L'état de siège imposé qui a duré un an après le putsch manqué de mai 2001 est enfin levé
Après de couvre-feu, les banguissoises et banguissois retrouvent enfin l'air nocturne de la capitale centrafricaine. Les grandes sonos peuvent tonner toute la nuit. Mais comme tout prévenu, un débordement ou excès et un tapage sur la voie publique, il devrait retourner dans sa cellule. Par mesure de précaution, les barrières routières à l'entrée de Bangui supprimées un moment ont été rétablies. La mesure est entachée d'une sévère mise en garde : tous ceux qui tenteront de profiter de l'accalmie, "le retour à la normale pour ourdir leurs funestes complots seront considérés comme des terrorristes et tomberont sous le coup de la justice".
LE DECRET LEVANT LE COUVRE-FEU INSTAURE PAR DECRET N°01.126 DU 28 MAI 2001 EN REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE.
Le Président de la République, Chef de l'Etat;
- Vu la Constitution du 14 janvier 1995;
- Vu le Décret du 28 mai 2001 instaurant un couvre-feu en République Centrafricaine et
ses modificatifs subséquents;
DECRETE
Art. 1er : Le Couvre-feu instauré par Décret N°01.126 du 28 mai 2001 en République
Centrafricaine est définitivement lévé.
Art. 2 : Le présent Décret qui abroge les dispositions du Décret N°01.126 du 28 mai
2001 et qui prend effet pour compter de la date de sa signature, sera enregistré et
publié au Journal Officiel.
Fait à Bangui, le 9 mai 2002
Ange Félix Patassé
NB : les heures de Couvre-feu décreté ont varié dans le temps : d'abord de 18H00 à O6h00 du matin, puis de 21H00 à O5H00, enfin de 24H00 à O5H00.
Levée du couvre-feu près d'une année après le
putsch raté à Bangui (République Centrafricaine)
OCHA, IRIN, NAIROBI, 10 mai 2002 - Imposé il y a bientôt un an, à l'occasion
d'un putsch raté qui a secoué Bangui, capitale de la République centrafricaine (RCA),
le couvre-feu en vigueur dans tout le pays a finalement été levé jeudi.
Instauré le 28 mai 2001, lorsque des soldats fidèles à l'ancien président André
Kolingba ont lancé une offensive contre les forces loyales au président actuel,
Ange-Félix Patassé, le couvre-feu a d'abord été imposé entre 21h et 6h du matin, pour
ensuite n'être maintenu en vigueur que de minuit à 5h, depuis le 31 décembre 2001.
Durant ces heures, chacun devait en principe rester chez soi. Seules les
patrouilles militaires avaient le droit de circuler. En cas d'urgence, les
véhicules des particuliers n' étaient autorisés à circuler qu'avec leurs feux de
détresse. Les personnels des quarts de nuit, notamment les gardes de sécurité et
les médecins, étaient tenus de ne pas se déplacer en dehors de leurs périmètres de
travail.
Des sources humanitaires à Bangui attribuent en partie la prise d'une telle décision
maintenant au fait que des forces rebelles ayant franchi le fleuve Ubangi vers Zongo, en
République démocratique du Congo (RDC), aient été déplacées à quelque 100
kilomètres de la frontière et graduellement désarmées. Ces forces
représentaient encore, jusqu'à récemment, une menace militaire, étant donné qu'elles
étaient basées sur la berge opposée de ce fleuve frontalier.
Selon une déclaration émise par la présidence, « cette levée (du couvre-feu)signifie
le retour à la normale de la situation en Centrafrique », ajoutant qu'en prenant cette
décision, le chef de l'État «compte sur le civisme et le sens de responsabilité de
tous les fils de Centrafrique ».
« En revanche », poursuit la déclaration, « (le président) met
sévèrement en garde tous ceux qui, refusant obstinément que notre pays et le peuple
centrafricain vivent dans la concorde nationale et la paix, tenteront encore de profiter
de ce retour à la normale pour continuer d'ourdir leurs funestes complots afin de
remettre en cause nos institutions démocratiquement constituées. Ils seront considérés
comme des terroristes et tomberont sous le coup de la justice. »
Une autre source basée à Bangui a informé IRIN qu'en dépit de la levée du couvre-feu,
un niveau élevé d'insécurité perdure toujours dans la capitale et ses environs,
prenant souvent la forme d'agressions et de vols à main armée sur les autoroutes.
Bangui a été à nouveau le cadre d'hostilités en novembre 2001, lorsque les forces
gouvernementales centrafricaines ont tenté de mettre en état d' arrestation un ancien
commandant de l'armée, le général François Bozize, en
agissant au nom d'une commission judiciaire d'enquête sur la tentative de putsch du 28
mai 2001. M. Bozize a refusé de se soumettre au mandat d'arrestation, estimant qu'on ne
lui fournissait pas suffisamment d'assurances concernant sa sécurité. M. Bozize
avait été révoqué de son poste de chef d'état-major de l'armée le 26 octobre 2001,
à la suite d'accusations selon lesquelles il aurait trempé dans la tentative de coup
d'État. Il a nié une telle implication à l'époque, invoquant qu'il avait soutenu M.
Patassé lors des mutineries de l'armée de 1996 et 1997. Des soldats proches de M. Bozize
ont alors pris sa défense et, durant cinq jours, des escarmouches se sont produites dans
la région nord de la capitale, jusqu'à ce que M. Bozize et les soldats qui l'appuyaient
aient été délogés. Ils se sont alors enfuis vers le nord, jusqu'à la localité
de Sarth, dans le sud du Tchad.
Les autorités centrafricaines ont accusé le Tchad d'avoir apporté son soutien à M.
Bozize et à ses supporters, qui se sont affrontés à plusieurs reprises avec l'armée
centrafricaine le long de la frontière commune entre les deux pays. Le Tchad a par
la suite accordé l'asile politique à M. Bozize, par "souci humanitaire", a
déclaré à IRIN en janvier un responsable du ministère tchadien de la Communication.
Durant la même période, des rebelles tchadiens ont effectué des raids au sud du Tchad,
à partir de bases situées en Centrafrique. Le Tchad a déployé des troupes pour
« entraver l'infiltration de troupes centrafricaines au Tchad », a déclaré à
l'époque un responsable tchadien, en reconnaissant toutefois qu'il n'y avait eu aucun
affrontement direct entre les armées des deux pays.
M. Patassé et le président tchadien, Idriss Deby, se sont rencontrés à N'djamena le 10
avril 2002, pour discuter des tensions persistantes entre les deux pays. À la suite
d'une rencontre de deux heures qualifiée de « réussie », les deux leaders ont annoncé
la réouverture immédiate de leur frontière commune, et déclaré que les problèmes en
suspens seront abordés par une commission bilatérale composée d'experts et de
parlementaires.