Verdict de Bangui:  à mort par contumace pour Kolingba et d'une vingtaine de militaires, et 20 ans de réclusion pour d'autres accusés


Le général Kolingba, "bête noire" du régime Patassé

BANGUI, 26 août (AFP) - 20h09 - L'ancien président centrafricain, le général André Kolingba, condamné lundi à Bangui par contumace à la peine de mort pour le putsch manqué du 28 mai 2001, est l'éternelle "bête noire" du régime d'Ange-Félix Patassé depuis les mutineries de 1996 et 1997, dont on l'a accusé d'être l'instigateur.

Le général Kolingba, qui avait endossé la paternité de la tentative de putsch sur les ondes de Radio France Internationale (RFI), a finalement été reconnu coupable par la Cour criminelle de Bangui de "crime d'atteinte à la surêté de l'Etat".

Né en 1936 dans la capitale centrafricaine, le général Kolingba a présidé le pays de 1981 à 1993, après avoir renversé le président David Dacko à la faveur d'un coup d'Etat.

Formé à l'Ecole des officiers d'active de Fréjus (France) et à l'Ecole d'application des transmissions de Montargis (France), il a toujours été auréolé d'une réputation sulfureuse.

L'ex-empereur Bokassa 1er lui-même, soucieux d'écarter certains officiers jugés dangereux pour son régime, l'avait nommé en 1975 ambassadeur au Canada puis en ex-République fédérale d'Allemagne, avant de le nommer en 1979 chef d'état-major de l'armée.

L'actuel président, Ange-Félix Patassé, qui l'a rétrogradé au rang de "soldat de deuxième classe" après le coup de force de 2001, l'a également soupçonné de vouloir le renverser, notamment lors des trois mutineries de

André Kolingba est issu de l'ethnie Yakoma, riveraine du fleuve Oubangui et minoritaire dans le pays (5 à 8% selon les sources), mais fortement représentée au sein de l'armée au moment des trois mutineries de 1996-97, notamment parmi les officiers.

Ses liens avec les militaires des ethnies sudistes de l'Oubangui et de la forêt, opposées au régime nordiste de l'actuel président, avaient aggravé les soupçons du pouvoir sur sa personne.

Le général, qui a continué de jouer un rôle sur la scène politique, a toujours fermement nié toute implication dans ces mutineries, orchestrées par des sous-officiers et des hommes de troupe.

Même si ses relations avec M. Patassé sont restées empreintes de défiance mutuelle, il n'a pas été réellement inquiété mais ses meetings sont régulièrement interdits par le régime.

M. Kolingba était arrivé second de l'élection présidentielle centrafricaine du 19 septembre 1999, avec 19,38% des voix, contre 51,63% pour M. Patassé. Il avait alors contesté les résultats du scrutin mais appelé ses sympathisants au calme.

Jusqu'au coup d'Etat manqué, il présidait le parti qu'il avait fondé, le Rassemblement démocratique centrafricain (RDC), seconde formation de l'opposition avec 20 députés sur 48, sur un total de 109 députés.

A ce moment, l'homme se faisait très discret. Représenté la plupart du temps par le secrétaire général de son parti, il consacrait l'essentiel de son temps à sa ferme agricole, située à l'est de Bangui.

Peu de temps après la tentative de putsch, il se serait enfui en République démocratique du Congo, avant de s'installer à Kampala, en Ouganda, où il résiderait toujours, selon des rumeurs insistantes à Bangui.


André Kolingba condamné à mort par contumace

BANGUI (AP), lundi 26 aout 2002, 16h01 - L'ancien homme fort de Centrafrique, le général André Kolingba, a été condamné à mort par contumace lundi pour sa participation à la tentative de putsch de 2001 contre le président Ange-Félix Patassé.

Kolingba, dictateur pendant 12 ans avant de se faire battre dans les urnes par Patassé en 1993, est condamné pour "atteinte à la sécurité de l'Etat" pendant ce putsch, le 28 mai 2001. Il est également condamné pour assassinat et destruction de propriété.

Les putschistes avaient tiré des obus de mortier sur la villa présidentielle, avant que des combats ne les opposent aux forces régulières. La mutinerie fut matée au bout d'une semaine avec l'aide de soldats libyens.

Le général Kolingba a fui le pays après l'échec du coup d'Etat, et on ne sait pas où il se trouve.

Le tribunal a également condamné à mort 20 hauts gradés de l'armée, tous jugés par contumace. Ce sont en tout 600 verdicts qui ont été délivrés: les personnes condamnées pour avoir financé le putsch ont été condamnées à 20 ans de prison, et plus de 300 soldats ayant participé à la mutinerie à dix ans de prison. La plupart d'entre eux appartiennent à la tribu de Kolingba, les Yakoma.

De nouveaux affrontements ont eu lieu en novembre, après le limogeage du chef d'état-major le général François Bozizé, accusé d'avoir participé à cette tentative de coup d'Etat. Il a fui avec ses partisans vers le Tchad voisin, alors que des escarmouches ont opposé ses hommes aux forces gouvernementales dans la région de Kabo (nord). Des escarmouches ont lieu régulièrement sur la frontière depuis lors.

Le procès se poursuit pour 90 autres prévenus, qui eux ne sont pas jugées par contumace, parmi lesquels l'ancien ministre de la Défense Jean-Jacques Demafouth et plusieurs hauts responsables du parti de Patassé. AP - nc/v257


Le général Kolingba condamné à mort pour le putsch manqué du 28 mai 2001

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lundi 26 aout 2002, 18h58 BANGUI (AFP) - L'ancien président centrafricain, le général André Kolingba, et une vingtaine de militaires centrafricains, jugés par contumace dans le cadre du procès sur le coup d'Etat manqué du 28 mai 2001, ont été condamnés à mort lundi par la Cour criminelle de Bangui.

L'ex-chef de l'Etat, au pouvoir de 1981 à 1993, a été reconnu "coupable du crime d'atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat" par la Cour criminelle qui a rendu son verdict lundi.

La Cour a suivi le réquisitoire du procureur général, Joseph Bindoumi, qui avait requis vendredi la peine capitale contre le général Kolingba pour avoir "préparé et exécuté" l'attaque, dans la nuit du 27 au 28 mai 2001, de la résidence de l'actuel président Ange-Félix Patassé, au pouvoir depuis 1993.

En fuite, comme la plupart des 615 présumés putschistes jugés vendredi dernier par contumace, le général Kolingba avait de toute façon endossé la paternité de ce putsch sur les ondes de Radio France internationale (RFI) quelques jours plus tard.

Ce coup de force, suivi de près de deux semaines de combats entre putschistes et troupes loyalistes, avait fait 59 morts, selon un bilan officiel, davantage selon des témoignages, et provoqué l'exode d'environ 80.000 Banguissois.

La Cour criminelle, une juridiction spéciale dépendant de la cour d'appel de Bangui, a également condamné à mort, comme l'avait demandé le procureur général, 22 officiers et sous-officiers reconnus coupables du même crime.

Trois fils d'André Kolingba, Serge, Francis, et Arthur, ainsi que le commandant Anicet Saulet, qui avait mené l'une des mutineries militaires de 1996-97 en Centrafrique, font partie de ce groupe.

La Cour pouvait difficilement être clémente au regard des témoignages recueillis par la Commission mixte d'enquête judiciaire sur le coup d'Etat. Ces témoignages, lus au cours de l'audience de vendredi, étaient accablants pour la plupart des condamnés, souvent cités nommément dans certaines phases du putsch.

Dans le cas du général Kolingba, des témoins ont rapporté la tenue de réunions secrètes à son domicile, où des armes avaient également, selon eux, été entreposées.

La Cour criminelle, présidée par Zacharie Ndouba, a créé la surprise en condamnant aussi à mort le député d'opposition Charles Massi, un militaire en disponibilité et en exil depuis début 2001 en France, ainsi qu'un colonel des douanes, pourtant présentés par le procureur général parmi les "co-auteurs" du putsch.

Le général Guillaume Lucien N'djengbot, un proche d'André Kolingba incarcéré au moment des faits avant d'être libérés par les putschistes, contre lequel avait été requis la peine capitale, a en revanche été placé dans ce groupe des "co-auteurs", dix personnes au total, condamnés à "20 ans de travaux forcés". Pour tous ces condamnés, la Cour a par ailleurs ordonné la "confiscation des biens meubles et immeubles".

Le verdict a également été sévère envers ceux que le procureur avait décrit comme des "déserteurs", un groupe d'environ 580 militaires en fuite ou qui, rentrés à Bangui dans l'anonymat, ne se sont pas présentés à la justice de leur pays.

Elle les a reconnus coupables de "désertion pour complot", avant de les condamner "à dix ans de réclusion", alors que les peines requises étaient de "10 ans de travaux forcés".

La Cour criminelle a par ailleurs délivré à l'issue du verdict un "mandat d'arrêt" contre l'ensemble des condamnés jugés par contumace, qui ont également été "déchus de leurs droits civiques".

A la suite d'une courte suspension, la Cour a repris le procès de quelque 82 autres présumés putschistes, militaires et civils, présents à Bangui, et parmi lesquels figure l'ancien ministre de la Défense de l'époque, Jean-Jacques Démafouth, accusé d'avoir ourdi un complot parallèle.


Editorial du 26/08/2002, Edition Numéro 145

Justice : LA RCA DANS L’ATTENTE DE LA 1ere GRANDE DECISON

La seconde session de la Cour Criminelle pour l’an 2002 a démarré, comme prévu, lundi 19 août et ne devrait entamer que le 26 août prochain l’audition des co-auteurs et complices de la tentative de coup d’Etat du 28 mai 2001, qui est l’objet principal de sa convocation. Mais, avant même d’avoir commencé, ce procès a déjà pris fin, à en croire certains éditorialistes banguissois, toujours enclins à emprunter des raccourcis. Pour ces sommités de la presse centrafricaine, le procès du coup d’Etat est déjà terminé pour avoir commencé avec les mêmes principaux acteurs qu’à la première session, à savoir Zacharie N’douba, président de la Cour, et Joseph Bindoumi, représentant du Ministère Public. Du reste, expliquent-ils, la seule raison d’être de ce procès est de détourner l’attention de l’opinion nationale de ce qu’ils nomment les « vrais problèmes ». Etrange démarche, de la part de gens qui proclament à sons de trompe à tous les carrefours qu’ils s’expriment au nom des principes et des citoyens. Se souviennent-ils seulement de ce que la justice a également pour rôle de laver de tout soupçon tout citoyen injustement mis en cause ? Songent-ils seulement que nombre des concitoyens qu’ils prétendent représenter attendent impatiemment de savoir, grâce au procès qui démarre, au moins une part de vérité sur les circonstances dans lesquelles des êtres chers ont été arrachés à leur affection par une balle tirée à bout portant ou tout simplement égorgés. Sauf à vouloir, par mauvaise conscience, que les auteurs du coup d’Etat soient purement et simplement absous, nos éditorialistes n’ont aucune raison de tromper leurs concitoyens en déclarant sans objet le procès Kolingba qui va commencer.

Prosper N'DOUBA (Centrafrique-Presse)


Actualité Centrafrique de sangonet - Dossier 10
Première liste de condamnés dans le procès contre le général Kolingba et consorts