LE TEMPS DES TRANSFORMATIONS ET
QUELQUES VOIES POUR LA RENAISSANCE CENTRAFRICAINE
Depuis le 15 mars 2003, tous les espoirs les plus fous sont partout étalés avec ferveur, enthousiasme et optimisme. Les centrafricaines et les centrafricains réalisent à peine que le temps des oppresseurs arrogants est probablement terminé. Reste alors à prévenir des futurs détournements de pouvoirs et de suffrages.
On peut postuler qu’un véritable temps des transformations s’ouvre dans notre pays . On devrait s’interroger dans le même temps sur ce que chaque citoyen apportera à cette dynamique, au lieu pour certains de se perdrent en conjectures négativistes. En effet, les voies de la renaissance Centrafricaine sont diverses et dépendent du niveau d’investissement de tous, au travail et dans une espèce de communion collective et constructive.
Quelles peuvent être les points d’ancrage des transformations de notre société, notamment celles susceptibles d’être amorcées dans le processus de transition et posant ainsi les jalons de la renaissance Centrafricaine ?
En ce moment de l’histoire de la République Centrafricaine, un devoir de vigilance active s’impose. Il signifie ne pas attendre de voir si l’équipe du professeur Abel GOUMBA ( si herculéenne soit elle), sous l’impulsion du Général Président François BOZIZE, fasse les miracles indispensables au redémarrage de la vie, d’une autre vie pour nos populations. Il n’est pas non plus question de croire que les membres du Conseil National de Transition se transformeront en illuminés, détenteurs exclusifs des avis les plus judicieux, pour faciliter la définition des priorités et la justesse des mesures d’accompagnement.
Notre devoir de vigilance active consiste entre autre à expliquer aux opinions publiques et à la communauté internationale, le caractère approprié des orientations et des décisions esquissées par l’équipe de transition. Personne d’autre mieux que nous ne le fera. Efforçons nous donc de poursuivre avec détermination ce travail de légitimation de l’action gouvernementale en privilégiant la raison et l’intérêt général.
Il nous revient aussi de nous impliquer le plus courageusement possible dans les multiples voies de la renaissance Centrafricaine, en exprimant les convictions et les propositions qui sont les nôtres.
L’impératif de vigilance nous oblige à ne pas laisser dire que, l’annonce par le Premier Ministre de la procédure de déclaration des biens (avant la prise de fonction ministérielle) est une disposition dérisoire. Les intéressés insinue t-on pourraient toujours s’approprier de façon illicite les fonds et les biens publics. Ceci est un procès d’intention des champions de l’impunité et des artisans des crimes économiques et financiers qui n’ont jamais caché leur hostilité à cette vieille revendication de l’ancienne opposition démocratique. Au contraire, l’intention gouvernementale est bien ici de susciter réellement une exemplarité au sommet de l’appareil d’Etat. Le but avoué est de dissuader toutes celles et ceux dont le seul dessein aurait été à nouveau de s’ériger en nouveaux prédateurs.
D’autres dispositions fortes et empreintes de la même philosophie permettront de concrétiser ce premier temps des transformations des mentalités, à l’égard de la gestion de chose publique. C’est dans cet esprit, qu’il y’ a lieu pour le gouvernement en premier, de cultiver une véritable éthique de la vérité et de la transparence. Elle est envisageable à travers la réalisation optimale des deux priorités nationales de la transition : la sécurité et le pouvoir d’achat.
La sécurisation de tout le territoire, autant des personnes que des biens, ainsi que le paiement des salaires, des bourses, des pensions et des fournisseurs intérieurs, sont des préalables de la plus haute importance. L’autorité de l’Etat et sa solvabilité sont les deux préoccupations incontournables du pouvoir et de la population toute entière.
Très concrètement, nous suggérons que chaque trimestre soit publié un compte de gestion des ressources de l’Etat, comportant les entrées et les sorties ( avec leur affectation lisible), et un point exhaustif sur la récupération des armes, ainsi que l’évolution de la sécurisation de l’ensemble du territoire. De telles pratiques apparaîtraient comme des traductions palpables de cette volonté de transparence et de ce souci de vérité. Les impatiences quant aux attentes populaires, trouveront ainsi une réponse tant sur la capacité du gouvernement que sur les réelles marges de manœuvre du nouveau pouvoir.
La matrice minimale de la transition c’est cela, mais il y’ a néanmoins d’autres enjeux de fonds à verser au dialogue patriotique (*1), dont il convient d’assurer la permanence jusqu’aux prochaines consultations électorales et référendaires.
Trois enjeux s’inscrivent dans l’optique du deuxième niveau du temps des transformations :
Premièrement, il y’ a lieu d’affirmer que le temps des modifications institutionnelles et politiques majeures est arrivé. Il est question d’une REFONDATION sur ce plan, sans complaisance mais surtout avec réalisme.
Le prochain texte constitutionnel doit être l’objet et l’aboutissement d’une consultation la plus large possible des centrafricains partout où ils se trouvent, et de toutes conditions sociales et économiques.
Pour notre part, nous recommandons un régime équilibré dans lequel le gouvernement détiendrai des pouvoirs importants, en contrepartie de quoi lui seront exigés des résultats mesurables. Le Président de la République sera davantage conçu comme un arbitre en cas de blocage institutionnel. D’une part le gouvernement proviendra de la coalition qui se battra, munie d’un programme commun préélectoral et qui aura réuni la majorité parlementaire ; d’autre part, les velléités de fractures qui ont toujours été suscitées par l’enjeu présidentiel pourraient ainsi être atténuées significativement.
Nous pensons aussi que l’organisation des pouvoirs s’efforcera d’élargir les attributions de l’Assemblée Nationale et se préoccupera de garantir l’autonomie organique et l’indépendance fonctionnelle de la justice. La codification des coutumes conformes à l’esprit de la légalité et la dotation en moyens conséquents de notre service public judiciaire sont à mettre en œuvre et à réaliser. Les procédures de nominations des magistrats échappant à l’ingérence abusive du mouvoir exécutif et s’appuyant sur des critères de mérite professionnel, et enfin des auxiliaires de justice soumis à des obligations déontologiques strictes…constituent quelques pistes de réformes de notre justice garant de notre démocratie citoyenne, économique et sociale.
Nous appelons de nos vœux et participerons à l’élaboration d’une charte des partis politiques pour moderniser notre pluralisme . Elle aura vocation à dégager des critères de reconnaissance plus lisibles et plus crédibles, afin de donner toute sa dimension aux formations politiques. Il y’ a déjà plusieurs années que nous préconisions un multipartisme intégral mais limité par la loi ( après bien entendu un débat dans le pays) à trois ou quatre partis véhiculant de véritables propositions alternatives de développement du pays.
Le statut de l’opposition et le financement des partis, en partie pat les fonds publics deviendraient alors réalisable et facile d’application. Quelques principes suprapartisan seront à inscrire dans cette charte : l’unité nationale, le principe du mérite, l’égalité des sexes, l’unité territoriale, la forme républicaine de l’Etat le devoir de protection et de réalisation de la jeunesse, la laïcité Centrafricaine,…Voilà en tout l’opportunité de laisser à la postérité une vraie charte des partis politiques dont on évoque l’utilité et la pertinence depuis une dizaine d’années au moins ( cf : archives de la Concertation des Forces Démocratiques).
Deuxièmement, le temps des transformations passe par une REFONDATION sociale et culturelle, capable de favoriser le bien-être des populations et le rayonnement de l’identité nationale.
Il revient au gouvernement de transition et à tous les acteurs de parvenir par le dialogue consensuel à un texte engageant la communauté nationale sur le redynamisation des services publics vitaux : santé, éducation, sécurité. Ils sont la marque d’un temps de la solidarité entre les générations qui ont chacune souffert de manière différente.
Accessoirement, nous proposons au département ministériel de l’économie sociale de faire jonction avec le très dense réseau associatif, humanitaire, culturel et social sur place et à l’étranger afin de faire profiter au pays les multiples retombées des initiatives centrafricaines qui ont été longtemps découragées ou annihiler dans de nombreux domaines.
Il devrait en être de même pour l’appui aux initiatives et entreprises culturelles, car le temps des transformations c’est aussi une politique tendant à permettre l’expression des talents artistiques pour consolider notre patrimoine national en la matière et nous ouvrir sur le monde qui nous connaît si peu.
Troisièmement, plus que ce qui précède nous croyons enfin aux vertus de l’activité économique libérée et régulée, à l’économie rurale et à son alter ego l’économie sociale.
Le gouvernement de transition et tous les compatriotes devons créer une vraie convergence ; d’une part des pouvoirs publics qui simplifient les démarches et diverses contraintes qui pèsent dès lors que l’on veut investir en CENTRAFRIQUE, d’autre part des centrafricaines et des centrafricains, notamment ceux de notre diaspora et les jeunes diplômés ou pas, qui développent un engouement pour l’entreprise privée.
Comment capitaliser les ressources, les compétences, les énergies que recèlent la diaspora Centrafricaine en Afrique, en Europe, en Amérique et en Asie ? Comment surtout les organiser en forces et acteurs de l’émergence économique de notre pays ? Telle est la motivation de l’organisation Initiatives Economiques Centrafricaines dont nous avons la chance d’animer la mise en place au sein de la diaspora. A court terme nous demandons la facilitation sur le terrain. De cette manière s’oriente aujourd’hui l’énergie patriotique qui nous anime et qui est largement antérieure au 15 mars 2003.
Ces enjeux majeurs déblayés au moins au niveau de la réflexion lors de la transition, sera alors donné le ton pour l’élaboration d’un corpus constitutionnel, législatif et réglementaire cohérent. Restera alors à construire puis à imposer un habitus citoyen et économique sain, positif, constructif et civilisé. Les conditions d’une vraie campagne politique et d’une compétition électorale responsable seront alors réunies pour que notre peuple confie cette fois en toute connaissance de cause, à un homme et à son équipe, la charge de la consolidation du bien être et de l’épanouissement des centrafricaines et des centrafricains.
A tous nos concitoyens nous avons envie de dire très simplement, prenons responsabilités, osons pour un autre avenir .
Paris le 15 avril 2003,
Jean-Pierre REDJEKRA
Ancien Secrétaire Général de la Coordination des Elèves et Etudiants Centrafricains ( 1991-1992)
Membre de la Ligue Centrafricaine des Droits de l’Homme (LCDH)
Ancien Représentant du Mouvement pour la Démocratie l’Indépendance et le Progrès Social en France MDI-PS ( 1995-2001)
Animateur de Initiatives Economiques de la Diaspora Centrafricaine (IECA)
Membre du Conseil de Surveillance de Cœur d’Afrique ( BE AFRICA)
Trésorier de YSB ( association pour la promotion du sango)
vice-président de l’Association pour le Développement d’Ippy (ADI)
Chevalier de la reconnaissance Centrafricaine
Regards et points de vue des
partis politiques et mouvements centrafricains