Incarcération d'un journaliste: deuxième article commun de la presse privée
DAKAR, 14 juil 2004 (AFP) - 13h23 - La majorité des quotidiens privés dakarois ont publié mercredi, pour la deuxième fois, un article commun relatif à l'arrestation et l'incarcération depuis le 9 juillet du directeur de publication du journal indépendant Le Quotidien, Madiambal Diagne, a-t-on appris auprès de ces médias.
L'article est notamment publié par Le Quotidien, Le Matin, Sud Quotidien, L'Info Sept et Le Populaire, mais pas par le quotidien Le Soleil, proche de la mouvance gouvernementale ni par Walfadjiri, qui demande la libération du journaliste, mais souhaite éviter "toute récupération politique".
Portant le titre "J'ai empêché un putsch", il est rédigé à partir d'éléments communiqués par le journaliste depuis sa prison de Reubeuss, la maison d'arrêt de la capitale sénégalaise, où il est détenu.
M. Diagne, détenu pour trois chefs d'accusation - "diffusion de correspondances et de rapports secrets, diffusion de fausses nouvelles et diffusion de nouvelles tendant à causer des troubles politiques graves" - écrit: "les tenants du pouvoir n'ont pas réussi à me museler".
Dans cet article, Madiambal Diagne affirme par ailleurs que son journal n'a récemment pas publié d'articles qui risquaient de troubler l'ordre public au Sénégal. Il cite notamment un article portant sur un projet d'attentat contre le dirigeant indépendantiste casamançais Augustin Diamacoune Senghor et des responsables politiques et militaires sénégalais.
"En le faisant, nous avions pour seul et unique objectif de préserver la paix sociale et la stabilité de notre pays, de ne pas fragiliser ses institutions, sans aliéner notre sacro-sainte liberté. Ils sont peut-être +fous+ au Quotidien mais pas +irresponsables+", conclut le texte du directeur du Quotidien.
Les patrons de presse sénégalais ont rencontré mardi soir le Premier ministre Macky Sall et le ministre de l'Information, Mamadou Diop.
L'un de ces responsables de presse, Mamadou Oumar Ndiaye, directeur de publication de l'hebdomadaire Le Témoin, a indiqué à l'AFP qu'il avait eu la conviction que leur confrère allait bientôt recouvrer la liberté.
Les quotidiens privés dakarois avaient déjà publié à la "Une" le 10 juillet un éditorial commun intitulé "Tous contre le monstre", au lendemain de l'arrestation et de l'incarcération de Madiambal Diagne.
L'éditorial affirmait que "le pouvoir vient de poser un nouveau jalon dans sa tentative de museler la presse."
La majorité des quotidiens privés dakarois ont organisé lundi une "journée sans presse" tandis que les radios privés diffusaient de la musique entrecoupée d'informations relatives à l'affaire Madiambal Diagne et à la liberté de la presse.
Journaliste incarcéré au Sénégal: les protestations se poursuivent
DAKAR, 13 juil 2004 (AFP) - 23h06 - Deux associations, Survie et AJA (Association des juristes africains) ont condamné mardi l'incarcération de Madiambal Diagne, directeur de publication du journal privé sénégalais Le Quotidien, dans deux communiqués séparés reçus par l'AFP à Dakar.
M. Diagne a été arrêté le 9 juillet et placé en détention provisoire à la maison d'arrêt de Dakar. Il est inculpé pour "diffusion de correspondances et de rapports secrets, diffusion de fausses nouvelles et diffusion de nouvelles tendant à causer des troubles politiques graves", selon un de ses avocats.
L'association Survie estime, dans son communiqué, que cette incarcération vise "à faire taire l'une des voix les plus libres du pays"
"Inquiets, mais confiants dans la démocratie sénégalaise et la vigueur de sa société civile, nous appelons les autorités sénégalaises à un plus grand respect des principes démocratiques et de leurs obligations", ajoute-t-elle.
L'AJA, de son côté, "déplore" l'arrestation de M. Diagne de même que celle de ses collègues algérien, Mohamed Benchicou, et centrafricain, Maka Gbossokotto.
Elle "considère ces actions comme étant la conséquence de la résurgence du délit de conflit condamné par les constitutions" au Sénégal, en Algérie et en Centrafrique ainsi que par la Charte africaine des droits de l'Homme et des peuples, affirme-t-elle dans son communiqué.
M. Benchicou, directeur du quotidien algérien Le Matin, purge depuis le 14 juin, une peine de deux ans de prison ferme pour "infraction régissant le contrôle des changes et les mouvements des capitaux". Il avait fait appel, mais aucune date n'a encore été fixée pour son procès.
M. Gbossokotto, directeur de publication du quotidien privé centrafricain Le Citoyen, a été inculpé et écroué lundi à la suite d'une plaine pour diffamation à l'encontre d'un proche du président François Bozizé.
Journaliste incarcéré au Sénégal: "une mesure arbitraire", selon RSF
DAKAR, 12 juil 2004 (AFP) - 18h16 - L'organisation Reporters sans frontières (RSF) a dénoncé l'incarcération de Madiambal Diagne, directeur de publication du journal privé sénégalais Le Quotidien, estimant que cette détention est "une mesure arbitraire", dans un communiqué reçu lundi par l'AFP à Dakar.
M. Diagne a été arrêté vendredi et placé en détention provisoire à la maison d'arrêt de Dakar. Il est inculpé pour "diffusion de correspondances et de rapports secrets, diffusion de fausses nouvelles et diffusion de nouvelles tendant à causer des troubles politiques graves", selon un de ses avocats.
"Cette incarcération est une nouvelle preuve du durcissement de l'Etat à l'égard de la presse sénégalaise. Auparavant, les autorités s'étaient contentées de multiplier les communiqués, les mises en gardes ou les intimidations sans prendre de mesures concrètes", affirme RSF.
"Depuis quelques mois, le gouvernement (du président sénégalais) Abdoulaye Wade a recours à la justice, par l'entremise de textes peu précis, pour neutraliser les journalistes", ajoute-t-elle.
"Cette affaire en est un nouvel exemple", estime l'ONG, en rappelant que depuis le début de l'année 2004, trois journalistes (deux du quotidien pro-gouvernemental Le Soleil, et un du quotidien privé L'Info7) ont été condamnés au Sénégal à des peines de prison avec sursis pour des affaires de diffamation.
RSF évoque par ailleurs la "vague de solidarité" exprimée et les différentes mesures prises par les "autres médias privés du pays", selon elle "pleinement conscients de l'aggravation de leurs conditions de travail.
80% des quotidiens privés dakarois étaient absents des kiosques lundi, décrété "journées sans presse" par les médias privés. Ceux-ci ont décidé de boycotter la couverture des activités du gouvernement et des partis de la majorité présidentielle, pour marquer son opposition à l'incarcération de Madiambal Diagne.
"Le pouvoir vient de poser un nouveau jalon dans sa tentative de museler la presse", avaient affirmé samedi les journaux privés en "Une, dans un éditorial commun intitulé "Tous contre le monstre".
Des chansons pour la liberté de la presse en boucle sur les radios privées
DAKAR, 12 juil 2004 (AFP) - 13h45 - Les radios privées dakaroises qui protestent contre l'arrestation et l'incarcération du directeur de publication du journal indépendant dakarois Le Quotidien, Madiambal Diagne, passent en boucle lundi des chansons, notamment celles qui rendent hommage à la liberté de la presse ou à la liberté tout court sur le continent africain.
Les radios diffusent en particulier des "tubes" des ivoiriens Alpha Blondy et Tiken Jah Fakoly et des sénégalais Ismaël Lô et Youssou N'dour.
Le morceau du chanteur ivoirien Alpha Blondy, "Journalistes en danger Démocrature", en hommage à Norbert (bien Norbert) Zongo, revient régulièrement sur les ondes. La chanson commence par "Au clair de la lune Mon ami Zongo refusa de bâillonner sa plume au Burkina Faso" et le refrain martèle "la démocratie du plus fort est toujours la meilleure".
Le journaliste burkinabé, Norbert Zongo, a été retrouvé criblé de balles et carbonisé en décembre 1998 avec trois autres personnes.
Norbert Zongo, directeur de l'hebdomadaire privé l'Indépendant enquêtait sur une affaire de meurtre mettant en cause le frère du président Blaise Compaoré, François, et des membres de la garde présidentielle.
Les radios diffusent également une des chansons les plus connues de Tiken Jah Fakoly, "Y'en a marre" (l'Afrique en a marre) qui commence par ce couplet: "des journalistes assassinés, parce que des présidents assassins".
Sont également diffusés des titres des Sénégalais Ismaël Lô et Youssou N'dour ("Porter presse").
Les plages de musique sont entrecoupées de rappels de discours d'hommes politiques sénégalais en rapport avec la liberté de la presse.
Actualité internationale et africaine - sangonet