requêtes des avocats de la défense.

Dans la nuit du 28 mai 2001, un commando armé avait attaqué, sans succès, la résidence du président centrafricain, Ange-Félix Patassé.

Dix jours de combats entre putschistes et forces loyalistes, avaient fait, selon un bilan officiel, 59 morts et provoqué l'exode de plusieurs dizaines de milliers d'habitants.

L'accusation attribue le putsch à un groupe d'anciens officiers mutins, et considère que l'ancien président centrafricain, André Kolingba, en est l'instigateur.

Le procès, déjà ajourné le 15 février à la demande de la défense qui souhaitait prendre connaissance du dossier, a repris mercredi en milieu de matinée.

Environ 3.000 personnes se sont massées aux abords du palais de justice de Bangui, sous la surveillance de nombreux militaires en armes, postés à l'intérieur comme à l'extérieur d'un prétoire comble.

L'audience, retransmise en direct par la télévision et la radio publiques, était largement suivie par les Banguissois.

Le président de la Cour avait annoncé à son ouverture que la journée serait consacrée au cas de l'ancien ministre de la Défense, Jean-Jacques Démafouth, arrivé au Palais de justice dans un 4X4 blanc, escorté par quatre militaires.

Limogé et détenu depuis le 26 août, M. Démafouth est accusé d'avoir ourdi un complot parallèle au putsch manqué du 28 mai, notamment en ayant demandé ultérieurement au chef rebelle congolais Jean-Pierre Bemba un appui en hommes.

"Je n'ai jamais conspiré et je n'ai jamais été en contact avec les auteurs du coup d'Etat", avait affirmé le 7 septembre le ministre déchu, dans un entretien accordé à l'AFP sur son lieu de détention.

La défense a soulevé de nombreux points de procédure, ciblant ses critiques sur la Commission nationale mixte d'enquête judiciaire, mise en place au lendemain du putsch avorté pour faire la lumière sur ces événements.

Certains ont réclamé l'annulation intégrale de la procédure, arguant que cette commission, présidée par le Procureur général Joseph Bindoumi, qui représente le ministère public au procès, avait été mise en place dans des conditions "illégales et anticonstitutionnelles".

La commission était incompétente pour mener des investigations, faire arrêter et placer en détention des personnes pendant des mois, ont-il fait valoir.

Les avocats de M. Démafouth ont estimé pour leur part que le dossier de leur client n'était pas en état d'être jugé, car il avait été instruit dans le cadre d'une procédure de crime flagrant ne pouvant excéder un total de 24 jours avant jugement.

Ils ont également estimé que M. Démafouth était poursuivi pour des faits commis dans l'exercice de ses fonctions de ministre et devait donc comparaître devant la Haute cour de justice, une juridiction spéciale chargée de juger les ministres.

Le Procureur général Bindoumi a demandé à la Cour de "considérer les requêtes de la défense "comme étant sans intérêt et sans fondement et de les rejeter purement et simplement".

Six cent quatre-vingt personnes, civils et militaires, doivent répondre, en grande majorité par contumace, d'"atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat, évasion, assassinat et complicité d'assassinat", lors de ce procès initialement prévu pour durer jusqu'au 24 février.


Actualité Centrafrique - Dossier 9