Le mal centrafricain N°7 : le nihilisme et l'infantilisation
Une question, inlassablement, revient. Et invariablement, les débatteurs s'épient les uns les autres pour savoir qui va aligner une phrase ou mentionner un mot de plus; celui-là sera aussitôt aspiré et réduit à un nihilisme parfait. C'est le comble de la satisfaction. Seul, le peuple ignoré, agonisant aux quatre coins de Kodro continue à dépérir et aussi espérer un souffle salvateur.
La spirale du mal centrafricain comme un vertige conduit à l'intellectualisme coupable. Il est désormais de mise, la dissertation et une composition aseptisée ou acerbe. Ainsi va le pays sous l'oeil distrait de ses élites et de ses leaders.
Y-a-t-il encore matière à réflexion ? Un espace pour un débat, des échanges, des
confrontations d'idées sans tomber dans le nihilisme ?
Les Réalités Africaines (et centrafricaines) sont encore à découvrir. Si l'on ne veut
pas que l'intelligence soit bloquée, une remise en question de certaines idées reçues
est nécessaire pour mieux appréhender les véritables enjeux du moment et du futur.
Quelques éléments de lectures permettront de nourrir les débats et de se poser
quelques questions avec moins de passion qui demeurent sans réponses.
Victor BISSENGUE (24 mai 2002)
REPLIQUE 1 JPR A PROPOS FAUSSES AFFIRMATIONS [K NK NY]
Aita Ti Kodro,
Awakodro,
J'ai tout d'abord voulu garder le silence par rapport au débat institué à la suite de
l'intervention de Jean-Paul Ngoupandé (JPN) dans le journal Le Monde et également par
rapport à son livre. Je crois qu'il est du devoir de chacun de se prononcer de manière
claire sur comment nous comptons relancer la reconstruction de notre pays; comment nous
comptons relancer le dialogue politique, économique, social, éducatif et culturel et
enfin comment nous comptons résoudre le problème réel qui se pose actuellement à nous
à savoir le TRIBALISME. Il y a parmi nous, des politiques, des membres de la société
civile, des défenseurs de droit de l'homme, des anti-mondialisations, le simple citoyen
et n'oublions pas les opportunistes, les MLPCistes et RDCistes convaincus, les militants
du FPP et MDD, etc. C'est donc toutes ces catégories de personnes qui constituent la
population de notre République centrafricaine avec en arrière plan l'appartenance
tribale et ethnique. Alors, que dire et que faire, lorsque à chaque sortie d'un
compatriote faisant partie à tort ou à raison d'une de ces catégories, un tir de
dénonciation se met en marche réduisant de manière ostentatoire sa contribution et
entraînant de facto le repli sur soi de beaucoup d'entre nous. Cette attitude fait
finalement grossir le nombre de "réfugiés" dans ce que nous qualifions
désormais de "majorité silencieuse", groupe hétéroclite à qui j'avais
déjà consacré une réflexion.
Je constate à travers les interventions des uns et des autres que notre force est en
même temps notre faiblesse à savoir l'esprit critique, la dénonciation sans ambages des
louvoiements de certains d'entre nous, enfin et surtout le foisonnement et les
propositions d'idées. Ces dernières se noient le plus souvent dans les dédales
inextricables des interventions souvent à caractère agressif. Ne gagnerions-nous pas à
intervenir comme Socrate que Platon fait parler dans la République!
L'instabilité d'opinion et de caractère prédomine chez nos politiques et chez nombreux
de nos compatriotes. A entendre et lire les discours et déclarations publiques des
politiques centrafricains, le besoin du paternalisme, français surtout, est toujours
ancré au cur de nos dirigeants. Au courant de l'année 2000, j'avais avec Crépin,
publié un article (sur notre forum Kodro) sur le paternalisme (voir à la fin du présent
texte, la copie de celui sur le paternalisme), défaut récurrent, pire permanent, des
centrafricains.
Nous avions dans ce papier mis en lumière ce paternalisme rampant, passif et actif,
source de tous les maux centrafricains, qui détermine les actes des politiques de notre
pays les poussant à ne pas faire face à leurs responsabilités; les exemples de fuite de
responsabilité foisonnent, en témoigne, pour ne pas citer que le complexe du Trans all:
les résultats des élections présidentielles de 1999, l'opposition politique nationale
qui n'arrive pas à prendre d'initiative se faisant seulement l'écho des choix
extérieurs (Khartoum et Libreville), le dernier voyage du Président Patassé à
N'Djamena ainsi qu'à Libreville où il s'est mis à pleurnicher à chaude larme devant
les Présidents Deby et Bongo, respectivement.
En revenant au livre de JPN, l'idée principale de cette contribution ainsi que
l'intervention de son auteur dans le journal Le Monde rejoignent ce que nous n'avons
cessé de pointer à travers nos prises de positions sur les forums: le paternalisme ou
comme il le traduit dans son langage, l'infantilisation. Il est vrai que la personnalité
de JPN évoque beaucoup de doutes et de méfiances quant à sa sincérité effective dans
ses écrits. Il apparaît néanmoins que JPN à travers sa dernière production a mis le
doigt sur le mal du politique centrafricain. Arrêtons-nous plutôt sur ce mal et essayons
de lui trouver des solutions efficaces même si nous ne sommes pas d'accord politiquement
avec l'auteur du livre. Ne nous laissons pas nous enfermer dans le piège de contestation
tout azimut en ne cherchant pas à débattre des véritables problèmes aussi bien
théoriques que pratiques qui se posent à nous et à notre pays.
J'ai, comme la plus part des "Kodronautes", une défiance vis-à-vis de l'homme
politique, JPN. J'aimerais savoir si cette défiance constitue une raison importante pour
ne pas participer au débat qu'il a eu l'honnêteté intellectuelle et politique de
disséquer? Ne doit-on pas débattre de manière démocratique et intense ce sujet dont
les effets pervers continueront à jouer des tours néfastes incommensurables sur les
politiques de notre pays? Les sujets qu'il a abordés ont fait l'objet de certaines
réflexions sur nos forums et ont parfois suscité très peu des réactions. En refusant
souvent le débat sur les grandes questions, nous nous pénalisons car nus laissons la
porte ouverte aux démagogues et autres prédateurs qui savent tirer profit d'une
situation apparaissant confuse.
Je crois pour ma part qu'il est plus que temps de consacrer le plus souvent notre énergie
aux sujets concernant la reconstruction, la responsabilisation, la réconciliation et la
restauration d'une véritable démocratie dans notre pays avec un esprit ouvert et
dépassionné. Ainsi, le livre et le parcours politique sinueux et illisible de son auteur
devraient plutôt nous pousser à des réflexions sur le rôle, l'engagement, la
détermination et la conviction politique des soi-disant leaders politique de notre pays.
Je ne crois pas que débattre des idées contenues dans ce livre ne puisse faire de nous
les adeptes de JPN. Par contre cet exercice permettra probablement à notre génération
de sortir de ce cercle de contestation permanente qui à la longue bloque toute évolution
positive de nos prises de position vis-à-vis de notre pays. Les questions concernant le
paternalisme et l'infantilisation du centrafricain demeureront aussi longtemps
d'actualité nationale tant que les hommes/femmes politiques centrafricains continueront
de lorgner vers la France, de ne pas prendre leur responsabilité dans le développement
économique, culturel et éducatif de tout le pays. Ce sujet ne concerne pas seulement les
politiques, il s'étend également au citoyen centrafricain qui se considère comme un
étranger, indifférent à la destiné du lieu où il habite sur le sol national.
L'exemple patent est celui que tout le monde a fait les frais: "SO YE TI LETAT
LA", lorsque quelqu'un se met dans l'idée de détruire un bien public ou de se
l'approprier! "LETAT" représente le gouvernement et les membres du clan
Présidentiel. Le citoyen à ce niveau ne se considère que comme un usufruitier, pas
comme un membre à part entière de sa ville et responsable des biens publics. La
réalité est qu'à vouloir prendre les Centrafricains pour des enfants, afin de les
éloigner de la gestion du bien public, les politiques centrafricains ont effectivement
créé des grands enfants qui ne connaissent ni leur droit, ni leur devoir, mais qui
obéissent à la loi et sont toujours prêts à la braver.
J'ai fait le tour des hommes/femmes ayant des ambitions politiques déclarées, je n'en ai
trouvé aucun(e), à ma connaissance, qui puisse se prévaloir d'une intégrité, d'un
désintérêt et d'un moral au-dessus de tout soupçon. La génération de relève ne se
fait pas connaître sur le plan politique, alors, comment le pays compte-t-il aborder les
futures échéances? Ce ne sera pas seulement l'uvre d'un homme/femme compétent et
politiquement fort, mais celle d'un homme/femme doué de plusieurs qualités se traduisant
par un engagement, une détermination et une conviction effectifs pour redonner vie et
courage à un peuple longtemps infantilisé et martyrisé!
J'ai choisi d'étendre de manière brève l'infantilisation et le paternalisme au niveau
du citoyen afin de relancer le débat. Car ce mal doit être connu et exorcisé de nos
compatriotes pour un meilleur devenir de notre pays.
Patriotiquement.
Narcisse Komas, NY.
Date : Thu, 23 May 2002 14:44:19 -0700 (PDT)
Le livre de Ngoupandé n'est pas une reécriture de la bible [K FS]
Chers amis,
Le livre de Ngoupandé n'est pas une reécriture de la bible.On peut contester certaines positions qu'il prend dans son ouvrage, celà n'est que normal.Celui qui le trouve positif n'est pas forcément un supporter de l' auteur!
Ceci dit il faut reconnaitre que c'est le premier (Ngoupandé) à lancer le débat, le vrai : Quelle est notre responsabilité dans notre propre histoire politique et économique? Que devons nous faire pour régler nos problèmes?
Quand je dis c'est le premier j'entend par là le premier homme politique ayant occupé de hautes responsabilités, qui se lance dans cet exercice. Il y exprime ses sentiments et ses convictions par rapport à son expérience et ses réflexions.Maintenant d'accord ou pas que celui qui a une autre explication la donne pour faire avancer le débat!
Je ne comprend pas cette particularité centrafricaine qui consiste à être soit d'un côté ou de l'autre,mais jamais au milieu.L'opposition par réflexe et donc le refus de reconnaitre ce que l'autre peut apporter de positif dans un débat,simplement du fait qu'il n'est pas de 'notre' côté! Ou bien ?
On avancera quand on aura mis de côté notre petite personne qu'on veut absolument mettre en exergue! qu'est ce qu'on en a faire de savoir qui fait quoi ou qui est qui,qui supporte qui? Y a-t-il quelqu'un qui détient le monopole du savoir chez nous?...
Cordialement.
Febana.
Ne nous contentons pas de condamner sans rien avancer comme argument valable.
Date : Thu, 23 May 2002 14:44:19 -0700 (PDT)
Distinguer la majorite silencieuse de la majorite complice [ K JBK]
Salut les compat's,
Avant de de contribuer,effectivement,dans le debat consacre au au dernier ouvrage de
JPN,j'aimerais aborder,une fois de plus le sujet de la fameuse"majorite
silencieuse".
L'article de Dr Komas sur ce sujet avait suscite peu de reactions alors que les differents
aspects importants ont ete touche.
Les centro preferant la dispute animee a la discussion sereine et reflechie?Bref...
J'aimerais ici faire une distinction entre la majorite silencieuse qui comprend les
sous-categories suivantes:
1)Les gens qui ne savent pas quoi dire car ne comprenant rien du debat en cours et ne
maitrisant pas(ou tres peu)l'expression ecrite et les concepts utilises ici.
2)Les gens qui se refugient dans le silence car ayant goute a quelques missiles lors d'une
intervention precedente,provenant d'opposants feroces ou inutilement insolants.
3)Les "sous-marins"dont le role consiste a compiler des informations sur les
opposants au regime honni de Bangos.Eh oui,ils sont la tapis dans l'ombre comme le veut
leurs roles funestes.
4)Les gens qui sont juste ici pour s'informer et n'ont aucun interet direct, dans ce qui
se passe dans ce bout de brousse a la derive, peuple de cannibales acharnes dans leur
tache d'autodestruction programmee.
5)les individus occupant des postes de responsabilite et qui ne peuvent prendre le risque
de s'exprimer publiquement et a visage decouvert.
Vous pouvez creer d'autres categories selon ce que vous pensez de vous-meme.
Il y a d'autre part,la majorite complice dont le silence est plus criminel et coupable
qu'autre chose en plus de la lachete.
Cette categorie,dans laquelle se camouflent les cameleons'Te Ka Mo Te Gue",est la
plus dangereuse car ayant le c..l entre deux barambos.Attendant de voir dans quelle
direction le vent va tourner pour dire demain,en gonflant une poitrine de lache:J'ETAIS
LA!!!
Comme disait Dr Komas,beaucoup seraient etonnes de connaitre les points de vue exprimes en
prive, mais que l'on ose pas avancer en public car le peuple centro a appris a vivre avec
la lachete,toute honte bue.
Cette majorite a ses raisons que la Raison ignore mais comme on le
dit,vulgairement;"il faut de tout pour faire un monde".Meme les vautours,les
charognards ainsi que les hyenes remplissent une fonction precise dans l'ecosysteme malgre
la repugnance qu'elle peut nous causer.
Je bavardais,innocemment avec un vieux copain avec Bangos,qui l'alcool aidant, m'a revele
qu'il avait acces au reseau et que certaines analyses pertinentes lui tordent la
conscience car il suce le sang de ses compatriotes.Il est conscient des nombreuses derives
actuelles et parlent de pratiques diaboliques...
Je n'avais aucune idee qu'il etait branche et suivait les debats sur nos reseaux!!
Je lui ai alors demande pourquoi il n'intervient jamais et surtout que je n'avais aucune
idee qu'il etait revolte vu ses liens familiaux/d'interet avec la caste aux affaires.
Un lourd silence,un rire gene et l'empressement de passer a un autre sujet moins
compromettant et finalement un rendez-vous urgent dans une petite minute...
Ce n'est pas moi,dans la toundra, qui ira nourrir ses enfants et payer les ordonnances de
la parente eloignee sans compter sa propre securite physique,car il connait le systeme de
l'interieur..
J'ai eu pitie couple avec un peu de degout mais embue d'une certaine comprehension ambigue
et douloureusement lancinante.
Comment puis-je le juger?En utilisant quels criteres?
Je me suis pose la question de savoir si l'exil, malgre ses affres, n'est pas
meilleur que ce niveau de compromission qui risque de lui couter cher ,un jour?
Bref,le debat est moral et comme la conscience est elastique selon les individus, et les
circonstances dans lesquelles ils evoluent,determinantes,que dire?
Pour ma part,chapeau bas a la minorite agissante et courageuse et que ce COURAGE MORAL
puisse,un jour,permettre d'amener le pays de Boganda dans la sphere de l'HUMANITE QUI
PROGRESSE ET ACCEPTE LA CONTRADICTION POSITIVE,SOURCE DE LUMIERE.
Patriotiquement,
Joel Bombo-Konghonzaud
Date : Thu, 23 May 2002 16:59:23 -0700 (PDT)
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"L'Afrique suicidaire", par Jean-Paul Ngoupandé, in Le Monde, 17 mai 2002 (édition du 18 mai) et réactions à chaud des WakodroActualité Centrafrique - Dossier 9