Jean-Jacques 
DEMAFOUTH MAFOUTAPA : LA BIOGRAPHIE
Par 
Emmanuel Limbassa

Jean-Jacques 
Demafouth@sni
Sommaire 
:
1. 
Famille, jeunesse, débuts dans la vie active.
2. 
Rôle trouble sous Kolingba.
3. 
Apogée et chute sous l’ère Patassé.
4. 
Opposition au régime Bozizé.
5. 
Maillon fort durant la transition de Samba-Panza jusqu’aux élections de 
2015-2016.
1. 
Famille, jeunesse, débuts dans la vie active.
Jean-Jacques 
Demafouth est né le 3 octobre 1959 au quartier Malimaka -Miskine- à Bangui. Son 
père Albert Mafoutapa est originaire de Sibut. Il a servi en tant qu’infirmer 
dans le bataillon de marche d’Oubangui-Chari intégré aux forces françaises 
libres pendant la Seconde Guerre Mondiale. Il en sort caporal-chef en 1945 puis 
entre comme infirmier au Ministère de la Santé. Sa mère Jeanne Ingama est 
originaire de Kouango.
Demafouth 
est le cinquième enfant d’une famille de dix-sept frères et sœurs. Il grandi à 
Sibut avant d’être pour la première fois scolarisé à l'école primaire à 
Koukourou - localité de Nana-Grebizi, située sur l’axe Bamingui  - Mbrès- 
 où il est envoyé chez sa grande sœur, loin de chez ses parents. Il 
continue ensuite sa scolarité à Kaga-Bandoro, puis à Dékoa, puis brièvement au 
collège au séminaire Saint-Marcel de Sibut. Il entre ensuite au lycée de 
Berbérati, puis au lycée Barthélémy Boganda de Bangui tout en étant vendeur 
ambulant pour subvenir à ses besoins.
En 
1979, la capitale est en pleine effervescence. Après les grèves des élèves et 
étudiants en Janvier, les écoles et l’Université de Bangui s’affirment au 
printemps comme les bastions de la contestation au régime Bokassa. Demafouth qui 
est alors en classe de première assiste avec d’autres élèves aux réunions 
politiques et fait partie de ce mouvement de jeunesse contestataire. Demafouth 
quitte le lycée avant de décrocher son baccalauréat. Il participe alors à 
l’édition d’une page de programmes de films diffusés dans les salles de cinéma, 
financée par des encarts publicitaires des magasins de la place avec son ami 
Bienvenu Dotocko, avant de transformer cette page en un journal intitulé 
"Tongolo" en 1980. Ce journal traitant de sport et de musique est publié tous 
les 3 mois pendant un an et demi avant d’être arrêté après 6 ou 7 tirages faute 
de moyens.
2. 
Rôle trouble sous Kolingba.
Peu 
après l’arrivée du Comité Militaire de Redressement National - CMRN - au 
pouvoir, Demafouth entre au secrétariat d’Etat de la Jeunesse et des Sports que 
dirige alors Gaston Gambor - lequel est rattaché au Ministère de l’information 
et de la culture dirigé par François Bozizé-.
Proche 
de l’ancien premier ministre Maïdou - dont l’aide de camps est Guy-Bertrand 
Damango - qui dirige le Parti Républicain pour le Progrès -PRP, Demafouth est 
impliqué - aux côtés de Guy Moskit - dans l’attentat à la bombe du 14 juillet 
1981 au cinéma "Club"  à Bangui. Cet attentat qui fait trois morts, une 
soixantaine de blessés et d’importants dégâts matériels entraîne un durcissement 
du pouvoir de David Dacko : l'état de siège est décrété, la loi martiale 
imposée, la constitution suspendue.
Demafouth 
suit une formation de correspondant de presse avant de travailler au service de 
Documentation de la Présidence -renseignements- jusqu'en mars 
1982.
Après 
ce que l’on a nommé le coup d’Etat radiophonique du 3 mars 1982, Mesdames 
Bozizé, Patassé, Mbaïkoua et leurs enfants sont finalement faits prisonniers au 
camp Kassaï le 6 mars 1982 où ils resteront prisonniers pendant quasiment un an. 
Demafouth servira alors brièvement de relai entre Kolingba et Agnès Mbaïkoua 
avant de quitter Bangui accompagnant le général Alphonse Mbaïkoua qui quitte 
Bangui à la mi-mars à pieds accompagné de quelques hommes en direction du 
Tchad.
En 
mai 1982, ils arrivent à Moundou où Mbaïkoua s’appuie des éléments tchadiens 
dissidents, dirigés par le colonel Kamougué auquel il est parenté et qui sont 
hostiles à la mainmise des gens du nord sur les populations du sud du Tchad. 
Kamougué domine toute cette zone jusque fin 1982 avant de réfugier au Gabon, 
chassé suite à la victoire de Habré. Demafouth est arrêté, emmené à N’Djamena et 
présenté au président Hissène Habré comme l’un des meneurs de l’opposition 
centrafricaine à la frontière ce qui lui vaut un emprisonnement de cinq mois. Il 
prend ensuite contact avec le général Bozizé qui lui permet d’atteindre Cotonou 
en 1983 en passant par le Cameroun, puis le Nigeria.
Demafouth 
retrouve au Bénin les généraux Bozizé et Mbaïkoua et sert de point de relais 
avec Patassé à Lomé. C’est ainsi qu’il apprend à connaître Patassé et qu’il fait 
bon nombre de voyages pour le compte du MLPC, notamment en Italie et surtout en 
Libye. A cette époque, Kadhafi est obligé d’évacuer le nord du Tchad suite à 
l’intervention militaire française dans cette zone qui est réoccupée alors par 
Habré. Kadhafi soutient alors les dissidents tchadiens du sud et l’opposition 
centrafricaine Demafouth recevant ainsi une formation à 
Benghazi.
En 
1984, Demafouth et Mbaïkoua rentrent en RCA où ils montent une rébellion appelée 
"commando Mbakara" concluant une alliance avec les groupes de rebelles tchadiens 
"Codos" situés au sud du Tchad. En novembre 1984, le commando Mbakara et les 
rebelles Codos attaquent Markounda.
En 
février 1985, ces hommes accaparent 41 millions de Fcfa encaissés par l’antenne 
de SOCADA - Société centrafricaine de développement agricole- à Paoua. En avril 
1985, une opération de ratissage menée conjointement par les FACA du colonel 
Guillaume Djengbot et les Forces armées nationales du Tchad - FANT- du Comchef 
Idriss Deby. De nombreux villages autour de Paoua seront pillés et brulés par 
les FACA et les habitants de ces villages lorsqu’ils n’ont pas le temps de se 
réfugier dans la brousse, sont tués ou battus et/ou emprisonnés. Demafouth 
déclarera vaguement "en 1984, au cours d’un accrochage avec l’armée 
centrafricaine, le général Mbaïkoua fut tué." Alphonse Mbaïkoua a-t-il été tué 
au cours d’un accrochage avec l’armée centrafricaine ou bien lors du partage du 
butin de la SOCADA victime de la vénalité de son adjoint l’adjudant Bobet et/ou 
de celle de Demafouth ? Bien des années plus tard, lorsqu’une mission fut menée 
en 1999 pour récupérer le corps du général Mbaïkoua pour lui rendre les honneurs 
et le rétablir dans ses droits à titre posthume, Demafouth indiqua précisément 
le lieu où se trouvait les restes de sa dépouille au 
Tchad…
Demafouth 
quitte alors le front partant au Cameroun puis rejoint Bozizé en Algérie, puis 
en Libye. Ce n’est qu’à la fin des années 1980 qu’il gagne la France où il 
reçoit comme réfugié des conseils de l’association Cimade avant lui-même de 
faire de "l’assistance juridique" pour le compte de cette association française 
d’aide aux migrants. Il aide ainsi au montage de dossiers de demande d'asile et 
de carte de séjour aux ressortissants étrangers en France. A partir de cette 
expérience, il se présente comme "conseiller juridique" sans pour avoir 
quelconque diplôme, puis profitant des réformes Badinter de 1990-1993 dispensant 
les détenteurs de certains diplômes universitaires d'enseignement supérieur 
exerçant professionnellement le métier de juriste du passage de l’examen du 
barreau, il n’hésite pas à se présenter au fil du temps comme avocat faisant de 
ce titre autoproclamé sa profession principale ! Demafouth est par ailleurs 
co-fondateur d'une association France-Centrafrique, installée rue du Faubourg St 
Antoine à Paris.
Demafouth 
œuvre jusqu’à ce que Patassé obtienne un visa pour venir se soigner puis 
obtienne l’asile politique en France où il peut résider à Paris à la fin de 
l’année 1991. Demafouth suit Patassé qui fait son retour à Bangui le 15 octobre 
1992, où il est accueilli triomphalement après plus de dix ans d’exil pour 
participer aux élections législatives et 
présidentielles.
Au 
début de l’année 1993, alors que Demafouth est en couple avec la sœur de l’homme 
d’affaires Robert Ngoki - un ancien baron du régime de l'ancien président André 
Kolingba qui soutient la campagne de Patassé- ceux-ci sont contactés par des 
Israéliens qui veulent récupérer les mines de diamants du général Shmuel Gonen, 
décédé brusquement à Milan le 30 septembre 1991.

Ange-Félix 
Patassé dit AFP et Jean-Jacques Demafouth@sni/illustration
3. 
Apogée et chute sous l’ère Patassé.
Après 
l’élection de Patassé, Demafouth officie en qualité de conseiller juridique à la 
Présidence. Il entretient des liens avec des responsables français-notamment 
Bruno Delaye, conseiller pour les affaires africaines à la Présidence et Michel 
Roussin, ministre français de la Coopération-. En mars 1994, Demafouth tente de 
récupérer les biens immobiliers et les comptes en France de l'ex-empereur 
Jean-Bedel Bokassa.
Le 
28 mars 1994, le conseiller du président saisi ainsi le cabinet Jeantet & 
Associés pour entamer une procédure d'exequatur afin que la condamnation le 12 
juin 1987 de Jean-Bedel Bokassa, par la Cour criminelle de Bangui puisse 
permettre de récupérer ses propriétés en 
France. 
Demafouth 
épouse l’avocate Danièle Darlan, professeur en droit à l’Université de 
Bangui.

Jean-Jacques 
Demafouth et Ange-Félix Patassé@emat
Il 
dirige le tristement célèbre Centre national de recherche et d’investigation 
-CNRI - créé le 28 janvier 1995, par décret N° 95.031 par le président Patassé. 
Rattaché à la Présidence, le CNRI est doté d'une autonomie financière et d'une 
brigade d'intervention pour mener des recherches tant à l'intérieur qu'à 
l'extérieur du territoire national. Cette structure permet de mener des enquêtes 
de police en lien avec le parquet conjointement avec la gendarmerie et de 
l’armée.
Le 
18 mai 1996, débute ce que l’on a appelé la "deuxième mutinerie" lorsque se 
propage la rumeur que l’armurerie du camp Kasaï, la base du Régiment de Défense 
Opérationnelle du Territoire -RDOT-, passerait sous le contrôle de la Garde 
présidentielle. Durant ces événements qui durent une dizaine de jours et 
impliquent plusieurs centaines de militaires avec de violents combats, Demafouth 
se réfugie à l'ambassade de France jusqu’au 24 mai 1996, en excipant de sa 
double nationalité, française et centrafricaine. Sous la pression de Paris, le 
gouvernement de Koyambounou sera contraint à la suite de ces évènements de céder 
sa place à un Gouvernement d’Union Nationale - GUN- , dirigé par Jean-Paul 
Ngoupandé qui prend fonctions le 30 juin 1996. Les rapports entre le Chef du 
Gouvernement, son Directeur de Cabinet Karim Meckassoua, et les caciques du MLPC 
sont exécrables et certains ministres référents directement au président de la 
République sans passer par le Premier ministre Ngoupandé. C’est dans ce 
contexte que le 19 janvier 1997, Karim Meckassoua : sortant d'une réunion avec 
le général malien ATT dans le cadre de la médiation africaine, est arrêté dans 
l'enceinte du Palais Présidence par le capitaine Yossé de la Garde 
présidentielle, à la demande de Me Jean-Jacques Demafouth. Tandis que son 
chauffeur est passé à tabac, il est conduit dans les locaux de la Garde 
Présidentielle et longuement et violemment interrogé. Ces évènements 
interviennent juste avant qu’un nouveau gouvernement dirigé par Michel 
Gbezera-Bria ne soit formé le 30 janvier 1997.
Demafouth 
se distingue aussi à la tête du CNRI par l’arrestation de journalistes comme le 
rédacteur en chef du journal "Le Novateur" qui passe de sales moments en prison, 
par l’instruction de "dossiers de corruption" sans lendemains judiciaires, comme 
celui de l'ex-ministre Charles Massi en janvier 1998 et celui du général Ndayen, 
Ministre délégué à la Défense pour la restructuration de l'armée, désigné à ce 
poste par les mutins ou encore par l’élimination d’éléments comme celui du 
colonel Alphonse Rehote. Ce poste au CNRI lui permet par ailleurs d’octroyer des 
promotions à certains de ses éléments membres des forces armées, notamment 
celles de Guy-Bertrand Damango, adjudant puis commandant la brigade territoriale 
de Bangui ou celle du lieutenant Alfred Service. Demafouth dirige le CNRI 
jusqu’à sa dissolution le 5 mars 1998, date à laquelle il se consacre notamment 
à ses activités de Président du Conseil d’administration de la Société 
centrafricaine des télécommunications  -SOCATEL- et de président de la 
commission d'arbitrage du MLPC.
Une 
fois passées les élections présidentielles de septembre 1999, un nouveau 
gouvernement est formé dans lequel Jean-Jacques Demafouth est nommé Ministre de 
la Défense. Lors de la campagne de ces élections, la tension fut palpable entre 
les militants du MLPC et ceux du RDC dans la préfecture de la 
Basse-Kotto.

Jean-Jacques 
Demafouth@emat/pr
Début 
novembre, des responsables MLPC viennent se plaindre au Président Patassé que 
des militants du MLPC sont victimes de violences de la part d’une bande armée 
qui sévit aux alentours de Kembé.
Le 
Ministre de la Défense décide alors de l’envoi d’une mission dans la zone en vue 
de remettre de l’ordre. Lors de cette opération, le lieutenant Alfred Service 
prend la tête d'un commando de l'Unité de sécurité présidentielle -USP- auquel 
se joint le Ministre de la Défense lui-même. 
Ils 
se rendent à Kembé avec deux véhicules de l'armée et une trentaine d'éléments. 
Au cours de cette expédition, dans la nuit du 18 au 19 novembre 1999, le 
Lieutenant Antoine Bodot, le maréchal de logis chef Apollinaire Hondet, 
commandant de la brigade de gendarmerie de Kembé ainsi que trois autres 
personnes seront assassinés. Apollinaire Hondet fut ainsi conduit de Kembé vers 
Grimari où il fut torturé avant d’être mis à mort. Son corps, enterré dans un 
village situé entre Sibut et Grimari fut exhumé par la suite par la famille pour 
les funérailles à Bangui. Cette initiative sous forme d’expédition punitive 
entraîne la colère de la Primature et de la Présidence qui digèrent très mal le 
bilan macabre de cette funeste expédition aux lendemains des 
élections…
La tentative de coup d’Etat survenue dans la nuit du 27 au 28 mai 2001 a longtemps été présentée comme une aventure exclusive d’André Kolingba. Mais Jean-Jacques Demafouth fomentait lui aussi un projet de renversement du régime. Les soupçons des cadres du régime contre Demafouth seront tels qu’il sera démis de ses fonctions fin août 2001 accusé d’avoir fomenté "un coup d'Etat dans le coup d’Etat"

Jean-Jacques 
Demafouth - général Njadder et général Bozizé@ema
Au 
petit matin du 28 mai 2001, le général François Bédaya Ndjadder - alors 
Directeur Général de la gendarmerie et ultime rempart pour la protection du 
régime- est grièvement blessé au niveau de l'Université de Bangui. Au cours de 
cette embuscade organisée par Demafouth, c’est le sergent-chef Anatole Ngaya, 
chauffeur et garde du corps de Ndjadder qui tire sur ce dernier. Bien que 
blessé, Ndjadder arrive à contacter l’ambassadeur de France et Patassé pour être 
secouru et conduit à l’hôpital communautaire où il décédera quelques heures plus 
tard…
Dans 
l’après-midi du 29 mai, alors que le coup d’Etat était en train d’échouer, le 
général André Kolingba est manipulé par Jean-Jacques Demafouth qui lui fait 
croire que Patassé est décédé. Le Ministre de la Défense pousse à ce moment 
André Kolingba à se démasquer, probablement pour se couvrir des accusations de 
coup d’Etat auxquelles il fera finalement face quelques mois plus tard. Kolingba 
tombe naïvement dans le piège et revendique la paternité du coup d’Etat à 
travers une déclaration sur les antennes de la Radio France 
Internationale.
Ndjadder 
éliminé, Jean-Jacques Demafouth tente une manœuvre le 2 juin 2001 pour tuer le 
chef d’Etat-major de l’armée Bozizé en lui demandant de venir faire le constat 
de la maison d’André Kolingba. Cependant, Bozizé est méfiant et il demande au 
colonel Abel Abrou chef d'Etat-major de l’armée de terre de se rendre à Ouango. 
A son arrivée, les assassins qui le prennent pour Bozizé ouvrent le 
feu…
Beaucoup 
d’exécutions sommaires sont commises à la suite de l'appel lancé par 
Jean-Jacques Demafouth, qui demande aux populations de revenir dans la ville de 
Bangui et aux rebelles et loyalistes de regagner leurs camps. C'est souvent à 
l'occasion de ces retours volontaires que les civils sont exécutés, parfois par 
ds frères d'armes, dans les locaux de la police, de la gendarmerie ou dans les 
camps militaires. C'est dans ces conditions que le Lieutenant-Colonel de 
gendarmerie Alphonse Konzi par exemple est exécuté…Demafouth expliquera 
tranquillement aux enquêteurs de la FIDH que des douilles ont été retrouvées 
devant le portail de la concession des Bangazoni ce qui entraînera la mort de 
Léon Bangazoni, décapité ainsi que son fils qui sera lui aussi 
tué…
Le 
Ministre de la Défense annonce le 7 juin 2001 que toute la capitale est sous le 
contrôle de l’armée loyaliste et Jean-Pierre Bemba ordonne le départ de ses 
troupes de Bangui, estimant que leur mission aux côtés des forces loyalistes est 
"terminée"
Le 
11 juin 2001, une Commission d’Enquête Judiciaire présidée par le Procureur 
Général Joseph Bindoumi est créée pour investiguer sur la tentative de coup 
d’Etat du 28 mai. Dans la nuit du 5 au 6 juillet 2001, le chef de la sécurité du 
Programme des Nations-Unies pour le Développement  -PNUD- à Bangui 
Jean-Pierre Lhommée, un ancien colonel de l'armée française est tué par balles. 
Cet assassinat entraîne le classement du pays en catégorie 3 dans l’échelle des 
risques de l’ONU, ce qui interdit la présence des familles d’expatriés et les 
missions de l’extérieur. Jean-Pierre Lhommée, ancien colonel des Éléments 
français d’assistance opérationnelle  -EFAO- est alors le seul 
fonctionnaire étranger habilité à circuler pendant cette période de couvre-feu 
au cours de laquelle de nombreuses exécutions extrajudiciaires sont maquillées 
en vols à main armés. D’après la Commission Mixte d’enquête judiciaire, un 
document prétendument tiré de l’ordinateur du colonel Lhommée aurait indiqué que 
plusieurs diplomates et hautes autorités étrangères étaient impliqués dans le 
coup d’Etat du 28 mai 2001. Le Procureur Général Joseph Bindoumi expliquera aux 
délégués Amnesty International que c’est pour cette raison que le Ministre de la 
défense a donné l’ordre d’exécuter Jean-Pierre 
Lhommée.
Jean-Jacques 
Demafouth à qui l’on reproche "une passivité incompréhensible de l'armée" au 
cours de cette tentative de coup d'Etat est finalement démis de ses fonctions et 
placé à la disposition de la justice le 27 août 2001 sur la base de 
conversations enregistrées dans lesquelles Demafouth demande à Bemba 600 hommes 
qui devait traverser le fleuve le dimanche soir pour "l’aider à prendre le 
pouvoir". Il s’avère en effet que Demafouth a plusieurs fois appelé Bemba sur 
son satellitaire et que les enregistrements de ces conversations ont fini par 
fuiter entraînant son arrestation…
En 
février 2002, le procès des putschistes du 28 mai 2001 débute devant la Cour 
criminelle. L’ancien ministre de la Défense, et 80 autres co-accusés 
comparaissent devant cette juridiction. Jean-Jacques Demafouth notamment défendu 
par Me Nicolas Tiangaye est jugé pour atteinte à la sûreté intérieure de l'État. 
Alors que le procureur en chef, Joseph Bindoumi réclame de la cour l'imposition 
d'une sentence de 20 ans d'emprisonnement contre Demafouth, celui-ci est 
finalement acquitté par la Cour Criminelle le 7 octobre 2002 "au bénéfice du 
doute".  Evoquant l'une des principales pièces de l'accusation, une écoute 
téléphonique entre Demafouth et le chef rebelle congolais Jean-Pierre Bemba, la 
Cour Criminelle estime que "l'intérêt de cet élément vise la matérialité du 
complot d'un autre projet de coup d'Etat qui se détache du crime dont 
l'accusation a déterminé d'une manière précise les 
circonstances".
4. 
Opposition au régime Bozizé.
En 
janvier 2004, un mandat d’arrêt international est émis par le tribunal militaire 
de Bangui à l’encontre de Jean-Jacques Demafouth pour "assassinat et complicité 
d’assassinat" du lieutenant Antoine Bodot, du maréchal de logis chef Apollinaire 
Hondet, du commandant de la brigade de gendarmerie de Kembé ainsi que trois 
autres personnes dans la nuit du 18 au 19 novembre 1999. Pour ce motif, la 30 
décembre 2004, la Cour Constitutionnelle invalide sa candidature à l’élection 
présidentielle prévue début 2005.

Le 
22 janvier 2005, la médiation du Président gabonais Omar Bongo aboutit à la 
signature de l’accord de Libreville qui acte finalement la validation de sa 
candidature. Cependant, Bozizé précise bien à Libreville qu’il ne pourra pas 
intervenir dans la procédure judiciaire qui reste ouverte contre Demafouth qui 
délègue l’action de terrain à son directeur de campagne Joseph Agbo. Demafouth 
recueille finalement 1,27% des suffrages sans avoir mené campagne sur le 
terrain…
Le 
28 mars 2008, l’état-major du groupe armé Armée populaire pour la restauration 
de la démocratie - APRD - désigne Demafouth comme président de ce mouvement qui 
sévit alors dans le nord-ouest de la Centrafrique. Le 7 mai 2008, Demafouth 
rencontre Omar Bongo pour baliser le bon déroulement du dialogue politique 
inclusif que le président Bozizé entreprendra prochainement avec l’opposition et 
les troupes rebelles en vue d'un rétablissement de la paix en RCA. Un "accord de 
cessez-le-feu et de paix" est signé le 8 mai à Libreville entre l’APRD et le 
gouvernement. Le texte prévoie "l'adoption d'une loi d'amnistie générale" et 
"l'abandon de toutes les poursuites judiciaires en 
cours".
Le 
21 juin 2008, le gouvernement signe à Libreville avec l’APRD un "accord de paix 
global" qui prévoit notamment une amnistie pour tous les combattants ainsi que 
les responsables civils et le cantonnement des soldats rebelles qui doivent 
intégrer un programme de Démobilisation, de Désarmement et de Réinsertion  
-DDR- et participer au "Dialogue Politique Inclusif" - 
DPI-.
En 
août 2008, Demafouth crée le parti politique Nouvelle alliance pour le progrès 
-NAP- afin d’être candidat aux élections de 2010. Son ami de longue date 
Bienvenu Dotocko est un cadre de ce parti politique qui est officiellement 
reconnu par le Ministère de l’Intérieur.
En 
octobre 2008, Bozizé promulgue la loi d’amnistie générale des personnalités, 
militaires et responsables civils des groupes rebelles, après que celle-ci ait 
été adoptée par le parlement centrafricain. Cette loi d’amnistie notifie l’arrêt 
des poursuites engagées pour atteinte à la sûreté de l’Etat et à la défense 
nationale ainsi que des infractions connexes, contre les responsables et les 
membres des groupes politico-militaires se trouvant sur le territoire national 
ou en exil. Le texte concerne notamment Jean-Jacques Demafouth ainsi que les 
co-auteurs et complices pour détournement des deniers publics, assassinat et 
complicité d’assassinat.
Le 
4 décembre 2008, Demafouth affirme à Libreville que son "premier acte sera de 
demander pardon au peuple centrafricain" lorsqu’il reviendra au pays mettant fin 
à six ans d'exil en France pour prendre part au DPI. Le DPI a lieu entre le 8 et 
le 20 décembre 2008 à l’Assemblée nationale à Bangui, en présence de Bozizé et 
de Bongo rassemblant des acteurs de l’opposition politique, armée et de la 
société civile. Les travaux de ce forum sont présidés par l’ancien président du 
Burundi, Pierre Buyoya. A l’issue des débats, la plupart des recommandations 
formulées par la commission ont été adoptées par consensus, prévoyant notamment 
que l'organisation des prochaines élections générales, prévues pour 2010. Alors 
que les représentants des associations de victimes des évènements de 2001-2002, 
à l'instar de la ministre Bernadette Sayo et du président de la Ligue 
centrafricaine des droits de l'homme, Goungaye Wanfiyo sont écartés des débats, 
il est demandé la création d'une Commission vérité et réconciliation pour 
permettre "un pardon définitif" après des années de conflits et exactions… Le 
DPI se clôture par une accolade publique entre Patassé et Bozizé qui s’engage à 
former un gouvernement de large ouverture.
Le 
30 janvier 2009, la Conférence des Chefs d’Etats de la CEMAC réunie à Libreville 
annonce accorder une "assistance financière de 8 milliards de Fcfa pour aider la 
réalisation des opérations de DDR".

Cyriaque 
Gonda et J.Jacques Demafouth@sni
Le 
13 août 2009, Bozizé lance officiellement le programme de DDR des ex-combattants 
dans le cadre d’une cérémonie de fête nationale célébrée pour l’occasion à Paoua 
aux côtés de Demafouth "Vice-président du comité de pilotage du programme de 
programme des anciennes rébellions".
Le 
21 décembre 2009, le Conseil de Sécurité de l’ONU demande au Gouvernement de la 
République centrafricaine de faire en sorte que le processus de désarmement soit 
achevé avant les prochaines élections.
Le 
18 février, lors d’une visite à Paoua, Bozizé s’en prend publiquement à 
Demafouth ainsi qu’à son ministre d’Etat Cyriaque Gonda, chargé de la 
communication et réconciliation, qui ont tous deux, la charge du pilotage du 
programme DDR. Bozizé pose la question de savoir ce qu’ils ont bien fait avec 
tout l’argent qu’il leur a précédemment remis pour payer les ex combattants. 
Bozizé les accuse d’avoir détourné une large partie de ces fonds pour se 
procurer des armes afin de le renverser du pouvoir. Il limoge finalement 
Cyriaque Gonda en avril 2010.
Le 
17 mai 2010, Demafouth annonce que l'APRD est dissoute.
Le 
Président du parti politique NAP candidat à l’élection présidentielle du 23 
janvier 2011 ne recueille finalement que 2,79 % et 31 184 
voix.

Le 
6 janvier 2012, la Section Recherche et Investigation -SRI- arrête Jean-Jacques 
Demafouth mais aussi Herbert Gotran Djono-Ahaba et deux autres membres de 
l’UFDR. Tous sont accusés "d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat" et 
incarcérés à la prison de Bossembélé. Demafouth est défendu par Me Nicolas 
Tiangaye et Mathias Morouba. Il sera finalement libéré en avril 2012 après 
plusieurs semaines de détention. Fin 
décembre 2012, Demafouth accompagne Eric Neris Massi à Paris où ils rencontrent 
notamment le directeur Afrique du Quai d’Orsay, Jean-Christophe 
Belliard.
Le 
13 mars 2013, alors qu’il s’était rendu à Paoua dans le cadre du DDR, Demafouth 
passe la frontière tchado-centrafricaine à moto, habillé en soutane et indique à 
RFI qu’il a agi ainsi car il avait menacé d’arrestation par le Ministre de la 
Sécurité Josué Binoua. Faisant alors valoir son passeport français et demande à 
être rapatrié en France. Il est cependant refoulé vers la RCA le 16 mars 2013, 
avant d’être escorté jusqu'à Paoua puis d’être acheminé à 
Bangui.
Le 
13 avril 2013, Michel Djotodia qui s'était autoproclamé Président après la prise 
de Bangui par la coalition Seleka le 24 mars est élu président de la République 
lors de la première session du Conseil national de transition -CNT- sous les 
applaudissements par acclamation, sans vote. Jean-Jacques Demafouth est alors 
membre du CNT en tant que représentant des partis politiques. Le 24 août 2013, 
Djotodia nomme Demafouth comme Ministre Conseiller à la Présidence en matière de 
DDR, chargé des relations avec la MISCA.
5. 
Maillon fort durant la transition de Samba-Panza jusqu’aux élections de 
2015-16.

La 
transition de Samba-Panza permet à Demafouth de revenir en force et d’être le 
maillon fort de cette période d’intérim jusqu’aux élections de 2015-16. Parenté 
à la Présidente de transition de son côté maternel, il est nommé conseiller à la 
Présidence en charge de la sécurité et des relations avec les forces 
internationales -Sangaris, Misca-. Installé dans un bureau juxtaposant celui de 
sa parente Samba Panza, Demafouth est l’un des rare qui peut entrer dans son 
bureau sans solliciter audience.
Le 
Colonel Follot -qui fut chef de cabinet particulier de Jean-Paul Ngoupandé, 
Premier ministre du Gouvernement d'Union Nationale sous Patassé- est l’assistant 
de Demafouth. Ses proches sont promus comme par exemple Guy-Bertrand Damango, 
qui accède au grade de lieutenant-colonel avant d’être ensuite nommé Directeur 
Général de la Gendarmerie. Notons aussi les nominations dans le gouvernement de 
Mahamat Kamoun en août 2014 de son ami Joseph Agbo aux Ministère des Mines et de 
Armel Sayo au Ministère de la Jeunesse et des Sports dont le mouvement, 
Révolution et Justice, a recyclé nombre d’anciens cadres de 
l’APRD-.
En 
2014, Demafouth, Aristide Sokambi -Ministre de la défense- et le colonel Jules 
Kogbia -qui, en 2001, participa à une tentative de putsch contre Ange-Félix 
Patassé et qui a été nommé commandant de la Sécurité présidentielle- recrutent 
d’anciens membres des FACA qu’ils rétribuent en liquide pour combattre les 
poches de résistance anti-balaka à Bangui. Ces militaires sont utilisés lors 
d’interventions armées, et dans les heurts qui éclatent périodiquement dans 
plusieurs quartiers de la capitale.
En 
septembre 2014, le visa américain est refusé à Demafouth alors qu’il faisait 
partie de la délégation qui accompagne Samba-Panza à New York où celle-ci devait 
prendre part à une réunion sur la RCA en marge de l’Assemblée générale des 
Nations-Unies.
Le 
4 avril 2015, Samba-Panza signe trois décrets nommant le présidium du Forum de 
Bangui, les membres du Comité technique, et fixant les dates du dialogue 
national du 27 avril au 4 mai 2015. Le Conseil national de transition -CNT-, le 
Parlement transitoire centrafricain, s'élève alors contre ces décisions, 
accusant la présidente de n'avoir consulté ni le CNT ni la Cour 
constitutionnelle et les critiques se cristallisent surtout sur le choix de 
Demafouth, comme coordinateur du comité technique. Beaucoup reprochent à la 
présidente de la transition de noyauter la préparation du débat et menacent 
alors de boycotter le Forum. Le 13 avril 2015, de nombreux partis politiques 
rencontrent les parlementaires du CNT pour exiger que la présidente revienne sur 
les décrets de nomination. Le lendemain, les ex-présidents Bozizé et Djotodia 
s'engagent par écrit en faveur du Forum de Bangui dans un document signé à 
Nairobi, au Kenya. Catherine Samba-Panza réunit finalement tous les acteurs le 
15 avril 2015. La ministre de la Santé Marguerite Samba, personnalité 
consensuelle, remplace finalement Demafouth à la place du comité technique. La 
composition des deux comités est entièrement revue et tous les membres ont été 
choisis par consensus.
A la fin de l’année 2015, les violences s’amplifient à Bangui. Demafouth entretient ce climat de violence dans la capitale par les milices du Km5 et notamment via Abdoulaye Hissène espérant pouvoir prolonger un peu plus la transition, les autorités en place ne pouvant pas être candidates à ce scrutin…

Jean-Jacques 
Demafouth et Charles Malinas@sni
Lors 
des élections présidentielles de 2015-2016, de nombreuses voix dénoncent 
l’influence de Demafouth qui supervise le travail de l’Autorité Nationale de 
Elections et empêche certains candidats de mener campagne en Province. Demafouth 
fut ainsi à la base d’un vaste système de fraude organisée par les autorités de 
transition et validé par l’ambassadeur de France à Bangui Charles Malinas en 
faveur de Faustin-Archange Touadéra. Parmi les anomalies dénoncées par ses 
adversaires : la distribution de bulletins de vote préremplis en faveur de 
Touadéra, l’existence de bureaux de vote fictifs, la modification de 
procès-verbaux par des responsables administratifs et le vote d’électeurs 
dépourvus de tout document d’identité…Ces manœuvres expliquent le surprenant 
score de Touadéra - loin de faire partie des favoris de ce scrutin - au premier 
tour et le trucage des dernières élections à la Présidence de la République 
centrafricaine…

Juste 
avant la fin de son mandat, Samba-Panza essaye de trouver un point de chute à 
Demafouth comme ambassadeur de la République centrafricaine auprès de la France 
mais les autorités françaises rejettent la demande d’agrément et une autre 
personnalité sera finalement choisie à ce poste.
Emmanuel 
LIMBASSA 
Le 
2 mai 2020