ENTRAIDE PROTESTANTE DE LYON

 

Rencontre de MONTELIMAR 2006

 

Vendredi, 10 Mars 2006

 

 

 

POURQUOI MENER DES ACTIONS HUMANITAIRES EN DEHORS DE NOS FRONTIERES ?

 

Par

M. SAULET-SURUNGBA Clotaire

 

Président de «  ADAAC », « EDUCAVENIR » et « Coordination pour Action Humanitaire en Centrafrique »

Militant associatif

Professeur de Sciences Physiques au lycée Alfred KASTLER de CERGY (95)

 

 

 

« Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger et vous m’avez accueilli ; nu et vous m’avez vêtu ; j’étais malade et vous m’avez visité, j’étais en prison et vous êtes venu vers moi…

 

…Toutes les fois que vous avez fait ces choses à ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous les avez faites. »

Matthieu 25/35-40.

 

« En notre temps, la seule querelle qui vaille est celle de l’homme. C’est l’homme qu’il s’agit de sauver, de faire vivre, de développer.»

Général Charles de GAULLE, 1959.

 

 

Le jeudi 16 février 2006, je recevais un coup de fil, pour le moins intéressant et mon interlocutrice me disais ceci : Je viens de la part du pasteur Bernard COYAULT du DEFAP à Paris vous informer que dans le cadre des activités de notre association, « Entraide Protestante de Lyon », nous allons avoir une journée de réflexion à MONTELIMAR le vendredi 10 mars 2006. Le pasteur Bernard COYAULT m’a dit que vous êtes la personne qui serait intéressée et intéressante pour nous parler du thème : Pourquoi mener des actions humanitaires en dehors de nos frontières ?

Ma première réaction a été de dire à Mme Eve, après les civilités d’usage que je suis vraiment intéressé par le thème…Je dois avouer tout de suite que j’ai toujours eu à l’esprit le premier engagement de la « Déclaration de Cergy-Pontoise » du 20 Février 2005 qui interpelle les chrétiens de la Diaspora Africaine à participer de manière multiforme au processus du développement et de soutenir l’action missionnaire en Afrique en faisant appel aux Eglises et associations de France. J’étais dans mon sujet. Cependant, serais-je à même de traiter ce sujet comme il le faut ? Autrement dit, est ce que j’ai des choses intéressantes à communiquer aujourd’hui, lors de notre rencontre ? Voilà la contradiction principale que le cergypontain que je suis doit résoudre, après ces quelques heures dans cet « avion de terre », le TGV que je viens de prendre pour la première fois et qui m’a fait faire un saut de puce de deux heures entre les régions d’Ile de France et du Rhône-Alpes…

 

I-                   UNE DEFINITION POSSIBLE DE L’ACTION HUMANITAIRE 

 

L’adjectif « humanitaire » désigne la personne qui recherche le bien de l’humanité et qui lutte pour le respect de l’être humain. Cette définition du Larousse se poursuit en précisant ce qu’il convient d’entendre par corridor ou couloir humanitaire qui est un espace, une voie de communication destinés à acheminer de l’aide humanitaire dans une région sinistrée ou en proie à la guerre.

 

L’évolution de ce vocable, aujourd’hui est telle que par « l’humanitaire », il faut comprendre l’ensemble des organisations humanitaires et des actions qu’elles mènent. 

 

Le 26 décembre 2004, un nouveau « mot »  au-delà des « maux » qui ont accompagné le tremblement de terre de terre dont l’épicentre était en pleine mer et donnant naissance à une effroyable onde progressive destructrice qui a ravagé en quelques minutes, tout ce qui bouge et qui vit, dans un rayon de plusieurs milliers de kilomètres, les côtes de l’Asie du Sud-est à l’Afrique, de part et d’autre de l’Océan Indien. C’était le TSUNAMI…

 

En août 2005, la première puissance mondiale, les Etats-Unis d’Amérique, si prompts à engager toute sa puissance de feu pour anéantir, en n’importe quel partie du globe, tout individu qui serait détenteur supposé ou réel, des « armes de destruction massive »,  a été impuissante devant le cyclone KATRINA qui a transformé une partie de son territoire en une zone pire que les quartiers « Gbakondja » ou « Linguissa » à Bangui lors des inondations particulières en cette année 2005 en République Centrafricaine…Les inondations en République Centrafricaine pendant cette même période, relativement faibles par rapport à Katrina certes, mais non moins dramatiques en raison de la pauvreté,  n’ont pas aussi été médiatisées…Toutefois, l’une des conséquences, positives j’allais dire et ne dit-on pas qu’à quelque chose malheur est bon ?- , cette conséquence positive aura tout de même été le sursaut citoyen de quelques associations « centrafricaines » qui se sont mobilisées depuis septembre 2005 pour lancer un appel de solidarité en faveur des victimes de ces inondations. Et la volonté d’inscrire cette action dans la durée a abouti à la mise en place de la « Coordination Action Humanitaire pour le Centrafrique » dont je suis le responsable légal. 

 

Ce pays, la République Centrafricaine, en raison de la baisse du revenu national depuis un certain nombre d’années, est le siège de « tsunami quasi quotidiens » qui se caractérise par :

 

-67% des 3,5 millions de Centrafricains vivant avec moins de un dollar US par jour en 1997,

 

-60% des Centrafricains, en 2003, à table n’ont pas un menu constitué de l’hors d’œuvre, du menu principal, du dessert ni de l’inévitable fromage, mais ne mangent pas à leur faim,

 

-pour 100 000 naissances, 1100 femmes enceintes ne bénéficient pas de césariennes ni d’ambulances pour une évacuation d’urgence dans un centre de soin et rendent la vie alors qu’elles s’attendaient à donner vie comme nous le recommande les Saintes Ecritures : multipliez-vous !

 

-avec une forte prévalence du VIH/SIDA de 15 %, la RCA est au 10ème rang mondial des pays les plus infectés etc.…

 

Ces trois tableaux des vagues déferlantes qui balaient tout en transformant les zones affectées en paysage lunaire, des villes et quartiers de la Nouvelle Orléans sous les eaux et cette photographie du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) de la République Centrafricaine nous permettent déjà de voir que tout homme qui a un cœur en chair ne peut pas ne pas s’émouvoir face à ces catastrophes d’origine naturelle ou artificielle qui a tendance à anéantir l’espèce humaine sur terre…

 

Que faire ? Qui doit faire quelque chose ?

 

II- ETAT DU MONDE

 

Le « bilan du monde » en cette année, tel que résumé par l’atlas de 173 pays par le journal « Le Monde » dans son numéro hors série sur la situation économique internationale montre que le paradis, bien qu’il ne soit pas sur terre comme le dit un dicton populaire, mais que tout n’est pas du tout rose pour les pays du Sud.

Tout ne sera rose pour ces pays d’Amérique latine, de l’Océanie et surtout de l’Afrique dans sa globalité et tout ne sera même  pas rose -pâle pour l’Afrique Noire sub saharienne…

 

La grippe aviaire vient renforcer une certaine idée de « la colère des dieux » qui, après les pays du Nord dotés de moyens sophistiqués sur le plan d’infrastructure sanitaire, donner le coup de grâce aux pays d’Afrique Noire où le paludisme et le SIDA, combiné à la pauvreté dédoublé d’un manque criard d’infrastructure sanitaire, doit faire face au virus H5N1 qui vole comme le vent…

 

Nous pouvons énumérer ici la kyrielle de mots et de maux :

-difficile libéralisation des échanges internationaux au niveau de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC),

-jeu des alliances commerciales bousculé en Amérique latine,

-annulation de la dette multilatérale des pays les plus pauvres ; La France adopte une taxe sur les billets d’avion pour financer la lutte contre le SIDA,

-un nombre record de catastrophes,

-des médicaments bon marché pour les pays pauvres ?

Des constats suivants interpellent :

 

En Amérique, il est noté des convergences pour le pire et le meilleur. « Face aux catastrophes naturelles et à la pauvreté persistante, les Américains du nord comme du sud comprennent de plus en plus que la loi du marché ne suffit pas à panser les plaies économiques et sociales ».

 

« Le Proche-Orient sait qu’il ne se tirera pas de l’extrême pauvreté où il végète, tant qu’il ne se tournera pas vers la démocratie, la transparence économique et le respect des libertés individuelles. Le poids de la tradition et du tribalisme, tout comme les intérêts des clans au pouvoir, s’opposent à cette indispensable modernisation… »

 

Il est noté une nouvelle donne en Asie avec les grands groupes économiques Chinois qui ont lancé une offensive générale  avec les « made in China »…Toutefois, le dicton «  l’hirondelle ne fait pas le printemps » semble être confirmé de manière générale au niveau de l’Asie. L’analyste du monde précise : « Ce n’est pas l’apparition d’un mastodonte, mais de deux qui bouleverse le jeu en Asie. Car si le monde n’a d’yeux que pour la Chine et sa croissance phénoménale de plus de 9%, l’Inde n’est pas en reste. Désormais, la puissance nippone est obligée de compter avec ces jeunes colosses, tout comme le reste du monde…

 

« Le continent le plus pauvre de la planète résiste au renchérissement des prix du pétrole, mais il ne peut le faire que grâce au soutien international. Les investissements étrangers ne sont toujours pas adaptés aux fragilités africaines ».

 

A l’euphorie observée en Algérie, à l’or noir de la Libye et la débâcle du textile maghrébin, l’Afrique Noire sub saharienne est caractérisée par :

-la morosité au Bénin qui est empêtré en ce moment dans les questions électorales,

-la partition de la Côte d’Ivoire, ce géant économique de l’Afrique de l’Ouest,

-une fin de règne mouvementée en Guinée -Conakry, 

-la promotion de l’approche genre avec l’avènement d’une femme à la magistrature suprême de l’Etat au  Libéria, ce qui ne signifie nullement le règlement par un coup de baguette magique des problèmes d’un pays transformé en poudrière et où la kalachnikov a remplacé depuis le « Game Cube » des jeunes adolescents,

-les barbelés de Ceuta et Melilla ou les côtes des îles espagnoles Canaries qui accueillent, parfois à coup de balles réelles ou de grenades lacrymogènes les malheureux candidats à l’immigration vers une Europe où ils deviendront probablement des « RACAILLES » qu’il faudrait tôt ou tard « KARCHERISER »,

-la réconciliation au Congo Brazzaville,

-la normalisation qui se cherche à se frayer un chemin dans le pays du colton, du cuivre, du diamant et de l’électricité du barrage d’Inga,

-les encouragements du Gabon avec sa stabilité ou

La République Centrafricaine, mon pays d’origine, où « le retour à la normale » ne semble pas être accompagné par la Communauté internationale, malgré des efforts consentis par les Centrafricaines et les Centrafricains, ces « mal aimés » des institutions financières internationales et qui doivent se faire violence pour redevenir crédibles tant sur le plan de la gouvernance que sur le plan de l’engagement citoyen…L’appétence pour la politique politicienne et la gabegie, la corruption, les critiques non productives ou la culture d’une nostalgie d’un pouvoir « héréditaire » doit laisser la place à une réelle volonté de tous les instants de bâtir un Centrafrique uni, fort et puissant au risque de disparaître avec la mondialisation néo-libérale qui ne fait pas de cadeau aux canards boiteux et aux amateurs politicards qui, de bonne ou mauvaise foi, font un amalgame suicidaire entre Dieu et la politique…   

 

III-CHRIST EST LA SOLUTION

 

« Si l’Eternel ne bâtit la maison, Ceux qui la bâtissent travaillent en vain ;

Si l’Eternel ne garde la ville, Celui qui la garde veille en vain .»

 

Les « humanitaitres » sont les bâtisseurs de vie et le disciple du Christ est tout naturellement interpellé…Non pas pour une mission « civilisatrice », mais pour être le Bon Samaritain.

 

Les problèmes sont immenses et multi factorielles. Seuls les Etats ne peuvent pas…

 

Il n’est d’action humanitaire que durable et je voudrais ici reprendre à mon compte les propos de Jean-François MATTEI, Président de la Croix Rouge Française.

 

« Cette mission essentielle, notre honneur d’humanitaire est de l’accomplir par nos forces propres, mais aussi en complémentarité, voire en alliance, avec d’autres acteurs prêts à en partager la responsabilité. A cet égard, le rôle des Etats n’est pas le moindre. Il ne s’agit pas de faire à la place de l’Eta, mais avec lui, sans le diaboliser, ni inversement tout en attendre. Notre champ de compétence, la promotion de l’humain, doit s’inscrire en articulation intelligente, adaptable et souple avec les missions assignées aux pouvoirs publics, au premier rang desquelles la gestion des infrastructures et des enjeux collectifs. Tout en préservant jalousement notre indépendance et en exerçant notre vigilance, il nous faut sortir, dans les rapports entre humanitaire et Etat, des vaines querelles, des fausses oppositions, des suspicions à priori qui amoindrissent les réalités plus qu’elles n’aident à les ré enchanter.»      

 

 

CONCLUSION   

 

LEVONS-NOUS !

 

Oui, au regard de la perte des repères dont le monde est le théâtre, avec le rouleau compresseur de la mondialisation néo libérale dont les effets collatéraux sont les misères indescriptibles et les calamités d’origine naturelle et humaine qui déciment les populations du Sud, les hommes et femmes de bonne volonté, au rang desquels se retrouvent les disciples de JESUS-CHRIST, doivent se lever pour constituer ce « corridor humanitaire » par un engagement humanitaire qui soit aux antipodes de l’ « action humanitaire à la Maranatha d’Osny » en République Centrafricaine…

 

Pour l’amour et la gloire de Dieu !

 

Jouy, le 10 Mars 2006

 

« clotairesauletsurungba@wanadoo.fr »