Sida: la viande de singe menace l'homme en Afrique

AFP, Paris, 23 mars 2002 - Les singes, captifs ou chassés pour être mangés, en Afrique centrale forment une réserve de virus du sida du singe qui pourraient favoriser l'émergence de nouvelles souches du virus du sida (VIH) chez l'homme, avertissent des chercheurs français de l'institut de recherche pour le développement (IRD, ex-ORSTOM).

"L'homme qui chasse les singes comme viande de brousse est en contact avec une diversité considérable de virus du sida du singe, le virus de l'immunodéficience simienne (VIS)", constate l'équipe de Martine Peeters et Eric Delaporte de l'IRD qui a mené une étude de grande ampleur sur près de 800 singes au Cameroun.

Les résultats, publiés dans le journal américain Emergency Infectious Diseases daté du mois de mai "révèlent un risque élevé d'exposition de l'homme à ces virus, particulièrement en cas de morsure ou de blessure, en Afrique centrale". "Des données d'autant plus préoccupantes que, ces dernières années, le commerce de la viande de brousse s'est développé et que les forêts sont de plus en plus exploitées, favorisant un contact accru des populations avec la faune sauvage", s'alarment les chercheurs.

Les tests sanguins de ces singes chassés dans les forêts camerounaises, vendus dans des marchés ou élevés comme animaux domestiques, révèle que l'infection par les virus du sida simien est "très répandue", avec un taux d'infection (séroprévalence) supérieur à 16 %, et qu'elle touche un plus grand nombre d'espèces qu'on ne le pensait.

L'infection touche 13 des 16 espèces analysées, dont quatre qui n'avaient jamais été identifiées comme porteuses du virus, portant ainsi à trente le nombre d'espèces de singes pouvant être infectées par des VIS, selon l'étude.

Les chercheurs ont également découverts l'existence de cinq nouvelles souches du virus de l'immunodéficience simienne.

Ils soulignent "l'urgence" d'établir une surveillance épidémiologique avec notamment des tests de dépistage des différentes souches virales hébergées par les primates en Afrique.

"Il est désormais admis que les virus du sida (VIH 1 et 2) dérivent, historiquement, du virus de l'immunodéficience simienne (VIS, virus du sida du singe), via le chimpanzé pour le VIH-1 ou le mangabey pour le VIH-2", rappellent-ils.

Le VIH-1 est le virus du sida le plus répandu dans le monde. Le VIH-2 reste essentiellement localisé à l'Afrique de l'Ouest.

Il n'existe actuellement aucune preuve de transmission à l'homme de ces nouvelles souches virales de SIV identifiées. Mais "des études ont montré que plusieurs types de SIV pouvaient se multiplier dans des lymphocytes humains (cellules sanguines) et, ainsi, qu'une contamination de l'homme, voire l'apparition d'un VIH 3, était envisageable", souligne l'IRD.

Une campagne d'information mise en place au Cameroun avertit les populations des dangers potentiels de la chasse et de la consommation de la viande de brousse, souligne l'IRD.


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