L'Erythrée et l'Ethiopie ont mis fin dimanche à Alger à plus de deux ans de guerre qui ont fait des dizaines de milliers de morts en signant un accord d'arrêt des hostilités "applicable immédiatement".
Cet accord, objet de longues et laborieuses négociations, a été signé par les ministres des Affaires étrangères d'Erythrée et d'Ethiopie, MM. Haile Woldensae et Seyoum Mesfin, en présence du président algérien Abdelaziz Bouteflika, président en exercice de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA).
Le calme régnait dimanche sur tous les fronts de la guerre éthio-érythréenne, a indiqué à l'AFP le porte-parole de la présidence érythréenne, Yemane Ghebremeskel.
Les deux ministres, dans de brèves interventions à l'issue de la signature au Palais du peuple d'Alger (ex-Palais d'été), se sont engagés à respecter les dispositions de l'accord.
Cette signature est "un jour historique", a affirmé Seyoum Mesfin. "C'est le résultat d'un effort collectif."
Pour son homologue érythréen, "cet accord marque le commencement de la fin d'un conflit entre l'Erythrée et l'Ethiopie".
Ils ont rendu hommage aux efforts de M. Bouteflika qui, au cours du mois de mai, a notamment fait la navette entre Asmara et Addis Abeba pour rapprocher les points de vue des frères ennemis.
Le président algérien a souligné que cet accord, "victoire de la paix et de la dignité", allait "permettre aux deux pays de régler leur différend frontalier selon le droit international avalisé par l'OUA en 1964 dans le respect des frontières héritées de la colonisation".
M. Bouteflika a lancé un appel aux "Nations Unies en collaboration avec l'OUA pour qu'elles mobilisent rapidement les forces internationales afin que la paix s'installe durablement dans la région". Il a aussi demandé "la mobilisation des gouvernements et des peuples d'Amérique et d'Europe pour une aide économique et sociale à ces deux pays".
L'accord prévoit, notamment, le déploiement d'une force internationale entre les deux belligérants.
Une zone temporaire de sécurité va être créée dans une bande de 25 km à l'intérieur du territoire érythréen et une mission de maintien de la paix des Nations Unies, dont la composition sera définie ultérieurement, y sera déployée entre les deux camps.
Selon le texte de l'accord publié par l'OUA à Asmara et à Addis Abeba, les deux pays doivent cesser "toute activité hostile sur terre et dans les airs immédiatement après la signature de l'accord".
Le mandat de la mission de maintien de la paix sera de surveiller l'arrêt des hostilités et le redéploiement des troupes éthiopiennes, d'assurer l'observation des engagements de sécurité acceptés par les deux parties et de surveiller la zone temporaire de sécurité érythréenne prévue par l'accord.
L'Erythrée et l'Ethiopie garantissent "la liberté de mouvement et d'accès à la mission de maintien de la paix et respect et la protection des membres de cette mission".
Déclenché en mai 1998 à la suite d'un différend frontalier, le conflit s'est transformé en guerre de grande ampleur, faisant des dizaines de milliers de morts jetant sur les routes plus d'un million de réfugiés.
Il a fallu deux rounds de négociations indirectes à Alger, sous la médiation de l'Algérien Ahmed Ouyahia, pour obtenir à l'arraché cet accord.
Un premier round, début mai, avait tourné court au bout de six jours. Après cet échec, les combats avaient redoublé. Un deuxième round s'était engagé à Alger le 30 mai.
(AFP, Alger, Dimanche 18 Juin 2000 -15h02 heure de Paris)