De l’ultimatum de Séléka aux décrets promulgués par le président François Bozizé

 


 

Centrafrique: cessez-le-feu rompu entre Séléka et Bangui

Par Reuters - 20/03/2013 - journaldebangui.com

Le président tchadien, Idriss Déby, et son homologue congolais, Denis Sassou-Nguesso, sont attendus ces prochains jours dans la capitale centrafricaine pour des négociations

Les rebelles centrafricains ont rompu aujourd'hui un cessez-le-feu conclu en janvier avec le gouvernement et disent envisager toutes les options à quelques jours d'une médiation menée par des Etats voisins. "L'ultimatum a expiré sans rencontrer la satisfaction des revendications des éléments du Séléka sur le terrain, ce qui de fait entraîne la reprise possible des hostilités", a déclaré Eric Massi, porte-parole de l'alliance rebelle.

Signé le 11 janvier à Libreville, l'accord de cessez-le-feu a mis fin à une insurrection armée de plus d'un mois qui se rapprochait de la capitale centrafricaine, Bangui. Le Séléka a prévenu ces derniers jours que la trêve était menacée par le non-respect de certaines conditions de l'accord par le gouvernement. Les rebelles réclament notamment la libération de prisonniers politiques. "Toutes les options sont étudiées par l'état-major militaire. Je rappelle simplement que la prise de Bangui avait été jugée inutile afin de préserver des habitants de la capitale de combats. Nous espérons toujours que le président François Bozizé saura entendre raison et reconnaître sa défaite militaire", a poursuivi Eric Massi.

 

Le président tchadien, Idriss Déby, et son homologue congolais, Denis Sassou-Nguesso, sont attendus ces prochains jours dans la capitale centrafricaine pour des négociations. La France s'est déclarée "préoccupée" par la situation dans son ancienne colonie et a convoqué le Conseil de sécurité des Nations unies pour des consultations. Paris soutient le processus politique issu des accords de Libreville, signés sous les auspices de la Communauté économique des États d'Afrique centrale (CEEAC) et demande aux parties de s'abstenir de tout recours à l'option militaire, a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Philippe Lalliot.

 

 

----------------------------------------------------

 

Les cinq ministres de la seleka attendus samedi à Bangui

 

20/03/2013 - bêafrika Sango

 

De sources proches de l’Etat major de la séléka, les cinq ministres issus de la rébellion qui ont été retenus contre leur gré depuis dimanche 17 mars arriveraient samedi prochain à Bangui.

 

Les membres du gouvernement de l’Union nationale « se portent bien et sont logés à l’église catholique à Sibut », a rassuré la source tout en précisant que leur présence est attendue à Bangui à l’occasion de la venue des présidents Denis Sassou Nguesso du Congo, médiateur de la crise centrafricano-centrafricaine et Idriss Déby Itno du Tchad, président en exercice ce la Ceeac.

 

 

-----------------------------------------------------------------

 

François Bozizé répond en partie aux exigences de la Séléka

Par RFI - mercredi 20 mars 2013

http://www.rfi.fr/afrique/20130320-rca-bozize-ultimatum-seleka-centrafrique

 

La rébellion avait lancé un ultimatum de 72 heures au président François Bozizé afin que les accords de Libreville soient intégralement appliqués. Ultimatum qui a expiré ce mercredi 20 mars. Le président François Bozizé a promulgué deux décrets en début de soirée, pour tenter de calmer le jeu. Des mesures jugées insuffisantes par la Séléka.

La menace de la rébellion Séléka de reprendre les armes en raison du non-respect des accords de paix de Libreville fait planer le risque de nouveaux combats en Centrafrique. Mais ce geste suffira-t-il à ramener de la sérénité ?

En début de soirée, mercredi, quelques heures après l’expiration de l’ultimatum lancé par la Séléka au président François Bozizé, celui-ci a promulgué deux décrets, qui sont une réponse directe aux exigences de la Séléka.

 

Barrières levées et prisonniers libérés

Le premier décret, signé vers 17h30 TU par le président François Bozizé, prévoit que toutes les barrières érigées à travers le pays lors de l'instauration du couvre-feu sont désormais levées.

Le second décret prévoit que toutes les personnes arrêtées, détenues ou condamnées depuis le 15 mars 2012 recouvrent leur liberté. Mais ce n'est pas tout. Cette dernière mesure de libération s'applique également aux prisonniers politiques et aux prisonniers de guerre. En clair, toutes les personnes qui ont été interpellées dans le cadre de la récente crise qu'a connu le pays.

 

Le départ des troupes sud-africaines

Reste à savoir si ces deux décrets suffiront à calmer ces quelques rebelles mécontents qui, depuis dimanche, retiennent cinq ministres issus de la rébellion à Sibut. Pour le colonel Bordas, l'un des porte-parole de la Séléka, « ils ne servent à rien dans un gouvernement, où ils n'ont pas les coudées franches pour travailler. A quoi bon y rester ? »

En tout cas, même si la présidence centrafricaine qualifie ces deux mesures de « majeures et significatives », l'exigence la plus importante de la Séléka, le départ des troupes sud-africaines du pays, n'est pas à l'ordre du jour.

 

 

------------------------------------------------------------

 

Vincent Hugeux sur RFI: «À l'origine, le concept de Françafrique n'était pas péjoratif»

Par RFI -  mercredi 20 mars 2013

http://www.rfi.fr/afrique/20130320-vincent-hugeux-express-devoile-secrets-francafrique

Le magazine L’Express sort un numéro spécial sur «Les Secrets de la Françafrique», dans lequel on redécouvre à travers des reportages et des entretiens soixante années de liens passionnels et complexes entre Paris et les pays du continent. Vincent Hugeux, grand reporter à L’Express et spécialiste de l’Afrique, revient sur les évolutions de ces rapports et livre son analyse sur la politique africaine de François Hollande.

RFI : le cahier spécial de L’Express, « Les secrets de la Françafrique », commence par un étonnant plaidoyer de Mendès France, en 1956. Il écrit : « Nous sommes à l’heure cruciale où il faut rénover et sauver l’Afrique toute entière »...

 

Vincent Hugeux : Il y a des pépites qui sommeillent dans les archives de L’Express. Cet hebdomadaire a été fondé en 1953, quelques années avant les frémissements puis les convulsions de la lutte pour l’indépendance. De fait, il y a ce plaidoyer, très mendésiste pour le coup. On comprend mieux en lisant Mendès-France que le divorce entre Paris et ses anciennes colonies ait mis tant de temps à se faire...

On retrouve ça dans l’étymologie même du néologisme « Françafrique ». À l’origine - Jean-François Bayart, africaniste chevronné, le rappelle dans l’entretien qui ouvre ces cahiers - ce concept n’avait pas du tout la connotation péjorative qu’on lui connaît aujourd’hui.

Dans l’esprit d’un Félix Houphouët-Boigny, par exemple, le patriarche de l’indépendance ivoirienne, la Françafrique est un concept positif. C’est la continuité d’un lien privilégié.

Cela n’est pas du tout ce que cela deviendra après, avec les réseaux affairistes, politiques et militaires, de ceux qui ont moins servi l’Afrique qu’ils ne se sont servis d’elle. Donc, on retrouve aussi dans l’idéalisme mendésiste, cette idée qu’il y a une communauté de destins qui n’a pas de raison d’être brutalement rompue.

 

Il y a des pépites, effectivement, écrites et photographiques dans ce numéro. Notamment ce cliché de Valéry Giscard d’Estaing, coiffé de la même toque léopard que Mobutu. On est en août 1975 et tous les deux sont tout sourire. Et puis cet article intitulé « Sékou Touré m’a dit », de 1962, signé de François Mitterrand. Quelle est l’histoire de ce voyage en Guinée de François Mitterrand ?

 

Il se trouve que François Mitterrand, qui avait déjà un passé ministériel à l’époque, était un peu en réserve de la République et entretenait des relations plutôt cordiales avec la direction de L’Express. On s’est posé la question de savoir qui devait aller rencontrer le fameux Sékou Touré, l’homme qui avait infligé ce terrible camouflet à de Gaulle, en 1958, lors de cette tournée où le grand Charles tentait de vendre aux partenaires africains une forme d’association préservée au lendemain d’indépendances inévitables.

Les patrons de L’Express de l’époque se sont dit que François Mitterrand, ancien ministre de la France d’Outre-mer, était parfaitement fondé à engager ce dialogue, qu’on imaginait rugueux. À l’évidence, dans cet article, dont nous ne publions hélas que quelques extraits, on s’aperçoit qu’il était l’interlocuteur idoine.

Il se fait un peu remonter les bretelles, tout de même. Il s’entend dire de Sékou Touré que « la France nous traite en pays libre, qu’elle cesse de nous punir de cette indépendance »...

Les admonestations du Sékou Touré de 1962 ressemblent à s’y méprendre à celles qu’essuya Charles de Gaulle lui-même, quatre ans plus tôt. Il se veut encore, à l’époque, le champion d’une intransigeance dans l’indépendance. Et il est effectivement le héros dans cette période de jeunesses africaines qui veulent marquer, fut-ce avec fracas, une souveraineté nouvelle. Il n’est pas du tout impressionné par le passé de son illustre visiteur et c’est plus lui qui s’installe dans la posture du professeur que l’inverse.

 

Dans ce numéro, il est question aussi des hommes de l’ombre, des visiteurs du soir, de ces réseaux « françafricains » dont beaucoup de chef d’Etat français ont juré de se débarrasser. Avez-vous le sentiment depuis l’alternance politique en France du mois de mai dernier qu’on s’est rapproché de cet objectif ?

 

Paradoxalement, plutôt oui. Bien sûr, on a toutes les raisons d’être sceptiques, méfiants, voire suspicieux. On se souvient des espérances soulevées par Nicolas Sarkozy pendant sa campagne électorale, en 2006 et 2007, lorsqu’il prononce des discours à Cotonou, au Bénin, ou à Bamako, des discours que tout moderniste de la relation post-coloniale signerait des deux mains aujourd’hui.

Mais il se trouve qu’effectivement, François Hollande va peut-être réussir à exploiter l’atout générationnel dont, hélas, Nicolas Sarkozy n’a rien fait. C'est-à-dire d’avoir eu deux, quatre ou cinq ans à l’heure des indépendances, et donc de ne pas avoir, comme un Jacques Chirac ou un François Mitterrand, un lien à la fois intime et pervers, des dettes symboliques, sentimentales ou politiques envers tel ou tel potentat africain. C’est la raison pour laquelle, à mon sens, et Dieu merci, je ne suis pas le seul à le penser, vouloir inscrire l’intervention militaire française au Nord-Mali dans une sorte de continuité historique d’une France retorse n’a aucune résonnance dans le réel.

 

Cette guerre est-elle affranchie de cette lourde histoire ?

 

Je ne dis pas qu’elle est immunisée. En tout cas, dans sa genèse. À la différence de ces interventions du fameux gendarme de l’Afrique, costume un peu lourd à porter qui a été celui de la France, lorsqu’au fond, on volait au nom d’accords plus ou moins obscurs au secours de despotes en difficultés. Là, la France a répondu à l’appel de l’écrasante majorité des Maliens asservis par ce qui est vécu comme une occupation et un écrasement.

J’entends bien le discours post-tiers-mondiste qui nous explique qu’aucune initiative française ne peut être chimiquement pure, qu’elles sont toutes dictées par une volonté de piller les richesses du continent. Ne soyons pas totalement angélistes, ni naïfs. Mais pour le coup, il faut être d’une singulière étroitesse d’esprit pour assimiler l’opération Serval à telle ou telle intervention menée hier en Centrafrique, au Congo-Brazzaville, en RDC ou au Gabon.

 

On est sortis de la doctrine de Lionel Jospin, « ni ingérence, ni indifférence » ?

 

D’une certaine manière, François Hollande fait un peu du Jospin. Il a aussi peu de sympathie pour ces émissaires de l’ombre, qui, comme disait Sarkozy, n’ont d’autre mandat que celui qu’ils s’attribuent. Et il ne veut pas apparaître comme étant extrêmement froid à l’égard du continent.

Hollande a un atout considérable et paradoxal : il connaît très mal l’Afrique. C’est un atout dont il ne faut pas abuser, évidemment. Mais il peut avoir un regard plutôt analytique. Au fond, qu’un président « normal » soit l’acteur de la normalisation du rapport avec l’Afrique, quoi de plus logique ?

 

----------------------------------------------------------------------

 

Centrafrique: la rébellion dit reprendre les armes malgré des concessions du pouvoir

LIBREVILLE (AFP) - 20.03.2013 22:28 - Par Patrick FORT

 

L'annonce mercredi par la rébellion centrafricaine Séléka qu'elle reprenait les armes en raison du non-respect des accords de paix de Libreville fait planer la menace de nouveaux combats, notamment à Bangui, malgré des concessions tardives du président François Bozizé en soirée.

 

L'annonce mercredi par la rébellion centrafricaine Séléka qu'elle reprenait les armes en raison du non-respect des accords de paix de Libreville fait planer la menace de nouveaux combats, notamment à Bangui, malgré des concessions tardives du président François Bozizé en soirée.

 

"L'ultimatum est terminé. Nous allons retourner aux armes", a affirmé à l'AFP le colonel Djouma Narkoyo, un des chefs militaires rebelles, soulignant que le président Bozizé, au pouvoir depuis 2003, n'avait pas respecté les accords de paix signés à Libreville le 11 janvier.

 

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné mercredi "les attaques menées récemment par les rebelles de la coalition Séléka, en particulier à Bangassou (sud) et dans ses environs, et la menace de reprise des hostilités".

 

Dimanche, la rébellion avait donné 72 heures au pouvoir pour respecter les accords et retient depuis à Sibut (160 km au nord de Bangui), cinq ministres issus de la rébellion et membres du gouvernement d'union nationale formé après les accords de Libreville. Parmi les ministres retenus, jusqu'ici chef officiel de la rébellion, le vice-Premier ministre Michel Djotodia, et le ministre des Forêts, le général Mohamed Dhaffane.

 

Mercredi soir, le président Bozizé a signé deux décrets portant sur les revendications du Séléka. Il a notamment fait libérer "tous les prisonniers politiques et de guerre mentionnés dans les accords de Libreville" et levé le couvre-feu à Bangui, ouvrant ainsi la voie à la suppression des barrages mis en place par ses partisans. Ceux-ci contrôlaient de nombreux axes dans la capitale et étaient accusés de racket voire d'arrestations illégales de sympathisants présumés de la rébellion.

 

Toutefois, le colonel Narkoyo a estimé en soirée: "Ce n'est pas encore ça. Ca ne suffit pas (...) Il (Bozizé) a fait semblant de signer des décrets mais il n'a pas parlé du recrutement de nos éléments dans l'armée centrafricaine (...) ni du départ des troupes centrafricaines et ougandaises".

 

Il n'a toutefois pas fermé la porte. S'il a souligné que le Séléka étudiait encore sa "stratégie", il a concédé: "On peut lui (Bozizé) accorder une chance s'il accepte d'exécuter les revendications. Ces revendications existent depuis le 11 janvier mais on peut encore lui donner un délai: il faut qu'il mentionne sa volonté de ramener la paix dans le pays".

Les deux principaux points d'achoppement sont la présence des troupes sud-africaines et ougandaises dans le pays et l'intégration des combattants Séléka dans l'armée. La rébellion estime que ces troupes ont été appelées par le président Bozzizé pour se maintenir au pouvoir. Elle réclame l'unique présence de forces sous-régionales.

 

Actuellement, l'effectif de la Fomac (la force mixte) composée de Tchadiens, Congolais, Camerounais et Gabonais est estimé à environ 500 hommes alors que la France dispose dans le cadre de l'opération Boali de 250 hommes qui ne sont pas intervenus pendant l'offensive rebelle entamée le 10 décembre et qui s'est achevée aux portes de Bangui le 11 janvier sous la pression internationale. Le président français François Hollande avait clairement indiqué que ces troupes n'étaient là que pour défendre les ressortissants et intérêts français.

 

La veille, le Premier ministre issu de l'opposition Nicolas Tiangaye avait aussi donné des gages à la rébellion lançant "un appel pressant (...) pour que l'esprit de dialogue qui a prévalu à Libreville puisse demeurer". Il avait souligné que l'intégration des combattants Séléka n'étaient pas prévus dans l'accord de Libreville.

 

De sources proches de l'opposition et du pouvoir, le départ des troupes étrangères non sous-régionales étaient, selon les termes de l'accord, un principe acquis mais conditionné par l'évaluation de la situation sécuritaire.

 

"Le dialogue" est la "seule solution à la crise actuelle (...). 1,5 million de nos concitoyens sont devenus déplacés internes et vivent dans des conditions nécessitant une assistance humanitaire urgente. Les populations civiles sont victimes de graves violations des Droits de l'Homme: assassinats, viols, pillages et vols", a-t-il souligné.

 

Une source proche du président François Bozizé a indiqué à l'AFP que "toutes les revendications de la rébellion ont été acceptées. Alors, ils n'ont plus aucune raison de jouer les va-t-en-guerre".