DISCOURS   10 mai Place du Général CATROUX à 18h

 

 

 

Madame la Maire du 17ème arrondissement,

Mesdames et messieurs les élus,

Monsieur le président des amis du général Dumas,

Mesdames et Messieurs,

 

La Mairie de Paris a toujours commémoré l’Abolition de l’esclavage en organisant une cérémonie pour le personnel de la Mairie tous les 27 avril, en soutenant des initiatives associatives le 10 mai et en faisant déposer une gerbe rue Delgrès le 23 mai.

 

Désormais, conformément aux dispositions du décret du 31 mars 2006 qui a fixé le 10 mai comme jour « des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions » et, en référence  à la date de l’adoption en dernière lecture de loi du 21 mai 2001, la Mairie de Paris commémore le 10 mai et rend hommage aux victimes de l’esclavage.

Par la loi Taubira, la République française reconnaît que « la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l'océan Indien d'une part, et l'esclavage d'autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l'océan Indien et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l'humanité ».

Au-delà, la loi Taubira prévoit que les programmes scolaires et les programmes de recherche en histoire et en sciences humaines accorderont à la traite négrière et à l'esclavage la place conséquente qu'ils méritent.

L’histoire de la traite négrière et de l’esclavage fait partie intégrante de l’Histoire de France. La traite coloniale fut massivement racialisée : seuls les noirs d’Afrique en furent les victimes. Elle a fait l’objet d’une législation minutieuse, tant au plan fiscal qu’administratif, sanitaire et commercial. Elle a prélevé en Afrique entre 12 et 13 millions d’êtres humains, toutes destinations confondues dont environ un tiers de femmes. L’esclave est nié comme être humain. C’est un objet, une marchandise qui peut être achetée et vendue.

Il est important que la commémoration du 10 mai ait lieu ici, aujourd’hui, devant les fers brisés de Driss Sans-Arcidet en l’honneur du Général Dumas, père de l’écrivain, né esclave à Saint-Domingue.

Le général Dumas n’est pas seulement le héros exemplaire de la Révolution qui créa les chasseurs alpins, le vainqueur du Petit-Saint-Bernard, du Mont-Cenis et de Brixen. C’est aussi une figure majeure du combat pour les Droits de l’Homme. Le général Dumas mérita le surnom enviable de «Monsieur de l’Humanité» à cause de son opposition à la peine de mort, ce qui était une position plus que courageuse pour un général jacobin en 1793.

A cause de son attachement à ne pas maltraiter les prisonniers de guerre qui préfigurait l’esprit des conventions internationales ultérieures.

A cause de sa volonté de protéger les populations civiles qui le conduisit à démissionner avec éclat en 1794 de son commandement de l’armée de l’Ouest pour protester contre les massacres de Vendée.

 A cause, bien sûr de sa lutte constante contre l’esclavage et le racisme.

C’est aussi un grand Républicain. Victime de racisme, à l’époque on dit « du préjugé de couleur », il est dénoncé  pour avoir fait démonter la guillotine qui devait servir à exécuter quatre condamnés qui voulaient s’opposer à ce que la cloche de leur église ne soit fondue.

Devenu « Monsieur de l’Humanité », il fut aussi surnommé « Le Diable Noir » pour ses combats sur le pont de Brixen. Le Directoire lui confie le commandement de l’une des huit divisions  qui devaient partir dans l’expédition d’Egypte avec Bonaparte.

Après la répression du Caire,  il demande et obtient l’autorisation de regagner la France.

Prisonnier  à Tarente en Italie, il en revient estropié et meurt à Villers-Cotterêts à 44 ans dans l’Aisne où il est enterré. Le Général DUMAS est un symbole. Né esclave, il s’est battu pendant toute sa vie pour la liberté et la dignité.

Paris est une cité de mémoire, qui regarde toute son histoire, y compris ses pages les plus sombres. Paris n’oublie pas l’esclavage, blessure absolue pour l’humanité. Paris se souvient du Général DUMAS,  victime de son vivant parce que né esclave à Saint-Domingue ; victime jusque dans sa mémoire lorsque, en 1940, les nazis  firent abattre la statue  à son effigie.  L’oeuvre à la mémoire du Général DUMAS représente des chaînes de 4 mètres de haut. En rendant au Général DUMAS sa place dans sa ville, dans votre ville, nous réparerons un peu, sans jamais effacer, la double injustice qui lui fut faite.

 

Le destin de cet homme vient nous rappeler l’histoire et  la mémoire communes des originaires d’Outre-Mer et des Parisiens : une histoire pour la liberté.

 

 

[Allocution par Catherine Vieu Charier 10 mai 2010 abolition esclavage]

 

 

Mme Catherine VIEU-CHARIER  Adjoint(e) au Maire de Paris,

Adjointe chargée de la mémoire et du monde combattant. Groupe communiste et élus du parti de gauche.<