5 (cinq) ministres issus de la Séléka séquestrés par leurs éléments à Sibut (Centrafrique)

 

 

Alwihda -  Pacôme PABANDJI, 18 Mars 2013 (Reportage exclusif à Sibut de Pacôme PABANDJI pour LNC) - Le médiateur dans la crise centrafricaine désigné par Denis Sassou Nguesso, le général Essongo arrivé en République centrafricaine il y a quelques jours, a conduit une mission à Sibut, à 187 kms de Bangui, mission composée du vice-premier ministre chargé de la défense M. Michel Am Nondroko Djotodjia et des autres ministres du gouvernement d’union nationale, notamment Herbert Gontran Djono Ahaba, Hamed Moussa Dhaffane, Christophe Gazam-Betty et Amias Amallas Aroune.

Le but de cette mission a été pour le médiateur, une prise du pouls de la situation chez les rebelles, et de la comparer avec la situation du côté du pouvoir.

 

Malheureusement, l'équipée a tourné en vinaigre.

 

L’équipe de la mission a été reçue à la mission catholique de Sibut, devenue depuis l’entrée des rebelles dans la ville, un centre d’opération.

Après de vives discussions, les rebelles par la voix du colonel Bordas, ont présenté 10 points de revendication à savoir:

 

1- le suivi des accords de Libreville,

2- le retrait des troupes sud-africaines présentes en République centrafricaine,

3- la protection des habitants des zones occupées par Séléka « qui sont à chaque fois massacrés par les forces gouvernementales lorsqu’ils sortent »,

4- la reconsidération des postes ministériels pour la Séléka,

5- le démantèlement des barrières de COCORA

6- la suppression de toutes les milices pro-gouvernementales,

7- la libération de tous les prisonniers politiques,

8- le paiement des primes aux ex-libérateurs qui ont conduit Bozizé au pouvoir en 2003,

9- la reconnaissance officielle par décret présidentiel des galons des rebelles

10- l’intégration immédiate de plus de 2000 rebelles dans les rangs des forces armées centrafricaines « pour assurer la sécurité de leurs parents et leurs chefs ».

 

Ils ont accordé un délai de 72 heures pour que ces revendications soient exécutées, faute de quoi ils passeront à l'action.

 

Et afin de pousser le gouvernement à vite réagir, ils ont retenu tous les ministres Séléka à Sibut en attendant…

 

Le médiateur quant à lui a promis rendre compte fidèlement des évènements, et restera en contact permanent avec les rebelles pour les procédures à suivre.

Le vice-premier ministre en charge de la défense M. Djotodjia a, au sortir des discussions, donné son point de vue sur la situation. Selon lui, c’est la mauvaise coordination qui est à l’origine de tout cela.

« Comment un président, père de la nation, peut-il tenir un tel discours devant tout un peuple au stade le 15 mars dernier ?

Il a appelé à la haine et à la division.

Nous ne saurons rester les bras croisés… » a-t-il martelé.

Toujours selon lui, « Je n’ai pas décidé de rester mais ce sont mes éléments qui en ont décidé ainsi. C’est en quelque sorte une forme de pression, car ils veulent que le chef de l’Etat respecte les termes des accords de Libreville.

Si le président Bozizé est de bonne foi, même dès demain (ndlr : lundi 18 mars 2013) nous pourrons repartir. J’ai essayé de convaincre les éléments pour qu’ils nous laissent repartir à Bangui, mais ils sont fermes et, puisqu’ils ont des armes et que moi je n’en ai pas… je ne peux que me plier. Mais j’exclus la reprise des hostilités et prône toujours pour la voie du dialogue. »

 

En dehors de quelques débordements, la mission est rentrée à Bangui tard dans la nuit. On attend la réaction du gouvernement.

 

© Mars 2013/LNC

 

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Centrafrique: la rébellion mécontente retient cinq de ses ministres

Par AFP - Libération, 18 mars 2013 à 13:33

Des rebelles du Séléka près de Darma, en Centrafrique, le 10 janvier 2013 (Photo Sia Kambou. AFP)
Des rebelles du Séléka près de Darma, en Centrafrique, le 10 janvier 2013 (Photo Sia Kambou. AFP)

Cinq ministres centrafricains issus de la coalition rebelle du Séléka sont retenus au nord de Bangui par les éléments de cette même rébellion qui accusent le gouvernement de ne pas respecter des accords de paix et lui ont adressé un ultimatum menaçant d’une reprise des hostilités.

Les ministres, dont le chef officiel de la rébellion, le vice-Premier ministre Michel Djotodia, et le ministre des Forêts, le général Mohamed Dhaffane, font partie d’une délégation gouvernementale dépêchée dimanche auprès du Séléka à Sibut, à 160 km au nord de Bangui, où ils sont retenus depuis.

«Nous avons exigé du gouvernement qu’il applique les accords de Libreville. Mais il ne semble pas nous écouter», a déclaré à l’AFP une autre figure de la rébellion, le colonel Djouma Narkoyo, un de chefs militaires sur le terrain.

«Nous donnons 72 heures au gouvernement pour répondre à ces exigences, sinon le Séléka va reprendre les hostilités», a mis en garde le colonel Narkoyo.

Mi-décembre, les rebelles du Séléka avaient pris les armes contre le régime du président François Bozizé, menaçant la capitale Bangui. Après avoir signé un accord de paix le 11 janvier à Libreville, au Gabon, la coalition rebelle a accepté de participer à un gouvernement d’union nationale.

La rébellion n’a cessé depuis lors de demander le respect de ces accords, avec notamment la libération de prisonniers politiques et le départ des troupes étrangères de la Centrafrique, en particulier sud-africaines.

«En plus de nos exigences, nous avons retenu les cinq ministres pour protester contre le langage dégradant tenu à la radio nationale par le président de la République à l’encontre du Séléka, qui démontre sa volonté de ne pas aller à la paix», a ajouté le colonel Narkoyo.

Depuis le début du conflit et la première offensive de décembre, des dissensions sont apparues au sein du Seleka, qui veut dire +Alliance+ en sango, la langue nationale.

Le mouvement est formé d’éléments de deux grandes rebellions, l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR) et la Convention des patriotes pour le justice et la paix (CPJP), ainsi que d’éléments dissidents d’autres groupes armés.

L’UFDR et la CPJP étaient déjà traversées par des divisions avant l’offensive de la fin 2012, mais les victoires sur le terrain face à l’armée centrafricaine avaient fait taire ces divergences.

Depuis l’accord de paix, ces divisions sont devenues patentes, avec des attaques de villes par différentes factions du Séléka: fin février à Sido (nord), le 11 mars à Bangassou, l’une des principales villes du sud du pays.

Ces attaques avaient été fermement condamnées par M. Dhaffane ou le ministre de la Communication Christophe Ghazam Betty, qui fait également partie des cinq ministres retenus à Sibut.

En février, une partie de la rébellion voulait poursuivre l’offensive sur Bangui après s’être arrêtée à une cinquantaine de km la capitale sous la pression internationale.

Les chefs rebelles ont aussi eu beaucoup de mal à contrôler leurs éléments, dont certains combattants désoeuvrés sont accusés de pillages et de rackets.

Selon l’accord de Libreville, les hommes du Séléka doivent normalement être cantonnés puis désarmés dans un processus de réinsertion.

La principale revendication de la rébellion au début de son offensive était le respect de vieux accords de paix que, selon elle, le président Bozizé, arrivé au pouvoir par le biais d’une attaque rebelle en 2003, n’avait pas respectés.

Ils demandaient notamment le paiement et l’intégration dans l’armée des anciens combattants, ou encore des investissements dans les régions du nord d’où sont originaires de nombreux rebelles.

 

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« L’accord que nous avons signé avec Bozizé est caduc ! »

lundi 18 mars 2013 / par Assanatou Baldé [www.afrik.com/]

 

Les rebelles du Séléka, en confrontation avec François Bozize depuis plusieurs mois, ont lancé un ultimatum au président centrafricain qui a trois jours pour respecter leurs revendications. Ils menacent de reprendre les armes si le dirigeant s’entête. Eric Massi, porte-parole de la rébellion, nous donne les raisons de la colère de son mouvement.

Afrik.com : Pourquoi avez-vous décidé de lancer maintenant un ultimatum au président François Bozizé ?
Eric Massi :
L’accord de Libreville a été signé il y a deux mois. Il n’a toujours pas été mis en place par le président François Bozizé. Rien n’a été respecté. Il y a dix jours, le Premier ministre centrafricain est allé à la rencontre du Séléka. Il a estimé que les revendications du mouvement sont légitimes. Mais depuis nous attendons toujours son retour qui n’a pas eu lieu. Je rappelle que nous revendiquons toujours la libération de l’ensemble des prisonniers du Séléka, la fin des arrestations arbitraires et le départ des troupes sud-africaines, chargées de protéger François Bozizé.

Afrik.com : N’avez-vous pas l’impression que François Bozizé vous a menés en bateau depuis le début du conflit qui vous oppose à lui ?
Eric Massi :
Effectivement nous constatons que Bozizé n’a pas respecté ses engagements depuis le début de la crise. Pour le chef d’état-major du Séléka, il est temps que cela cesse. Les hommes du Séléka doivent être satisfaits de leurs revendications. Il est temps que Bozizé prenne en main ses responsabilités ! Bozizé s’entête toujours à déployer ses troupes sur l’ensemble du territoire. Cette situation ne peut plus durer ! Elle est devenue supportable pour les rebelles du Séléka mais aussi pour le peuple centrafricain. Le maintien de Bozizé au pouvoir ne permet pas de ramener la paix. Or nous avons toujours souhaité le retour à la paix et sécurité dans le pays. Nous sommes persuadés que son départ permettra à la société centrafricaine de repartir de l’avant.

Afrik.com : Ce n’est pas la première fois que vous menacez de reprendre les hostilités. Vous n’avez jamais mis vos menaces à exécution. Cette fois-ci, comptez-vous aller jusqu’au bout ou est-ce juste un effet d’annonce ?
Eric Massi :
Dès l’expiration du délai de trois jours s’il ne respecte pas ses engagements, nous envisageons de reprendre les hostilités. Il faut savoir que depuis dix jours le Séléka a procédé à la sécurisation de plusieurs villes comme Bangoussa, car nous avons constaté que des armes en circulation ont été récupérées par le régime de Bozizé. Une situation qui peut se révéler dangereuse.

Afrik.com : François Bozizé ne semble jusqu’à présent jamais avoir pris vos menaces au sérieux. S’il s’entête que va-t-il se passer ? Comptez-vous le déloger de force comme vous l’aviez annoncé lors de votre premier entretien avec Afrik.com ?
Eric Massi :
Oui tout à fait. Nous prendrons les mesures nécessaires s’il ne réagit pas. Lorsqu’un accord est signé et qu’une des parties ne le respecte pas, il est caduc. En l’occurrence, l’accord que nous avons signé avec Bozizé est caduc ! Il faut prendre la réalité de la situation avec le plus grand sérieux et toute la mesure qu’elle requiert. Nous ne sommes pas dans un jeu.

Afrik.com : La Cemac s’est-elle, selon vous, suffisamment impliquée pour résoudre la crise centrafricaine ?
Eric Massi :
La Cemac est toujours active pour tenter de régler la crise. Ses membres suivent la situation avec attention.