"Les va-t'en - guerre Centrafricains"
Si la nouvelle se confirme, voilà une bien mauvaise blague.
En effet, nous apprenons que des éléments de l'armée Centrafricaine auraient à plusieurs reprises pénétré en territoire camerounais, aux environs de GAROUA et auraient tenté d'annexer une portion territoriale de 100 à 1000 mètres de ce pays voisin.
Le drapeau centrafricain aurait même été hissé !
Jusqu'alors, malgré les protestations diplomatiques des autorités camerounaises, le gouvernement centrafricain s'enferme dans un lourd silence. Serait-ce l'aveu dune reconnaissance implicite de cette aventure stupide ou le signe avéré de son incompétence notoire à contrôler les troupes ? La question demeure.
Dans le premier cas, si le gouvernement centrafricain était au courant ou à l'initiative de cette entreprise hasardeuse, et la cautionne, on peut s'interroger sur ses motivations.
Certes, la découverte du pétrole du Tchad et la création d'un pipe-line le reliant au port de Kribi dans le sud-ouest camerounais attise les convoitises. On pourrait ainsi faire l'hypothèse d'une tentative d'annexion territoriale sur le tracé des pipe-line afin d'espérer participer aux partages des royalties dégagés de l'exploitation et du transport de l'or noir Tchadien. En effet la portion territoriale ainsi comprise ferait de la RCA un territoire de transit.
Une telle stratégie serait suicidaire, pour plusieurs raisons :
- la RCA et le Cameroun font partie depuis 1965 de L'UDEAC puis de la CEMAC,institutions d'harmonisation des politiques nationales de développement qui imposent aux pays de la bordure maritime de verser des compensations financières aux pays de linterland ; c'est à dire que, dune certaine manière, si les statuts de L'UDEAC étaient respectés, la RCA participerait au bénéfice de l'exploitation du pétrole tchadien.
- la RCA ne dispose pas d'une armée aguerrie et outillée pour mener une expédition hors ses frontières ou capable de se projeter sur des théâtres opérationnels extérieurs. On a vu d'ailleurs, au moment des mutineries de 96 et 97, qu'elle était incapable de juguler une rébellion interne. Il a fallu le concours de militaires français et de la MISAB pour conforter l'armée centrafricaine dans son rôle et ses missions de sécurité.
- les militaires font, depuis des mois, les frais de la mauvaise gestion gouvernementale et plusieurs unités accusent des retards de soldes conséquents, à l'instar des fonctionnaires de l'administration publique. On voit mal ces militaires - crève la faim - obéir à un ordre de marche dont les conséquences seraient dramatiques pour leur propre sort et pour le pays tout entier ; la RCA étant déjà en charge des réfugiés des guerres civiles dans les deux Congo.
S'agit-il alors d'une fraction des forces armées centrafricaine (FACA) en dissidence ou hors tout contrôle hiérarchique qui se serait lancée dans une aventure irréfléchie afin de se payer sur le dos des villageois camerounais sans défense ?
Cette seconde hypothèse n'exclut pas non plus le cas, sans doute plus plausible où nous serions en présence d'une bande armée de coupeurs de routes ou de militaires démobilisés dans le cadre des accords de Bangui et qui seraient utilisés par quelques potentats locaux ou agissant pour leurs propres comptes. Ils auraient pour but d'accéder, par le biais de la force ou en vendant leur puissance de feu, au partage de la rente pétrolifère qui naîtrait de l'exploitation du pétrole tchadien.
Comme on le voit, les deux hypothèses ne sont pas exclusives l'une de l'autre. Et le fait que le gouvernement centrafricain n'ait pas immédiatement réagit témoigne de son embarras ou de sa duplicité.
Or une guerre entre ces deux pays serait catastrophique pour la RCA, pour les raisons suivantes
- le pays ne dispose pas des moyens financiers pour soutenir 'effort de guerre qu'exige toute confrontation armée entre deux pays ;
- la RCA, gangrenée par la misère et la pauvreté aurait beaucoup de mal à disposer des infrastructures et de la logistique nécessaires à la conduite d'une guerre moderne.
- faute d'avoir été capable de payer les soldes et traitements depuis 29 mois, on voit mal ce gouvernement mobiliser les ressources humaines de première ligne et les réservistes indispensables à une telle expédition : l'arrière ne pourrait soutenir le front ;
- enfin, depuis la fermeture de facto de l'avitaillement du pays par le port de MATADI au Congo -Kinshasa, l'approvisionnement de la RCA en carburant dépend essentiellement du libre accès aux installations portuaires camerounaises de Douala.
Il suffirait dont d'un simple blocus camerounais pour que la RCA soit asphyxiée, sans possibilité de ravitaillement par voies fluviales ou terrestres.
Non, ne rêvons pas, dans les conditions actuelles le président centrafricain, n'a pas les moyens de livrer la guerre, tout au plus, pourra t-il jouer le Tartarin de Tarascon mais nullement revêtir la tunique d'un maréchal belliciste.
Dès lors, il lui appartient de dénoncer, cette entreprise guerrière sans lendemain, de rassurer nos voisins camerounais et d'assurer les fins de mois de ses militaires afin de leur ôter toute velléité de jouer les corps expéditionnaires, chasseurs de primes ou de butins de guerre.
L'affaire est sérieuse pour que Patassé se dérobe, puisqu'il est le commandant en chef de l'armée centrafricaine. Il lui faut veiller à tenir la bride à ses milices.
Pour une fois, il lui faut être "le président" et non plus l'affairiste pompeux, car toute aventure guerrière au Nord Cameroun précipiterait sa chute.
A bon entendeur...
CISCO
Regards et points de vue des partis politiques et des mouvements centrafricains
Actualité Centrafrique