République centrafricaine: Une enquête conjointe sera ouverte avec le Soudan à la suite d’accrochages frontaliers

NAIROBI, 30 mai (IRIN) - Les gouvernements voisins de République Centrafricaine (RCA) et du Soudan ont accepté de créer une commission d’enquête pour faire la lumière sur le massacre d’une centaine d’éleveurs soudanais, le 18 mai, dans les secteurs Gordil et Birao, au nord de la savane de la province centrafricaine de Vakaga. Un communiqué conjoint des deux pays, émis le 28 mai, indique que la commission entreprendra une mission pour déterminer la cause du conflit, le nombre exact des victimes, et pour traîner les responsables en justice. Elle s’efforcera également de récupérer les troupeaux qui se sont enfuis durant les hostilités. La déclaration souligne les rapports excellents entre les deux pays et félicite leurs autorités frontalières pour avoir rapidement ramené le calme parmi la population.

Ce communiqué faisait suite à des rencontres de haut niveau tenues lundi et mardi dans la capitale centrafricaine, Bangui, réunissant une délégation soudanaise composée de gouverneurs régionaux et chefs tribaux, dirigée par le conseiller du président Umar Hasan al-Bashir en matière de sécurité et ministre de l’Intérieur, le major-général Abd al-Rahim Muhammad Husayn, et par le secrétaire d’État aux Relations extérieures, Fudayl al-Tijani, ainsi que des responsables du gouvernement centrafricain. Un site Internet soudanais basé à Khartoum signale que les groupes ethniques Bani Halbah, Ta'ishah et Al-Falatah Al-Wisdaniyyah, séjournent habituellement huit mois par année en République centrafricaine. Ils y entretiennent depuis longtemps des relations étroites avec des groupes ethniques de ce pays, et les mariages entre ressortissants des deux pays sont fréquents.

Une rencontre semblable entre une délégation centrafricaine et des représentants du gouvernement tchadien a eu lieu en mai dans la capitale du Tchad, N’djamena, pour améliorer la sécurité à leurs frontières communes.

On attribue surtout les hostilités dans la région au conflit de longue date opposant agriculteurs et éleveurs, un conflit aggravé en raison d’un afflux d’armes. Dans certains cas, des villages entiers ont été brûlés.

Copyright (c) UN Office for the Coordination of Humanitarian Affairs 2002


La difficile coexistence soudano-centrafricaine dans les zones frontalières

AFP, Bangui, BANGUI, 31 MAI 2002 - 8h50 - Les incidents de ces dernières jours entre Soudanais et Centrafricains illustrent la difficile coexistence entre les deux communautés, mais aussi la réalité du braconnage, dans cette région peu peuplée de Centrafrique, voisine du Soudan.

Selon le ministère soudanais des Affaires Etrangères, qui a envoyé mercredi une délégation à Bangui, plus de 60 Soudanais ont été tués et d'autres blessés récemment dans ces affrontements en RCA.

De source militaire centrafricaine, on évalue le bilan à "une vingtaine de morts et une dizaine de blessés", côté soudanais, tandis que trois Centrafricains ont été tués.

Ces affrontements, qui n'étaient pas les premiers, se sont produits début mai dans un village de la sous-préfecture de Gordil (nord-est), à plus de 100 km de la frontière soudanaise.

Dans ce village, dont le nom n'a pas été précisé, les braconniers "ont abattu le chef et deux de ses proches, provoquant la débandade des villageois", a-t-on indiqué de source militaire. En représailles, les braconniers partis, les villageois centrafricains ont attaqué des campements d'éleveurs soudanais.

"Puissamment armés, venus souvent d'Am Dafog, de Buram, ou de Radom (région du Darfour, ouest du Soudan)" ces braconniers sont à la recherche "d'animaux sauvages dans les préfectures centrafricaines de Vakaga, du Bamingui-Bangoran, du Haut-M'bomou, et du M'bomou (est de la RCA)" qui compte plusieurs réserves animalières, a-t-on expliqué de même source.

Les animaux les plus recherchés sont les éléphants pour l'ivoire, les lions et les panthères pour leurs peaux et les rhinocéros pour leurs cornes, auxquelles on prête notamment des vertus aphrodisiaques.

"Ces braconniers arrivent sur des chevaux ou des chameaux, en caravane. Ils sont munis de kalachnikov et de mitrailleuses et font la loi là où ils passent", s'insurge un ressortissant de Vakaga (région frontalière du Soudan), travaillant dans une ambassade à Bangui et ayant requis l'anonymat. "Les populations de ces régions sont terrorisées par les braconniers", ajoute-t-il.

"Rien que pour la dernière décennie, précise un ancien député de la province du Bamingui-Bangoran, voisine de Vakaga, au moins 1OO à 15O Centrafricains ont été tués par ces braconniers dans la région, parmi lesquels des pisteurs, des guides de chasse, et les gardes chargés de protèger la faune centrafricaine".

"A plusieurs reprises, des chefs de village centrafricains ont été humiliés, voire tués devant leurs administrés. D'autres ont été enlevés pour aider les braconniers à transporter leur butin, et cela des mois durant, avant de pouvoir revenir", déplore l'ancien député.

"Il s'agit de querelles surannées (...) mais les braconniers soudanais estiment que ces villageois Centrafricains, musulmans comme eux, ne devraient pas s'opposer à leurs exactions", explique-t-il.

Les autorités centrafricaines ont pris ces incidents très au sérieux et ont dépêché sur place le ministre de la santé, Joseph Kalité, originaire de la région.

Pour lutter contre le braconnage qui décime la faune centrafricaine, une garnison militaire a été créée il y a deux ans à Bria, chef-lieu de la Haute-Kotto (est de la Centrafrique), avec le concours de la France.

Cette présence militaire constante a, de l'avis de tous, réduit les fréquences des incursions de ces braconniers.


Actualité Centrafrique - Dossier 10