De la mutinerie au coup d'Etat en Côte d'Ivoire à l'aube du troisième millénaire

(Revue de presse sur les journées des 23, 24, 25 décembre 1999, préparée par H. GROTHE et V. BISSENGUE)


Le général Robert Gueï, a obtenu samedi le ralliement de tous les chefs militaires et des forces de l'ordre
Le général Robert Gueï refuse tout renfort français et demande le départ de Henri Konan Bédié
Gueï veut empêcher Bédié de quitter le pays, et resserre dans le même temps son emprise
LACHETE - YA MEUN'GA
MESSAGE DU CHEF DE L'ETAT A LA NATION ET LE CHANTAGE DE BEDIE AU RDR
CAMPUS DE COCODY : ETUDIANTS ET POLICIERS S'AFFRONTENT
Bédié a quitté la résidence de France et se trouve "en sécurité"
Le général Gueï promet que "la démocratie sera respectée"
Le point de l'actualité internationale à 05H30 Vendredi 24 décembre 1999
Soulèvement de militaires à Abidjan vu du côté ivoirien
2E FOCUS Côte d'Ivoire/Silence radio-télévision


Le général Robert Gueï, a obtenu samedi le ralliement de tous les chefs militaires et des forces de l'ordre

Le nouvel homme fort de Côte d'Ivoire, le général Robert Gueï, a obtenu samedi le ralliement de tous les chefs militaires et des forces de l'ordre, ainsi que du parti du président déchu Henri Konan Bédié, dont il a exigé le départ du pays.
Le général Gueï a par ailleurs refusé tout renforcement du dispositif militaire français dans le pays, alors que Paris avait annoncé plus tôt dans la journée l'envoi de renforts à Abidjan et dans la région.
Et il a fait une démonstration de force avec l'apparition dans la soirée à la télévision nationale de tous les commandants de l'armée, de la gendarmerie et de la police, ainsi que du numéro 2 du parti du président Bédié, pour faire allégeance au nouveau pouvoir.
Les commandants des différentes armes (infanterie, parachutistes, marine, blindés) ou des principales unités ont été montrés à une même table, s'engageant aux côtés du Comité national de salut public (CNSP), dont le général Gueï a annoncé la création dans la matinée de samedi.
Plusieurs responsables considérés comme de loyaux soutiens du président déchu se sont ainsi ralliés, dont les généraux Attoh Nanguy, directeur de la police nationale, et Séverin Konan, directeur de la gendarmerie, corps très important dans le pays et dont l'allégeance était jusqu'alors incertaine.
Autre ralliement d'importance, même s'il ne semblait pas spontané, celui du numéro 2 du parti de M. Bédié, Laurent Dona Fologo, un des piliers du régime.
Entouré d'hommes en armes, M. Fologo, secrétaire général du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI-au pouvoir depuis 1960), a souligné que "pour que la Côte d'Ivoire connaisse toujours la paix (...) nous ne pouvons que souhaiter la réussite de cette entreprise dans l'intérêt de nos populations".
Le général Gueï a enfoncé le clou en souhaitant "qu'avec cette intervention des différents animateurs des différentes composantes des forces de l'ordre le peuple soit rassuré, que les diplomates soient rassurés (...) et sachent qu'il s'agit d'une action collégiale pour le bonheur du peuple ivoirien et le salut de la République".
Le général Gueï a toutefois exprimé sa vive irritation quant la présence continue en territoire ivoirien du président déchu, réfugié sur une base française proche de l'aéroport d'Abidjan et affirmé que l'envoi de renforts français dans le pays ferait "couler le sang".
Paris a reconnu samedi que le président déchu était réfugié, "à sa demande", sur la base du 43ème BIMA, qui compte 550 hommes et jouxte l'aéroport d'Abidjan et annoncé l'envoi de renforts.
"Si Bédié ne quitte pas la Côte d'Ivoire, l'ambassadeur de France portera la responsabilité de ce qui se passera", a ajouté le général, affirmant que "le peuple et les jeunes mutins (qui ont lancé le soulèvement ayant conduit à la chute de M. Bédié) veulent aller chercher Bédié".
Les autorités françaises sur place estiment ce départ impossible techniquement dans l'immédiat.
Le général Gueï refuse pour sa part que le Premier ministre et le ministre de la Défense du président déchu, également réfugiés au 43ème BIMA selon des sources concordantes, quittent la Côte d'Ivoire avec le président.
Le général Gueï a vigoureusement rejeté tout envoi de renforts français, affirmant que "positionner d'autres troupes françaises serait appliquer une vieille stratégie honteuse déjà appliquée par la France dans le passé".
Samedi matin, officialisant le renversement du président Bédié, le général Gueï avait annoncé la formation d'un Comité national de salut public (CNSP), composé de dix officiers et sous-officiers.
Il aura pour principale tâche "d'assurer la sécurité des biens et des personnes et de restaurer l'autorité de l'Etat en vue de créer les conditions de l'organisation d'élections libres et transparentes", selon le général Gueï, ancien chef d'état-major de l'armée, limogé en 1995 par le président Bédié puis accusé de complot.
Le CNSP prendra notamment contact avec les principaux leaders de l'opposition au président déchu, dont Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo, en vue de la future constitution d'un gouvernement de "large consensus".
Alors que plusieurs quartiers d'Abidjan ont été dans la nuit de vendredi à samedi le théâtre de pillages systématiques de magasins, notamment par des soldats mutins, le général Gueï a ordonné de tirer à vue sur les pillards et les personnes ne respectant pas le couvre-feu en vigueur de 18H00 à 05H00 (locales et GMT).
Il a promis que la vie reprendrait son cours normal dès lundi et le CNSP a annoncé pour dimanche la réouverture de l'aéroport international d'Abidjan.

ABIDJAN, 25 décembre 1999, AFP, 23h42 heure de Paris)

 

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Le général Robert Gueï refuse tout renfort français et demande le départ de Henri Konan Bédié

Le nouvel homme fort de Côte d'Ivoire, le général Robert Gueï, a refusé samedi l'arrivée de tout renfort de Militaires français et exigé le départ du président déchu Henri Konan Bédié, réfugié sur une base française proche de l'aéroport d'Abidjan.
Au sortir d'une réunion des principaux chefs militaires qui ont pris le pouvoir vendredi, le général Gueï a vigoureusement refusé l'envoi annoncé par Paris de renforts pour assurer la sécurité des ressortissants français après la mutinerie militaire qui a conduit au renversement du président Bédié.
"A cela nous disons non", a déclaré le général Gueï à l'AFP, affirmant qu'un tel envoi ferait "couler le sang".
Il s'est engagé à défendre les "intérêts français et de la France" en Côte d'Ivoire et à assurer la sécurité des ressortissants étrangers.
"Le 43 ème BIMA (NDLR: force française de 550 hommes présente à Abidjan), ça suffit. Positionner d'autres troupes françaises serait appliquer une vieille stratégie honteuse déjà appliquée par la France dans le passé", a-t-il poursuivi.
Paris a reconnu samedi que le président déchu était réfugié, "à sademande", sur la base du 43ème BIMA, qui jouxte l'aéroport d'Abidjan.
Le problème du départ du pays du président déchu a fait monter la tension toute la journée entre le nouveau pouvoir militaire et les autorités françaises sur place qui estiment ce départ impossible techniquement dans l'immédiat.
"Si Bédié ne quitte pas la Côte d'Ivoire, l'ambassadeur de France portera la responsabilité de ce qui se passera", a ajouté le général, affirmant que "le peuple et les jeunes mutins (qui ont lancé le soulèvement ayant conduit à la chute de M. Bédié) veulent aller chercher Bédié".
Le général Gueï refuse notamment que le Premier ministre et le ministre de la Défense du président déchu, selon lui également réfugiés au 43ème BIMA, quittent la Côte d'Ivoire avec le président.
Samedi matin, officialisant le renversement du président Bédié, le général Gueï a annoncé la formation d'un Comité national de salut public (CNSP), composé de dix officiers et sous-officiers.
Le CNSP aura pour principale tâche "d'assurer la sécurité des biens et des personnes et de restaurer l'autorité de l'Etat en vue de créer les conditions de l'organisation d'élections libres et transparentes", a affirmé le général Gueï, ancien chef d'état-major de l'armée, limogé en 1995 par le président Bédié puis accusé de complot.
Le CNSP prendra notamment contact avec les principaux leaders de l'opposition au président déchu, dont Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo, en vue de la future constitution d'un gouvernement de "large consensus".
Alors qu'Abidjan a été dans la nuit de vendredi à samedi le théâtre de pillages systématiques de magasins, notamment par des soldats mutins, le général Gueï a annoncé que les violations du couvre-feu - imposé de 18H00 à 05H00 (locales et GMT) - feraient désormais l'objet de "tirs sans sommation".
Les principaux théâtres de ces pillages ont été la rue du Commerce dans le quartier administratif du Plateau et le boulevard Valéry Giscard d'Estaing, principale avenue de la capitale économique ivoirienne qui relie le Plateau à l'aéroport.
Le général Gueï a promis samedi que la vie reprendrait son cours normal dès lundi et le CNSP a annoncé pour dimanche la réouverture de l'aéroport international d'Abidjan.
Le nouvel homme fort du pays, porté à leur tête par les soldats mutins qui avaient investi jeudi Abidjan, a par ailleurs indiqué que quatre ministres du président Bédié avaient été arrêtés.
Il n'en a cité nommément que trois: le ministre de l'Intérieur, Emile Constant Bombet, le ministre de la Solidarité nationale, Laurent Dona Fologo, également secrétaire général du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI, au pouvoir depuis l'indépendance), et le ministre du Commerce extérieur, Guy Alain Gauze.
De ce dernier ministère dépendait la filière cacao, principale ressource du pays, actuellement plongée dans une profonde crise.
Des sources militaires ont également fait état de l'arrestation du ministre des Affaires étrangères de M. Bédié, Amara Essy.
Le général Gueï a simplement déclaré à l'AFP que M. Essy "avait demandé à (le) voir".

(ABIDJAN, AFP - 25 décembre 1999 20h42)

 

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Gueï veut empêcher Bédié de quitter le pays, et resserre dans le même temps son emprise (1)
(samedi 25 décembre 1999, 1h08)

Côte. d'Ivoire - Le chef des soldats insurgés resserre son emprise
Par Nicolas Pythian

ABIDJAN, 25 décembre - Le général ivoirien Robert Gueï, leader des soldats qui se sont mutinés à Abidjan, a consolidé vendredi son emprise sur la situation et rendu hommage à ceux qui s'étaient ralliés à sa cause.
Cet ancien chef des forces armées, qui a annoncé dans la journée que le président Henri Konan Bédié était destitué, a ensuite affirmé que la France lui avait demandé d'autoriser Bédié à quitter le territoire. L'information a été démentie par l'ambassade de France.
Le général Gueï a annoncé la mise en place d'un "comité de salut public" censé prendre la direction des affaires nationales. La Côte d'Ivoire, premier producteur mondial de cacao, n'a jamais connu de coup d'Etat depuis son accession à l'indépendance en 1960.
"Dès cet instant, le président Henri Konan Bédié n'est plus le président de la Côte d'Ivoire", a dit Gueï, avait été limogé et assigné à résidence pour tentative de coup d'Etat en 1995, au moment de l'élection de Bédié.
Bédié, dont on ne sait pas avec certitude où il se trouve, a déclaré à Radio France International qu'il était toujours aux commandes et a exhorté les Ivoiriens à résister "par tous les moyens" à la rébellion, qu'il a qualifiée de "grotesque et rétrograde".

Couvre-feu imposé à Abidjan
Les forces loyales au président Bédié n'ont pour l'heure tenté aucune action. A la mi-journée, on avait rapporté de source militaire loyaliste que Bédié avait ordonné à ses troupes de "mater la rébellion".
Gueï a imposé un couvre-feu entre 18h00 et 05h00. Selon certaines informations, le ministre de l'Intérieur de Bédié aurait été arrêté.
Par ailleurs, la télévision nationale, contrôlée par les mutins descendus dans les rues d'Abidjan jeudi pour réclamer une revalorisation de leurs traitements, a présenté Gueï comme le président du pays.
Le général Gueï a assuré aux diplomates en poste en CÔte d'Ivoire que leur sécurité serait garantie. "Les accords internationaux seront maintenus et scrupuleusement respectés", a-t-il dit lors d'une allocution télévisée. Il a annoncé l'envoi "dans un très proche avenir" de délégations à l'étranger pour expliquer les "bonnes raisons des actes que nous venons de faire".
Le calme prévalait vendredi soir à Abidjan, ville portuaire de trois millions d'habitants, hormis quelques coups de feu sporadiques.
Dans son intervention, Bédié a appelé "toutes les forces vives, tous les commissaires de la République, préfets, sous-préfets, tous les élus, maires, députés, la société civile, toutes les populations du pays profond, à organiser pour une fois en Afrique, la résistance".
Gueï veut empêcher Bédié de quitter le pays

Gueï a dit que cet appel justifiait que l'on empêche Bédié de quitter le pays.
"L'ambassadeur de France m'a appelé pour recourir à la compréhension des mutins pour que la France aide Bédié à fuir le pays", a dit le général insurgé lors d'un entretien par téléphone à Reuters.
"Lorsque Bédié a commencé à parler aux antennes de la radio et de la télévision françaises pour dire qu'il invite la population à la désobéissance civile, j'ai encore appelé l'ambassadeur (de France) pour lui dire que, d'un côté, Bédié ne peut nous demander d'être compréhensifs et de le laisser partir du pays, et de l'autre côté, envisager d'inviter la population à la désobéissance civile", a-t-il ajouté.
La plus grande incertitude règne à Abidjan quant au lieu où se trouve Bédié. Dans son intervention sur l'antenne de RFI, il a assuré qu'il était dans sa résidence officielle, mais selon certaines informations il aurait gagné la résidence de l'ambassadeur de France. Des témoins ont dit quant à eux qu'un convoi sous escorte avait quitté dans l'après-midi la résidence présidentielle du quartier de Cocody.

La France a condamné vendredi un "coup de force" en appelant "au rétablissement immédiat de l'ordre et de la sécurité à Abidjan".
Ce "coup de force" survient au lendemain d'une mutinerie d'une poignée de soldats qui réclamaient une revalorisation de leur solde. On précise toutefois de sources militaires qu'une frange de l'armée est hostile à l'action de Gueï, au motif qu'elle risque d'isoler la Côte d'Ivoire sur le continent africain et sur la scène internationale.
Bédié avait rencontré dans la matinée une délégation des mutins pour entendre leurs doléances. Les rebelles réclament notamment la libération de tous les prisonniers politiques, parmi lesquels figurent 11 membres du parti de l'ex-Premier ministre Alassane Ouattara, le Rassemblement des républicains (RDR).
L'entourage du président Bédié dénie à Ouattara, candidat à l'élection présidentielle d'octobre 2000, la nationalité ivoirienne. Un mandat d'arrêt a été lancé à son encontre pour "faux commis dans les documents administratifs, usage de faux complicité". L'opposant se trouve actuellement en France. /SOL/PBR

 

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LACHETE - YA MEUN'GA

Henri Konan Bédié, Laurent Dona Fologo et tous les va-t-en guerre du PDCI engagés dans une guerre stupide contre Alassane Dramane Ouattara et le RDR ne savent pas jusqu'où leurs actes inutilement belliqueux peuvent avoir des répercussions graves sur l'image de la Côte d'ivoire à l'extérieur et des inconvénients sur la vie de leurs concitoyens hors des limites du territoire national.
Certes, quand un Bédié ou un Fologo part à l'étranger, il bénéficie de la protection due à son rang de président de la République ou de ministre. Mais combien d'Ivoiriens ont-ils ce privilège de n'être pas en contact avec le petit peuple prompt à réagir, à appliquer la loi du Talion ?
Même avec le titre de ministre, un Ivoirien n'est sûr aujourd'hui de ne pas essuyer la mauvaise humeur des autres Africains. Ainsi, il y a quelques semaines en arrière, le ministre Léopoldine Tiézan Coffie, en mission à Addis-Abeba, a-t-elle dû affronter le courroux des autres délégations africaines. On raconte qu'il ne faisait pas beau d'être dans la peau d'un Ivoirien à ce forum qui a montré son hostilité aux représentants de la nouvelle vague de xénophobes africains qui éclaboussent le continent noir de leurs thèses rétrogrades à quelques jours de l'an 2000.
À en croire les témoignages de nombreux cadres ivoiriens qui ont participé à des séminaires, colloques et conférences depuis le début de la cabale contre ADO, les gens ne comprennent pas comment un pays si grand dans l'esprit de nombre d'Africains a pu tomber si bas avec ses nouveaux dirigeants. En tout cas, les gens ont du mal à comprendre et à accepter l'offensive du pouvoir ivoirien contre ADO.
Si dehors, on est perplexe, à l'intérieur du pays, des voix autorisées comme celle de Laurent Gbagbo, président du FPI, candidat de ce parti à l'élection présidentielle de l'an 2000, dénoncent sans ambages le jeu dangereux auquel le PDCI, son chef et certains de ses militants se livrent : Quand un homme n'est pas d'accord, il dit non. Mais tu ne peux pas manger dans la main d'Houphouet, ne rien dire et puis attendre sa mort pour dire que c'est Houphouet qui a fait ceci ou cela. ( ) Si jamais les juges établissaient que M. Ouattara n'est pas Ivoirien, je porterai plainte contre le PDCI.

Parce qu'il nous a trompés.

Les joueurs du Stade d'Abidjan qui se sont retrouvés en terre burkinabé à l'occasion de la récente phase finale de la 23 ème édition de la coupe UFOA ont eu à se rendre compte, par eux-mêmes, du danger que la bande à Bédié fait courir aux Ivoiriens qui vont à l'étranger. Lapidés, ils ont entendu des Ivoiriens bâtards !
Rentrez chez vous à Tabou !
Dur le prix à payer pour la dérive xénophobe actuelle et pour l'attitude de la classe dirigeante faite, hier, de lâcheté.

Par Freedom Neruda
e-mail:
freedomtr@hotmail.com

(24 Décembre 1999 22:45:06 +0100)

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MESSAGE DU CHEF DE L'ETAT A LA NATION ET LE CHANTAGE DE BEDIE AU RDR
(Date: Fri, 24 Dec 1999 22:49:58 +0100)

M. Henri Konan Bédié n'a pas pris de mesures d'apaisement, hier, à l'occasion de son message à la nation comme d'aucuns l'avaient prédit. En lieu et place, une déclaration qui sent le chantage.
"Vous voulez des mesures d'apaisement ? Alors repassez demain. Et surtout tachez de devenir bien sages avant de revenir". Tel semble être le message que le Président de la République, M. Henri Konan Bédié a envoyé, aux dirigeants du Rassemblement des républicains (RDR), dans son message à la nation, hier, à l'assemblée nationale. Avec une pointe d'ironie, il a proposé aux dirigeants du RDR, "ceux qui sont à l'étranger comme ceux qui sont ici", ce qu'il a appelé "un minimum de code de conduite" qui se résume en trois points : le respect de l'Etat de droit qui se traduit par le respect des lois en vigueur ; le respect de l'autorité de la justice et de l'autorité de la chose jugée ; la participation à la sauvegarde de l'ordre public avec l'abandon de toutes les manifestions susceptibles de troubler l'ordre public, d'obstruer les voies publiques etc.
"Si ces engagements qui constituent un minimum de code de bonne conduite sont affirmés, alors devra être envisagé l'arrêt des poursuites devant les tribunaux et l'on pourra prendre des mesures d'apaisement", a dit en substance le Président Henri Konan Bédié. Il a ajouté que lesdites "propositions valent réconciliation si elles sont suivies". Selon lui, les mesures d'apaisement qu'il se propose de prendre "permettront à tous de vivre en paix pour que nous allions ensemble aux élections". Et cela "au nom de la démocratie apaisée et du dialogue sans ingérence extérieure", selon ses propres termes. Il a, toutefois, tenu à affirmer que la Côte d'Ivoire est un pays de droit et un pays démocratique. Aussi a-t-il soutenu que les dirigeants du RDR actuellement en prison ne sont pas condamnés pour leurs opinions, mais plutôt à cause des casses qu'ils auraient perpétrés lors de la marche du 27 octobre dernier. Pour M. Bédié, la Côte d'Ivoire est non seulement un pays de droit, un pays démocratique, mais aussi et surtout un Etat souverain qui ne saurait admettre les ingérences d'où qu'elles viennent. Aussi s'est-il attaqué, avec une violence verbale dont lui seul a le secret, à tous ceux qui, ces derniers temps, se sont inquiétés de la situation socio-politique en Côte d'Ivoire. "N'en déplaise à certains esprits chagrins et donneurs de leçons, notre pays est pleinement démocratique et un pays de droit", a-t-il déclaré. Et, il a ajouté plus loin que la souveraineté de la Côte d'Ivoire est aujourd'hui mise en cause par "des organisations qui s'arrogent le droit de décider de ce qui est bon pour les Ivoiriens".
M. Bédié a saisi, l'occasion qu'il avait pour faire un grand développement sur les notions de souveraineté, de démocratie et de citoyenneté. Ceci lui a permis de se livrer encore une fois à son jeu favori d'attaque contre ses adversaires politiques dans des allusions à peine voilées. "L'intégration à la communauté nationale est un processus et non le résultat d'un coup de baguette magique à effet instantané", a-t-il affirmé. M. Bédié s'est ensuite interrogé : "quelles sont ces personnes ivoiriens les jours pairs et non ivoiriens les jours impairs ? N'y a-t-il pas dans nos formations politiques assez de personnalités qui remplissent les conditions". Pour lui, il appartient aux ivoiriens de refuser l'imposture. Après s'être attaqué à ses adversaires et ceux qui s'ingèrent dans la politique intérieure de la Côte d'Ivoire, le Chef de l'Etat a, enfin, évoqué la question épineuse de la dette sous le poids de laquelle ploie la Côte d'Ivoire.

La Côte d'Ivoire et sa dette extérieure
Selon le Président de la République, le gouvernement a pris l'engagement de payer entièrement sa dette extérieure à laquelle, selon lui, 52 % du budget de l'Etat sont consacrés. Il a déclaré que bientôt, l'objectif sera atteint. Mais, il n'a pas manqué l'occasion pour dénoncer ce qu'il a appelé l'ingérence des institutions de Bretton Woods dans le budget de l'Etat de Côte d'ivoire. Il a soutenu que la fin de cette situation sera également la fin "de 20 ans de tracasseries et d'ingérence". Le Président de la République de Côte d'Ivoire a avoué qu'au cours de cette période, trop de choses ont été imposées à la Côte d'Ivoire. Notamment des politiques anti-sociales difficilement supportables pour la population. Il a encore une fois donné rendez-vous aux ivoiriens à la période d'après l'annulation de la dette extérieure ou à tout le moins à son allégement, pour qu'ils puissent jouir du "progrès pour tous et le bonheur pour chacun".
En tout état de cause, M. Bédié tient à ce que les négociations avec les institutions de Bretton Woods aboutissent à des résultats heureux. Aussi-a-t-il pris l'engagement de piloter lui-même lesdites négociations dont il présidera deux fois par mois le comité.

La frayeur
Sur sa lancée, le chef de l'etat a un instant jeté un léger froid parmi ses partisans en lançant cette terrible phrase : "le monde change, nous devons changer aussi. Nous devons donner un souffle nouveau à notre action avec de nouvelles équipes". Et alors, l'on a cru un instant qu'il allait annoncer des décisions graves. Mais que non. Il a plutôt parlé de la réorganisation de la CAISTAB et de la douane. Il reconnaîtra tout de même que dans ce monde de globalistaion, les investisseurs exigent des structures économiques plus amples. Aussi a-t-il exprimé sa volonté de regroupement sous-régional. Mais en tenant compte de la spécificité de chaque nation.
Hier, M. Bédié a beaucoup parlé. De tout. Il a été acclamé par les "applaudisseurs" installés dans la salle des pas perdus de l'assemblée nationale à cet effet. Mais, il n'a pas dit l'essentiel qui apaiserait la situation socio-politique en Côte d'Ivoire. Pour une fois que le message à la nation était délivré dans l'hémicycle, et à 9 neuf jours de la fin de l'année, il n'a rien apporté de nouveau.

Augustin Kouyo

 

- Propos de Maître Boga Doudou Emile
(président du groupe parlementaire FPI): "Je suis déçu"

En tant que président du groupe parlementaire du Front populaire ivoirien, je veux exprimer ma déception. Parce que je m'attendais à un discours de grande qualité du point de vue du contenu, du point de vue de la forme, parce que nous sommes à quelques jours du 3ème millénaire. Or, le chef de l'Etat du point de vue de la forme a manqué de sérénité. Il a été dans la majeure partie du discours inutilement agressif. Du point de vue du fond, il s'est attaqué, mais de façon inutile à des organisations internationales, à l'opinion internationale. Et ça, il n'a pas eu un discours de rassembleur. C'est cela qui m'a déçu. Et il a déjà ouvert sa campagne, mais ce n'est pas le cadre. Il s'adresse à la nation à quelques jours du 3ème millénaire, j'en attendais plus. Je m'attendais à un discours de rassembleur, un discours de dépassement, un discours de tolérance. Et j'attendais que le chef de l'Etat nous dise qu'il saisit l'Assemblée nationale pour le vote d'une loi d'amnistie. C'est ça qui aurait montré qu'il est tolérant. Mais on n'a pas vu tout cela, je suis déçu.

 

- Ousmane Sy Savané
(député RDR) : "Je suis perplexe"

Je suis un peu perplexe à la lecture du discours que le Président de la République vient d'adresser à la nation. Cela me fait dire que les décisions auxquelles nous nous attendions ne sont pas tombées. La première décision était de reconnaître la réalité telle qu'elle est et non pas l'apparence qu'on a plaquée sur elle. Je veux parler de la nationalité d'Alassane Ouattara. Alassane n'a pas une double nationalité. Il n'a qu'une seule et même nationalité acquise par le sang et le sol. C'est la nationalité ivoirienne. Personne n'a enregistré à aucun moment de l'histoire de ce garçon qu'il a renoncé à sa nationalité. Car pour ce faire, il faut un acte juridique qui est publié et porté à la connaissance de la nation entière pour qu'elle en prenne acte.
La deuxième préoccupation du député RDR que je suis, c'est lorsque le Président dit qu'il faut que le RDR respecte les lois de la République. Nous pensons que nous respectons les institutions de la République. C'est pour cela d'ailleurs que nous avons créé ce parti. Pour que le respect soit général et généralisé. De sorte que nos institutions gardent leur autonomie les unes par rapport aux autres et leur respectabilité. C'est ce que nous cherchons et souhaitons. Nous y sommes très attachés. Que la justice soit autonome, indépendante et qu'elle rende la chose jugée crédible. Mais, je ne désespère pas dans la mesure où le Président a laissé entrevoir qu'il est animé d'une volonté d'ouverture.

 

- Auguste Séverin Miremont
(président du groupe parlementaire PDCI) : "Nous sommes satisfaits"

Le message qui nous a été livré est un message dense, fort comme le Président de la République en a l'habitude. Il a indiqué trois axes. Il y a d'abord son message pour conforter la paix, l'unité nationale et surtout la souveraineté nationale. Parce que c'est un leg que nous devons laisser aux générations futures. La Côte d'Ivoire n'est pas devenue indépendante pour se laisser dominer par d'autres pays ou pour revenir à la dépendance qu'elle a connue sous la colonisation.
Le deuxième, c'est un message économique pour lequel il nous a demandé encore des sacrifices. Qui, d'ailleurs et bientôt connaîtront la fin et avec elle la lutte contre la pauvreté, la lutte pour le développement.
Le troisième axe, c'est le pas vers la réconciliation nationale qu'il demande aux dirigeants du RDR de franchir. Par les conditions qu'il a fixées. Je dois dire que les membres de mon groupe sont satisfaits de ce discours et surtout de l'espérance qu'il laisse augurer.

Propos recueillis par Augustin Kouyo
Collaboration : Koné Fidel

 

CAMPUS DE COCODY : ETUDIANTS ET POLICIERS S'AFFRONTENT

Pour réclamer la réouverture des résidences universitaires, les étudiants ont organisé, hier, un sit-in devant la direction du centre régional des oeuvres universitaires, au campus de Cocody. A peine le rassemblement a-t-il commencé que des éléments de la brigade anti-emeute, ont fait irruption, à bord de leurs chars hérités

du régime de l'apartheid. Les gaz lacrymogènes et les matraques ont alors été distribués à tout bout de champ. Les étudiants y ont opposé une résistance éphémère avant de se disperser. Des policiers ont perdu des képis dans le corps à corps avec des étudiants. Plusieurs étudiants ont été interpellés. Parmi eux, Yavo Martial, 1er secrétaire adjoint à l'information de la FESCI.

Le secrétaire général de la FESCI, Blé Goudé Charles a reçu des coups de matraque au dos. "Le ministre Wodié et M. Séka Séka, directeur du CROU d'Abidjan avaient promis la réouverture des cités au plus tard le 15 décembre. Nous sommes le 22 décembre et c'est le statu quo pour la plupart des étudiants", indique Blé Goudé Charles. "Ça répond à une logique de messieurs Wodié et Séka Séka. Leur objectif est d'exclure la FESCI des résidences et y loger en priorité des étudiants recrutés pour renforcer la jeunesse du PIT. Si tu veux être logé le plus vite possible, tu dois prendre une carte de militant PIT", revèle-t-il.

"Je prends toute la nation à témoin de ce que les agissements de Wodié risquent encore de dégrader l'atmosphère. Nous lui demandons de se ressaisir et ouvrir les résidences universitaires avant le 3 janvier, délai de rigueur. Dans le cas contraire, la FESCI va prendre ses responsabilités et demander à tous les étudiants de descendre dans les cités. Pour l'instant, nous exigeons la libération de tous les étudiants interpellés ce matin (NDLR : hier)", a-t-il conclu.

 

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Bédié a quitté la résidence de France et se trouve "en sécurité"
(Vendredi 24 Décembre 1999 - 21h42 heure de Paris)

ABIDJAN (AFP) - Le président ivoirien Henri Konan Bédié, dont la destitution a été annoncée vendredi par les militaires mutinés, a quitté la résidence de France (domicile de l'ambassadeur de France) vers 17H00 (locales et GMT) et se trouve "en sécurité", a déclaré à l'AFP une source proche de l'ambassade.
Selon cette source, le chef de l'Etat a passé une partie de la journée de vendredi à la résidence de France, dans le quartier résidentiel de Cocody, après avoir passé la nuit à l'ancien domicile du président Félix Houphouët-Boigny, qui jouxte la résidence de l'ambassadeur de France.
A l'heure actuelle, le président Bédié, "n'est ni à la résidence de l'ambassadeur ni dans les locaux de l'ambassade", a assuré cette source, qui a tenu à conserver l'anonymat.
"Il est en sécurité", a ajouté cette même source, précisant que le chef de l'Etat se trouvait toujours sur le territoire ivoirien.
Les bâtiments de la résidence de France et le domicile de Félix Houphouët-Boigny se trouvent dans le quartier huppé de Cocody, en bord de lagune.
Des informations, souvent repétées mais jamais confirmées de source officielle, indiquent que ces deux constructions sont reliées par un tunnel.
Après 24 heures de mutinerie, des militaires ont annoncé vendredi la destitution du président Henri Konan Bédié et la constitution d'un Comité de Salut public, dont la composition n'a pas encore été annoncée.

A 20 heures, locales et GMT, la télévision nationale a rediffusé la proclamation du "porte-parole" des mutins, le général Robert Gueï, ancien chef d'Etat major, présenté en sous-titre comme "président de la Côte d'Ivoire".

 

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Le général Gueï promet que "la démocratie sera respectée"
(Vendredi 24 Décembre 1999 - 20h04 heure de Paris)

ABIDJAN (AFP) - Le général Robert Gueï, qui a annoncé vendredi la destitution du président ivoirien Henri Konan Bédié, a affirmé en fin d'après-midi à la télévision qu'il veillerait personnellement "à ce que les règles de la démocratie soient respectées" dans le pays.
"Un élément fondamental est à noter, c'est que la démocratie, les règles de la démocratie seront très respectées et j'y veillerai personnellement", a déclaré le général Gueï, dans une brève adresse diffusée vers 17H30 (locales et GMT) sur la première chaîne de télévision, contrôlée par les mutins.
"Je rassure tous les amis du corps diplomatique (...) que nous veillerons particulièrement à leur sécurité et qu'il sachent que les accords passés entre notre pays et les leurs, ces accords seront respectés", a-t-il ajouté.
"Les accords internationaux sont maintenus et seront scrupuleusement respectés", a-t-il poursuivi, ajoutant que "la sécurité des Ivoiriens et des non-ivoiriens sera aussi garantie".
Le général Gueï, ancien chef d'état-major de l'armée porté à la tête des mutins qui ont investi Abidjan jeudi, n'a pas fait mention de la formation du "Comité de salut public de la république", dont il avait annoncé la création vendredi matin.
"S'agissant de nos frères d'armes, qu'ils soient de la gendarmerie ou de la police, nous sommes heureux de constater qu'ils sont solidaires", a-t-il déclaré.
"Très prochainement nous enverrons des missions dans les pays frères et amis pour expliquer le bien fondé des actes que nous venons de poser", a encore dit le général Gueï.
Evoquant la situation sécuritaire à Abidjan, où des pillages ont été signalés depuis jeudi dans plusieurs quartiers, il a exhorté la population a coopérer avec les militaires.
"Nous savons que certains éléments incontrolés peuvent piller.
Nous vous demandons de nous aider à vous aider. Il faudrait, chaque fois que vous en verrez, ceux-là il faut les maitriser", a-t-il dit.
Evoquant enfin la situation économique plus que délicate du pays, il a annoncé son intention de se pencher "à très court terme (...) personnellement sur le problème des paysans", touchés de plein fouet par la baisse des cours et la libéralisation de la filière du cacao, dont le pays est le premier producteur mondial.

 

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Le point de l'actualité internationale à 05H30 Vendredi 24 décembre 1999

ABIDJAN (AP) -- Après s'être livrés à des pillages dans la capitale en raison notamment de retards dans les versements de leurs soldes, des soldats ivoiriens continuaient à tirer des coups de feu dans la nuit de jeudi à vendredi dans les rues d'Abidjan.
Un porte-parole de la présidence, qui s'exprimait sous couvert de l'anonymat, a déclaré dans la soirée que des négociations étaient en cours avec les chefs des mutins. Un responsable de la présidence, Daniel Kadja, a de son côté minimisé les troubles assurant qu'il n'y avait ``pas lieu de paniquer''.
La population continuait cependant à se terrer dans les maisons.

 

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Soulèvement de militaires à Abidjan vu du côté ivoirien

ABIDJAN, 23 décembre (AFP) - Des soldats se sont mutinés jeudi à Abidjan, la capitale économique ivoirienne, ont occupé les sièges de la télévision et de la radio, et continuaient dans la soirée à tirer des rafales en l'air dans plusieurs quartiers, alors qu'une délégation de leurs représentants était reçue par le gouvernement.
La délégation des mutins est arrivée en fin de journée à la primature (siège du gouvernement) où elle a été reçue par plusieurs membres du gouvernement, dont le ministre de la Défense Bandama N'Gatta.
Le gouvernement était réuni à la primature depuis 16H00 (locales et GMT) en comité de crise.
La télévision et la radio nationales, dont les sièges sont aux mains des mutins depuis le début de leur révolte, n'ont pas repris leurs émissions.
Les tirs des mutins, qui circulent en toute liberté à travers la ville à bord des véhicules qu'ils ont "réquisitionnés" sous la menace de leurs armes, retentissaient toujours dans la nuit.
Ils sont toutefois nettement moins nombreux qu'au cours de l'après-midi. Des scènes de pillage sont également signalées en plusieurs quartiers de la ville.
Ni les mutins ni les autorités ne s'étaient adressés à la population après 22H30.
Les raisons du soulèvement et le nombre exact de militaires impliqués - 200 au maximum selon la plupart des observateurs - ne sont toujours pas tout à fait claires.
Il semble que le soulèvement soit lié au non paiement de leurs primes aux soldats d'un ancien contingent de la Mission des Nations unies en Centrafrique (MINURCA), qui auraient trouvé le soutien d'une frange du reste de l'armée.

Les soldats révoltés auraient également, selon les informations obtenues de sources militaires, été furieux de ce que le président Henri Konan Bédié n'ait pas du tout évoqué leur sort, lors de l'important discours qu'il a fait mercredi devant l'assemblée nationale.
Cette adresse à la nation, en pleine crise provoquée par l'affaire Ouattara, qui visait calmer le jeu, semble ainsi avoir eu un effet inverse totalement inattendu et incompréhensible pour les Ivoiriens.
Cette mutinerie intervient alors que le pays traverse depuis plus de 4 mois une grave crise politique liée au refus du camp présidentiel d'autoriser l'ancien Premier ministre Alassane Dramane Ouattara à briguer la présidence lors de l'élection d'octobre 2000.
Rien n'indique toutefois que cette mutinerie soit liée directement à l'affaire Ouattara et, en tout cas, les mutins n'ont donné aucun signe indiquant une prise de position en faveur de l'ancien Premier ministre dont les principaux lieutenants sont en prison depuis octobre.
De bonnes sources on a appris que le président Bédié qui avait quitté jeudi matin Abidjan pour son village natal de Daoukro (centre), avait regagné dans la journée la capitale économique de Côte d'Ivoire.
Les mutins se sont emparés du siège de la Télévision ivoirienne, dans le quartier résidentiel de Cocody. Ils ont également investi les locaux de la radio, dans le quartier administratif du Plateau.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, plusieurs militaires venus du camp d'Akouédo, à l'est de la ville, avaient fait irruption au domicile du commandant de l'armée de terre, le général Maurice Tauthuis, pour lui soumettre des revendications.
Ces "soldats de base" se sont heurtés aux gardes en faction et ont échangé des coups de feu, a indiqué une source proche de l'armée ivoirienne. Un des mutins a été blessé.
La mutinerie a ensuite débuté en milieu de matinée, lorsque les mutins ont commencé à progresser vers le centre ville depuis le camp d'Akouédo.
En chemin, ils se sont attaqués à plusieurs magasins et ont "réquisitionné" de nombreux véhicules de particuliers ainsi que des taxis.

bur-sa/abm tf tmf

 

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Troubles militaires à Abidjan
par Glenn McKenzie

ABIDJAN, 23 décembre 1999 (AP) -- Des soldats ivoiriens armés ont pris d'assaut jeudi après-midi les rues d'Abidjan, tirant des coups de feu en l'air, volant des voitures et pillant les magasins, alors que la télévision et la radio nationales ont cessé d'émettre et que la population se terre dans les maisons.
Aucune explication officielle n'a été donnée à ces troubles, mais des responsables gouvernementaux et diplomates étrangers, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat, ont précisé que les militaires étaient en colère en raison de retards dans les versements de leurs soldes.
Dans la soirée, la situation est redevenue plus calme, mais des coups de feu sporadiques étaient encore entendus tandis que les soldats bloquaient les principales artères de la ville. Un mutin, interrogé sous couvert de l'anonymat devant une station-service, a déclaré qu'il n'avait toujours pas été payé après avoir participé à une mission de maintien de la paix en République centrafricaine.
``Il ne faut pas s'inquiéter'', a-t-il ajouté. ``Il n'y a pas de danger pour le peuple de Côte d'Ivoire''. Un autre soldat se plaignait des conditions de vie ``misérables'' alors qu'il repoussait les véhicules qui approchaient le siège de la télévision nationale dans le quartier de Cocody.
Dans la journée, des soldat ont encerclé un immeuble résidentiel des forces de police dans le quartier d'Adjame, relativement pauvre, où les restaurants ont été pillés ainsi que les stations-service.
Auparavant selon des témoins, les soldats ont volé de l'argent dans les caisses enregistreuses de magasins d'un centre commercial de la ville, qu'ils ont investi après avoir forcé les nombreux clients présents à se coucher à terre. ``Ils sont venus comme des fous'', a témoigné Pierre Koutou, un jardinier. ``Mais je n'ai pas vu de blessés''. D'autres soldats ont emprunté à bord de véhicules militaires la route conduisant à Bingerville, plus à l'est, et tiré des rafales d'armes automatiques en l'air.
Des voitures abandonnées jonchaient le bord des rues désertées par la population, alors que les soldats ont volé plusieurs véhicules à leurs propriétaires. Les magasins ont baissé leurs rideaux et quelques barricades s'érigeaient ça et là.
On pouvait également entendre des coups de feu près du siège de la télévision nationale. Cette dernière a d'ailleurs cessé d'émettre à 14h30 (15h30 à Paris) et la radio en a fait de même, sans aucune explication. En fin d'après-midi, les soldats patrouillaient devant les portes closes des deux édifices. Le personnel de l'ONU s'est retranché dans ses bureaux du centre ville en face de la radio nationale, selon le porte-parole des Nations unies à New York Fred Eckhard. Deux véhicules de l'ONU ont été endommagés par des coups de feu. Les portes de l'ambassade américaine voisine étaient également fermées.
En revanche, les rues environnant la résidence présidentielle dans le quartier de Cocody étaient calmes.
La Côte d'Ivoire a longtemps été un modèle de stabilité en Afrique de l'Ouest, mais les tensions politiques et sociales n'ont cessé de s'accroître à l'approche de l'élection présidentielle d'octobre 2000.
Le dirigeant de l'opposition Alassane Dramane Ouattara accuse ainsi le régime du président Henri Konan Bédié d'harceler son parti, le Rassemblement des républicains (RDR, centre). Douze de ses dirigeants ont ainsi été emprisonnés le mois dernier et un mandat d'arrêt pèse contre Ouattara lui-même.
Le pouvoir refuse en effet que ce dernier brigue la présidence en prétextant que son père est burkinabé et non ivoirien. Démentant ces affirmations, celui qui fut Premier ministre de 1990 à 1993 ainsi que directeur général adjoint du FMI en a appelé à la France pour sortir de la crise. ``La France ne peut rester indifférente à la situation en Côte d'Ivoire. Il faut qu'elle fasse quelque chose'', dit-il dans un entretien paru jeudi dans ``La Croix''.
Le président Bédié était apparu mercredi soir à la télévision pour appeler la population à se montrer calme et unie. Paraissant mal à l'aise, il avait promis ``réconciliation, paix, bonheur et prospérité'' si l'opposition acceptait de coopérer avec le gouvernement. AP

mw-nc/v0284-322/sb/424

 

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Quatre mois de tension politique en Côte d'Ivoire
(jeudi 23 décembre 1999, 18h47)

ABIDJAN, 23 déc (AFP) - La tension jeudi à Abidjan où des soldats incontrôlés ont tiré en l'air et occupé la radio et la télévision coïncide avec l'affrontement politique entre le président Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara, ancien Premier ministre et candidat déclaré à la présidentielle d'octobre 2000.
Le camp présidentiel s'est lancé dans une bataille politico-juridique contre M. Ouattara, auquel le pouvoir dénie la nationalité ivoirienne et donc la possibilité de briguer la magistrature suprême, arguant que l'ancien Premier ministre a possédé la nationalité burkinabè.

--AOUT--
- 1er: Retour en force sur la scène politique de M. Ouattara, après cinq ans passés à Washington comme directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI). Il annonce sa candidature à la présidentielle et est élu à la présidence du Rassemblement des Républicains (RDR, opposition libérale).

--SEPTEMBRE--
- 10: Interdiction d'un meeting du RDR à Dabou (40 km à l'ouest d'Abidjan).
- 14: Des policiers sont pris à partie par des militants devant le domicile de M. Ouattara, où des militants sont rassemblés depuis plusieurs jours. 388 personnes sont arrêtés et relâhées le lendemain.
- 18: Rencontre à Abidjan entre le président Henri Konan Bédié et M. Ouattara, la première depuis août 1995.
- 22: Annonce de l'ouverture d'une information judiciaire contre M. Ouattara pour "faux et usage de faux", après une enquête de la police judiciaire sur la "sincérité" de ses deux cartes d'identité ivoiriennes.

--OCTOBRE--
- 6: Le ministre de la Justice annonce que le certificat de nationalité ivoirienne délivré par un juge à M. Ouattara a été annulé pour "de nombreuses irrégularités".
- 9: M. Ouattara annonce à Paris le maintien de sa candidature à la présidence, réaffirme qu'il est de nationalité ivoirienne et dénonce la discrimination dont il ferait l'objet parce qu'il est musulman.
- 13: Le gouvernement accuse Ouattara de "dérive identitaire tribale et religieuse".
- 27: Le tribunal de Dimbokro (nord), la ville natale d'Ouattara, annule le certificat de nationalité ivoirienne qu'il avait fait déposer pour légaliser son élection à la tête du RDR.
- 28: Des manifestants de l'opposition incendient plusieurs bureaux de la préfecture de Korhogo, la principale ville du nord.

--NOVEMBRE--
- 12: Condamnation à deux ans de prison ferme des principaux cadres du RDR, dont la numéro deux, Henriette Dagri Diabaté, incarcérés depuis le 27 octobre à la suite de violences au cours d'une manifestation de ce parti. Washington et Paris expriment leur "profonde préoccupation".
- 26: Le président Bédié annonce l'interdiction des manifestations de rues pour une durée de six mois.
- 29: Un mandat d'arrêt est lancé contre M. Ouattara.

--DECEMBRE--
- 9: M. Ouattara appelle le président Bédié à démissionner. Il propose que le Conseil constitutionnel statue sur la recevabilité de sa candidature.
- 16: L'ancien Premier ministre accuse le pouvoir d'avoir mis le pays "à genoux" et de mettre "en péril la cohésion nationale".
- 18: Environ 15.000 de ses partisans se rassemblent à Abidjan "pour la défense des libertés" lors d'un meeting autorisé par les autorités.
Dans un message enregistré diffusé lors de ce meeting, M. Ouattara, qui se trouve hors du pays depuis le 19 septembre, demande à ses partisans de "continuer la lutte" contre "l"injustice et l'arbitraire".
- 22 déc: Le président Bédié propose au RDR d'accepter de respecter un "code minimum de bonne conduite", en échange de "l'arrêt des poursuites" et de "mesures d'apaisement". La presse d'opposition qualifie ce marché de "chantage".
- 23: Alassane Ouattara demande la médiation de la France. Paris critique à nouveau les autorités ivoiriennes dans l'affaire Ouattara.

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Côte-d'Ivoire: soulèvement de militaires à Abidjan

ABIDJAN (AFP) - Jeu 23 Déc 99 - 18h19 heure de Paris - Une mutinerie était en cours jeudi à Abidjan, où des soldats en uniforme se sont déployés en tirant en l'air dans différents quartiers de la capitale économique ivoirienne, s'attaquant notamment aux locaux de la radio-télévision.

Les raisons du soulèvement et le nombre exact de militaires impliqués n'étaient pas immédiatement connus, mais selon des témoins, les mutins affirment faire partie d'un ancien contingent de la Mission des Nations Unies en Centrafrique (MINURCA) et réclamer le versement de primes non perçues.
Des rafales d'armes automatiques sporadiques et quelques tirs de mitrailleuse se faisaient toujours entendre peu avant 17H00 (locales et GMT), notamment dans le quartier administratif du Plateau, où les mutins ont investi le siège de la radio nationale, qui a cessé d'émettre, à l'exception de 15 minutes où quelques morceaux de musique ont été diffusés.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, plusieurs militaires venus du camp d'Akouedo, à l'est de la ville, avaient fait irruption au domicile du commandant de l'armée de terre, le général Maurice Tauthuis, pour lui soumettre des revendications matérielles portant sur des questions de permissions et de solde.
Ces "soldats de base" se sont heurtés aux gardes en faction devant la maison et ont échangé des coups de feu, a indiqué une source proche de l'armée ivoirienne. Un des soldats mutins a été blessé, a précisé cette même source.
Aucune réaction des autorités ivoiriennes n'était immédiatement disponible sur la mutinerie en cours,que ce soit à la présidence, au ministère de la Défense ou au ministère de la Sécurité.
Venus de la caserne d'Akouédo, les mutins, portant les bérets rouges des unités commando, se sont déployés depuis le milieu de la matinée vers les quartiers résidentiels de la capitale économique, se livrant en chemin au pillage et volant des véhicules à des automobilistes ou réquisitionnant des taxis.
Ils ont attaqué divers magasins, faisant notamment irruption dans un grand centre commercial Sococe, où ils ont tiré quelques coups de feu, obligeant toutes les personnes présentes à se coucher par terre, a indiqué une vendeuse du magasin.
Vers 14H00, des éléments mutins ont gagné le quartier administratif du plateau, tirant en l'air sur leur chemin. Des camions chargés de soldats sillonnaient différents quartiers de la ville en tirant en l'air.
Aucune information ne faisait immédiatement état de victimes.
Les mutins se sont emparés du siège de la Radio Télévision Ivoirienne (RTI) dans le quartier résidentiel de Cocody, selon des sources concordantes. Ils ont également occupé et encerclé le siège de la radio situé au Plateau.
Certains passants ont été vus encourageant les mutins, alors que des cris de joie ont été entendus et que la rumeur affirmait en ville qu'il s'agissait d'un coup d'Etat.
Le président Henri Konan Bédié a prononcé mercredi un important discours devant l'Assemblée nationale, dans lequel il a proposé un compromis à l'opposition pour débloquer la situation politique.
Plusieurs dirigeants du parti de l'ancien premier ministre Alassane Ouattara ont été emprisonnés fin octobre, alors que le pouvoir dénie à M. Ouattara la possibilité de se présenter à l'élection présidentielle de l'an 2000.
Le personnel de la Maison d'arrêt d'Abidjan (MACA), qui a reçu l'appui de la gendarmerie, était "en alerte" jeudi après-midi après des informations annonçant l'arrivée de soldats mutins à la prison où sont incarcérés des dirigeants de l'opposition , a indiqué à l'AFP une source pénitentiaire.

 

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2E FOCUS Côte d'Ivoire/Silence radio-télévision*
(jeudi 23 décembre 1999, 17h38) par Nicholas Phythian

ABIDJAN, 23 décembre - Des militaires venant de l'une des plus grandes casernes de Côte d'Ivoire ont silloné jeudi les rues du centre d'Abidjan
après avoir, semble-t-il, tenté d'enlever dans la nuit le chef d'état-major de l'armée de terre, ont rapporté des témoins et des sources militaires.
En début d'après-midi, des tirs ont gagné le Plateau, le quartier des affaires et des ministères, peu après que de petits groupes de soldats eurent sorti leurs armes dans d'autres quartiers de la capitale économique.
*Pour le moment, on ne signale pas de victimes civiles et le gouvernement du président Henri Koan Bédié n'a pas publiquement réagi aux évènements.
*La radio et la télévision nationale (RTI) ont, cependant, cessé d'émettre.
*Selon des sources proches des services de sécurité, policiers et gendarmes ont reçu l'ordre de ne pas intervenir contre les militaires en colère et de laisser le mouvement s'essoufler.
D'après des témoins, des militaires ont aussi réquisitionné des véhicules civils.
On ignore pour le moment la cause de ce mouvement mais d'après certaines sources, il pourrait s'agir de militaires mécontents de leur solde et de leurs conditions de service.
D'autres affirment que les soldats sont en désaccord avec le discours prononcé la veille devant les députés dans lequel le chef de l'ETat a offert une amnistie conditionnelle à onze dirigeants de l'opposition emprisonnés en vertu de la loi anti-casseurs.
Selon des sources militaires, un groupe de six militaires venant du camp Akoudédo s'est rendu à 03h00 locales au domicile adbidjanais du général Maurice Tauthui, commandant l'armée de terre, pour exiger de voir leur chef. Ils ont pénétré de force, entraînant une riposte des gardes du général qui ont blessé l'un de six intrus.
En joue
D'après ces sources, des membres d'un groupe d'une vingtaine de soldats se sont emparés du controle du camp Akouédo et se répandent actuellement en ville.
"J'ai aperçu un camion transportant des hommes ressemblant à des soldats. L'un d'entre eux se tenait debout, il m'a mis en joue avec son fusil et dit 'Recule !'", a raconté Vincent t'Sas, correspondant de Reuters qui se trouvait non loin de l'école de gendarmerie d'Abidjan.
D'après lui, un axe principal menant de la capitale économique ivoirienne à Bingerville, l'ancienne capitale coloniale située à l'est, semblerait avoir été coupé.
Un témoin qu'a rencontré Vincent t'Sas a affirmé qu'unn soldat lui a déclaré: "Nous n'avgons rien contre la population !".
Un autre témoin a vu un véhicule de transport de troupes avec trois hommes à bord sur un parking du supermarché SOCOCE du quartier résidentiel des Deux Plateaux.
"Les types ont commencé à sortir et l'un d'entre eux a alors tiré avec son fusil. Les gens se sont jeté à terre pour se mettre à l'abri", a raconté Ann gray, un ancien agent de la police canadienne. On ignore si le militaire a fait des victimes.
Ces troubles interviennent dans un climat politique tendu, marqué par la polémique sur la nationalité ivoirienne d'Alassane Ouattara, candidat de la 2e formation politique de l'opposition à l'élection présidentielle d'octobre 2000, à laquelle Henri Konan Bédié briguera un nouveau mandat.

*Les services de sécurité et certains diplomates se sont efforcés de minimiser l'agitation dans la rue. "Ces soldats sont juste un peu mécontents, ce sont de simples soldats qui veulent leur part du gâteau", a commenté un diplomate occidental pour qui seuls quelques dizaines de militaires sont impliqués. /JLF


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