Les traitements anti-SIDA restent largement inaccessibles aux Africains
AP, NEW YORK 29 mars 2002 - Deux ans après le début des efforts de l'ONU pour améliorer l'accès aux médicaments contre le SIDA en Afrique et un an après que trois laboratoires eurent accepté de proposer des médicaments à prix réduit, le constat reste alarmant: seule une toute petite partie des séropositifs sur le continent noir bénéficient d'un traitement contre le SIDA.
Les compagnies pharmaceutiques soulignent que la hausse du nombre d'Africains infectés par le VIH recevant ces médicaments est spectaculaire en terme de pourcentage et témoigne d'un réel progrès. Mais on est encore extrêmement loin du compte.
Médecins sans frontières estime que seulement 25.000 à 30.000 Africains sur les 2,5 à 3 millions qui auraient le plus besoin d'un traitement anti-SIDA en reçoivent effectivement un. "Ce sont des chiffres extrêmement bas," souligne Rachel Cohen, porte-parole de MSF. "Que des gens aient accès aux médicaments est une bonne chose, mais il n'y a vraiment pas de quoi s'extasier devant ces chiffres".
On estime que 28,1 millions de personnes en Afrique sub-saharienne sont porteuses du virus. Les traitements les plus efficaces (trithérapie ou multithérapie) sont coûteux et impliquent une combinaison de médicaments.
En vertu d'un accord sur les prix, les médicaments traditionnels contre le SIDA peuvent être achetés en Afrique à partir de 67 cents (76 centimes d'euro) par jour et les nouveaux traitements pour 8,7 dollars (9,9 euros) au plus. Mais ces sommes restent trop élevées pour beaucoup. En Ouganda, par exemple, le produit national brut par habitant est d'environ 83 cents (94 centimes d'euro) par jour.
Tout en reconnaissant que le prix reste un obstacle, les laboratoires pharmaceutiques assurent que l'accès aux traitements s'améliore. Ils soulignent avoir parrainé de nombreux programmes liés au SIDA, allant de la formation des médecins à l'aide aux enfants orphelins à cause du SIDA. "Nous pensons avoir fait beaucoup," plaide Robert Lefèbvre, responsable du programme anti-SIDA du laboratoire Bristol-Myers Squibb. "Nous avons baissé les prix et cela nous coûte de l'argent."
Les militants anti-SIDA estiment qu'une nouvelle baisse des prix serait utile et se plaignent qu'il y a encore trop de contreparties liées aux offres des laboratoires.
Une autre désillusion concerne le Fonds mondial contre le SIDA, la tuberculose et la malaria, créé par la communauté internationale. Les militants avaient pensé qu'il fournirait beaucoup d'argent pour l'achat de médicaments en faveur des malades des pays pauvres. Le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan avait estimé qu'une dotation du fonds de 10 milliards de dollars (11,4 milliards d'euros) par an serait nécessaire, mais les promesses de dons s'élèvent actuellement à seulement deux milliards (2,28 milliards d'euros).
Le fonds doit débourser prochainement 800 millions de dollars (912 millions d'euros) et annoncera les pays bénéficiaires le mois prochain.
Sous la pression des militants et des fabricants de médicaments génériques, les laboratoires Merck, Abbott et Bristol-Myers ont accepté il y a un an de vendre leurs médicaments anti-SIDA sans marge bénéficiaire aux gouvernements africains, à des organisations caritatives et à des assureurs privés. Le groupe pharmaceutique GlaxoSmithKline leur a emboîté le pas en juin dernier.
Les trois compagnies initiales ont posé toutefois comme condition que les
gouvernements et autres bénéficiaires présentent un plan pour l'administration des
médicaments. Le but avancé est d'éviter que les médicaments ne soient pris de manière
aléatoire, ce qui pourrait accroître la résistance du virus à ces traitements.
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