Centrafrique : la Résistance n'est pas une transition.

 

 

La RCA est sans doute le seul pays au monde où un étranger, sans se prévaloir de la nationalité centrafricaine, exerce les fonctions de Conseiller à la présidence en matière de sécurité nationale et édite des communiqués de presse au nom du chef de l’État. M. Valeri Zarkhov a accompli cet exploit le 21 février 2021 !

 

Le premier « Appel à la Résistance » date du 2 novembre 2016, après deux lettres ouvertes adressées au président Faustin Archange Touadéra. Dans la première, je lui conseillais de « privilégier la stratégie de la coopération avec l’opposition démocratique et non l’affrontement » (1) ! Elle est demeurée lettre morte ; l’archange portant la malédiction de son ancien patron, François Bozizé. D’où l’appel rappelé ci-dessus.

Dans la seconde, je lui reproche de commettre les mêmes erreurs que son devancier, dont il utilise les mêmes entourloupes et bafoue la constitution de même (2).

Aujourd'hui, comme le mauvais maçon, il est au pied du mur. Tant pis, est-on tenté de dire s'il était seul. Malheureusement, il y va de l'avenir d'un pays, de la survie d'un État et de l'harmonie d'une Nation.

 

1 – La technique de l'édredon.

Faustin Archange Touadéra a le pouvoir d'un édredon, cet effet de literie fait de duvet, de plumes ou de matières synthétiques et destiné à tenir le corps au chaud. On a beau le plier en quatre, l'enrouler sur lui-même ; relâché, il reprend sa forme initiale, dodue et inerte. Cela a suffi pour faire carrière et atteindre le faîte du pouvoir. Mais, il faut plus que de la plasticité pour diriger un pays en crise.

Cette situation, il l'a voulue et l'a créée tout seul, n'écoutant que son besoin égotique et irrépressible du pouvoir, à l'exemple de son nouveau mentor du moment, le Tutsi Paul Kagamé (3).

La roublardise ne peut plus suffire, la force brutale non plus. Il les a expérimentés sous Bozizé.

Dès lors, la solution à la crise repose sur lui et sur lui seul.

Or, en recevant ce vendredi 4 octobre 2022, ce qui reste de la Cour constitutionnelle en audience, il tente de faire diversion en laissant à croire à un retour à la normalité (4).

 

2 – La voie de la raison est celle de la Résistance et non de la transition.

La Résistance est d'abord une affaire individuelle, personnelle. Il s'agit, pour chacun, de combattre ses propres lâchetés, ses lacunes et ses faiblesses, qui font préférer la trahison et l’intérêt personnel aux dépens de la fidélité à « la cause du peuple ».

Voir aujourd'hui ceux qui hier ont conduit le pays là où il se trouve réclamer le partage du pouvoir, sans regret ni pardon, relève de l'usurpation. Certes, la RCA n'est pas un camp de rééducation, mais on eût préféré un début d'autocritique.

La résistance est ensuite une affaire collective. Il s'agit de faire comprendre à M. Touadéra qu'il a trahi la confiance du peuple et ce dernier exige réparation : au milieu du gué, il faut faire la chaîne pour traverser une rivière en crue.

Deux voies se présentent à M. Touadéra :

 

-        soit il persiste et passe outre, en exigeant de sa majorité à l'assemblée nationale le pouvoir de gouverner par ordonnances (Art. 42) et il peut organiser son référendum constitutionnel – lui qui a été incapable d'organiser des élections territoriales et sénatoriales en 5 ans de présidence -. S'il perd, il devra se soumettre, se démettre et affronter l'indignité nationale à perpétuité. Cependant, cette voie est sans issue. En effet, la Cour constitutionnelle étant non opérationnelle, M. Touadéra ne peut plus produire une seule loi, ni proclamer quelques élections que ce soit ;

-        soit il choisit la voie de la raison, celle de la coopération et il lui faudra ;

 

3 – Le Conseil national de la Résistance est la seule voie du salut.

Il ne s'agit pas, dans notre esprit, de mettre en place une nouvelle transition. M. Touadéra ayant élu au suffrage universel direct, et quelle que soit l'étendue de sa trahison, il ne peut être destitué, la majorité parlementaire lui étant acquise depuis la réunion du Comité exécutif du MCU, réunie le 28 octobre dernier (6).

Le rôle et la tâche du Conseil national de la Résistance consiste donc, dans ces conditions, à porter le combat ci-dessus pour un retour à l'équilibre des pouvoirs, à constituer un Gouvernement provisoire qui soit le « préfigurateur » du prochain gouvernement de la République, et à remettre à l'endroit l’État centrafricain et une administration publique au service de nos populations, et non à la solde d'une camarilla de petites crapules, hier coiffeurs à Paris, aujourd'hui ministres à Bangui.

Le Conseil national de la Résistance ne doit pas être un conclave de l’entre soi, où l’on se copte et se congratule. C’est une instance décisionnelle, connue et reconnue, qui opère de manière transparente et non clandestine ; gage de son succès mais aussi de sa sécurité.

 

Paris, le 4 novembre 2022

 

Prosper INDO

Économiste,

Consultant international.

 

(1)   – Prosper Indo : « Appel à la Résistance » ! Paris, 2/11/2016 ; « Lettre ouverte à M. Faustin Archange Touadéra », Paris, 22/02/2016.

(2)   - Prosper Indo : « Deuxième lettre ouverte à Monsieur le président Faustin Archange Touadéra », Paris, le 24/06/2017.

(3)   - M. Paul Kagamé, président du Rwanda, fait partie de ces chefs d’État africains, qui ont juré respecter la constitution et faire 2 mandats, mais qui ont modifié la dite loi fondamentale pour accomplir un troisième mandat (cf. interview à Jeune Afrique)

(4)   - Sur la photo de famille de cette audience, on recense 6 personnalités censées représenter la Cour constitutionnelle, alors que celle-ci ne doit plus compter que 5 magistrats constitutionnels, après les limogeages de Mme Darlan et du juge Trinité Bango Sangafio, ainsi que le décès de Mme Nadine Pingama.

(5)   - Nul n'a oublié le triste épisode des « deux millions de dollars évaporés » du don angolais, ni la forfanterie de Mme Samba-Panza : « j'ai donné les instructions pour que M. Touadéra soit élu », avait-elle confié, affirmant avoir agi sous la dictée de l’ambassadeur de France de l’époque, M. Charles Malinas ! N’ayant aucun lien particulier avec elle, je fonde ma proposition sur sa qualité d’ancienne présidente de l’ »Association des femmes juristes de Centrafrique ».

(6)   - Prosper Indo : « Ci-gît le pays de Barthélemy Boganda », Paris, 30/10/2022.

 

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Tribune – Point de vue. Sangonet