RCA : Au jeu du chat et de la souris, c'est le Muridé qui trépasse ! Le pouvoir perd la boule, et le MCU fait sa crise de nerfs ! [Chronique de Prosper INDO]

 

 

        I.  Au jeu du chat et de la souris, c'est le Muridé qui trépasse !

 

     Dans une correspondance datée du 3 novembre 2022, adressée à Mme Catherine Colonna, le ministre français de l'Europe et des affaires étrangères, sa collègue centrafricaine, Mme Baïpo-Témon Sylvie dénonce le comportement de l'ambassadeur, Haut Représentant de la France auprès du chef de l’État centrafricain.

Dans cette missive, le ministre centrafricain rappelle l'accord de coopération en matière de relations internationales entre les deux pays signé en 1960, par le président David Dacko pour la partie centrafricaine. Cet accord, fondé sur le principe du décanat, fait du représentant français le doyen du corps diplomatique en RCA, sans accorder la réciprocité.

Elle signale par ailleurs le comportement discourtois de l'ambassadeur de France à l'endroit du chef de l’État centrafricain, ses propos peu amènes à l'égard des autorités du pays hôte et l'attitude désobligeante du Haut Représentant français, « également constatée par l'ensemble du corps diplomatique résidant ou non en terre centrafricaine qui manifeste une gêne dans l'exercice de leurs propres missions »  et, pour terminer, prend acte de la dénonciation, à l'initiative de Paris, de l'accord de coopération militaire entre les deux pays, concrétisée par le retrait des derniers éléments du contingent français stationnant à Bangui.

 

      Après cette charge brutale et inhabituelle, rendue publique avant que la lettre ne parvienne à son destinataire, qui doit se conclure par une décision tout aussi ferme que catégorique – rupture des relations diplomatiques et/ou déclaration non grata du Haut Représentant de la France en RCA, on est surpris de voir Mme Baïpo-Témon, informer sa collègue  « du renoncement par la partie centrafricaine du décanat » et faire une offre de service en bonne et due forme, témoignant de « sa disponibilité à tout échange [que vous jugerez] nécessaire » (1) ! Tout ça pour ça !

 

On demeure pantois devant tant de légèreté et d'inconsistance, au moment où le Conseil de sécurité de l'ONU se réunit le 15 novembre prochain pour se prononcer en faveur de la prolongation du mandat de la Mission des Nations unies pour la stabilisation de la Centrafrique (MINUSCA).

Cette absence de logique souveraine est le signe des esprits serviles, prompts à biaiser devant l'adversité.

Le proverbe africain dit : « Quand deux éléphants se battent, c'est l'herbe qui souffre ». On serait tenté d'ajouter : « Au mauvais jeu du chat et de la souris, à la fin, c’est toujours la souris qui trépasse !

 

Paris, le 8 novembre 2022

 

Prosper INDO

Économiste,

Consultant international.

 

(1) – Les attendus de cette prise de position valent la peine d'être cités in extenso : « Le Gouvernement centrafricain par ma voix réaffirme son attachement à préserver l'histoire profonde des relations qui lient la République centrafricaine et la République française, ainsi que la disponibilité à poursuivre à écrire ensemble une histoire commune, au-delà des turbulences du moments, axée sur l'équilibre de notre partenariat, le respect de nos Accords passés ou futurs qui se voudront mutuellement bénéfiques, ainsi que des valeurs d'amitiés, de courtoisie et de solidarité régissant les relations internationales entre les États » !

 

Au jeu du chat et de la souris, c'est le Muridé qui trépasse !

 

 

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II. RCA : Le pouvoir perd la boule, et le MCU fait sa crise de nerfs !

 

     Après avoir joué les bravaches en critiquant le projet de nouvelle constitution de son ami Touadéra, le président de l'assemblée nationale et ci-devant Secrétaire exécutif du MCU (Mouvement des Cœurs unis, le parti présidentiel), Simplice Mathieu Sarandji, joue désormais le dernier repenti.
Dans un communiqué signé de sa main en date du 7 novembre 2022, où il s'affuble du titre de professeur, il dénonce l'appel à la résistance et à la transition porté par une partie des Centrafricains établis en France, n'hésite pas à parler de sédition, de déclaration de guerre contre le peuple centrafricain – sans doute en lisant à l'envers l'article 28 de la constitution que le pouvoir veut abolir -.

 

1 – Tel Judas au Mont des Oliviers.

     Dans l'exégèse de son ire, M. Sarandji indexe les autorités françaises et les taxe d' « une remise en cause de la philosophie des Lumières », une emphase jargonnante qui oublie que le pays de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et du Citoyen, est un État de droit où manifester et exprimer librement son opinion est un devoir et une obligation reconnus à tout individu dès lors que ce dernier ne trouble pas l'ordre public.

Passant outre le principe de la séparation des pouvoirs, inscrit dans la constitution du 30 mars 2016, M. Sarandji abjure le parquet de Bangui à poursuivre MM. Akandji-Kombet et Nguérékata, considérés comme les initiateurs de cet appel, et demande aux autorités centrafricaines de réclamer l'extradition de ces derniers.

Manifestement, il échappe à M. Sarandji qu'on puisse manifester librement sans être rémunéré. De même qu'il ne lui vient pas à l'esprit la question simple de sa présence à la tête de l'Assemblée nationale, alors qu'il est mis à la retraite d'office par le même décret que Madame Danièle Darlan !

Comme Judas au Mont des Oliviers, pour reprendre une rhétorique évangélique qui leur est coutumière, M. Sarandji joue la résipiscence, au lieu de s'en prendre à son ami Faustin Archange Touadéra pour sa propension égotique à vouloir se maintenir au pouvoir, quitte à tordre le cou aux principes fondamentaux de la République.

 

2 – Le Bon, la Brute et le Truand.

     Au lieu de s'en prendre à la terre entière et de faire une fixation sur la France, M. Sarandji devrait reprendre l'historique de l'ascension au pouvoir de M. Touadéra et se remémorer ce qu'il s'est pas passé en République centrafricaine depuis l'année 2008, alors que lui-même et ses deux comparses, Touadéra et Ngouandjika ou Ngouandjika et Touadéra, jouaient le remake du film western « Le bon, la brute et le truand ».

Nous ne prenons qu'un exemple pour illustrer notre propos :

 

-        fin décembre 2009, M. Charles Massi, ancien ministre d’État, de l'équipement, des transports et de l'aviation civile (19/6.2005 – 2/9/2006) dans le gouvernement du président François Bozizé, et président du FODEM, est arrêté par les autorités tchadiennes et remis aux autorités centrafricaines, en échange du transfert du rebelle tchadien Baba Ladé ;

-        le 8 janvier 2010 est déclaré décédé dans des circonstances non élucidées à ce jour. Le 14 janvier 2010, Mme Massi Denise, venue s'enquérir du sort de son époux, est expulsée manu militari de Bangui et renvoyée en France où elle décédera 19 mars 2010 d'un hématome cérébral à l'hôpital militaire du Val de Grâce (Paris).

-        S'ensuit un imbroglio diplomatique au cours duquel le Tchad dément avoir arrêté Charles Massi ; Jean Francis Bozizé, le cancre devenu ministre de la défense nationale par la grâce tutélaire de son père, énonce « un démenti formel aux allégations mensongères » et dénonce une « véritable campagne d'intoxication » ; M. Jean-Jacques Démafouth, président du groupuscule armé APRD parle d'un « assassinat et d'acte prémédité au plus haut niveau de l’État, demande à ce que le corps soit remis à sa famille et réclame une commission d'enquête internationale » ; le procureur de la République de Bangui, un certain Firmin Feindiro, ordonne un non-lieu et laisse entendre qu'il faille laisser courir un délai de viduité de 10 ans avant de décréter la mort du « disparu » ! Quant au président Bozizé, toujours aussi cynique, il énonce que « Charles Massi a choisi la voix des armes qui l'a perdu ».

-        Le 28 avril 2020, dix ans ayant passé, la famille de Charles Massi demande, dans une lettre adressée à M. Faustin Archange Touadéra élu entre temps président de la République centrafricaine, l'ouverture d'une Commission d'enquête indépendante et internationale à l'occasion de la date marquant la disparition de l'ancien ministre d’État.

Tous ces faits et de nombreux autres, comme l'assassinat du médecin Joseph Yakité devant sa maison, en présence de sa femme et de ses enfants ; l'attentat nocturne perpétrée contre la résidence de Madame Marie-Reine Hassen, alors ministre délégué à l'intégration régionale et candidate aux élections présidentielles, se passent pendant que Faustin Archange Touadéra trône à la Primature, avec un certain Mathieu Simplice Sarandji, comme directeur de cabinet ; M. Fidèle Ngouandjika étant conseiller spécial à la présidence !

L'intéressé ni ne démissionne ni ne se désolidarise. Il se fait dès lors le complice objectif de ces crimes, par inertie, lâcheté ou volonté délibérée de ne point intervenir, puisque :

 

-        alors qu'il est arrêté par la MINUSCA et poursuivi pour crimes de guerre au titre de son action au sein de la nébuleuse Anti-Balaka, Jean Francis Bozizé est libéré sous contrôle judiciaire sur intervention du chef de l'Etat, et disparaît dans la nature ;

-        le 16 décembre 2019, François Bozizé, le père, qui fait pourtant l'objet d'un mandat d'arrêt international pour les mêmes chefs d'inculpation, frappé des sanctions de l’ONU et d’une interdiction de voyager, atterri à Bangui, vaque librement à ses « occupations politiques » en jouissant du statut d'ancien chef de l'Etat, et crée le COD-2020, la coalition de l'opposition démocratique, une alliance de circonstance !

 

3 – La mort sans cadavre de Charles Massi.

     Dix ans ont passé et la démarche de la famille de Charles Massi demeure lettre morte ! Dès lors le décès sans cadavre de l'ancien ministre n'étant ni prescrit ni couvert par une quelconque loi d'amnistie, M. Simplice Sarandji serait mieux inspiré, en sa qualité de président de l'assemblée nationale centrafricaine, de constituer une Commission d'enquête parlementaire ayant pour objectif d'investiguer et de connaître les circonstances de l'arrestation de Charles Massi, les conditions et le lieu de sa détention arbitraire, les causes de sa disparition et de sa mort éventuelle, ainsi que les motifs qui ont présidé à l'expulsion de son épouse, citoyenne française, et les modalités d'exécution de cette mesure, susceptible d'avoir provoqué sa mort par négligence ou sans intention de la donner, etc.

Foin donc des gesticulations oratoires et épistolières d'un homme acculé à se dédouaner, c'est à de telles tâches que devrait se consacrer l' « Honorable » président de l'Assemblée nationale, sauf à venir répondre, lui et ses acolytes, devant le tribunal de Paris doté de la juridiction universelle, pour l'enlèvement, la séquestration, la détention arbitraire et la mort, tentative ou complicité, d'un homme politique, médecin-colonel de l'armée, diplômée en pharmacie de l’École de Santé militaire de Bordeaux.

 

Paris, le 9 novembre 2022

 

Prosper INDO

Économiste,

Consultant international.

Consultant international.