ENTRE DOUTE ET ESPOIR :

                                                    La diaspora centrafricaine partagée

                                                                 Entre critiques et propositions …     ( Par Prosper INDO)

 

Partagée entre le doute et l’espoir d’une réconciliation véritable, la diaspora centrafricaine l’est également , au plan des principes, entre critiques et propositions au nouveau gouvernement. Si la critique est facile, la tentation est grande mais difficile de faire des propositions aux nouvelles autorités politiques pour sortir le pays de l’ornière. La tâche est immense : il faut reconstruire le pays. Dans les conditions actuelles, les propositions ou conseils qui peuvent être délivrés demeurent des formulations très générales ; vagues dans leurs attendus, imprécises quant à leurs portées.

 

                             Un début de démarche rationnelle suppose que les centrafricains puissent disposer d’un véritable état des lieux afin de sérier les problèmes et déterminer leur degré d’urgence. Qui dit état des lieux entend audit. Il importe donc, pour le nouveau gouvernement, de faire établir par une société internationale indépendante et crédible, l’inventaire de la maison « Centrafrique ». Les organisations de ce type existent. Certes, elles sont chères. Conseillons donc aux nouvelles autorités centrafricaines de faire appel à l’une d’elle, en faisant l’économie du sempiternel publi-reportage confié naguère à l’hebdomadaire JEUNE AFRIQUE L’INTELLIGENT , comme au bon vieux temps d’Ange-Félix PATASSE et de ses gouvernements successifs. Ces reportages publicitaires avaient pour objectif de vendre la RCA aux investisseurs et autres bailleurs de fonds. Ils ont seulement concouru flatter l’ego du président démocratiquement élu et à installer durablement sa tyrannie. L’audit préconisé a une vertu autre, faire prendre conscience aux centrafricains des forces et faiblesses de la situation économique et sociale du pays. Une fois cet audit réalisé, il appartient au premier ministre de proposer une déclaration de politique générale qui sera soumise à la réflexion de tous les centrafricains, et au vote du Conseil National de Transition.

 

                             A défaut d’une organisation de consultants, neutre et indépendante, le nouveau gouvernement peut faire appel aux différents compatriotes qui prospèrent à l’étranger. Regroupés au sein d’un « Vivier de compétences » installé auprès du premier ministre, ces experts auraient une mission temporaire d’un mois afin de déterminer les urgences du moment et d’en planifier l’ordre des priorités. Bien évidemment, ces urgences n’échappent à personne. Outre le rétablissement de la sécurité publique, elles se concentrent dans les secteurs de la santé, de l’éducation. Gageons cependant qu’un axe prioritaire de réflexion demeure le relèvement de l’économie nationale. En ce qui nous concerne, nous pensons fermement que l’indicateur le plus précieux et le plus dynamique pour rendre compte de la situation d’une économie demeure le taux de création des entreprises. C’est la création des entreprises seule qui crée des emplois, génère des plus-values et, donc, permet la distribution des revenus ou favorise l’épargne. Or, ce taux pour la République Centrafricaine est très nettement inférieur aux potentialités réelles du pays. Entre 1960 et 1979, il n’était que de 0,06% !

 

                             Malgré l’adoption d’un code des investissements commun aux états de la CEMAC, très favorable aux investisseurs, la création des entreprises en République Centrafricaine se heurte à de multiples barrières à l’entrée. Ces barrières sont, soit d’origine politique liée à un climat peu propice aux affaires (la RCA est considéré comme un pays à haut risque), soit d’origine technique en relation à l’enclavement du territoire (les coûts de production sont grevés par des frais de transports exorbitants), soit d’origine financière caractéristique d’un pays à faible capacité d’épargne ( réseau bancaire anémique voire inexistant ou atonique). Pour vaincre ces barrières à l’entrée, l’état centrafricain doit élaborer et mettre en œuvre une politique volontariste d’incitation (aides financières ou dérogations fiscales), de promotion (formation des entrepreneurs locaux, acquisition de brevets, financement de la recherche scientifique) et de protection (taxes douanières sélectives), etc…, susceptible de créer un véritable climat favorable à la création des entreprises. En l’occurrence, il s’agit d’élaborer une stratégie industrielle nationale et d’asseoir sa structure de commande optimale. Celle-ci serait constituée par la création d’un grand ministère stratégique regroupant l’économie, les finances, le commerce et l’industrie. Seule une telle structure organisationnelle serait de nature à favoriser la synergie nécessaire à une vraie politique de création des entreprises et de développement industriel. Un tel grand ministère s’appuierait d’un côté sur le « vivier de compétences » décrit plus haut et constitué en direction de prospective stratégique, et d’un autre côté sur l’existence d’une agence nationale de création des entreprises constitué en « centre d’arbitrage » fonctionnant comme un fonds de garantie. Ce schéma pourrait être repris à l’identique pour d’autres secteurs de l’activité économique et sociale, en particulier dans les domaines de la santé, de l’éducation, des transports, de l’environnement… C’est là le seul chemin de l’espoir.

    (18 mai 2003)


Regards et points de vue des partis politiques et mouvements centrafricains